Chapitre 299 : Giovanni Chen ( 2nde partie )
Oh, monde morne, je te vois
Faire fi du potentiel des humains
Mais nous ne sommes point aveugles
La Team Rocket nous guide
Debout guerriers du R rouge
Le bras armé du progrès humain
La force, l'ordre et la volonté
Seront les clés du succès
Notre passion pour les Pokémon
Ne saurait nous aveugler longtemps
L'avenir est quelque chose
Qui ne se conquiert que par la force
La gloire suprême de l'humanité
Passera par le grand R rouge
Seconde partie de l'Hymne de la Team Rocket, écrit par Samuel Chen, Urgania G.S.Urdain et Karus Crust.
***
Il va sans dire qu'Agatha fut un peu surprise de l'invité que Giovanni ramena chez elle.
- Par Arceus, quelle est cette horreur ? Grinça-t-elle quand Giovanni introduit Mewtwo.
- Un peu de respect je vous prie, maîtresse, la sermonna Giovanni. Ce n'est pas tous les jours que vous accueillez le plus puissant Pokemon du monde chez vous.
Giovanni entreprit de lui raconter toute l'histoire, de la création de Mewtwo à ce qu'il avait apprit à Tishgard. Agatha n'avait pas quitté le Pokemon des yeux durant tout ce temps, tenant sa canne comme si elle le suspectait de vouloir se jeter sur elle.
- Eh bien, je suis soulagée que tu ais renoncé à cette folie de vouloir rencontrer Urgania, fit Agatha quand Giovanni eut terminé. Mais ce... cette chose ne me parait guère mieux.
- Je reconnais bien là l'arrogance des humains, si prompts à juger sur l'apparence, fit froidement Mewtwo. Devrais-je le faire moi aussi, vieille humaine ? Ça ne serait pas bien glorieux.
- Tu prends des grands airs toi aussi, remarqua Agatha. Les Pokemon ne devraient pas pouvoir parler. Leur rôle est de servir les humains, ni plus ni moins. J'ai bien envie de te capturer, pour t'apprendre le respect.
Les yeux de Mewtwo se plissèrent, et Giovanni se demanda s'il avait bien fait de l'amener ici. Agatha pouvait bien être une ancienne du Conseil des 4, elle avait toujours été de ceux qui prônaient l'obéissance absolue des Pokemon aux humains plus que le respect mutuel des deux races.
- Je crois qu'il ne vaut mieux pas, maîtresse, intervint Giovanni avant que Mewtwo n'ait pu répliquer. Même une Masterball ne fonctionnerait sûrement pas sur lui. Et puis pour le capturer, encore faudrait-il l'affaiblir, ce qui n'est pas si aisé...
- Pour toi peut-être. Je suis une dresseuse de Pokemon Spectre d'élite ! Cette bestiole est de type Psy, m'as-tu dis ?
- Les forces et faiblesses n'ont aucun sens pour un Pokemon comme moi, ricana Mewtwo. De plus, Giovanni ne connait de moi que mon ancienne force. J'ai beaucoup progressé durant ces dernières années. Voyez...
Une sphère brillante enveloppa soudainement Mewtwo, et un symbole apparut au dessus. Le symbole très reconnaissable de la Méga-évolution. Quand la sphère s'évapora, Mewtwo était totalement changé. Il était plus petit, avait une espèce d'anneau autour de la tête, et sa queue avait disparu. À la place, il avait un long appendice violet derrière la tête qui était plus long que son corps, et ressemblait à son ancienne queue. Enfin, ses yeux normalement violets étaient devenus rouges.
- Une Méga-évolution... constata Agatha. Mais c'est impossible sans Méga-Gemme ! Et un Pokemon ne peut pas méga-évoluer sans dresseur !
- Les règles de base ne s'appliquent pas à moi, riposta Mewtwo sous sa nouvelle forme. Je peux me transformer à volonté, et de deux façons différentes. Ceci est ma forme Méga-Mewtwo Y, qui transcende mes pouvoirs psychiques. J'ai aussi une forme Méga-Mewtwo X, qui elle change toute mon attaque spéciale en force physique. Il n'est pas impossible que j'ai encore d'autres possibilités de Méga-évolution. Plus le temps passe, et plus je me découvre de nouveaux pouvoirs.
Il repassa sous sa forme normale, sous les yeux médusés de l'assistance. Puis Agatha fusilla Giovanni du regard.
- Tu avais prévu tout ça pour lui quand tu l'as conçu, à ce monstre ?
- Bien sûr que non, se défendit Giovanni. Mais les scientifiques qui l'ont créé ont chamboulé le génome de Mew pour le rendre instable et évolutif, en plus de le croiser avec de l'ADN humain. Et comme tu le sais, Mew renferme en lui les gènes de tous les Pokemon du monde. Nul ne peut donc prédire jusqu'à quel stade Mewtwo poursuivra son évolution.
- Et ça ne t'inquiète pas, ça ?
- J'avoue que dans l'immédiat, il y a d'autres choses qui m'inquiète. Il s'est passé des trucs durant mon absence ?
Agatha haussa les épaules.
- Venamia a conquis Doublonville. Ça ce n'est pas une surprise. Mais ce qui l'est, c'est qu'elle n'a rien eu à faire. La ville était quasiment déserte. Igeus, son armée et la plupart des habitants se sont volatilisés.
- Venamia contrôlait tout le reste de Johto. Comment ont-ils pu partir juste sous son nez ?
- Par la sorcellerie. Je ne vois que ça.
Giovanni abandonna le sujet. C'était curieux, certes, mais ça ne le concernait pas. Igeus était de toute façon hors jeu.
- Il va nous falloir espionner les mouvements de Venamia, décréta-t-il. Savoir où elle va, ce qu'elle prépare. On choisira alors le meilleur moment pour frapper.
- Frapper ? Avec quoi ?
- Avec Mewtwo. C'est pour ça que je l'ai amené.
- Une minute, humain, intervint le Pokemon. Je t'ai dit que j'allais d'abord enquêter sur la situation ici. Tu penses bien que je ne te fais pas confiance au point de te croire sur parole.
- La GSR commet tellement d'exactions néfastes que tu n'auras que l'embarras du choix pour le lieu où aller, ricana Giovanni.
- Je n'ai pas besoin de me déplacer. Mes pouvoirs psychiques me suffiront. Je peux les utiliser pour percevoir le sentiment global de la région et avoir une image précise de ce qui s'y passe. Ça prendra juste quelques jours.
Depuis cette discussion, Mewtwo n'avait pas bougé du living-room de la demeure, lévitant à deux mètres du sol, les yeux clos. Agatha cultivait ses anciennes relations pour tâcher d'en apprendre plus sur les projets du gouvernement, et Giovanni lui-même sortait de temps à autre pour recueillir des informations auprès des gens, de façon discrète, bien sûr. C'était fou le nombre de rumeurs qu'on pouvait rassembler en si peu de temps. Beaucoup n'étaient que du vent, bien sûr, mais certaines se répétaient assez pour sembler plausible. Apparemment, Estelle avait rassemblé autour d'elle la X-Squad et les forces du général Tender, et tous auraient pris la fuite de Kanto. Si c'était le cas, c'était une bonne chose. Estelle avait suivi ses conseils. Avec Tender et la X-Squad, elle avait une chance de faire quelque chose. Au bout du troisième jour, Agatha lui fit part d'une importante nouvelle.
- Le Chef d'Etat Treymar a démissionné suite à un attentat, dit-il d'un coup. Venamia est la nouvelle présidente du Protectorat de Johkan.
- Ce n'était qu'une question de temps, fit Giovanni. Depuis le début, elle voulait le pouvoir pour elle seule. Treymar n'a servi juste qu'à se débarrasser de moi. Maintenant, c'est elle qui s'est débarrassée de lui, à moins qu'ils se soient entendus avant sur ça aussi... Par contre, j'imagine mal comment les députés ont pu accepter ça.
- Elle ne leur a pas vraiment laissé le choix. Treymar a plaidé en sa faveur, et elle avait toute une garde armée de la GSR avec elle. Elle a suspendu la Constitution et proclamé la loi martiale. Tous les députés, même ceux de Chen, n'ont rien pu faire à part chanter La Marche de la Gloire comme tout le monde. C'était un Coup d'Etat déguisé.
- Venamia aime les Coup d'Etat. Ce qu'elle ne peut pas obtenir par la parole, elle le prend par la force.
Giovanni manqua de sourire devant la situation. Venamia lui avait rendu un fier service en se révélant ainsi, dans une dictature à peine dissimulée. Tout cela n'allait pas tenir bien longtemps. Des gens se soulèveront, c'était certain. Et, pour parfaire le tout, c'est au cours de cette journée que Mewtwo quitta sa stase et dit :
- Je sens le mal germer à Kanto. Quelque chose de mauvais approche, une présence maléfique qui n'a de cesse de corrompre tout autour d'elle. Et il semble en effet que cette présence découle de cette Venamia. Ses idées sur les Pokemon sont encore plus fanatiques que les tiennes, humain. Quoi que tu fasses contre elle, tu auras mon aide, même si pour cela je dois refaire de toi le chef de la Team Rocket. Un moindre mal vaut mieux qu'un mal profond.
Giovanni se leva, et chose étonnante, plaça sa main sur l'épaule de Mewtwo.
- Je te remercie de ton soutient. Mais sache que ce ne sera pas pour moi que tu vas te battre. Même si on triomphe de Venamia, je ne redeviendrai pas le Boss. Ce sera ma fille et héritière, Estelle. C'est elle qui représente l'avenir ; un avenir dans lequel la Team Rocket deviendra respectable et vivra en complémentarité avec le reste des gens et des Pokemon. Tu as le droit de me mépriser, Mewtwo. Mais Estelle est une brave fille, qui respecte tous les êtres vivants. C'est à elle que tu devras t'associer.
Puis Giovanni se tourna vers Agatha.
- Et vous maîtresse ? Vous êtes avec nous ?
- Non mais tu m'as regardé, jeune crétin ? Qu'est-ce que je pourrai faire à mon âge, à part me casser le dos ?! Je te récolte des infos, c'est bien assez. D'ailleurs, j'en ai une autre qui devrait t'intéresser.
- Je vous écoute.
- Si tu promets qu'ensuite, tu partiras, avec ton Pokemon de foire. Libre à toi de jouer les révolutionnaires, mais je veux vivre mes derniers jours tranquillement.
- C'est entendu. Vous m'avez déjà beaucoup aidé... Alors, cette info ?
- J'ai encore quelques contacts dans la communauté des dresseurs. Il semblerait qu'une réunion des huit champions d'arène soit prévue pour demain. Une réunion secrète, car pas grand-chose n'a filtré. Je sais juste que l'ordre de rassemblement vient du gamin Chen qui a pris la relève à l'arène de Jadielle.
Régis... Si Giovanni n'avait pas été un très bon père pour la plupart de ses enfants, pour lui, il n'avait rien été du tout. Sa mère, Daisy, avait quitté Giovanni alors qu'elle était enceinte, pour se réfugier à Bourg-Palette, auprès du professeur Chen. C'est ce dernier qui a élevé Régis. Giovanni n'avait appris que tardivement son existence. Et bien sûr, Chen en avait profité pour lui inculper une haine profonde envers la Team Rocket...
- Je ne connais pas bien ce gosse, dut avouer Giovanni.
- Oh, un pur Chen. Un vrai nigaud. Il te ressemble beaucoup. Tu sais, quand tu as quitté ton arène pour ton petit voyage en exil après que tu t'es fait battre par ce gosse ça, celui qui a détrôné Peter... Fred ?
- Red, grommela Giovanni.
- C'est ça. Bah, après ça, je t'ai remplacé un moment à l'arène. Peter ne voulait pas d'une arène sans champion, et comme je venais juste de prendre ma retraite du Conseil des 4... Bref, c'est ce Régis Chen qui a pris le relai ensuite. Un très bon dresseur, sans nul doute possible. Mais il ne se cantonne pas à un seul type, ce qui est peu courant pour un champion. Il possède une équipe d'un niveau de maître, et naturellement, il est rapidement devenu le chef de file des champions de la région. Il est très anti-Rocket, comme tu dois t'en douter. Si c'est lui qui a appelé à cette réunion des champions, ce n'est sûrement pas pour vanter les mérites de Venamia.
Les champions... Giovanni les connaissait tous, plus ou moins. Ils feraient assurément de très bonnes recrues, d'autant que la symbolique de les avoir avec soi était grande. Elle signifierait, de façon claire et précise, que la communauté des dresseurs de Kanto était unie contre Venamia.
- Je vais donc tenter de les recruter, dit Giovanni. La réunion se fera-t-elle à l'arène de Jadielle ?
- Heureusement, ton fils est moins nigaud que toi, ricana Agatha. Comme il est le suppléant du vieux Chen à l'Assemblée, il est observé de près par les sbires de Venamia. À Jadielle, ce ne serait pas une bonne idée. Si je devais parier, ce serait à Carmin. Bob s'est toujours amusé à placer des pièges dans son arène, et en tant que militaire, il sait comment sécuriser les lieux.
Bob... Encore un vieil ami, songea Giovanni. Dans sa jeunesse, avant d'être le subordonné de Lance, il avait été un commandant Rocket efficace.
- Je suivrai donc votre conseil. Encore merci, maîtresse.
- Va pas te faire tuer, petiot, lui conseilla la vieille femme. T'es trop vieux pour tout ça. Laisse donc la place aux jeunes.
- Je vais me battre pour justement céder ma place à la bonne personne.
***
Voyager avec Mewtwo était bien plus rapide qu'en avion. Il vous faisait voler à ses cotés avec ses pouvoirs psychiques, vous bénéficiez de la vue et des sensations, et vous arrivez à destination en très peu de temps. Giovanni vit très vite qu'Agatha avait sans doute tapé dans le mille. L'arène de Carmin était fermée pour la journée, et quand Giovanni entra néanmoins, il tomba sur des barrières électriques de haut niveau. Bob avait coutume d'en installer quelque unes pour piéger les dresseurs souhaitant l'affronter, et ils devaient galérer parfois de longues minutes pour dénicher les bons interrupteurs. Mais aujourd'hui, les barrières étaient doubles, parfois triples, et le voltage très élevé. Elles signifiaient clairement que Bob ne voulait pas de visiteur indésirable. Sauf que Giovanni était accompagné de Mewtwo. Il lui suffisait d'un seul geste de la main pour interrompre les flux électriques. Devant la porte du terrain, Giovanni entendait ce qui se disait derrière.
- Tu as raison, Morgane. Mais je vais te dire un truc : je me fiche des autres.
Cette voix, ça devait être celle de Régis Chen. Giovanni l'avait rarement eu en face de lui, mais il se souvenait de ce gamin sûr de lui qui, il y a quinze ans, s'était présenté dans son arène, et qui au final, s'était fait proprement étalé par la puissance de Mewtwo. Aujourd'hui, il devait être un homme.
- Oui, je m'en fiche, poursuivit la voix de Régis. Ils apprécient Venamia et son régime totalitaire ? Bah c'est leur droit. Mais moi, je le conteste. Et parce que je le conteste, je me battrai contre. Je ne vais pas renier mes idéaux à cause de ceux des autres, même si je suis en minorité. Même si je suis tout seul !
Giovanni ne put s'empêcher de rire. Il fut un temps où lui aussi avait dit des mots de ce genre. Quant au professeur Chen, c'était typiquement le genre de truc qu'il pouvait prononcer sans se soucier de ses interlocuteurs.
- C'est parler comme un vrai Chen, mon garçon, fit Giovanni en entrant.
Bob se leva d'un coup, son arme au poing.
- Qui est là ?!
- Mes excuses, chers vieux amis, mais je me suis invité. Bien qu'actuellement, je n'en ai plus trop le droit, il est vrai...
Quand Régis le reconnu, son visage se peignit d'un mélange de colère et de surprise.
- Vous...
Plusieurs champions se levèrent, comme s'ils craignaient que Giovanni ne les attaque sauvagement. Seuls Auguste et Morgane n'esquissèrent pas un geste. Eux aussi, c'étaient des anciens membres de la Team Rocket. Morgane avait été, aux cotés de Bob et de Koga, une commandante, tandis qu'Auguste avait longtemps œuvré comme scientifique pour le compte d'Urgania. Il avait même un temps travaillé sur le projet Mewtwo. Bob, qui tenait toujours Giovanni en joue, semblait hésiter à tirer ou pas. Giovanni écarta les mains pour leur signifier qu'il venait en paix.
- Je n'ai nulle mauvaise intention envers vous.
- Ce sera à nous d'en juger, répliqua Bob.
- Allons Bob, tu me connais trop bien pour savoir ce qu'il en est. Morgane, tu es toujours aussi habile à lire dans les esprits ? Le mien t'est totalement ouvert.
La championne psy regarda Bob, qui haussa les épaules. Elle ferma les yeux un moment, puis les rouvrit.
- Il ne nous veut pas de mal, dit-elle à ses collègues. Il est venu nous recruter.
- Nous recruter ?! Répéta l'ombrageuse Ondine d'Azuria. Ils pensent qu'on est des recrues Rockets ?!
- Au cas où ça vous aurez échappé, je ne fais plus partie de la Team Rocket, objecta Giovanni. J'ai du creuser un trou dans mon propre QG pour m'échapper.
- Et quelle est... cette chose avec vous ? Demanda Jeannine en observant Mewtwo avec inquiétude.
Des huit champions présents, seuls Auguste et Ondine connaissaient le Pokemon.
- Mewtwo... balbutia Ondine, son visage devenant pâle.
- Cette créature est un Pokemon qui a été créé en laboratoire, expliqua Auguste. Tout en lui a été fait pour développer le plus grand pouvoir psychique possible. Plus qu'un Pokemon, c'est l'arme la plus dangereuse du monde.
Régis Chen observa Mewtwo d'un œil nouveau, et sembla reconnaître en lui le Pokemon en armure qui l'avait humilié lors de son match d'arène à Jadielle il y a quinze ans. Mewtwo fronça les sourcils, n'appréciant pas que l'on parle de lui en l'ignorant.
- Une arme implique quelqu'un pour la manier, répliqua-t-il. Et moi, je suis mon propre maître. J'aide juste Giovanni parce que je le désire. Si vous tous vous vous êtes réunis, c'est pour vous liguer contre Venamia, non ? Nous sommes aussi là pour ça.
- Nous ne pouvons pas faire confiance à Giovanni, avança Erika. C'est à cause de lui que nous sommes dans cette situation. Nous ne l'aiderons pas à retrouver son siège de Boss !
- C'est tant mieux, car je ne le désire pas, répondit Giovanni. Je désire seulement œuvrer pour la chute de Venamia et de son régime. Je n'ai ni ordre ni conseil à vous donner, mais j'ose espérer que vous reconnaîtrez en ma fille, Estelle, une alliée certaine. C'est à elle qu'il revient de gouverner la Team Rocket.
Vu l'échange de regard entre les champions, il parut évident qu'ils avaient déjà parlé d'Estelle.
- Vous ne pouvez pas lutter seuls, poursuivit Giovanni. C'est en rassemblant tous les ennemis de Venamia que l'on pourra parvenir à quelque chose.
Mewtwo hocha la tête et conclut :
- J'ai toutes les raisons du monde de détester cet humain et de me méfier de lui. Je ne l'aiderai pas si je pensais qu'il faisait tout ça pour lui. C'est du sort de Kanto dont il est question. En tant que ses champions, vous vous devez d'agir.
Au final, tous les regards se tournèrent vers Régis Chen. Les sept autres champions attendaient qu'il prenne une décision, le reconnaissant ainsi comme leur chef naturel. Giovanni en éprouva une étrange fierté. Le jeune homme hocha finalement la tête.
- Nous nous battrons alors, et avec vous. Mais que cela soit bien clair entre nous : ça ne fait pas de nous des amis.
- Je n'ai pas besoin d'ami, dit Giovanni. Juste de personnes de confiance.
***
L'intégration de Giovanni et de Mewtwo parmi les champions d'arènes se fit assez vite, au final. Deux jours à peine, et tout le monde leur parlaient plus ou moins naturellement. Même Bob parvenait à contenir assez son animosité envers son ancien Boss. Retravailler avec les champions faisait plaisir à Giovanni. Ça lui rappelait l'époque où c'était lui qui était le chef de file des champions de Kanto. Une règle était toujours valable : quelque soit notre opinion politique et idéologique, quand on était dresseur de Pokemon, on arrivait toujours à s'entendre.
Giovanni était plus ou moins parvenu à leur faire accepter l'idée de s'allier avec Estelle et la X-Squad. Personne ne la connaissait vraiment ici, mais Auguste et Bob avaient bien connu sa mère, la première femme de Giovanni, Claire Ivester. Elle avait été championne d'arène jadis, celle de Carmin-sur-Mer, et avait été l'entraîneuse de Bob. Ce dernier avait accepté de suivre Estelle seulement si elle tenait de sa mère, ce en quoi Giovanni l'avait rassuré. Jeannine acceptait tout ce que disait Giovanni sans rechigner ; de tous les champions, elle était sa première alliée. Son père Koga avait aussi fait parti de la Team Rocket jadis, et contrairement à Auguste, Bob et Morgane, il n'était pas parti à cause d'un désaccord, mais uniquement pour se consacrer pleinement à son arène et à ses Pokemon. Même quand il a intégré le Conseil des 4, Koga était toujours resté un partisan de la Team Rocket. Il avait du transmettre cela à sa fille.
Erika et le jeune Forrest restaient prudents, mais ne faisaient aucune histoire. Il n'y avait qu'Ondine et Régis qui posaient problèmes. C'était compréhensible pour les deux. Ondine avait passé une grande partie de son adolescence à combattre une équipe de terrain Rocket qui poursuivait sans relâche le jeune Sacha Ketchum et son Pikachu hors du commun. Comment s'appelaient ces zozos d'ailleurs ? Giovanni ne s'en souvenait même plus... Quant à Régis, eh bien, avec le grand-père qui l'a élevé, il ne pouvait certainement pas être un amoureux de la Team Rocket. Plus il passait de temps avec lui, plus Giovanni se voyait étant jeune dans ce garçon. C'en était même flippant. Il comprenait que Régis ne veuille pas vraiment avoir à faire à lui, donc Giovanni prenait garde à ne pas se trouver tout seul avec lui, mais quand il passa à quelque chose d'important, il dût lui en faire part, seul à seul.
- Où se trouve ton grand-père, garçon ? Lui demanda-t-il. En sécurité j'espère ?
- En sécurité ? Pourquoi ça ? S'étonna Régis avec suspicion. Il est à Bourg-Palette, chez lui, dans son labo...
Giovanni soupira.
- Dis-moi, comment penses-tu que Venamia va réagir quand elle saura que le chef de files des champions de Kanto, Régis Chen, s'est soulevé contre elle ? Tu ne crois pas qu'elle se servira du professeur Chen pour faire pression sur toi, ou qu'elle le tuera carrément pour se venger ?
- Pourquoi ferait-elle une chose pareille ? Grand-père n'a rien à voir dans notre rébellion. Il n'est coupable de rien, et c'est un député de l'Assemblé !
- Venamia fait ce qui lui chante, lui rappela Giovanni. La loi, c'est elle maintenant, et personne ne trouvera rien à redire à ce qu'elle pourrait faire. Si tu comptes te soulever, il faut mettre tes proches à l'abri. Ça implique Chen, mais aussi ta mère.
Le jeune homme hésita, mais fini par abonder dans le sens de Giovanni.
- Oui... C'est sans doute plus prudent. Mais où les amènerions-nous ?
- Le vieux Chen doit avoir des contacts partout dans le monde. On peut l'amener chez un de ses collègues professeurs. Chez Sorbier à Sinnoh, par exemple.
- Très bien. Je vais à Bourg-Palette tout de suite.
- Je viens aussi, dit Giovanni.
Régis s'arrêta pour le regarder d'un air suspect. Giovanni lui fit un sourire d'excuse, puis toucha le médaillon que portait Régis, un rond mélangé de vert et de jaune.
- Le symbole des Chen. Je l'ai porté aussi, quand j'étais gosse.
- Vous ? Comment avez-vous eu ce médaillon ?! Grand-père ne vous a jamais élevé...
- Non, mais il avait offert ce médaillon à ma mère quand ils se sont mariés. Il est parti, mais il l'a laissé. Ma mère ne me l'a jamais donné, car elle ne voulait pas que j'ai un seul lien avec les Chen, mais un jour, je lui ai volé dans un tiroir. Je savais que ça appartenait à mon père, même si j'ignorai qui il était à l'époque. Quand j'ai fini par l'apprendre, j'étais en colère, car le professeur Chen était un ennemi bien connu de la Team Rocket. Je lui ai donc renvoyé par la poste le médaillon, un peu comme pour dire que je le reniais, lui et le nom de Chen. J'ignore s'il a jamais su qui lui avait envoyé. Je le regrette un peu aujourd'hui. Ce médaillon a une longue histoire. La famille Chen existe depuis des générations, et il s'est toujours transmis de père en fils. La légende veut qu'il renferme quelque chose, un certain pouvoir...
- Grand-père m'en a parlé, acquiesça Régis. Mais depuis le temps que je le porte, il n'a jamais rien fait d'exceptionnel.
- Eh bien, je suis content que le vieux Chen te l'ai donné. Ne fais pas comme moi : garde-le, et le moment venu, donne-le à ton enfant. Peut-être qu'un jour, un Chen découvrira son secret.
Régis regarda son père avec gravité, s'apprêtant à dire quelque chose, mais y renonça. Il dit finalement :
- J'espère que vous avez un Pokemon Vol si vous voulez venir, parce que mon Ptera ne peut porter qu'une seule personne.
- Pas de souci. J'ai mon fidèle Scorvol.
- Et hors de question que vous alliez voir ma mère. Vous l'avez assez fait souffrir. À chaque fois qu'il était question de mon père - qu'elle ne nommait jamais - elle se mettait à pleurer.
- Je comprends...
Daisy. Elle avait été sa troisième femme. Bien sûr, Giovanni avait eu bon nombre de maîtresses entre Daisy et sa seconde femme, Priscilla, la mère des jumeaux Vilius et Rugard, et encore plus après Daisy. Mais Giovanni n'avait épousé que trois femmes, les trois qu'il avait sincèrement aimé. Giovanni avait espéré passer le restant de sa vie avec elle, mais c'était à cette époque que Madame Boss avait commencé à délaisser la Team Rocket et que Giovanni a dut, en tant qu'Agent 001, prendre ses responsabilités comme héritier officiel.
Il avait été obnubilé par l'argent et le pouvoir, et Daisy, effrayée par ce qu'il était devenu, s'était enfuie, alors même qu'elle était enceinte. Giovanni avait l'impression d'avoir agi comme sa mère, qui avait fait fuir son époux du fait de sa mégalomanie croissante. Mais Daisy était une fille intelligente. Elle avait deviné qui était le père de Giovanni - bien qu'il ne lui en avait jamais parlé - et était allée se réfugier chez lui, à Bourg-Palette. Une bonne chose finalement. Régis avait pu bénéficier de son nom légitime de Chen, et grandir auprès des Pokemon et de l'enseignement de son grand-père.
- Je n'ai pas su la garder, se surpris à dire Giovanni. C'était ma faute. Daisy était une fille pure et gentille. Elle a pu apprécier l'homme et le dresseur que j'étais, mais le Boss de la Team Rocket, jamais elle n'aurait pu vivre avec lui.
Il sourit, se remémorant leur temps passé ensemble, le beau visage de Daisy, son sourire éclatant, ses cheveux châtains qui sentaient si bons...
- La première fois que nous nous sommes rencontrés, c'était dans ma propre arène de Jadielle, raconta Giovanni. C'était une dresseuse qui voulait me défier.
Régis en fut ébahi.
- Maman ?! Une dresseuse de Pokemon ? Elle ne me l'a jamais dit !
- Elle a arrêté alors ? C'est dommage, elle était très bonne. C'est ça que j'avais remarqué en premier chez elle. Elle était très jeune quand elle est venue dans mon arène. Seize ans je crois. J'ai gagné, mais c'était limite. Comme il ne lui manquait que mon badge pour qu'elle puisse s'inscrire à la Ligue Pokemon, elle revenait me défier toutes les semaines ! Je crois qu'au final, j'ai eu pitié. J'ai fait semblant de perdre pour qu'elle ait son dernier badge. Elle m'a demandé de l'entraîner pour la compétition au Plateau Indigo. Durant ce laps de temps, nous sommes tombés amoureux, et nous nous sommes mariés le mois suivant.
Régis fronça les sourcils.
- Attendez voir ? Vous avez épousé ma mère alors qu'elle n'avait que seize ans ? Vous en aviez combien, vous ?
- La trentaine, j'imagine...
- C'est du détournement de mineur ! S'exclama Régis. Même pas besoin de chercher des preuves vous impliquant avec la Team Rocket ; on pouvait vous coincer rien que pour ça !
Malgré son ton scandalisé, Régis paraissait amusé.
- Quand elle a découvert que j'étais un haut cadre de la Team Rocket, en passe de devenir le futur Boss - et que j'avais déjà des enfants - elle a été surprise, mais je crois qu'elle l'a accepté. Elle aurait pu rester avec moi, si seulement je m'étais occupé d'elle. Mais j'ai laissé mon travail et mon ambition prendre le dessus. Je l'ai négligé, j'ai couché avec d'autres femmes, et j'ai laissé la Team Rocket devenir le réseau mafieux et criminel que tu connais. Elle a eu peur, et a fini par avoir peur de moi. J'ai regretté bien des choses, dans ma vie, mais Daisy fut l'un de mes plus grands regrets. Si je m'étais écouté, j'aurai tout plaqué à la Team Rocket pour partir avec elle dans une autre région, pour un nouveau voyage initiatique à deux. Mais, encore une fois, j'ai laissé ma mère décider à ma place.
Giovanni prit conscience que toute son existence avait été contrôlé et décidé par Urgania, depuis le jour de sa naissance. Il n'a jamais été libre. Et lui avait fait pareil pour la majorité de ses enfants. En cela, il était heureux que Régis ait pu vivre et grandir libre, loin de la Team Rocket.
- Je sais que mon père déteste la Team Rocket, alors qu'il fut un de ses fondateurs, poursuivit Giovanni. Il t'a appris à la détester toi aussi. Mais aucun de vous ne la déteste plus que moi je la déteste...
Régis ne parut pas comprendre. Ce n'était pas grave. Giovanni ne comprenait pas lui-même. Il avait été le Boss de la Team Rocket, mais aussi son premier esclave. Elle était sa vie, elle était tout pour lui, mais il la haïssait. Dur de mettre des mots sur ce genre de sentiment...
- Allez viens fiston, se reprit Giovanni. Allons dire à ce vieux grincheux d'intello en blouse blanche de prendre la tangente, et bon courage au pauvre bougre qui devra le recevoir chez lui !
Poussé par un étrange réflexe, Giovanni posa sa main sur l'épaule de Régis tandis qu'ils sortaient. Et, chose encore plus étonnante, Régis ne se dégagea pas.
***
Bourg-Palette. Un des plus petits villages de Kanto, mais étonnement, l'un des plus célèbres. C'était ici que tous les enfants âgés de dix ans ou plus voulant débuter une carrière de dresseur devaient passer pour recevoir leur premier Pokemon et leur Pokedex. Giovanni aussi, quand il avait dix ans, était venu ici, pour recevoir son Salamèche des mains du professeur Erable. Chen n'était qu'un assistant à l'époque, mais il avait été là aussi, sans bien sûr reconnaître en ce nouveau jeune dresseur son fils. C'était la seule fois où Giovanni s'était rendu dans ce village.
Quand Scorvol atterrit et que Giovanni posa le pied au sol, ça lui fit bizarre de se dire que dans ce trou paumé se trouvaient à la fois son père et son ex-femme. Régis était parti devant, pour raconter toute l'histoire à son grand-père et le convaincre de quitter Kanto. Giovanni avait préféré rester dehors. Il avait bien entendu parlé à Chen à de nombreuses reprises quand il était encore Chef d'Etat, mais là, rentrer dans son laboratoire, en compagnie même de Régis, ça aurait été... un peu trop embarrassant. Une demi-heure plus tard, Régis sorti du labo avec Chen. Le gamin avait l'air désemparé, et le vieux inflexible, signe que le professeur devait faire sa tête de mule. Quand il repéra Giovanni, il pointa le doigt sur lui de façon théâtrale.
- Qu'as-tu mis dans l'esprit de ce gamin, pour le pousser à cette folie ?! Tonna-t-il. Il n'y a pas de lutte possible contre Venamia ! C'est fini, elle a gagné, il faut l'accepter. Si tu avais un cheveu de bon sens, tu serais parti à l'autre bout du globe où elle ne pourrait pas te retrouver ! Mais non, tu es là, à embarquer les autres dans tes histoires...
Giovanni retint un sourire. Une bonne engueulade comme un père pouvait en donner à son fils turbulent. Il n'avait jamais connu ça.
- Maîtresse Agatha m'a dit plus ou moins la même chose. Signe que la vieillesse est un naufrage, comme on dit. Et pour votre information, sachez que votre petit-fils préparait déjà sa rébellion avec les autres champions avant que je ne les recrute.
- Parce que c'est un gamin fougueux qui rêve de gloire et de combat, comme tous les jeunes de son âge ! Riposta Chen. Mais toi, je n'avais pas pensé que tu irais l'encourager dans cette voie. Qu'il est bon d'avoir tant d'enfants pour pouvoir se servir de chacun à sa guise...
Giovanni fronça les sourcils, n'acceptant pas cette accusation, surtout qu'elle était fondée.
- Je ne force Régis à rien. Il est libre de me suivre ou pas. C'est un homme et il a le droit de prendre ses propres décisions. Et je ne me sers de personne sur ce coup là.
- Ah bon ? Tu ne veux pas écraser Venamia pour lui reprendre la Team ?
D'abord Mewtwo, Agatha, les champions, et maintenant Chen. Pourquoi diable tout le monde pensait ça de lui ?!
- Vous étiez là quand j'ai demandé à Estelle de prendre ma place, père. Je n'ai pas changé d'avis. Je vais me battre pour qu'elle devienne la nouvelle Boss, et rétablisse la Team Rocket dans le droit chemin. Et vous, si je me souviens bien, vous lui aviez promit votre soutient si elle respectait le régime démocratique que nous avions installé tous ensemble, et que Venamia a passé à la trappe.
Chen ne baissa pas les yeux, mais son regard se fit plus lassé qu'ombrageux.
- Je respecte cette jeune fille, et je prie pour qu'elle arrive à ses fins avec la Team Rocket. Mais je suis las de tout ça. Las des combats, de la guerre, de la politique... J'avais espéré faire de Régis mon successeur à l'Assemblée, et prendre ma retraite. Je suis vieux. Je n'ai plus ni la force ni la volonté de me battre.
- Fort bien, mais n'empêchez pas les autres de le faire à votre place, répondit Giovanni.
- Grand-père, intervint Régis, je me suis battu contre les vriffiens quand ils nous ont envahi. Je me suis battu contre Zelan dans la Tri-Alliance, que tu codirigeais toi-même. Venamia est autant une menace, sinon plus. On ne peut pas la laisser faire. Je pense... j'ai envie de croire en cette Estelle. C'est ma sœur, après tout...
Chen soupira.
- Je ne peux pas t'empêcher, mon garçon. Mais mon vieux cœur aurait été plus tranquille s'il te savait en sécurité.
- Je doute que quiconque soit en sécurité désormais, dans le nouveau régime de Venamia. Je te promets de faire attention, grand-père. Je reviendrai, et ensemble, nous refonderons Kanto. Nous aurons besoin d'un homme sage et d'expérience tel que toi pour le prochain gouvernement.
- Vous aurez surtout besoin de jeunes gens forts et dynamiques. Tu es un Chen. Tu es fait pour diriger.
Il prit son petit-fils dans ses bras, et le serra longtemps.
- J'ai bien compris que si vous comptez jouer les rebelles, j'ai tout intérêt à fiche le camp si je ne veux pas d'une visite de ces charmantes personnes de la GSR, reprit Chen. Mais je ne peux pas partir à l'instant. J'ai des centaines de Pokemon dans mon labo. Je ne peux pas les laisser, il faut que je les transfère quelque part, que je m'occupe de tout... Mais je partirai le plus vite possible, et je prendrai ta mère avec toi, fais moi confiance.
- Merci, grand-père.
Après quoi, Chen dévisagea Giovanni sans mot dire. Comprenant qu'il était peut-être de trop, Régis remonta sur son Ptera, laissant le père et le fils seuls à seuls.
- Je ne pensais pas te revoir un jour, après le Coup d'Etat, avoua Chen. Je pensais que Venamia t'avait tué.
- Et vous avez pleuré toutes les larmes de votre corps, j'imagine, ironisa Giovanni.
- Tu as sans doute plein de raisons de m'en vouloir, et des bonnes, je ne le nie pas. Mais ne te venge pas sur moi en utilisant Régis. C'est un brave petit.
- Je n'ai rien contre le gamin. Aussi incroyable que cela puisse vous paraître, je ne veux que son bien, et je vous suis reconnaissant de vous être occupé de lui et de Daisy.
- Un devoir légitime, qui ne rattrape pas celui auquel j'ai manqué avec toi...
Giovanni soupira, et fit un vague geste de la main, comme pour chasser une mouche.
- C'est bon, inutile de nous embarrasser avec des excuses gênantes. J'ai cessé de vous en vouloir il y a longtemps. Ce n'était pas votre faute ; quand vous êtes parti, vous ignorez que ma mère était enceinte...
- L'ignorance n'excuse pas tout. J'aurai pu me renseigner par la suite. J'aurai pu espionner la Team Rocket. Mais je me suis caché, en me bouchant les oreilles et en me couvrant les yeux. Je ne voulais plus avoir rien à faire avec la Team Rocket et Urgania. Je me suis forcé à oublier. J'ai été lâche. Si j'étais resté, j'aurai peut-être pu influer sur le cours des choses. J'aurais pu influencer Urgania...
- Et vous auriez échoué, conclut Giovanni. Je connais mère mieux que vous. Personne ne peut l'influencer. Mais assez avec le passé. C'est l'avenir qui compte.
- En effet, mais à mon âge, on a tendance à plus regarder en arrière qu'en avant. J'avais toujours rêvé d'avoir un fils. Le seul que j'ai eu, je ne l'ai jamais vraiment connu, sinon en tant qu'ennemi, et de loin. Ça ne pourra pas être réparé. Mais sache une chose : malgré nos divergences d'opinion sur nombre de sujets, malgré le fait que je t'ai toujours combattu à distance, une chose est certaine, à présent. Je suis fier de toi. Tu as accompli de grandes choses. Tu es un Chen.
Giovanni voulu trouver une réplique intellectuellement brillante, comme il y était accoutumé, mais son esprit était vide. Chen était fier de lui. Son père lui avait dit qu'il était fier de lui. C'était le premier qui lui disait ça. Jamais Urgania ne lui avait rien dit de tel. Giovanni dut faire un gros effort pour retenir ses larmes. Il ne s'était pas pensé si émotif. Quelle déchéance...
- Ouais, je suis un Chen, fit-il d'une voix rocailleuse. Je m'en suis rendu compte ces derniers jours. Ce sera comme ça que je me battrai.
Oui. Il n'était plus le Boss, ni même le Chef d'Etat. Il était juste un homme, avec un nom. Il était Giovanni Chen.
***
Finalement, il n'y eut nul besoin que le groupe des champions se cassent la tête à essayer de trouver un lieu pour s'en prendre à Venamia ; elle s'en était chargée elle-même. Ce fut Morgane qui les alerta, ayant eu une de ses visions psychiques.
- Une grosse bataille est en train de se dérouler à Hoenn. Le Pilier Céleste est tombé. Je vois le Mégador de Venamia, ainsi qu'un immense carrosse noir tiré par un énorme Pokemon inconnu. Il y a deux autres flottes qui se battent contre une armée de Pokemon spectres, et... une base volante.
Giovanni savait que Morgane avait un potentiel G-Man fort développé, aussi la croit-il sur parole. D'autant qu'il n'y avait qu'une seule base volante de connu : la base G-5, que l'un des jumeaux Mélénis Crust pouvait faire voler.
- Estelle se trouve sûrement là-bas. C'est le moment que nous attendions, mes amis. Allons présenter nos respects à notre chère Chef d'Etat, Lady Venamia.
Les huit champions signalèrent leur assentiment par des cris et des gestes variés. Ils étaient tous prêts à se battre, Giovanni plus que quiconque. Ceci dit, il prit Mewtwo à part avant de partir.
- Ma vie n'a aucune espèce d'importance. C'est Estelle qu'il faudra protéger. Estelle et, si je peux me permettre de te demander ça, Régis.
- Je n'ai en effet aucun ordre à recevoir de toi, mais c'est ainsi que je ferai, acquiesça le Pokemon. C'est le futur que je vois en Régis Chen via mes pouvoirs psychiques. Un grand futur, qu'il sera amené à forger. Si je vois le même chez ta fille, alors j'userai de tous mes pouvoirs pour les protéger.
- Ce sera à moi de les protéger en premier. Je veux, le moment venu, que tu m'y aides. Tu comprends ?
Bien que les paroles fussent obscures, Mewtwo pouvait discerner les pensées de ses interlocuteurs, donc oui, il avait compris. Après quoi, les huit champions et Giovanni, entraînés dans les airs par Mewtwo, volèrent à toute vitesse vers le lieu de la bataille. Et c'est ainsi que, une heure plus tard, Giovanni se trouva sur l'île d'Atalanopolis, face à Venamia, à Vilius, à 006 et 007, ainsi qu'à leur bataillon de GSR, pour défendre le groupe de sa fille Estelle, composé de Tender et d'une partie de la X-Squad. Les GSR furent un moment pris de court par l'arrivée soudaine des champions et de leurs Pokemon, mais ils se reprirent vite ; ils étaient toujours en nette supériorité.
- Voyez tous l'ancien Boss de la Team Rocket ! Clama Venamia. Réduit à trahir sa propre organisation !
- Si trahison il y a eu, elle venait de toi en premier, riposta Giovanni. Un Coup d'Etat n'est pas spécialement une marque de loyauté...
- J'ai fait ce qu'il fallait pour rendre la Team Rocket plus forte ! Si je vous aviez laissé la remettre à votre fille, elle aurait sombré dans le néant. Vous tous, vous devez disparaître afin que la Team Rocket puisse briller comme jamais !
Armée de son éclair, Venamia se lança elle-même dans la bataille. Les champions et leurs Pokemon aidant la X-Squad à combattre les troupes GSR, Giovanni fut résolu à se charger de Venamia. Il fit Méga-évoluer son Persian, et appela en plus Rhinastoc et Carchacrok. Mais Giovanni renoua bien vite avec la légendaire efficacité de Lady Venamia au combat : elle prédisait tout, elle esquivait tout, et lançait ses attaques avec une mortelle efficacité. Même si les Pokemon Sol de Giovanni étaient insensibles à la foudre, Venamia pouvait user de son brassard d'Eucandia. Venamia se rapprochait dangereusement de lui, jusqu'à qu'elle fut devant. Avec un sourire, elle s'apprêtait à embrocher Giovanni avec Ecleus, quand une Aurasphère provenant de Mewtwo la fit reculer.
- Neutralise-là avec tes pouvoirs psy ! Lui demanda Giovanni. Empêche là de bouger !
- J'essaye, mais je n'y arrive pas, répliqua le Pokemon génétique. Il y a quelque chose en elle, une présence faite de ténèbres, qui bloque mes pouvoirs psy...
Voilà qui était navrant. Les pouvoirs psychiques destructeurs de Mewtwo étaient leur seul atout face à la GSR. Si Venamia ne pouvait pas être arrêté, la défaite était courue d'avance. Giovanni bougea se regrouper avec les autres, qui commençait à reculer sous la pression des assauts conjoints de 006 et 007. Mais Venamia le suivit et lui lança un éclair destructeur que Rhinastoc bloqua. Bien qu'il ne reçu aucun dommage de la foudre grâce à son type Sol, le choc fut si violant qu'il fut propulsé plusieurs mètres plus loin. Vilius était aussi entré dans la bataille, battant à lui seul le Méga-Leviator d'Ondine et le Méga-Alakazam de Morgane. Les lignes de défense Pokemon allaient bientôt s'écrouler, et la X-Squad était au bout du rouleau. Mewtwo aurait pu tous les sauver d'un seul geste de la main en balayant tous leurs ennemis, mais Venamia le tenait occupé. Même un Pokemon comme Mewtwo, s'il ne pouvait pas se servir de ses pouvoirs psy pour se défendre, était en difficulté face à Venamia. Tender vint rejoindre Giovanni.
- Boss ! Il faut que vous évacuiez, Madame Estelle et vous ! Vous représentez à vous deux l'espoir de la Team Rocket ! Nous vous gagnerons le maximum de temps possible.
Giovanni lui sourit.
- Moi, je ne représente plus rien du tout, mon vieil ami. Je suis juste là pour permettre aux jeunes de prendre la relève.
Giovanni s'avança en tête vers Venamia et ses sbires, qui, en voyant l'ancien Boss approcher d'un pas conquérant, avaient soudainement stoppé leurs attaques. Il était temps. Ça n'aurait pas pu se terminer autrement. Non, c'était comme ça que ça devait se terminer.
- Estelle, Régis, dit-il. C'est vous qui forgerez le futur. Alors vivez jusqu'au jour où vous le ferez. N'oublie pas le médaillon, Régis, et perpétue la lignée des Chen. Estelle... tu es celle qui doit me succéder à la Team Rocket. Depuis le tout début. Tu vas la changer, en bien. Tu vas l'ouvrir à la lumière, alors que toutes ces années, je l'ai plongé dans les ténèbres.
- P-père ? Balbutia Estelle. Qu'est-ce que vous... Je ne comprends pas.
Giovanni rappela son fidèle Persian dans sa Pokeball, qu'il lança en direction d'Estelle. Il fit de même avec la Gemme Sésame qu'il portait comme bague.
- Garde-le, en souvenir de moi. Il te revient lui aussi.
Estelle était toujours perdue, mais Tender, comprenant ce que son Boss avait prévu, s'avança.
- Boss ! Permettez-moi de rester à vos cotés ! Nous avons commencé ensemble, il nous faut terminer ensemble !
- Toi, tu as encore des choses à faire, Hegan. Sers ma fille comme tu m'as servi, et mon âme n'en sera que plus apaisée.
Venamia ricana devant tout ce discours.
- Qu'est-ce que c'est que cela ? Vous comptez vous rendre en échange des autres ? Inutile, cher Boss. Vous périrez tous aujourd'hui.
- Tu ne commandes rien, Siena Crust, répliqua Giovanni. Malgré ta force, tes ordres ne peuvent transcender une volonté commune. La Team Rocket, c'est une multitude de volonté qui se rejoignent. Ce n'est pas juste un chef au sommet qui fait tout et décide de tout. Voilà pourquoi tu ne pourras jamais te l'approprier, gamine. Mewtwo, maintenant !
Le Pokemon génétique lévita en hauteur et croisa les bras. Aussitôt, le sol trembla, et se remodela. Un mur de roche de six mètres, en cercle, naquit du sol et s'interposa entre la GSR et les rebelles. Et Giovanni, lui, était resté du coté GSR. Il sourit pour lui-même. Mewtwo avait bien compris son souhait. Il lui avait fabriqué un beau terrain pour qu'il puisse y mener sa dernière bataille, pendant que les autres fuiraient.
- Protège-les, maintenant, murmura-t-il. Donne un sens à ta création.
- Vous êtes fou, décréta Venamia. Vous pensez que ce mur va nous retenir ?
- Lui, sans doute pas longtemps, approuva Giovanni. Mais je suis là aussi. Je vous retiendrai le temps qu'il faudra pour que les autres s'enfuient.
Venamia éclata de rire.
- Vous, un homme seul, contre nous tous ?! J'aimerais voir ça. Pour la peine, je vous promets de ne pas intervenir moi-même. Voyons combien de temps vous resterez debout, Boss Giovanni.
- Ton arrogance causera ta perte, gamine.
Giovanni s'entoura de ces cinq Pokemon restant. Son équipe sol ultime. Rhinastoc, Scorvol, Carchacrok, Nidoqueen et Nidoking.
- Je suis désolé de vous avoir enfermés avec moi, leur dit Giovanni. J'ai été un homme mauvais avec les Pokemon en général, mais j'ose espérer que je me suis toujours bien comporté avec vous. Me ferez-vous l'honneur de vous battre une dernière fois avec moi ?
Les cinq Pokemon donnèrent leur assentiment, le corps tendu, prêt à se battre.
- Allez, venez, les marmots ! Gronda Giovanni aux GSR. Je vais vous apprendre ce qu'est un vrai Rocket !
Oui, il était Giovanni Chen, mais il était aussi un Rocket. Ceux en face de lui, qui arrivaient par dizaine, n'en étaient pas.
Derrière le mur de roche, Estelle, quand elle avait vu son père disparaître, s'était précipitée sur les rochers.
- Père ! PÈRE !
Elle tapait du poing contre la roche, se faisant saigner elle-même, en pleurant, jusqu'à que Tender la prenne dans ses bras. Tous les champions et la X-Squad restèrent là un moment, stupéfaits par le geste de Giovanni. Régis aussi, regardait le mur de roche avec une expression indéchiffrable. Mewtwo, à l'aide de ses pouvoirs, arracha une petite portion de l'île, là où tout le monde se tenait, et la fit léviter. Le morceau de roche blanche se détacha d'Atalanopolis et fila vers les cieux, où chacun put voir, d'en haut, le dernier combat de Giovanni.
Les GSR, chacun ayant envie d'être celui qui aura battu l'ancien Boss, chargeaient de façon désordonnée. Giovanni, entourée de ses puissants Pokemon, se battaient à mains nues, les repoussant un par un, tandis que ses Pokemon les faisaient carrément voler. Tandis qu'il se battait, Giovanni ne pensait à rien, si ce n'était à ses débuts dans la Team Rocket. Qu'il avait été fier, à l'époque, d'intégrer l'organisation de sa mère. C'était cette même fierté qu'il ressentait aujourd'hui.
- Oh, monde morne, je te vois... dans ton implacable décrépitude, se mit-il à chanter. Oh, monde morne, tu es... bientôt arrivé à ton terme.
L'hymne de la Team Rocket. Combien de temps cela faisait-il qu'il ne l'avait plus chanté ? Il fut même surpris de se rappeler des paroles. Pourtant, en ce moment, il n'y avait nulle autre chanson plus appropriée.
- Et c'est alors, que je vois... une flamme s'élever depuis l'aube. Une aube teintée d'espoir. L'espoir d'un monde nouveau.
Agacés par le fait qu'ils n'aient pu, à eux tous, arriver à toucher Giovanni, les GSR commencèrent à utiliser leurs armes. Les balles rugirent, mais Giovanni, bien entouré par ses solides Pokemon, fut relativement à l'abri. Sauf qu'il ne voulait pas l'être. Il voulait se battre. Aussi se soucia-t-il peu des balles, continuant à bouger pour assommer les GSR. Sa voix prit de l'ampleur tandis qu'il arrivait au refrain.
- Debout guerriers du R rouge ! Façonnez donc l'avenir ! C'est le destin qui vous guide, celui de la Team Rocket !
Venamia regardait ce spectacle d'un air inexpressif. Vilius avait lui une espèce de sourire amusé teinté de fierté. Les autres officiers GSR étaient, eux, éberlués qu'un homme seul, sans pouvoir, sans arme, avec seulement cinq Pokemon, soit parvenu à repousser autant de leurs hommes. Venamia commença à perdre patience.
- Cette comédie a assez duré !
Elle empoigna son éclair avec l'intention d'en finir, mais Vilius la retint par l'épaule.
- Ne lui avez-vous pas promis de ne pas intervenir ?
Venamia se dégagea, agacée.
- Les autres sont en train de filer ! Je n'ai que faire de l'honneur stupide d'un moribond !
En effet, Giovanni s'était déjà pris plusieurs balles ci et là, et quelque coups de couteaux. Son Nidoking était déjà mort, mais le Boss et ses autres Pokemon continuaient de se battre sans faiblir. Vilius haussa les épaules.
- Soit. Mais c'est à moi de le faire.
Vilius s'avança, et Venamia ne l'arrêta pas. Il activa ses bracelets de Sombracier à leur second niveau, arracha un morceau de du sol rocheux qu'il réduisit en gravats, et fondit sur Giovanni. Ce dernier se tourna vers lui avec un rictus de mépris.
- Vilius !
- Adieu, père, dit simplement celui-ci.
Il jeta de toutes ses forces les morceaux de pierres dans sa main. Avec la puissance que lui donna le Sombracier, ces gravats furent dix fois plus mortels que des balles de pistolets. Ils traversèrent le corps pourtant immensément solide de Rhinastoc qui s'interposa pour protéger Giovanni. Le corps de ce dernier fut touché en de nombreux points, avant que les gravats continuent leur course jusqu'au mur de roche de Mewtwo, qu'ils traversèrent également. Giovanni, percé de toute part, recula de quelque pas et s'adossa au mur. Vu comment il perdait son sang en plusieurs endroits, tous s'attendaient à ce qu'il s'écroule. Mais, avec un sourire, Giovanni se redressa.
- Ai-je dit que j'en avais terminé, les minables ?
Avec ses trois Pokemon restants, tout aussi proches de la mort que lui, Giovanni Chen chargea. En haut, sur le morceau d'île qui flottait loin d'Atalanopolis, en direction du dernier vaisseau de la flotte d'Erend qui était resté, la X-Squad ainsi que Tender se mirent au garde à vous, dernier salut pour leur chef légitime. Au final, quand Giovanni s'écroula enfin, il ne restait plus beaucoup de GSR debout. Venamia était furieuse, mais Vilius regardait le corps sans vie de son père avec un respect renouvelé. Discrètement, il écrasa une unique larme sur sa joue.
***
Erend Igeus était discrètement resté dans les cieux d'Atalanopolis pour observer le combat, et avait accepté d'offrir refuge à Estelle, ses hommes, les champions et le prince Julian. Quand le détachement de Venamia sur Atalanopolis fut parti, Estelle insista pour qu'on l'y dépose. Régis l'accompagna, de même que Mewtwo et le Persian de Giovanni. Venamia, en partant, avait tout laissé tel quel, sans toucher aux corps, même ceux de ses propres hommes. Giovanni était bien là, entouré de plusieurs cadavres de GSR. Son corps était en sale état, troué de nombreuses parts, mais il affichait un sourire dans la mort. Alors qu'Estelle l'avait enlacé et pleurait à chaude larme sur son cadavre, Régis s'était tenu à distance, en un silence respectueux, mais son visage trahissait son trouble et sa tristesse.
Finalement, Mewtwo amena le corps au sommet de l'île. Là, il creusa avec ses pouvoirs psychiques une tombe dans la roche blanche. Quand elle fut recouverte et scellée à jamais, Mewtwo érigea un large rocher blanc en forme de stèle, où il grava une unique chose : un grand R. Régis lui demanda de graver autre chose en plus en dessous : le symbole de la famille Chen, qu'il portait en pendentif. Au loin, le soleil commença à se coucher, sa lueur orangée se reflétant sur la tombe blanche.
- C'était ce qu'il voulait, dit Mewtwo à Régis et Estelle. C'était comme ça qu'il désirait partir. Je le détestais, mais c'était un homme fier et brave.
Il dévisagea intensément les deux Chen.
- C'est à vous qu'il a transmis la suite. Le futur des Chen, comme celui de la Team Rocket. J'ai promis de vous aider. Ne le décevez pas.
Sans dire mot, Régis prit la main de cette demi-sœur qu'il connaissait à peine, et ils restèrent un moment ici, jusqu'à que le soleil se couche entièrement.