chapitre 3: Un nouveau rebelle?
Lorsque Neil ouvrit les yeux, la première chose qu'il vit fut deux grands yeux mauves qui l'observaient avec curiosité. Il se retint de crier et resta quelques secondes immobile, le temps que les souvenirs de la veille lui reviennent en mémoire.
La mise à mort d'un rebelle, la fugue dans une forêt noire, le sauvetage du Pokémon serpent, le voyage dans les airs, le vol de nourriture...
Rassuré, le garçon sourit avant de déclarer d'une voix mesquine :
- Alors, je sais que je suis le plus beau mais faut pas exagérer...
- Je me rappelle avoir déjà observé des humains au physique plus avantageux que toi, répondit le serpent d'une voix faisant penser à celle d'un enfant de 10 ans.
Neil se redressa et jeta un regard interloqué au Pokémon. Ainsi il était capable de parler ? Décidément, cette créature était pleine de surprises. Puis la signification des mots parvinrent à son cerveau.
- Hé, on n'insulte pas celui qui nous a sauvé la vie. Et de toute façon, tu ne comprends rien à la vraie beauté.
- Je dois avouer que je ne comprends pas la manie des humains à tant se préoccuper de leur apparence physique. Pour moi, ce n'est pas l'aspect qui compte mais les actions. Et, ce que tu as fait dans cette forêt, ça m'a surpris. Les humains prêts à sauver la vie d'un Pokémon sans autre motif que de préserver sa vie est plutôt rare de nos jours.
Le garçon acquiesça. Il comprenait très bien ce que le Pokémon voulait dire.
- D'ailleurs, qu'est-ce que tu faisais dans cet endroit ? Demanda le garçon pour essayer de changer de sujet. Tu n'as pas l'air de pouvoir vivre dans une forêt. Tu m'as l'air plutôt fait pour vivre dans l'eau. Et qu'est-ce que tu es exactement ? Même si on a pas l'habitude de voir des Pokémons, on se doit de connaître quelques uns et tu ne fais pas partie de ceux que l'on voit souvent.
Le serpent hocha la tête, compréhensif.
- Ce n'est pas étonnant que tu n'ais jamais vu de Pokémon comme moi, déclara-t-il d'un ton légèrement fier. Mon espèce est en voix de disparition et ce, depuis très longtemps. Je suis un Minidraco, un dragon des mers, le plus précieux trésor des océans. Et je voulais observer le monde des humains, je voulais voyager, voir le monde. Malheureusement, je me suis fait agresser par un groupe d'humains qui utilisaient les Pokémons comme des armes. J'ai réussi à m'enfuir mais j'étais fatigué et je me suis retrouvé dans cette forêt. Si tu n'étais pas venu à mon secours je serais mort. Je... Je te suis reconnaissant, vraiment.
- Je t'en prie, c'était un plaisir d'aider un... euh Minidraco c'est ça ? Je m'appelle Neil et... toi ? Tu as un nom ?
Le Pokémon dragon sembla réfléchir avant de murmurer :
- Mes parents m'ont donné le nom d'Enes.
- C'est plutôt joli comme nom, commenta le jeune homme en souriant. Et, tous les Minidraco savent parler le langage des hommes ?
Le serpent le regarda comme s'il venait de se rappeler une chose importante.
- Euh, je suis désolé mais ce n'est pas le cas. Même s'il existe des Pokémons capable de parler la langue des hommes, les Pokémons de ma famille en sont incapables.
Neil fut totalement perdu.
- Hé attends, si tu ne peux pas parler mon langage, comment ça se fait que je te comprenne ?
- Je n'en ai aucune idée, répondit Enes, aussi perdu que le jeune homme. Tu dois avoir un don, je ne vois que ça.
Neil se tut, réfléchissant à tout ça. Si cela était vrai, qu'il avait effectivement un don et que, s'il y avait une chance pour que l'empereur connaisse son existence, il était normal que ce dernier ait désiré limiter les accès de ses précieux citoyens aux merveilleuses créatures, Neil en était persuadé à présent, qu'étaient les Pokémons.
- Sinon, que vas-tu faire maintenant ? Demanda Neil au dragon.
Celui-ci réfléchit un petit moment avant de répondre.
- A vrai dire, je n'en ai aucune idée. J'aimerais continuer à voyager mais avec tout ces dangers... Et je voudrais également me venger de ces humains qui m'ont attaqué. Ils ont osé rabaisser les Pokémons à l'état d'objets et les utiliser contre leur famille. Rien qu'y penser me met hors de moi. Et toi ? Qu'as-tu l'intention de faire ?
Neil soupira avant de répondre.
- Et bien en fait, j'en avais assez de vivre dans l'Empire de Mecheva. Je me suis enfui pour ne plus assister aux horreurs et pour ne plus voir les monstres que sont devenus les hommes vivants dans ce trou à rattata. Après, j'avoue ne pas avoir réfléchit à la suite. Mais je dois avouer que j'apprécie beaucoup ta présence et ton esprit et ça me plairait de t'aider dans ta quête. Faire chier l'empire, c'est une idée plutôt plaisante.
Le jeune dragon parut excité à cette nouvelle.
- Mais, ajouta le jeune homme, pour partir en voyage, il va falloir des réserves et du matériel...
- Ce que tu as trouvé hier, tu ne peux pas le retrouver ?
- Non, je risque surtout de me faire arrêter et exécuté pour l'exemple. J'ai eu un coup de bol cette fois là.
- Alors on fait quoi ? Demanda Enes.
Le garçon se plongea dans ses pensées un petit moment avant de sourire.
- T'inquiète paupiette, j'ai une idée.
Environ une demi-heure plus tard, Neil se dirigeait, seul, à l'entrée de la métropole qui bordait la région : la ville de Dédrica. Enes avait accepté de porter le jeune homme sur son « dos » jusqu'à une distance raisonnable de la ville. D'ici, le jeune dragon devait se cacher et attendre calmement le retour de Neil qui, grâce à son statut de citoyen de l'empire, pouvait sans problème entrer et sortir des villes impériales sans que les soldats ne se posent la moindre question. Neil avait eu la chance d'emporter sa carte d'identité (qui servait également de carte de crédit) dans sa fuite.
Il n'eut qu'à la montrer au garde qui surveillait le passage vers le centre ville pour passer. Le jeune garçon fut d'un seul coup projeté dans l'animation d'un centre ville métropolitain et cela le paralysa de surprise. Il n'avait connu qu'un petit village de campagne, avec un petit marché qui avait lieu une fois par semaine, avec tout au plus cinq ou six marchands. Là, c'était une place faisant trois fois la superficie du village où il avait vécut avec des milliers de stands, des centaines de magasins et plusieurs milliers de personnes qui jetaient un coup d'œil à chaque boutique pour acheter ou non les produits présentés.
Retrouvant ses esprits, le jeune homme commença par se diriger vers une banque pour contrôler son compte bancaire. Il sourit quand il vit la somme qu'il avait réussit à récolter. Il y avait de quoi s'approvisionner en eau et nourriture pendant des années si tout ce passait comme prévu. Il ressortit en vitesse et chercha un stand où on vendait des sacs. Il en trouva un assez vite, solide et peu cher et ensuite, chercha ce qu'il voulait. Il finit par trouver un centre commercial assez grand et entra à l'intérieur.
Il commença par se diriger vers le magasin vendant des capsules habitables. Si vous ignorez ce que sont les capsules, sachez que, dans l'empire Mecheva, tous les objets que l'on trouvait habituellement dans des commerces spécialisés et qui coûtaient une fortune avaient été remplacés par les capsules. C'étaient des petits objets que l'on pouvait transporter dans les poches et qui renfermaient des maisons, des véhicules, même de la nourriture où des vêtements. C'était la plus grande découverte technologique trouvée à ce jour et l'empire se gardait bien le privilège de l'utiliser. Neil trouvait que, même si la technologie et la modernité de l'empire était admirable (c'était bien la seule chose que le jeune homme admirait dans cet empire d'ailleurs), seuls les habitants des villes pouvaient se payer le luxe d'avoir on en sait combien de capsules d'habitations ou de véhicules de luxe. En campagne, on pouvait juste avoir des capsules renfermant de la nourriture ou de l'eau, voire de temps en temps une voiture. Leur fonctionnement était simple. Il suffisait de prendre la capsule dans ses mains, appuyer sur un bouton et lancer la capsule pour que le contenu apparaisse comme par magie.
Neil acheta une maison moyenne tout confort avec eau courante et électricité, puis des vêtements de rechange. Enfin, il acquit de l'eau et de la nourriture pour plus d'un an et ce, sans dépenser plus de 200 Pokédollars, ce qui devait représenter à peine un centième de ce qu'il avait en banque. Et surtout, toutes ses acquisitions tenaient dans une petite boîte qui ne devait pas peser plus de 80g.
Tout content, il commença à quitter la place quand il entendit un marchand crier plus fort que les autres :
- Chers amis, venez acheter vos propres Pokémons de compagnie et tout ce qu'il faut pour en prendre soin !
Intrigué et surtout curieux, le jeune homme s'approcha et se fraya un chemin dans la foule jusqu'au stand. Il y avait un petit homme, chauve et bedonnant portant une moustache qu'il tripotait sans arrêt qui présentait plusieurs Pokémons enfermés dans des cages, des accessoires pour les décorer comme des peluches ou des poupées et des objets ronds étranges. Neil prit dans ses mains une de ces sphères et la pesa en se demandant à quoi cette chose pouvait bien servir.
- Ah, très bon choix mon garçon, s'exclama le marchand en se jetant littéralement sur lui. Vous avez du goût c'est évident et surtout, vous êtes fait pour l'armée impériale.
- Qu'est-ce que c'est que ce truc ? Bégaya le garçon.
- Ça mon garçon, c'est une Pokéball. Ce sont des objets incroyables qui permettent de stocker vos Pokémons à la manière des capsules pour vous déplacer plus facilement.
Neil fut aussitôt intéressé par cette boule mais plusieurs questions se posèrent dans son esprit : Le Pokémon souffrait-il durant le processus ? Etait-ce confortable pour lui ? Et surtout, Enes accepterait-il de se faire enfermer dans un objet aussi petit et banal que ça ? Il posa la question du traitement du Pokémon dans la sphère.
- Oh, je vois que vous avez le profil pour aller loin dans l'armée mon garçon. Etes-vous en première année de votre
formation ?
- Euh oui, c'est ça, menti-t-il dans un souffle.
- Donc vous cherchez encore votre Pokémon je me trompe ? Eh bien, sachez que cette Pokéball est ce qu'il y a de mieux pour vous. Et ne vous inquiétez pas, le Pokémon enfermé à l'intérieur ne souffre pas le moins du monde. Il est juste miniaturisé dans la sphère qui se révèle être une sorte de maison miniature. Et si vous cherchez un Pokémon que vous pouvez mettre à l'intérieur...
Le bras du petit homme fit tourner la tête de Neil vers les cages où des Pokémons étaient enfermés. En voyant la tristesse dans leurs regards, le garçon hésita à les libérer tous. Ce qu'il avait apprit ce matin pesait dans la balance et ces pauvres créatures enfermées contre leurs grés pour finir dressé comme des armes sans émotions ou des poupées étant là juste pour faire joli dans une maison, tel un meuble ou un vase le rendait juste malade.
La nausée le prenant à la gorge, le jeune homme parvint à garder son calme et acheta la boule sans dire un mot. En jetant un dernier regard aux Pokémons enfermés, il murmura un « désolé » qui, il en était sûr, devait leur faire une belle jambe. Il se sentait tellement misérable qu'il ne regardait même plus devant lui et rentra malencontreusement dans quelqu'un, les renversant tous les deux.
Neil marmonna des excuses avant de croiser le regard de la personne qu'il avait fait tomber.
C'était une femme d'environ quarante ans. C'était tout ce qu'il avait pu voir car, cette dernière cachait son visage derrière un masque qui couvrait l'ensemble de son visage et un de ses yeux. Neil supposa qu'elle avait été défigurée au cours d'une mésaventure. La femme se releva et reparti sans demander son reste. Mais Neil avait eu le temps d'apercevoir plusieurs boules rouge et blanche comme la sienne à sa ceinture.
C'était donc une dresseuse. Mais le garçon ne s'attarda pas même s'il aurait aimé lui poser des questions jusqu'à ce qu'il se rappelle qu'elle ne portait pas l'uniforme de l'armée impériale. Instantanément, le garçon frissonna. Il avait croisé sans le savoir une rebelle de l'empire. Bon sang, si le visage de la femme était connu, si on l'avait vu rentrer dans cette femme, il était mort !
Il devait partir, vite ! Il garda tout de même un air calme et une allure détendue.
« Quand on est recherché, se mettre à courir au milieu d'une foule qui marche est la pire chose à faire car c'est le meilleur moyen d'indiquer sa position aux poursuivants ».
Il se répétait encore et encore cette même phrase pour empêcher ses jambes de partir à toute vitesse.
Il finit par parvenir dans la ruelle étroite et presque déserte menant à la porte reliant le centre ville et la banlieue et il soupira de soulagement. Il remontra sa carte d'identité au garde et put sortir de la ville sans soucis.
Là, il reprit confiance en lui et marcha d'un pas plus libre, sans se douter qu'il était suivi.
La silhouette qui ne le perdait pas de vue ne cessait de se poser des questions. Malheureusement, c'était trop risqué pour elle de l'empoigner et de s'enfuir. Il fallait trouver un endroit avec moins de monde et surtout, avec moins de soldats. Heureusement pour elle, ce garçon se dirigeait vers la mer, à proximité de la forêt obscure, le seul endroit de la plage où presque personne n'allait jamais. Il y avait donc deux hypothèses : ce gamin était soit stupide, soit il avait des choses à cacher.
Elle pencha vers la deuxième solution. Quand il lui était rentré dedans, elle avait sentit l'énergie de sa bénédiction, une énergie à la fois inconnue et familière. S'il était ce qu'elle pensait, il n'y avait aucune chance qu'il ne choisisse quelqu'un de stupide pour lui succéder. Et puis, elle avait bien vue que ce gamin avait comprit très vite ce qu'elle était, à voir l'air effrayé et méfiant qu'il avait affiché avant de quitter la ville.
Il finit par rejoindre un lieu de la plage découpé par plusieurs blocs de roche qui, avec le temps, avaient finit par ressembler à des crocs. D'où le nom de cet endroit : La mâchoire du Shaperdo.
Elle vit le garçon zigzaguer entre les énormes dents de basalte avec sureté. Et quand elle le vit s'arrêter, elle comprit ce qu'il avait à cacher et elle sourit.
C'était un jeune Minidraco, il n'avait pas plus de quatre ans. En le voyant, le garçon caressa la tête du serpent de mer en souriant.
Elle décida de se montrer, convaincue de l'identité du garçon.
- Je ne me souviens pas m'être excusée tout à l'heure pour notre incident...
Le gamin se retourna aussitôt, les yeux exorbités, tel un saquedeneu ayant sentit du miel. Le Minidraco se mit aussitôt entre elle et lui, les yeux plissés dans un air de défi.
Elle soupira et croisa les yeux du dragon.
- Courageux de ta part mais tu ne me feras rien.
D'abord surprit qu'elle lui adresse la parole d'égal à égal, le serpent de mer retrouva sa position d'attaque.
- C'est ce qu'on va voir, répliqua le jeune dragon en utilisant une attaque Draco-rage.
Elle arrêta le rayon draconique avec sa main seule et le fit disparaître, sous les yeux médusés des deux enfants.
- C'est impossible... murmura le petit dragon. Une personne normale ne peut pas arrêter une attaque avec sa main, surtout une attaque dragon...
- Vous nous voulez quoi ? Demanda le garçon. On a rien à voir avec vous.
- Détrompes-toi mon garçon, répondit-elle en commençant à retirer son masque, dévoilant le visage d'une très belle femme entrant dans la quarantaine, aux longs cheveux qui autrefois étaient noir mais à présent étaient gris sombre, et au regard vairon. Un de ses yeux était bleu avec des teintes mauves qui l'assombrissaient légèrement. L'autre était de couleur argentée et brillait d'un éclat blanc surnaturel. Cet œil était barré de long en large par une cicatrice de toute évidence ancienne, à l'apparence fine et nette, comme si on avait tranché d'un coup vif dans la chair.
- Je m'appelle Lo et je suis une gardienne de Safaïa, tout comme toi.