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Team Rocket X-Squad de Malak



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» Auteur : Malak - Voir le profil
» Créé le 04/10/2015 à 08:45
» Dernière mise à jour le 19/12/2020 à 11:52

» Mots-clés :   Action   Fantastique   Organisation criminelle   Présence d'armes   Présence de Pokémon inventés

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Chapitre 298 : Giovanni Chen ( 1ère partie )
Oh, monde morne, je te vois
Dans ton implacable décrépitude
Oh, monde morne, tu es
Bientôt arrivé à ton terme

Et c'est alors, que je vois
Une flamme s'élever depuis l'aube
Une aube teintée d'espoir
L'espoir d'un monde nouveau

Debout guerriers du R rouge
Façonnez donc l'avenir
C'est le destin qui vous guide
Celui de la Team Rocket



Première partie de l'Hymne de la Team Rocket, écrit par Samuel Chen, Urgania G.S.Urdain et Karus Crust.



***


Quinze jours plus tôt...


Giovanni n'avait pas eu trop de mal à s'échapper de sa prison. La majorité des forces de Venamia étaient parties à Johto pour achever le régime d'Erend Igeus à Doublonville, et de toute façon, ils n'avaient pas pris la peine de le faire garder convenablement, parce que personne n'avait pensé qu'il pourrait sortir. De plus, Venamia devait se donner de la peine pour que pas grand monde ne sache qu'elle retenait le Boss dans son propre quartier général, car le Rocket qui lui apportait ses repas midi et soir était toujours le même. Comme il venait à heure régulière, il fut facile à Giovanni de préparer sa fuite.

Une fois méga-évolué, son fidèle Persian n'avait pas eu de mal à défoncer la porte blindée de la cellule. Étrangement, alors que Persian était plutôt efficace en attaque physique, Méga-Persian ne jurait que part l'attaque spéciale. C'était pour cela que Giovanni lui avait appris Machination, qui lui permettait de se booster en spécial. Une fois cela fait, son attaque Rayon Gemme avait sans mal fracassée la porte, chose que Persian n'aurait jamais pu faire, même boosté, sous sa forme normale.

Persian avait été le premier Pokemon de Giovanni, alors qu'il avait... quoi ? Huit ans ? Neuf ? C'était avant d'avoir réellement commencer son voyage initiatique de dresseur en tout cas. Le jeune garçon qu'il était à l'époque l'avait sauvé d'une bande de voleurs qui s'était spécialisée dans le vol et le recel de Persian, des Pokemon connus pour leur valeur marchande, surtout chez les riches propriétaires. Le Persian en question avait grandi dans la rue, à l'état sauvage, et bien que Giovanni l'eut sauvé, le Pokemon avait été très loin de lui faire confiance. Giovanni avait subi bien des morsures et des griffures avant que Persian ne s'attache à lui. Depuis, le Persian avait toujours été le Pokemon préféré de Giovanni, et en avait fait son symbole.

Mais si Persian était beau et digne, Méga-Persian l'était deux fois plus. Il avait la taille d'un lion, une crinière à leur image, de très longues moustaches, et des pattes et griffes bien plus développées. Le haut de sa tête était sombre, et sa fourrure beige cachait une seconde gemme rouge sur son ventre, en plus de celle sur sa tête qui avait doublé de volume. Giovanni l'avait rarement fait méga-évoluer, et n'avait jamais combattu avec lui. Il était son atout, son joker. Ceci dit, Giovanni n'avait aucunement l'intention de partir d'ici sans ses autres Pokemon. Enfin, juste son équipe du moins. Des Pokemon, il en avait des centaines, mais c'était avec ses six Pokemon fétiches qu'il combattait quand il le devait, comme du temps où il tenait encore l'arène de Jadielle. Venamia, qui n'avait que faire des Pokemon, ne comptant que sur sa propre force, avait du les laisser à la base.

- Trouvons les autres, et partons d'ici, dit Giovanni à son Pokemon.

Giovanni aurait bien aimé rester pour voir jusqu'où la loyauté des hommes du Quartier Général se situait, mais ça aurait été prendre trop de risques. Il ne devait compter que sur lui-même et sur ses Pokemon. Comme au tout début... Comme il l'avait prévu, le Quartier Général était relativement vide, mais le R noir de la GSR avait désormais remplacé les bannières personnelles de Giovanni. Il n'osa pas se risquer à entrer en contact avec les sbires qu'il voyait ; ils ne le connaissaient pas, et ça pouvait être autant des fidèles de Venamia que de bons Rockets. Par contre, il ne mit pas longtemps à trouver quelqu'un qu'il connaissait ; sa secrétaire personnel, Matori, qui errait sans but dans le grand hall. Giovanni lui passa par derrière, lui mit la main sur la bouche pour ne pas qu'elle hurle, et l'amena avec lui dans une petite remise. Quand la femme à lunette vit son kidnappeur, ses yeux s'agrandirent d'ébahissement.

- B-boss ?

- J'ai pas pris le temps de me coiffer, mais oui.

- Je... je ne comprends pas. Lady Venamia a dit que vous nous aviez abandonné et que vous aviez fui à l'étranger, lui laissant le commandement...

- Ah, c'est ce qu'elle vous a raconté ? Et vous avez gobez ça, alors que vous avez vu son armée de GSR nous assiéger y'a quelques jours à peine ?

- Vous aviez disparu, et monsieur Vilius était avec Venamia... fit Matori, penaude. Il a dit...

Giovanni lui fit signe de se taire.

- Qu'importe ce qu'a dit mon scélérat de fils. Venamia me retenait prisonnier dans mes propres murs, mais j'ai décidé d'aller prendre l'air. Vous savez où ils ont mis mes Pokeball ?

- Personne n'a touché à votre bureau, monsieur. Elles doivent y être.

- Fort bien. Je vous suis.

En tant que secrétaire du Boss, c'était Matori qui avait toujours les clés sur elle. Ils firent attention à ne croiser personne jusque là, même si Giovanni dut assommer deux GSR en chemin. Une fois dans son bureau, il constata que rien n'avait bougé, en effet. Venamia était sans doute trop occupée pour imposer sa marque à cet endroit, mais ça n'allait pas tarder. Giovanni ouvrit le second tiroir en partant d'en bas de son bureau, retira le double fond, et posa son doigt sur le détecteur d'empreinte digitale. Un bip, et six petites trappes s'ouvrirent, révélant les Pokeball. Celle de Persian, et ses cinq autres Pokemon Sol dont il se servait pour l'arène autrefois.

Dans une vieille étagère, il dénicha son ancienne ceinture de dresseur, qu'il avait porté il y a des décennies. Il se changea également. Son costume orange était un peu trop voyant et reconnaissable, et puis, il n'était plus le Boss, après tout. Son ancienne tenue de dresseur ne lui allait plus, mais il prit les vêtements les plus passe-partout qu'il avait pu trouver - qui étaient quand même de très haut de gamme. Il se trouverait autre chose plus tard. Ce n'est que lorsqu'il eut terminé que l'alarme sonna.

- Tiens, on a remarqué mon absence, remarqua Giovanni. Je suis étonné qu'ils l'aient activé. À vous croire, seuls les GSR savent que j'étais prisonniers.

Ce serait en effet gênant pour la GSR de demander aux sbires du Quartier Général que le Boss était prisonnier et s'est enfui, mais ils devaient préférer ça plutôt qu'annoncer à Venamia que Giovanni s'était fait la malle.

- Persian, le mur, demanda Giovanni.

Méga-Persian utilisa son Rayon Gemme sur le mur du bureau, créant un trou de taille conséquente qui donnait au dehors. Le grand portail métallique qui concluait les murs de la base était en train de se refermer, comme à chaque fois que l'alarme sonnait, mais ce n'était pas un problème. Même si cette fois, Méga-Persian ne pourrait pas éventrer cette épaisseur de métal, Giovanni comptait sur son Rhinastoc, qui pouvait défoncer tout et n'importe quoi.

- Bien, j'y vais. Prenez soin de vous, Matori.

- Boss, laissez-moi venir avec vous ! Ou plutôt, reprenons le QG à la GSR. Beaucoup sont ceux qui sont mécontents de la façon dont Venamia dirige les choses. Ils se rallieront à vous !

- Et après quoi ? On attend entre nos murs que Venamia revienne nous assiéger ? Non, très chère. Venamia a gagné, pour le moment du moins. Mais le temps reviendra où les Rockets loyaux devront se battre. Restez ici et faite mine de servir le nouveau régime. Puis attendez. Guettez un signal. Le moment venu, Estelle se soulèvera. Je compterai alors sur vous.

Matori se mit au garde à vous. Ce fut la plus belle image que Giovanni put emporter avec lui en quittant le Quartier Général.


***


La priorité pour Giovanni était de mettre la plus grande distance entre lui et la GSR, ce qui signifiait qu'il devait éviter les grandes villes qui étaient toutes fortement gardées. Giovanni passa les quatre jours suivants sur les routes de campagnes, à dormir dans des auberges miteuses, des grottes ou encore à la belle étoile, avec pour seule compagnie ses Pokemon. Très loin du confort auquel il avait été habitué en tant que Boss et l'un des hommes les plus riches de la planète, mais ça ne lui était pas désagréable. Il se souvenait, plein de nostalgie, de ses jeunes années de dresseur Pokemon, où ce mode de vie avait été son quotidien. Un homme ne devait jamais oublier comment vivre à la dure.

Quand Giovanni atteignit une ville de taille correcte, mais pas trop pour ne pas tomber sur des patrouilles GSR chaque minute, il voulut s'acheter une tenue de dresseur, pour passer encore plus inaperçu, mais, ironie de la chose, il se rendit compte qu'il n'avait pas d'argent sur lui. Il n'avait pas pensé à amener sa carte bancaire, et de toute façon, à l'instant où il aurait payer avec ou qu'il aurait effectuer le moindre retrait, nul doute que Venamia aurait connu sa position à la seconde.

Bah, tant pis. Comment avait-il fait jadis, quand il était un adolescent sur les routes de la région ? Comme tout bon dresseur : des combats Pokemon. Les dresseurs se laissaient facilement tenter à parier de l'argent sur leurs combats. Bien sûr, Giovanni n'avait pas un centime, mais il n'en avait pas besoin. À moins de tomber sur un Maître Pokemon qui passait par là par hasard, il ne risquait pas de perdre contre ces pequenauds de la campagne qui se battait exclusivement avec des Pokemon Normal, Vol ou Insecte.

Au bout de trois combats, il avait réuni une somme satisfaisante pour pouvoir se changer. Une tenue de dresseur bon marché, mais parfaite pour les longs voyages. Giovanni se regarda dans un miroir. Avec sa barbe de plusieurs jours, ses cheveux qui avaient poussés, mal coiffés, et sa défroque, il était impossible de reconnaître en lui le Boss de la Team Rocket. Satisfait, il fut enclin maintenant à passer devant des GSR sans laisser paraître la moindre inquiétude. Quand l'un d'entre eux l'avisa pour un contrôle de routine, Giovanni était serein. Il s'était même inventé un faux nom pour l'occasion.

- Nom et métier, exigea de savoir le GSR.

- Sammy Urdain, dresseur de Pokemon, répondit Giovanni sans hésitation.

Un nom qui aurait pu être le sien. Sammy avait été le diminutif qu'utilisait son père, Samuel Chen, durant sa jeunesse, et Urdain était le nom de famille de sa mère Urgania.

- Vos papiers.

- Euh... mes papiers ? Demanda Giovanni, perplexe.

- Vous êtes dresseur vous dites ? Vous devez avoir un Pokedex qui confirmera votre identité.

La gaffe. Giovanni se serait donné des gifles. Le Pokedex du dresseur... comment avait-il pu oublier un truc pareil ?

- Euh... eh bien... on m'a volé mon Pokedex avant-hier. Un gamin à l'air mauvais, au nord d'ici. J'ai fait une déposition au poste de police.

La plupart des GSR se seraient contentés de cette explication, mais manque de bol, Giovanni venait de tomber sur un adepte des procédures.

- Dans ce cas, il nous faut nous rendre au Centre Pokemon le plus proche, et y vérifier votre nom dans la banque de données des dresseurs. Veuillez me suivre je vous prie.

Giovanni était en train d'évaluer ses chances de sortir ses Pokemon et d'engager le combat. Les GSR n'étaient pas très nombreux ici, il pourrait sans nul doute s'échapper, mais ça attirerait l'attention et son signalement serait lancé. Pas terrible comme solution. Pourtant, dès que ce GSR verrait que le nom de Sammy Urdain ne figurait sur aucun registre de dresseurs, ce serait la détention immédiate jusqu'à éclaircissement de son identité.

- Tiens, Sammy ? Que fais-tu là, grand nigaud ! Lança une voix.

Giovanni et le GSR, tous les deux surpris, tournèrent la tête. Une vieille femme qui marchait avec une canne, que Giovanni ne pensait pas connaître, l'apostropha comme s'il était un vieil ami.

- Alors, tu as pu récupérer ton Pokedex ? Demanda l'ancêtre. Quelle tête en l'air tu fais, je te jure... Te laisser chaparder de la sorte, à ton âge ?! Et voilà que tu importunes nos bons GSR maintenant ? Laisse-le donc avec tes problèmes, ils ont plus sérieux à s'occuper !

Giovanni était perdu. Pourquoi cette vieille lui parlait ainsi et corroborant son récit ? Et qui était-elle, par Arceus ?

- Vous connaissez cet homme, madame ? Demanda le GSR.

Le temps déférant qu'il avait utilisé indiquait que lui, il semblait savoir qui était cette femme, et qu'elle n'était pas de la dernière importance.

- Oui oui, baratina la vieille en agitant sa canne. Un ami dresseur. Pas bien doué, je vous l'accorde, et terriblement nigaud, comme je ne cesse de lui rappeler. Figurez-vous, mon bon, qu'une fois, en plein combat officiel d'arène, il a lancé sur le terrain une Pokeball vide. Je vous dis pas la honte...

Giovanni fronça les sourcils. Effectivement, une fois, il avait fait bien ça. C'était lors de son tout premier match d'arène, qand il avait été envahit par le tract. Mais comment diable cette vieille le savait-elle ? Cette dernière continua à noyer le GSR sous ses babillages incessants d'anecdotes, à tel point que le soldat, excédé, fit :

- Bon, y'a pas de problème alors. Veuillez circulez je vous prie.

- Bien le revoir, bon monsieur, le salua la vieille dame. Allez, viens par là, Sammy.

Elle agrippa Giovanni par le bras et l'entraîna avec elle. Elle avait encore de la poigne pour son âge, cette vieille.

- Nom d'un chien, mais qui êtes-vous ?! S'exclama Giovanni. Pourquoi vous m'appelez ainsi ?

- N'est-ce pas le nom que tu t'es choisi ? Je suis vieille, mais pas encore sourde, jeune crétin. J'ai entendu l'histoire que tu essayais de faire gober à ce GSR. Sans moi, t'étais bon pour qu'il t'embarque. Mais depuis qu'ils savent que je suis venu dans cette ville, les GSR essaient de m'éviter. Cette gamine de Venamia leur a donné des ordres précis pour éviter d'offenser les dresseurs célèbres de Kanto.

- Dresseur célèbre... Moi, je vous connais pas.

- Tss, et c'est moi qui ait presque quatre vingt-ans, hein ? T'as perdu la mémoire en même temps que ta Team Rocket, petiot ?

Petiot... Il n'y avait qu'une personne qui l'avait jamais appelé ainsi. Et justement, c'était cette même personne qui avait assisté à son premier match d'arène.

- M-maîtresse Agatha ? Fit-il, incertain.

- Ah, tiens, il s'en souvient d'un coup ! Tu as toujours été lent à la détente...

- Je ne vous ai plus vue depuis plus de quinze ans, protesta Giovanni.

Oui, et à l'époque, bien que déjà âgée, elle avait encore les cheveux blonds et se tenait parfaitement droite. Rien à voir avec la vieillarde voutée et ridée devant lui. Agatha le fusilla du regard.

- Tu insinues que j'ai tant changé en quinze ans ? J'ai gagné en sagesse, c'est tout ! Toi, en revanche, tu as l'allure d'un vieux SDF.

Giovanni l'écouta rouspéter en se remémorant le passé. Agatha Kikuko avait été l'une des plus puissantes dresseuses de Kanto, en son temps. Elle a régné dans le Conseil des 4 durant des décennies, avant de prendre sa retraite il y a quinze ans, suite à une sale affaire dans laquelle elle avait été impliquée. Mais avant cela, elle avait été, dans sa jeunesse, une rivale du professeur Chen, et une amie d'Urgania, la mère de Giovanni. Quand Chen et Urgania ont fondé la Team Rocket - avant même la naissance de Giovanni donc - elle en a fait partie durant quelques années. Quand Giovanni avait débuté sa carrière de dresseur, c'était Agatha qui l'avait entraîné et initié à la stratégie. Elle avait été un peu comme une tante pour lui. Une femme que Giovanni respectait profondément, et l'une des raisons qui faisait qu'il n'avait jamais osé s'en prendre directement à la Ligue Pokemon.

- Qu'est-ce que vous fichez dans cette ville paumée ? Voulu savoir Giovanni.

- Je vais là où mes pas m'entraînent. J'ai passé l'âge d'avoir une destination en tête. Je voyage, je rencontre des gens, des Pokemon, et je fais quelques combats de temps en temps. Voilà comment je veux finir ma vie. Une chance pour toi que je passais par là, et que je t'ai reconnu, malgré ton accoutrement et tes cheveux gris.

- Oui... merci du coup du main.

- Je m'étais laissé dire que tu étais peut-être mort, poursuivit Agatha. La GSR fait tout pour le cacher, mais tout le monde sait qu'elle a orchestré un Coup d'Etat contre toi.

- Venamia voulait que je la légitimise. Elle ne m'aurait pas tué... du moins pas avant que je le fasse. J'ai décidé de ne pas lui donner l'occasion de me torturer.

- Tu es vraiment passé pour un idiot doublé d'un innocent, mon petiot... C'est ta passivité pendant que Venamia se défoulait sur Igeus qui a provoqué ta chute. Tu aurais dû choisir un camp. Soit Venamia, soit Igeus, mais choisir et te mettre à l'abri. Ton inaction a fait de toi le parfait crétin à décaniller ! Par les cieux, tu es autant un nigaud que ton père !

Giovanni ne répliqua pas. Ils étaient peu, ceux qui pouvaient le réprimander de la sorte sans rien craindre, et Agatha en faisait partie. Giovanni s'était fait traiter de tous les noms avec elle, maintenant, il n'en prenait plus nulle offense.

- Je m'étonne que vous m'aidiez, maîtresse Agatha, dit Giovanni. Vous n'avez jamais été en bon terme avec la Team Rocket depuis que vous l'avez quitté.

- À ma connaissance, c'est toi que j'ai aidé, pas la Team Rocket, répliqua Agatha. Et puis, si t'aider à prendre le maquis peut faire attraper de l'urticaire à cette folle gamine de Venamia, ça ne me dérange pas outre mesure. Comment as-tu pu laisser cette fille s'accaparer autant de pouvoir ? Es-tu si stupide, par Arceus ? Pourquoi je pose la question... bien sûr que tu l'es ! Attends, laisse-moi deviner ? Tu lui faisais peut-être confiance parce qu'elle est la fille de ce gamin de Tender, et qu'elle te le rappelait ? Ah, tu as toujours été bien trop sentimental pour diriger une organisation comme la tienne, mon petiot.

- Hegan n'avait rien à voir là dedans, se défendit Giovanni. Et je n'ai jamais fait confiance à Venamia, mais je n'ai pas pu empêcher son ascension. Tout cela a été orchestré par mon fils Vilius pour qu'elle l'aide à prendre ma place le moment venu, et...

- Et désormais, il se retrouve autant nigaud que toi, acheva Agatha. Ton idiot de fils pensait pouvoir se servir de cette fanatique pour son propre compte ?! Par Arceus, vous autres les Chen, vous n'avez vraiment rien dans la caboche !

Giovanni commença à s'impatienter. S'il laissait Agatha continuait, elle l'insulterait, lui et sa famille, jusqu'au lendemain.

- Je dois y aller, maîtresse. Merci de m'avoir aidé.

- Qu'est-ce que tu racontes, petiot ? Le seul endroit où tu vas aller maintenant, c'est la maison que je loue dans cette ville. Oh, rien de bien luxurieux, mais une vieille comme moi n'a pas de grands besoins... Tu vas prendre un bain et te nourrir convenablement.

Giovanni hésita. Certes, un bain et un repas ne seraient certainement pas de refus, mais il ne faisait pas entièrement confiance à Agatha. La vieille avait toujours été gentille et attentionné avec lui, à sa façon. Mais c'était aussi une femme roublarde qui n'avait pas son pareil pour poignarder les gens dans le dos. Et en effet, elle n'aimait pas la Team Rocket. Quand elle siégeait au coté de Peter Lance à la Ligue Pokemon, elle avait longuement milité pour que le Conseil des 4 débarrasse Kanto du grand R rouge, tout en manigançant ses propres projets dans le dos de ses collègues.

D'un autre coté, si elle lui avait vraiment voulu du mal, elle aurait laissé le GSR l'embarquer. Giovanni accepta donc, mais en se promettant de rester vigilant. Une fois chez elle, il se détendit. Il n'était jamais venu dans cette maison bien sûr, mais l'odeur et l'atmosphère qui s'en dégageait lui rappelait l'ancienne maison d'Agatha, dans laquelle il avait passé une grande partie de sa jeunesse. Il laissa son Persian sortir. Lui aussi avait longtemps habité chez Agatha avec Giovanni. La vieille femme jeta un bref coup d'œil au Pokemon qui alla ronronner à ses pieds.

- Eh bien, ton gros minou n'a visiblement pas eu les mêmes problèmes que toi à se rappeler qui j'étais.

- Persian a un sens olfactif bien plus développé que le mien...

- Comment ça ? Tu suggères que je sens bizarre ?! Va donc te décrasser, toi. Ton odeur rance me donne des nausées !

Obéissant humblement, Giovanni passa deux bonnes heures dans la salle de bain. Il se lava de fond en comble, mais ne toucha ni à sa barbe ni à ses cheveux. C'était le prix à payer pour son anonymat. Et puis, ça ne lui déplaisait pas non plus. Quand il revint dans le salon, Agatha avait déjà préparé un diner.

- Mange, lui ordonna-t-elle. Et raconte moi donc ce que tu as prévu maintenant. Un nigaud comme toi n'est sûrement pas du genre à partir se cacher à l'étranger et à y couler des jours paisibles...

Giovanni réfléchit. Agatha pourrait sans doute l'aider dans son projet.

- J'ai besoin de voir ma mère. Vous savez où elle est, maîtresse ?

Agatha eut l'air franchement surprise. Puis la colère, et même la peur firent place à la surprise.

- Qu'est-ce que tu racontes ? As-tu perdu la raison ? Ta mère ?!

- Elle est la seule qui pourrait m'aider. C'est elle qui m'a donné la Team Rocket. Elle saura peut-être comment faire pour la récupérer, ou alors, me dire en quoi elle doit changer.

Agatha le dévisagea gravement, et s'assit devant lui.

- Tu dois être bien désespéré pour placer tes espoirs en Urgania. Tu n'as jamais couru après elle. Tu ne lui as jamais rien demandé. Et elle n'a jamais rien attendu de toi...

En effet, c'était le cas de le dire. Urgania Chen n'avait pas spécialement été une mère modèle. Elle n'avait jamais montré grand intérêt pour son fils unique. Tandis qu'elle dirigeait la Team Rocket, elle avait laissé sa garde à certains de ses subordonnés, ou quelques uns de ses vieux amis, comme Agatha. Quand Giovanni est entré dans la Team Rocket, elle n'avait fait que se servir de lui, mettant de nombreuses fois sa vie en danger pour ses propres intérêts. Urgania... non, Madame Boss n'a jamais aimé personne à part elle-même. Elle aurait été capable de sacrifier tous ceux qu'elle connaissait pour ses intérêts. En cela, elle faisait beaucoup penser à Venamia, si ce n'était qu'Urgania était bien plus terrifiante.

- Mère se fiche peut-être de moi, dit Giovanni, mais j'ose espérer qu'elle accorde encore un peu d'intérêt à l'organisation qu'elle a elle-même fondée.

- J'en doute, répondit Agatha. Urgania se servait de la Team Rocket pour des objectifs plus grands. Pourquoi penses-tu qu'elle te l'a donnée alors qu'elle aurait très bien pu continuer à rester Madame Boss ? C'est parce qu'elle avait tiré tout ce qu'elle pouvait de la Team, et qu'elle ne lui était plus d'aucune utilité.

La vieille dame attrapa un de ses cookies, mais ne le mangea pas. Elle le fit tourner sur la table, perdue dans ses lointains souvenirs.

- Urgania était mon amie, quand nous étions gamines. Je l'ai vu s'enticher de ce nigaud de Chen. Je les ai suivi tous les deux dans la Team Rocket. C'était « jeune et cool » à l'époque, comme on disait. Un rassemblement des meilleurs dresseurs de Kanto, qui se donnaient de grands airs pour intimider les autres, et qui collaboraient pour dénicher des Pokemon rares. Rien à voir avec ce qu'elle est devenue ensuite, mais passons... Déjà à l'époque, avant même que tu naisses, je commençais à sentir cette obscurité en elle. Elle faisait mine d'aimer Samuel, mais ce n'était que du désir et de la possessivité. Elle faisait mine de se soucier des autres membres, mais elle ne faisait que se servir d'eux. C'est pour ça que je suis partie, et que Chen en a fait de même alors qu'Urgania était enceinte de toi.

Une pause, puis Agatha conclut :

- Ta mère est le mal incarné, petiot. J'ignore ce qu'elle veut ni même ce qu'elle est réellement, mais une chose est sûre : elle ne veut aucun bien à ce monde.

Giovanni, qui avait servi sous les ordres d'Urgania durant des années, ne pouvait pas tellement la contredire. Après tout, c'était sa mère qui avait indirectement tué la première femme de Giovanni, en pratiquant sur elle cette expérience sur le génome Pokemon, qui a crée le puissant hybride qu'était Estelle. Urgania avait toujours été obsédé par la recherche sur les gènes Pokemon, et plus particulièrement sur ceux de Mew, le tout premier Pokemon ayant vu le jour sur Terre. Giovanni, sur son insistance, avait pris le relai une fois devenu Boss, jusqu'à que ces recherches soient totalement abandonnées suite au fiasco total du projet Mewtwo.

- Qu'importe, dit cependant Giovanni. Je dois la voir. Vous devez savoir où elle se trouve, non ? C'était vous les yeux et les oreilles du Conseil des 4. La rumeur disait que vous travailliez en secret comme espionne, informatrice et même exécutrice pour le compte de l'Ordre G-Man. Votre surnom est remonté jusqu'à moi : la Main Fantôme.

- C'est loin, tout ça. Je n'ai fait qu'aider un peu Peter à l'occasion ; ma légende et ce stupide nom se sont forgés tous seuls. J'ai arrêté d'espionner qui que ce soit depuis que j'ai quitté le Conseil des 4.

- Mais vous n'avez pas répondu à ma question, remarqua Giovanni. Ça veut dire que vous savez quelque chose.

Agatha le fusilla du regard, mais Giovanni ne céda pas. Agatha soupira.

- Peter m'a en effet demandé d'en apprendre plus au sujet d'une femme mystérieuse qui aurait élu domicile au château de Tishgard. C'était il y a une vingtaine d'années...

- Tishgard ? Répéta Giovanni. Cette région pleine de ruines et de lacs dans le nord ? Il n'y a rien là-bas, à part des guides touristiques et des archéologues...

- C'est ce que je m'étais laissée dire, mais j'ai quand même été vérifié. Et en effet, à la place des ruines de l'ancien château, il y avait une espèce de gigantesque palais tout neuf, qui semblait fait de cristal. Je n'avais jamais rien vu de pareil. Les rares peuples nomades qui vivaient dans le coin l'avaient nommé le Palais de l'Aurore, car à chaque lever de soleil le matin, il brillait de mille feu. Mais aucun d'entre eux n'avait su me dire comment une chose pareille a-t-elle pu être construite sans que personne ne le remarque. Je ne suis pas entrée. Le palais était gardé nuit et jour par des dizaines de Pokemon. Mais j'en ai en capturé un, et grâce à l'hypnose de mon Ectoplasma, j'ai pu fouiller dans ses souvenirs. Ce Pokemon était certain de servir Suicune, le Pokemon Légendaire.

- Le Vent du Nord ? S'étonna Giovanni. Qu'est-ce qu'il vient faire là-dedans ?

- Ton réseau d'espions de la Team Rocket laisse à désirer si tu l'ignores... Depuis quelque années, les rapports se sont multipliés ci et là dans le monde. Ils affirment que le Pokemon Légendaire Suicune, à la tête d'une armée de Pokemon, attaque sans merci tous les humains qui auraient le malheur de maltraiter les Pokemon. Ce sont des raids rapides et sauvages, généralement contre des organisations ou des groupes qui exploitent et brutalisent les Pokemon.

- Jamais entendu parler, en effet, avoua Giovanni. Suicune n'a jamais osé s'en prendre à ma Team Rocket.

- Il devait avoir ses raisons. Ou alors, son armée était encore trop faible pour défier la Team Rocket. Quoi qu'il en soit, Suicune s'est en quelque sorte dressé comme le défenseur des Pokemon opprimés par les humains.

Giovanni haussa les épaules.

- Grand bien lui fasse. Mais quel est le rapport avec ma mère ?

- Eh bien, il semblerait qu'elle travaille d'une façon ou d'une autre avec Suicune. J'ai espionné l'extérieur du Palais de l'Aurore pendant des jours, et une fois, j'ai aperçu de loin une jeune femme aux cheveux violets. Bien sûr, ça ne veut rien dire, sauf que celle-ci, on pouvait voir de très loin ses yeux rouges.

Giovanni hocha la tête. Madame Boss avait effectivement des yeux rouges qui semblaient surnaturels. Elle avait été célèbre pour ça, au tout début de la Team Rocket.

- Mais que diable viendrait faire ma mère dans cette histoire de libération des Pokemon ? Je n'arrive pas à imaginer Urgania Chen en défenseuse des droits des Pokemon...

- Urgania a ses projets que seule Urgania connait, dit Agatha avec sagesse. Si elle fait cause commune avec Suicune, c'est qu'elle droit y trouver son compte. Quoi qu'il en soit, tu ne pourras pas la voir. Ce Palais de l'Aurore est formidablement bien gardé, et les Pokemon ne laissent entrer personne. Comme la région de Tishgard n'a plus aucun gouvernement, personne se s'est soucié d'aller voir ce qui se passe dans ce palais, et quand l'Ordre G-Man a appris qu'il était contrôlé par des Pokemon, il a abandonné. Ce n'est pas du genre des G-Man d'entrer en conflit avec les Pokemon.

Giovanni mis ses pensées en ordre, réfléchit un moment, puis hocha la tête et se leva.

- Merci pour ces informations, maîtresse. Et pour le repas. Il se peut que je revienne une fois que j'en aurai terminé là-bas.

- Tu as entendu ce que je t'ai dit, nigaud ? Il est impossible de pénétrer dans ce palais !

- J'ai entendu. Mais je peux peut-être contacter ma mère sans avoir à entrer là-dedans. Et puis, je veux voir ce palais de mes propres yeux. Ce n'est pas comme si j'avais quelque chose de mieux à faire, actuellement...

Agatha se prit la tête entre les mains.

- Arceus me vienne en aide, pourquoi tous Chen ne sont rien d'autre que des imbéciles ? Et pourquoi les ai-je tant côtoyés dans ma vie ? Je maudis le jour où, soixante-dix ans plus tôt, je suis entrée dans ce laboratoire pour y chercher mon premier Pokemon. Juste une heure plus tôt ou plus tard, et je n'aurai pas rencontré ce nigaud de gamin qui a attendu avec moi.

Giovanni s'empressa de sortir pour éviter d'entendre Agatha radoter à propos de Samuel Chen. La vieille Agatha n'aimait rien de plus que de raconter des anecdotes à son propos datant de plus d'un demi-siècle. Giovanni en avait assez soupé. Le plus ironique, c'est qu'Agatha aurait pu être la mère de Giovanni. La relation entre Samuel Chen et Agatha Kikuko était compliquée - quelque chose se situant entre la haine et l'amour. Rivaux, amis, ennemis, ils avaient aussi été amants, avant que Chen ne rencontre Urgania. Agatha adorait dire du mal de Chen, mais Giovanni pensait qu'au final elle regrettait de se l'être laissé voler par Urgania. En quittant la maison, Giovanni songea qu'il aurait mille fois préféré avoir Agatha comme mère...


***


Pour voyager jusqu'à Tishgard, il fallait bien entendu prendre l'avion. Et comme tous les aéroports de Johkan étaient étroitement contrôlés par la GSR, Giovanni avait fait en sorte de se créer sa nouvelle identité dans les règles. Il avait volé un Pokedex à un jeune dresseur, et l'avait reprogrammé pour qu'il devienne le sien, ou plutôt, celui de Sammy Urdain. Les Pokedex étaient très sécurisés, et les reprogrammer n'était pas à la portée de tous. Mais Giovanni connaissait bien ces engins. Ou peut-être avait-il ça dans le sang ; après tout, c'était son père, le professeur Chen, qui avait quasiment conçu le tout premier modèle.

Ainsi donc, officiellement, il était Sammy Urdain, originaire de Jadielle, qui avait abandonné son métier de cadre commercial il y a deux ans pour se consacrer uniquement aux Pokemon et à voyager à travers les régions. Il se rendait aujourd'hui à Tishgard pour y étudier les Pokemon locaux et peut-être en attraper quelques uns. Le GSR au poste de contrôle ne trouva rien à redire à son histoire. Le Pokedex qu'on lui avait présenté possédait bien le nom et la photo du voyageur, et Tishgard était une région vide du moindre intérêt stratégique et militaire. Giovanni put donc embarquer sans problème.

Ça faisait un moment qu'il n'avait plus pris l'avion public, lui qui avait une bonne dizaine de jet privé à son nom. Une fois à Tishgard, il fut débarrassé de la présence constante des sbires de Venamia partout autour de lui. Il n'y avait guère de grandes villes dans cette région, et aucune sorte de pouvoir politique. Les gens étaient autosuffisants. Ils vivaient du tourisme et de la pêche. En des temps reculés, Tishgard avait été le fief d'une grande civilisation. Un grand royaume humain s'y trouvait, gouverné par le roi Vhordan ; un des plus grands souverains de l'Histoire, à qui on attribuait des pouvoirs extraordinaires.

Ce royaume utopique n'avait perduré que quarante ans, mais avait laissé de nombreuses traces dans le monde, laissant des vestiges de son existence ci et là, notamment du côté des légendes concernant les Zan. C'était à Tishgard qu'il en restait le plus, en dehors bien sûr de la région Pertinia. Un endroit parfait pour les férus d'histoire, de légendes et les archéologues. Giovanni commanda un chauffeur pour qu'il le mène jusqu'au Palais de l'Aurore. Mais en entendant cette destination, le coursier fit une bien grosse grimace.

- Pouah question qué y aille là-bas, señor, fit-il avec un accent terrible. Muchos Pokemon dangereux, que si ! Ils vouloir pas los humanos chez eux, señor. Puis plus de ruines là-bas. Los Pokemon ont y tout détruire.

- Je ne suis pas venu ici pour les ruines, mais bien pour les Pokemon. Amenez-moi aussi près que vous pouvez.

Le conducteur haussa les épaules.

- Vous vouloir vous suicider, señor. Pour capturer Pokemon, muchos endroit plus sûr, que si. On ne chasse pas los Pokemon du señor Suicune, el Viento del Norte. Pas si on tient à la vie. Mais pas mon problemo.

Après deux heures de route, le chauffeur le lâcha donc en plein milieu d'une sorte de grand oasis, avec pour indication que le Palais de l'Aurore se trouvait à une heure de marche à pied vers le nord. Giovanni remarqua vite qu'il était le seul humain dans le coin. Pour assurer sa protection, il sorti ses six Pokemon, qui avancèrent autour de lui comme des gardes du corps.

Giovanni s'attendait à tomber sur de nombreux Pokemon qui voudraient sa peau d'ici au Palais de l'Aurore, mais bizarrement, à part quelque petits insignifiants, il n'en croisa aucun. Étaient-ils tous réunis dans ce Palais de l'Aurore ? Si oui, pourquoi diable son conducteur l'avait posé si loin ? Mais Giovanni compris bien vite pourquoi il n'avait rencontré aucun Pokemon. Passé une petite colline, il tomba sur une scène de désolation. Tous les arbres et la végétation alentour avaient brûlé. Le paysage était sans dessus dessous, comme si une bombe nucléaire avait frappé. Et, au sol, il y avait des centaines de cadavres de Pokemon, parfois en plusieurs morceaux.

Giovanni n'était pas spécialement quelqu'un d'impressionnable, mais là, même lui ne put se retenir de vomir. L'odeur et la vue étaient atroces. Qu'est-ce qui avait pu provoquer une chose pareille ? Les Pokemon s'étaient-ils entretués ? Était-ce une attaque d'humains ? Persian, qui avait à peine frémit devant ce spectacle, se hérissa tout d'un coup et souffla. Les cinq autres Pokemon de Giovanni se tendirent eux aussi, soudain sur leur garde.

- Que se passe-t-il ? Demanda Giovanni.

Persian dévisageait le ciel. Une espèce de traînée bleue arrivait vers eux, et à grande vitesse, tel un avion à réaction. Giovanni plissa les yeux. Ce n'était pas un missile ou une attaque quelconque, mais un Pokemon. Un Pokemon bipède, grand, entouré d'une sphère bleue brillante. Quand Giovanni le reconnu, des souvenirs pas très joyeux affluèrent dans son esprit. Le Pokemon, humanoïde, devait faire dans les deux mètres, et possédait une immense queue. Sa peau était grise, il avait deux excroissances semblables à des cornes sur le crâne, et un cordon reliant sa tête au reste de son corps. Des yeux violets où se reflétaient la rage et la puissance se posèrent sur Giovanni, qui se dit que sa dernière heure venait d'arriver.

- Toi... fit la voix psychique et résonnante de Mewtwo. Je te revois enfin après toutes ces années, humain.

Des années, oui. Quinze ans maintenant, depuis que Giovanni avait dirigé ce projet de clonage de Mew. Des chercheurs, qui travaillaient jadis pour sa mère, avaient fait une découverte fascinante dans la Jungle X : un poil fossilisé de Mew, l'ancêtre des Pokemon, dont la race, qui occupait jadis toute la planète, ne comptait plus qu'un seul spécimen. Le clonage des Pokemon était bien sûr interdit, mais pouvoir redonner vie à cette espèce légendaire aurait été le plus grand accomplissement scientifique depuis l'invention de la Pokeball.

Mais Giovanni, à cette époque, était plus jeune et avide de pouvoir. Il ne s'était donc pas contenté d'un simple clone de Mew. Non, il voulait un clone amélioré, aux pouvoirs titanesques. Il avait crée le plus puissant Pokemon du monde, Mewtwo. Giovanni avait eut pour projet de s'en servir pour les intérêts de la Team Rocket. Mais Mewtwo s'était vite révélé incontrôlable, et avait fait exploser l'ancien QG de la Team Rocket en s'échappant. Giovanni avait eu de la chance d'y survivre.

Mewtwo avait fait par la suite parler de lui, en se créant plusieurs clones de Pokemon selon la méthode de la Team Rocket. Giovanni avait tenté d'en reprendre possession une année plus tard, avec l'aide de 009, mais avait échoué, et sa mémoire avait été effacé par les pouvoirs psychiques de Mewtwo. Ce n'est qu'après une longue thérapie qu'il avait pu se souvenir de ce damné Pokemon, en préférant l'avoir oublié à jamais. Il avait depuis compris qu'il ne pourrait jamais contrôler Mewtwo par la force, et avait renoncé à lui. Mewtwo, quant à lui, avait vécu caché tout ce temps avec ses camarades clones. Le voir ici, aujourd'hui, à Tishgard, au moment même où Giovanni voulait revoir sa mère, était une coïncidence propre à vous faire croire au destin.

- Mewtwo, dit Giovanni d'un ton calme. Tout ceci est ton œuvre ?

Le Pokemon génétique observa d'un œil froid les restes des Pokemon.

- Des laquais de Suicune, qui voulaient me recruter de force. Ils ont tenté de m'intimider en massacrant plusieurs de mes compagnons clones. Ils en ont payé le prix. Ils prétendent aider les Pokemon exploités, mais ne désirent au final qu'une reconnaissance de leur domination.

Son regard se reposa sur Giovanni.

- En fait, ils sont comme toi, humain. Encore que toi, tu ne caches pas tes ambitions derrière une vile hypocrisie. Que fais-tu là ?

Giovanni opta pour la prudence.

- Je voulais en savoir plus sur ce Palais de l'Aurore et sur ce que mijotais Suicune.

- Hum, ça, je peux te le dire moi-même. Il mijote d'entrer en guerre contre les humains, de les exterminer, puis de régner sur les Pokemon.

Giovanni eut un sourire ironique.

- Je vois. N'était-ce pas ton ambition aussi, il y a un temps ?

- Vu que l'image que j'avais des humains n'était basée que sur ta propre personne, c'était un souhait tout à fait légitime, répliqua Mewtwo. Mais Suicune lui foule cette terre depuis des millénaires, et il a toujours été un allié de la paix entre Pokemon et humains. Son comportement récent est bizarre. Voilà pourquoi je suis ici, dans cette région, depuis près de deux mois. Pour enquêter.

- Quel brave petit détective tu fais... Eh bien, je te laisse à ton enquête.

Il fit mine de s'éloigner, mais sentit bien vite une force invisible le retenir sur place.

- Tu pense que je vais te laisser partir, maintenant que je sais que ta Team Rocket est impliquée ? Demanda Mewtwo. Vous n'allez apporter qu'encore plus de chaos si vous vous frottez à Suicune.

- Tu ne suis plus les actualités de Johkan depuis que tu es ici ? Rétorqua Giovanni. La Team Rocket n'est plus à moi. Je suis seul.

Mewtwo se posa devant lui et plongea ses yeux violets dans les siens. Giovanni eut du mal à soutenir son regard, mais il fit un signe rassurant à ses Pokemon qui avaient l'air prêts de passer à l'attaque. Même toute l'équipe de Giovanni réunie n'avait pas l'ombre d'une chance face à Mewtwo.

- On dirait que tu ne mens pas, fit enfin le clone. Mais tu ne dis pas toute la vérité non plus. Tu n'es pas ici pour Suicune.

Inutile d'essayer de tromper Mewtwo. Ses pouvoirs psychiques étaient si poussés qu'il pouvait lire en vous comme dans un livre.

- Je cherche quelqu'un, avoua enfin Giovanni. Ma... génitrice. Elle serait liée, d'une façon ou d'une autre, à Suicune.

- Et tu la cherches pour...?

- Voir si elle peut m'aider à reprendre la Team Rocket, admit Giovanni avec un pauvre sourire.

Mewtwo hocha la tête, comme si tout cela était parfaitement logique.

- Je vois. L'humaine aux cheveux violets et aux yeux de braises est ta mère ?

Giovanni cligna des yeux.

- Tu la connais ?!

- Non, mais je la sens. Je la vois, grâce à mes pouvoirs. Ce n'est pas une humaine ordinaire.

- Non, concéda Giovanni. En effet.

Il aurait été difficile de dire l'inverse, quand on savait qu'Urgania Chen paraissait avoir toujours vingt ans alors que son propre fils était proche de la soixantaine.

- Son aura brille de très loin, mais elle est assombrie par des ténèbres indiscernables, poursuivit Mewtwo. C'est une ennemie des Pokemon, sans l'ombre d'un doute.

Giovanni chercha à se justifier.

- J'ignore dans quoi est impliqué ma mère, mais je sais qu'actuellement, il y a une menace bien réelle et imminente à Johkan. Tu as dû entendre parler de Lady Venamia non ?

- Aux dernières nouvelles, cette femme était sous tes ordres, riposta Mewtwo.

- Aux dernières nouvelles, elle m'a évincé du pouvoir pour se l'accaparer. En prenant le contrôle de Kanto, je voulais arriver à établir un gouvernement de coalition entre dresseurs et Rockets. Tu n'aurais pas approuvé, bien sûr, mais tu approuveras encore moins ce que Venamia compte faire. Ce n'est pas seulement la Team Rocket ou même Johkan qu'elle veut, mais le monde entier.

Mewtwo fit un vague geste de sa main à trois doigts.

- J'ai tourné le dos à l'humanité. Vos affaires de luttes de pouvoir ne me concernent en rien. Je n'ai même plus de haine envers toi ou ta Team Rocket. Je pourrai te tuer ici et maintenant pour tout ce que tu m'as fait, mais je n'en ferai rien. Mew m'a appris ce qu'était la paix. Si tu avais œuvré pour, tu ne serais pas dans cette situation.

Le visage de Giovanni se ferma. Pour une fois, il était en colère.

- J'ai tenté d'œuvrer pour la paix il y a quelques jours à peine, répliqua-t-il. J'y ai perdu ma plus jeune enfant, la Team Rocket ainsi que mon pouvoir. C'est facile de critiquer les autres quand soit même on ne fait rien. Tu es resté cloitré loin du monde, à vivre avec tes clones, sans te soucier de ce qui se passait. Où étais-tu, quand les hordes de vriffiens ont envahi Kanto avec pour projet de manger la totalité de ses Pokemon ? Où étais-tu, quand ce fou de Zelan voulait exterminer tous les Pokemon et ressusciter un ancien dieu maléfique ? Où étais-tu quand les Dignitaires ont battit une arme de destruction massive pour contrôler tout Kanto sous la menace et la peur ? Tu n'étais pas là, alors que tes pouvoirs auraient pu faire la différence et épargner bien des vies ! C'est ma Team Rocket qui a dû gérer toutes ces crises ! Alors, ne viens pas me donner de leçons, Mewtwo.

Le Pokemon génétique parut étonné de cette soudaine colère de Giovanni. Puis ses lèvres s'étirèrent en un sourire.

- Autant de sincérité de ta part me surprend, humain. Tu dis peut-être vrai. Je suis resté à l'écart des autres, ne me souciant pas de leur sort. À présent, je me réjouis de ta misère. Mais qu'y puis-je ? C'est toi qui m'a conçu ainsi. J'ai été crée pour le combat, pour la destruction. Toutes les fibres de mon corps me poussent à déchaîner mes pouvoirs sur tout et n'importe quoi. En vivant en paria, je n'ai fait que protéger le monde, à ma façon. Si j'interviens dans un conflit, je risque de l'aggraver. Ceci dit...

Il regarda le ciel, puis les Pokemon qu'il a tués en masse.

- Si tu impliques cette femme que tu dis ta mère dans ce qui se passe à Johkan, j'ai le sentiment qu'il n'en résultera rien de bon. Cette humaine est le mal, j'en suis sûr.

Agatha lui ayant dit quasiment la même chose, Giovanni était tenté de le croire.

- C'est possible, mais j'ai fais tout ce chemin, dit-il. Je ne repartirai pas les mains vides.

- Qui a dit qu'elles seraient vides ? Je vais revenir avec toi à Kanto, et voir de mes propres yeux la situation. Si je juge que cette Lady Venamia est pire que ne l'était ta Team Rocket, il se peut que je t'aide. J'ignore quels sont les pouvoirs de ta mère, mais avec moi, tu ne perdras pas trop au change.





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Image de Méga-Persian :