Poupées russes - KyoLes événements contenus dans ce bonus se déroulent une huitaine d'années après la mort de Cassy.- Monsieur Weidinger ?
Angus leva la tête du graphique qu'il était en train de consulter. Un scientifique pénétra dans son bureau, une pile de documents soigneusement agrafés à la main. Il les lui tendit et le jeune homme les parcourut rapidement du regard.
Il était le plus jeune employé que le Centre Météorologique d'Hoenn ait jamais connu. Agé de dix-huit ans, il avait obtenu un poste à la fin de ses études grâce à l'influence de ses parents, mais c'était à son intelligence qu'il devait d'être si rapidement monté en grade, au point de diriger tout un secteur.
Ses yeux s'écarquillèrent lorsqu'il consulta le relevé qu'on venait de lui apporter. Bien que l'individu face à lui soit plus vieux d'une quinzaine d'années, il était son supérieur et était donc tenu de lui demander des comptes si cela s'avérait nécessaire.
- Ces données sont erronées, constata-t-il d'une voix neutre. Ce n'est pas la première fois qu'un fort orage électrique éclate à proximité de Rivamar, mais si vous comparez avec les précédents, aucun d'entre eux n'a jamais pu atteindre une telle puissance.
- Ce n'est pas une erreur, monsieur. Nous avons contacté quelques-uns de nos collègues, à Sinnoh, et ils affirment qu'il se passe quelque chose d'étrange. L'atmosphère est encore saturée d'énergie, ce qui provoque des dysfonctionnements dans le système d'alimentation de la ville. Le générateur principal a déjà sauté à deux reprises, plongeant tous les quartiers dans les ténèbres.
Angus se gratta nerveusement le crâne, ce qui souleva des épis de ses cheveux blonds jusqu'alors impeccablement coiffé. C'était la première fois qu'il se retrouvait face à un cas de ce genre et cela l'étonnait.
- Je crois qu'il faut mener une petite enquête. Cette histoire me parait tout sauf naturelle.
- Nous avons songé qu'il pourrait s'agir d'un pokémon, mais nous en sommes arrivés à la conclusion qu'aucune espèce reconnue à ce jour n'était capable de produire une telle effusion d'énergie.
Le jeune homme esquissa un bref sourire, que son interlocuteur n'eut pas le temps de percevoir. Raikou et Electhor possédaient la puissance nécessaire pour provoquer un tel incident météorologique, néanmoins cela n'avait aucun sens. Depuis qu'Athéna était devenue l'Alpha, elle avait ramené la paix chez les légendaires.
- Nous ne sommes pas les seules que cela inquiète. La Championne d'Arène nous a contactés et elle nous a demandé d'envoyer l'un de nos hommes sur place au plus vite, afin d'essayer de résoudre le problème. Elle craint que cela ne provoque de graves problèmes en ville.
- La Championne d'Arène ? répéta Angus, l'air soudain plus distrait.
- Oui, je lui ai dit que j'allais en parler au chef, c'est-à-dire vous, et comme vous venez d'affirmer qu'il fallait enquêter, je vais immédiatement dépêcher deux...
- Inutile. Cette affaire doit être traitée avec le plus grand sérieux. Je vais me rendre personnellement à Rivamar. Cela me donnera l'occasion de revoir une vieille amie.
***L'avion d'Angus arriva en fin de matinée à l'aéroport d'Unionpolis, d'où il prit un taxi jusqu'à Rivamar, aux frais du Centre Météorologique. Il n'était pas revenu à Sinnoh depuis des années, depuis ses quatorze ans, si ses souvenirs étaient bons, néanmoins il aimait encore particulièrement cette région, qui avait été le témoin de ses nombreuses aventures avec la Confrérie.
L'air était si électrique, lorsqu'il atteignit la ville côtière, que ses cheveux se dressèrent sur sa tête et se mirent à grésiller, à l'instar des lampadaires qu'il croisait en longeant le trottoir de la grand-rue. Il n'y avait personne, dehors. Tous les habitants s'étaient réfugiés dans leur maison, là où ils se croyaient certainement à l'abri de cet étrange phénomène.
Angus n'avait jamais rien connu de tel. Cela ne pouvait pas être le fruit d'un simple orage, il y avait forcément quelque chose d'autre derrière une pareille stagnation d'énergie. Il ne s'étonnait désormais plus des pannes de courant dont la ville avait été victime : le générateur et ses auxiliaires devaient saturer.
Il ne perdit pas un instant de plus à étudier les environs déserts et prit plutôt la direction de l'Arène. Sa visite à Rivamar était tenue de commencer par là, ne serait-ce que par pure politesse.
Le bâtiment rectangulaire était situé sur les hauteurs de la ville, auxquelles l'on accédait par un système de ponts habilement construits et ornés de plusieurs centaines de panneaux solaires, nécessaires à l'alimentation énergétique totalement naturelle de la cité, bien qu'en cet instant elle n'ait guère besoin d'un surplus d'électricité.
Comme il arrivait aux horaires d'ouverture, les portes principales n'étaient pas verrouillées et elles coulissèrent sur son passage afin de le laisser pénétrer à l'intérieur. Il eut à peine mis un pied à l'intérieur, néanmoins, qu'une fillette, vraisemblablement âgée d'une douzaine d'années à peine, fondit sur lui.
- Monsieur, vous ne pouvez pas entrer. La Championne ne reçoit plus personne.
- Oh, ce doit être un malentendu, je ne suis pas dresseur.
L'enfant le scruta de la tête aux pieds. Il était soigneusement vêtu, avec une chemise en lin et un pantalon impeccable, au contraire de tous ces jeunes aventuriers en herbe qui parcouraient les routes en survêtement. Il ne comprenait pas comment elle avait pu le confondre avec l'un d'entre eux.
- Un problème ?
Une ravissante demoiselle à la longue chevelure blonde fit son apparition, dans l'encadrement de la salle de combat. Elle tenait une pokéball à la main, dans laquelle elle venait certainement de rappeler l'un de ses pokémon, car la sphère s'agitait légèrement, comme si la créature contenue à l'intérieur trépignait d'envie de ressortir.
Angus n'avait pas utilisé ses gants de combat depuis longtemps, et par conséquence les pouvoirs que lui offraient son glyphe, néanmoins il avait conservé un sens aigu du détail. Rien ou presque ne lui échappait.
- Bonjour, je suis Marissa, la seconde de mademoiselle Vargas.
- Enchanté. Angus Weidinger. Je suis envoyé par le Centre Météorologique d'Hoenn afin d'enquêter sur les perturbations climatiques.
Son interlocutrice le scruta à son tour avec insistance, avant de laisser éclater un petit rire, qu'elle s'empressa d'étouffer dans le creux de sa main. Ce n'était pas la première fois qu'Angus subissait ce genre de réaction puéril. Beaucoup de gens doutaient de ses capacités à cause de son jeune âge et il prenait un plaisir particulier à leur démontrer leurs torts.
- Nous nous attendions à un véritable professionnel, vous comprenez ? Pas à un... Un vulgaire stagiaire. C'est la prospérité de toute la ville qui est menacée. Quand le générateur lâche, plus rien n'est alimenté. Ni l'hôpital, ni les magasins, ni l'Arène...
- J'ai conscience des problèmes auxquels vous devez faire face et je m'appliquerai au mieux afin d'y mettre un terme.
- Etes-vous suffisamment qualifié pour...
- Angus !
La jeune femme n'eut pas l'occasion d'achever sa question qu'un cri sonore l'interrompit. Une porte s'ouvrit, qui devait certainement mener aux quartiers privés du bâtiments, et une rousse volcanique à la chevelure bouclée eut à peine le temps de pénétrer dans le champ de vision d'Angus que, déjà, elle se jetait dans ses bras.
- Bonjour, Tina. Je suis ravi de te revoir.
Il la pressa un instant contre lui avant de desserrer son étreinte. Elle n'avait presque pas changé, si ce n'était qu'elle semblait plus belle encore que dans son souvenir. Il se rappelait encore l'adolescente qu'il avait autrefois côtoyé, avec son nez retroussé clairsemé de petites taches et son menton légèrement pointu.
Il l'avait revue à plusieurs reprises, depuis la fin de leurs aventures, mais jamais assez pour songer à renouer le contact. Il déplorait d'ailleurs cela, lui qui avait toujours nourri une certaine inclination à l'égard de Tina.
- Vous vous connaissez ? s'étonna la seconde de l'Arène.
- Bien sûr. Ce garçon est l'un de mes plus proches amis, même si nous n'avons guère l'occasion de nous parler. Je ne savais d'ailleurs pas que tu travaillais au Centre Météo. Cela fait longtemps ?
- Une année tout juste.
- Je vois. Viens, suis-moi. Je vais te conduire dans mes appartements. Nous y serons plus à l'aise afin de discuter. Marissa, peux-tu te charger de fermer l'Arène ? Je t'en serais reconnaissante.
Elle entraîna Angus par la main dans un long couloir, avec sa vivacité et son tempérament chaleureux habituel. Ils ne s'étaient pas adressés la parole depuis des mois, pourtant il avait l'impression de ne l'avoir quittée que la veille. C'était certainement parce qu'il lui arrivait souvent de penser à elle.
Le chemin qu'ils suivirent les mena dans un petit salon accueillant, où le jeune homme découvrit sur la table basse un sac à dos à moitié rempli, prêt à recevoir le reste du bric-à-brac étalé sur le sofa. Il interrogea Tina du regard.
- Je m'apprêtais à partir. J'avais l'intention de mener ma propre enquête sur cette vague électrique qui déferle sur Rivamar depuis deux jours. Les dégâts sont devenus trop importants pour continuer à les ignorer.
Elle jeta pêle-mêle les objets qui trainaient encore à l'intérieur et invita Angus à prendre place à côté d'elle sur le canapé. Il attendit patiemment qu'elle ait tiré la fermeture éclair de son paquetage, avant de demander :
- De quoi s'agit-il, d'après toi ?
- Cela pourrait être n'importe quoi et je ne veux écarter aucune possibilité, raison pour laquelle j'ai contacté le Centre Météo. J'ai quand même des doutes sur une cause naturelle, alors j'ai également tenté de joindre Marion, à Fiore.
- Si tu en es parvenue à une telle extrémité, c'est que tu en es arrivée à une hypothèse identique à la mienne. L'oeuvre d'un légendaire.
- C'est à n'y rien comprendre ! protesta Tina. Nous avons été tranquille pendant huit ans. Lorsqu'Athéna est venue ici, elle...
La Championne s'interrompit. Il n'était pas aisé pour elle d'évoquer ce souvenir, puisqu'il correspondait à la dernière journée qu'elle avait passée avec Léa, avant de ne plus jamais la revoir. Elle prit cependant sur elle et poursuivit :
- Elle m'a assurée que nous n'avions plus rien à craindre, que la paix durerait et que notre seule mission, désormais, était de veiller sur les humains.
- En même temps, c'est bien ce que nous nous apprêtons à faire. Notre espèce est en danger et, s'il y a vraiment un légendaire derrière cette histoire, nous sommes les seuls à être en mesure d'intervenir. Que t'as dit Marion ? A-t-elle donné des consignes particulières ?
Puisqu'aucun nouveau glyphe n'avait fait son apparition depuis la mort d'Arceus pour remplacer ceux qui étaient tombés, pas même le dragon, c'était la Ranger qui assurait le commandement de la Confrérie. Elle exécutait sa tâche du mieux qu'elle le pouvait, ce qui n'était pas une mince affaire étant donné que ses confrères étaient tous disséminés dans l'ensemble des régions.
- Non. En fait, je n'ai pas pu lui parler. L'homme qui m'a répondu à la FSR m'a informée qu'elle était en mission et qu'il lui transmettrait mon message dès qu'elle rentrerait. Je lui ai demandé de me retrouver à Rivamar dans les plus brefs délais.
- Tu n'as pas tenté de joindre les autres ? interrogea Angus.
- Yohanna a suivi Lilith dans le Monde Inversé, je doute qu'elles aient un visiophone là-bas. Emily semble avoir disparu de la surface de la planète, ce qui n'est pas vraiment étonnant de sa part. Chloé est en tournée avec un spectacle aquatique, Esméralda avec sa foire et Marco avec son cirque, donc j'ignore où les contacter. John a quitté l'armée pour aller nul ne sait où... Bref, je crois que nous allons devoir agir seuls, parce que pour être honnête, je n'ai pas envie de perdre mon temps à tenter de rassembler tout le monde. J'ai déjà connu cela la première fois où Cassy avait dissout la Confrérie. Nous avions chacune refait notre vie de notre côté, sans nous soucier des autres.
Son ami l'approuva d'un hochement de tête, avant de lui demander si elle avait déjà une idée sur la façon dont elle comptait commencer son enquête, ce à quoi elle répondit à l'affirmative.
- Le nuage électrique a l'air encore plus dense au large. Je pense que nous devrions nous éloigner de la côte. Il y a quelques îles au large, à seulement quelques dizaines de kilomètres du rivage. Je pense que nous trouverons des indices là-bas.
- Es-tu certaine qu'il soit bien prudent de traverser la mer ? L'eau est un élément conducteur.
- A nous de ne pas tomber dedans, dans ce cas. J'ai déjà loué un bateau. Il nous attend au port. Honnêtement, Angus, je suis heureuse que tu sois là. Je m'étais préparée à devoir mener cette mission seule, au lieu de quoi je vais pouvoir profiter du plaisir de ta compagnie.
Il sentit ses joues s'empourprer légèrement tandis qu'il lui rendait le sourire qu'elle venait de lui adresser.
***- Ne remarques-tu rien dans ce pseudo-orage ? s'enquit Angus.
Il se tenait à la poupe du hors-bord qui fendait les vagues, dont la couleur virait à l'orange dans le reflet du soleil couchant. Tina, devant lui, s'occupait de le manoeuvrer, même s'ils voguaient pour l'instant toujours droit devant.
- Si. Il n'y a pas le moindre éclair. Avec une telle quantité d'électricité, la foudre devrait s'abattre quelque part, or elle n'a pas frappé à une seule reprise depuis que tout ceci a commencé.
- Tu me surprends, ne put s'empêcher de constater le jeune homme. Je ne pensais pas que tu t'intéressais aux phénomènes météorologiques.
- Bien sûr que non. En revanche, je m'y connais sûrement mieux que quiconque en électricité.
Elle lui fit un clin d'oeil par-dessus son épaule et il se sentit idiot d'avoir formulé une telle remarque. Il s'agissait du type de son glyphe, il semblait donc logique qu'elle soit une véritable encyclopédie sur le sujet.
Plutôt que de relancer la conversation, Angus rajusta la capuche de son imperméable. Tina et lui en avaient revêtu un au moment d'embarquer afin de se protéger des éclaboussures. En cette saison, la mer était relativement froide, or ils ne tenaient pas à se faire tremper jusqu'aux os.
Après d'interminables minutes de navigation, ils atteignirent un îlot rocheux qui, d'après la Championne, abritait des cavités qui formaient un véritable labyrinthe, rempli de puissantes créatures sauvages.
- Angus ? appela-t-elle alors qu'elle troquait ses bottes de pluie contre des chaussures de marche, avec lesquelles elle serait plus à l'aise pour explorer les lieux. Nous avions raison. C'est bien l'oeuvre d'un pokémon, donc certainement d'un légendaire.
- Nous venons à peine d'accoster, comment...
Il s'interrompit lorsque, dans la pénombre de la nuit tombante, il vit scintiller un point lumineux. En plissant les paupières, il s'aperçut que cela provenait de la cheville de Tina. Son glyphe s'illuminait. Apparemment, l'énergie répandue dans l'atmosphère se propageait jusqu'à lui pour l'alimenter, sans qu'elle ait besoin de porter ses gants.
- Tu ne t'en es pas rendu compte avant ?
- J'ai appris à ne plus regarder cette marque depuis des années. Je sais qu'elle est là et je sais ce qu'elle représente. Je n'ai pas besoin de la voir pour m'en souvenir, alors j'évite de poser les yeux dessus. Comme je me déshabille généralement en pleine lumière et que je dors avec une paire de chaussettes, cela ne m'a pas frappée.
Angus acquiesça, le visage grave, avant qu'elle ne boucle ses lacets à la lueur de la lampe de poche dont il braquait le faisceau dans sa direction. Si un légendaire était bien la cause des problèmes de Rivamar, cela ne le rassurait pas. A seulement deux, ils ne tiendraient pas une minute face à une créature de cette trempe.
Il fouilla un instant dans son pantalon, à la recherche de ses gants de combat. La synesthésie ne lui serait d'aucune utilité face à un être mythique, cependant s'il avait de la chance, il pourrait le sentir approcher assez tôt pour se tenir prêt à le combattre. L'effet de surprise était toujours un avantage.
- Nous pourrions peut-être rentrer et attendre Marion, suggéra Tina.
- As-tu peur ?
- Pas vraiment, mais elle saura sans doute mieux que nous ce qu'il convient de faire.
- D'ici à ce qu'elle trouve le temps de nous rejoindre, le générateur de Rivamar et ses auxiliaires auront sans doute sauter. Maintenant que nous sommes ici, il n'est pas question de faire marche arrière. Nous avons traversé bien pire, non ?
Il tendit une main dans sa direction, qu'elle saisit presque sans hésiter. Elle empoigna ensuite une pokéball fixée à sa ceinture pour la jeter dans les airs. Un éclat rougeâtre éclaira les alentours un instant, avant d'être remplacé par le flash d'Elekid.
- Beaucoup plus pratique qu'une lampe de poche. J'en ai simplement apporté au cas où toute mon équipe soit mise K.O., mais si cela venait à arriver, je ne donnerais pas cher de ma peau.
Grâce à la capacité lumineuse, ils purent mieux distinguer les alentours. L'île était en réalité une sorte d'immense rocher, à l'intérieur duquel ils pouvaient accéder par diverses ouvertures naturelles. La plus proche d'eux se situait à environ cinq mètres en contrehaut du rivage sur lequel ils avaient accosté.
- Pas besoin de prendre la corde pour si peu, constata Angus. Il y a suffisamment de prises pour que nous atteignons la cavité sans mal.
Tina l'approuva. Elle enfila également ses gants de caoutchouc jaune, bien que l'air électrique suffisait à alimenter ses pouvoirs. Elle venait de les passer uniquement pour protéger des mains des égratignures que la pierre risquait de lui infliger.
- Elekid, reste en bas pour nous éclairer. Je te rappellerai dans ta pokéball afin que tu puisses nous rejoindre, puis te libérerai à nouveau.
- Kid ! acquiesça le pokémon.
La paroi n'était pas abrupte, ce qui leur facilita grandement la tâche. Un vent léger vint les déranger au milieu de leur escalade, néanmoins il cessa de souffler après deux ou trois minutes, leur permettant de reprendre leur progression sans danger. Du coin de l'oeil, Angus observait Tina.
Elle était beaucoup plus sportive que lui et n'avait aucun mal à le distancer, d'autant que son don, qu'elle utilisait sans même s'en rendre compte dans l'effort, accélérait chacun de ses mouvements. Elle s'engouffra à l'intérieur de la grotte bien avant lui, puis le tira par le bras pour l'aider à en faire de même.
Elekid les retrouva quelques instants plus tard et se remit à éclairer leur chemin. Ils étaient désormais dans un boyau sinueux, mais assez large pour ne pas se frotter contre les murs rugueux qui les encerclait. Tina ouvrait la voix, côte à côte avec son pokémon.
Sur le bateau, Angus avait rechargé les batteries de ses gants avec les attaques de Rapion. Il décida de gaspiller un peu d'énergie afin de songer les alentours, dans l'espoir d'anticiper une éventuelle menace. Il ferma les yeux et se concentra sur les sons qu'il percevait.
Le vent sifflait lorsqu'il s'engouffrait dans les tunnels, les vagues venaient lécher les flancs de l'île, néanmoins il n'y avait aucune présence vivante dans les alentours. Il trouvait d'ailleurs cela fort étrange.
- Il n'y a pas le moindre pokémon dans les environs, constata-t-il. Ne m'as-tu pas dit que ces îlots étaient réputés pour la puissance des créatures qu'elles abritaient ?
- En effet. Certains dresseurs téméraires viennent ici pour entraîner leur équipe. Même moi, pourtant, je ne suis pas aussi téméraire.
Le tracé qu'ils suivaient déboucher sur une intersection. Ils s'interrogèrent du regard, avant de poursuivre leur route à droite. Ils auraient tout le loisir de revenir sur leurs pas s'ils ne découvraient rien dans cette direction.
Une surprise de taille les attendait lorsqu'ils débouchèrent dans une première cave, creusée naturellement à l'intérieur du rocher géant. Tina ouvrit des yeux ronds de stupeur et Angus, derrière elle, se raidit, livide.
Des dizaines de Nosféralto gisaient sur le sol, immobiles. De temps en temps, un soubresaut électrique parcouraient leurs corps inconscients. Ils étaient paralysés, sans doute à cause de l'atmosphère saturée d'énergie.
- Par chance, Elekid est immunisé, mais il faudra penser à donner un Anti-Para à tes pokémon dès qu'ils sortiront leur museau de leur ball. Ainsi qu'à ces malheureux lorsque nous quitterons cette île.
- Nous n'en aurons jamais assez. Trouvons la source du problème, réglons-le, puis nous reviendrons avec l'infirmière Joëlle afin qu'elle s'occupe de leur cas.
Ils poursuivirent leur route, les traits décomposés. S'ils n'étaient déjà pas rassurés au moment de se lancer dans cette aventure, cela ne faisait qu'empirer au fil des minutes qui s'écoulaient. Cette découverte presque macabre les avait réduits au silence. Ils n'échangeaient plus le moindre mot.
- Attends... murmura soudain Angus. J'entends quelque chose. On dirait... un éboulement.
- Des pierres doivent sans doute se décrocher du plafond dans un autre boyau. Tu es capable de percevoir un bruit à plus d'un kilomètre à la ronde. Cela ne nous met pas en danger immédiat.
- Au contraire, je dirais que si.
- Pourquoi ?
- Parce que cela se rapproche.
Un grondement sonore se fit entendre, désormais si près que même Tina l'écoutait. Angus l'obligea à pivoter sur ses talons pour la faire courir dans la direction opposée à celle qu'ils suivaient jusqu'à présent. Ce n'était pas une simple chute de pierre. C'était un Grolem enragé qui fonçait sur eux. Ils devaient rapidement atteindre une cave, sans quoi il les aplatirait.
- Pars devant, ordonna Angus. Tu es plus rapide, je te rattraperai.
- Pas question. Nous ne sommes que deux, alors nous restons ensemble, quoi qu'il arrive.
Elle pressa fermement sa main à laquelle elle s'était accrochée et ils accélérèrent l'allure. Ce fut hors d'haleine qu'ils débouchèrent sur une salle, une fraction de seconde avant que le Grolem ne les rattrape. La Championne, de soulagement, négligea l'une de ses foulées et tomba sur le sol.
Elekid eut juste le temps de dresser un Mur Lumière devant elle avant qu'elle ne soit fauchée par un Jet-Pierres. Angus en profita pour l'aider à se remettre debout, la soulevant à moitié.
- Nous ne sommes pas revenus sur nos pas ! constata-t-elle, effrayée. C'est un cul-de-sac !
Ils étaient acculés dans une cave fermée de toute part, à l'exception de l'issue qui se trouvait face à eux, condamnée par le Grolem. La situation était critique, néanmoins elle ne fit qu'empirer lorsque les rochers, autour d'eux, se mirent à remuer. Il s'agissait tous de Racaillou, à l'exception de trois d'entre eux qui se révélèrent être des Gravalanch.
- Je crois que nous sommes dans de sales draps... constata Angus en s'efforçant de garder son calme. Nidoqueen, Spectrum, j'ai besoin de vous !
Il jeta ses deux pokéball en l'air et Tina l'imita, libérant son Lainergie. D'un commun accord, ils se répartirent leur cible, puis passèrent à l'action. Leurs adversaires étaient peut-être aguerris, mais aussi. Ils n'allaient pas se laisser abattre sans combattre au préalable.
- Surpuissance ! ordonna Angus en désignant le Grolem, sans doute le plus coriace de leurs ennemis. Et toi, Spectrum, Ball'Ombre.
Une attaque Telluriforce de sa Nidoqueen aurait certainement mis l'ensemble des créatures présentes au tapis, néanmoins elle aurait également représenté une menace pour eux, car ils n'avaient aucun endroit où s'abriter dans cette caverne exiguë aux allures de prison.
- Lainergie, Rayon Gemme ! Elekid, Casse-Brique !
Grâce à la vitesse de ses pokémon électriques, Tina causa des trous dans les rangs des Racaillou. Angus, en revanche, avait plus de mal. Sa Nidoqueen s'épuisait à vue d'oeil, or le Grolem semblait inébranlable. Elle leur heurta pour la troisième fois consécutive, avant de s'effondrer sur le sol, épuisée. Lui ne semblait pas avoir la moindre égratignure.
- Nous avons combattu des légendaires, bon sang ! Ce n'est pas logique que nous ne parvenions pas à...
- Sans vouloir t'offusquer, laisse la logique et les statistiques en dehors de cela pour le moment, protesta Tina, dont le Lainergie venait d'être mis hors d'état de nuire par une attaque Tomberoche.
Ils rappelèrent leurs pokémon inaptes à la bataille et en envoyèrent d'autres. Ils ne voulaient pas épuiser toute leur équipe dès à présent, néanmoins les doubles-types face à eux leur donnaient du fil à retordre. Luxray et Avaltout firent donc leur apparition.
Le Grolem, enragé, frappa le sol de ses pattes pour déclencher un séisme aux vibrations démesurées. Tina se serait écroulée si son quadrupède bleu n'avait pas glissé son encolure sous son bras au même moment. Angus était soulagé que Spectrum soit capable de léviter. Cela le rendait invulnérable à ce genre de tentative.
- Il m'a tout l'air d'être le chef, c'est lui que nous devrions tenter d'atteindre avant les autres.
- D'accord. Exécutons un assaut groupé. Elekid nous protégera.
La petite créature jaune déploya aussitôt un Mur Lumière au-dessus de leur tête afin de parer les chutes de pierres provoquées par les Racaillou et leurs évolutions. Deux des Gravalanch étaient encore debout et semblaient plus menaçants encore depuis la défaite de leur frère.
- Spectrum, Vibrobscur ! Avaltout, Détricanon !
- Luxray, Mâchouille !
Les trois pokémon fondirent en même temps sur le Grolem, mais ils furent bloqués à un mètre de lui par les Lame de Roc qui jaillirent du sol pour les heurter de plein fouet. Grièvement blessés, ils s'effondrèrent. Quant à Elekid, il commençait à ployer sous les attaques à répétition.
- Je retire ce que j'ai dit tout à l'heure, s'écria Tina d'une voix suraiguë en s'écartant du mur qui s'effritait dangereusement. Réfléchis ! Trouve un moyen de nous sortir d'ici vivant.
- Hélas... Nous utilisons des types qui sont beaucoup trop handicapés pour venir à bout de ceux que nous affrontons. Tout ce que nous allons faire, c'est perdre nos équipes au combat en vain.
- Sauf que nous ne pouvons pas passer en force, ils bloquent le passage. Angus, j'ai peur !
Elle vint se pelotonner contre lui, les yeux rivés sur Elekid dont le corps était parcouru de tremblement, à cause de l'effort que lui demandait le maintien du Mur Lumière. En d'autres circonstances, le jeune homme aurait été séduit par cette marque d'affection, néanmoins en cet instant, il était aussi terrifié qu'elle.
- Tes pouvoirs peuvent te permettre de t'échapper, déclara-t-il après un bref silence. Si je détourne l'attention du Grolem suffisamment longtemps, tu...
- Et toi, alors ? interrompit Tina. Pas question que je sorte d'ici sans toi.
- Tu préfères que nous soyons ensevelis à deux sous des tonnes de rochers ?
- Nous formons une équipe, Angus. Sur l'ensemble de la Confrérie, en cet instant, il n'y a que nous. C'est déjà trop peu. Je reste.
Elle appuya ses propos d'un hochement de tête déterminé tandis que le porteur du glyphe poison jetait une nouvelle pokéball en l'air, dans un geste désespéré. Au même moment, la barrière protectrice d'Elekid vola en éclats et le pokémon s'effondra, vidé de ses dernières forces.
- Arbok ! s'écria le jeune homme à l'intention du reptile qui venait d'apparaître. Creuse un Tunnel et frappe-le par en-dessous.
- Raichu, débarrasse-nous des Gravalanch ! Queue de Fer !
Le serpent violet disparut dans un trou qu'il perça à même la roche pendant que l'excroissance du rongeur électrique se recouvrait d'une fine armure d'acier afin de l'aider à frapper. Son premier adversaire fut assommé par le coup féroce, néanmoins le second résista.
Un soupir de soulagement leur échappa lorsque, au terme de son attaque, l'Arbok eut enfin raison du Grolem qui leur causait tant de fil à retordre. Il le propulsa de toutes ses forces en jaillissant sous ses pattes et l'envoya s'écraser contre le mur qui encadrait l'unique sortie de la salle.
Ce surcroît de vibration eut toutefois des conséquences indésirables. Des pierres robustes se détachèrent du plafond pour s'abattre sur la caverne. Elles seraient tombées sur Angus si Tina, grâce à ses dons, ne l'avait pas poussé in extremis. A la place, ce fut elle qui encaissa l'impact causé par l'un des rochers.
Elle s'affaissa, complètement sonnée, en dépit des gestes que son ami faisait pour tenter de la maintenir debout. Il appela son Raichu pour qu'il veille sur elle pendant qu'il poursuivait le combat, cependant celui-ci fut jeté au tapis par l'un des Racaillou encore debout. Angus pesta.
Il commençait à désespérer. La Championne, lourdement calée contre sa jambe, s'agitait avec mollesse. Il lui faudrait un long moment pour se remettre du choc qu'elle venait de subir, or ils n'avaient pas la moindre seconde devant eux.
Son Arbok, seul face à ses adversaires, se faisait malmener. Alors qu'il croyait la fin dangereusement proche, une voix claire s'éleva dans le boyau qui leur faisait face pour s'exclamer :
- Tranch'Herbe !
Un véritable tourbillon végétal s'engouffra dans la salle pour infliger de sérieux dégâts aux pokémon de pierre. Angus les observa, les yeux ronds, alors qu'ils s'effondraient les uns à la suite des autres. Les plus coriaces d'entre eux, qui ne succombèrent pas immédiatement à l'attaque, furent violemment fouettés par deux lianes sorties de nulle part.
Une silhouette se découpait face à lui. Il pouvait la percevoir grâce à la faible lueur qui émanait encore du corps inconscient d'Elekid. Il plissa les paupières pour mieux distinguer une chevelure blonde. Elle encadrait un beau visage, jeune, mais déjà âprement marqué par la vie.
- Ce n'est pas vrai... souffla-t-il.
Il n'arrivait pas à le croire, pourtant il en eut la confirmation lorsque la femme pénétra dans la caverne. Elle jeta un bref regard sur les environs, sans même froncer les sourcils à la vue des corps des pokémon vaincus qui jonchaient le sol.
- Léa ?
Il avait l'impression de se tenir devant un fantôme. Tina les avait informés, huit ans auparavant, de son départ avec Athéna. Depuis ce jour-là, nul n'avait eu de ses nouvelles, pas même sa meilleure amie. Elle avait, semblait-il, totalement disparu de la surface de la Terre, au point qu'ils avaient même fini par cesser de mentionner son nom dans les conversations.
- Bonjour, Angus, le salua-t-elle d'une voix parfaitement mesurée. Je suis un peu surprise de te rencontrer ici.
- Sûrement pas autant que moi. Que... Où étais-tu ? Pourquoi réapparais-tu subitement ?
- Je pourrais répondre à tes questions maintenant, mais Tina me reposera certainement les mêmes dès qu'elle sera revenue à elle. Je ferais mieux de la soigner avant tout autre chose, n'es-tu pas d'accord ?
Malgré sa soif de savoir, le jeune homme ne put qu'acquiescer. Le sort de son amie importait davantage que le fait d'assouvir sa curiosité, bien que celle-ci le tiraille douloureusement.
- Nous devrions peut-être nous éloigner d'ici, suggéra-t-il.
Léa l'ignora. Elle franchit la distance qui la séparait d'eux et vint s'accroupir à côté de Tina, qui gémit faiblement lorsqu'elle voulut examiner l'hématome en train d'apparaître sur son front. Au bout de quelques secondes, elle secoua la tête de gauche à droite.
- Elle a probablement une commotion, il vaut mieux la guérir immédiatement.
Elle plaqua une main sur le crâne de la Championne et, aussitôt, son glyphe s'illumina. L'étonnement d'Angus, qui commençait tout juste à se dissiper, revint au pas de course. Elle ne portait pas ses gants de combat, comment pouvait-elle utiliser ses pouvoirs ?
- Libère vos pokémon, tous ceux qui ont souffert du combat, et donne-leur ceci.
Elle glissa ses doigts dans le nécessaire à poison qu'elle portait en bandoulière et tendit au jeune homme une liasse d'herbe sèche à l'odeur nauséabonde. Il ne connaissait pas grand-chose en phytothérapie, mais il savait tout de même reconnaître les ingrédients utilisés dans la composition des Rappels trouvables en Boutique.
A tour de rôle, il appela les créatures blessées contenues dans ses pokéball, ainsi que dans celles de Tina pour leur faire ingurgiter le remède. Quand il eut terminé, son amie revenait déjà progressivement à elle.
- Je... Je... Ah !
Elle poussa un hurlement terrifié et se traina en reculant sur un bon mètre pour s'éloigner de Léa, qui était encore penchée au-dessus d'elle. Elle jeta un regard terrorisé à Angus, contre les jambes duquel elle vint se recroqueviller juste avant qu'il ne l'aide à se relever. Tout son corps tremblait.
- Que... Que... Qu'est-ce...
Elle était en état de choc, incapable de prononcer le moindre mot. Ses yeux exorbités paraissaient être sur le point de jaillir hors de leurs orbites. Si le porteur du glyphe poison ne l'avait pas fermement maintenue debout, elle se serait certainement évanouie. Revoir celle qui était jadis sa meilleure amie lui causait visiblement un traumatisme immense.
- Toutes ces années... parvint-elle à articuler péniblement. Toutes ces années sans un seul mot ! Sans un seul signe ! Je te croyais morte ! Tellement qu'à la fin, j'ai fini par espérer que ce soit le cas. Parce que cela me rendait ton absence moins douloureuse. Pourquoi ? Pourquoi n'es-tu pas revenue avant ? Pourquoi maintenant ?
- Je ne suis pas ici pour toi, Tina, ni pour aucun de vous, répliqua Léa avec froideur. Je suis ici pour régler un problème. Notre rencontre n'est que purement fortuite.
La Championne s'apprêtait à se remettre à hurler, cependant Angus l'interrompit en plaquant une main sur ses lèvres. Elle était hystérique et il préférait lui laisser le temps de se calmer plutôt que lui permettre de tempêter sur la nouvelle maîtresse des poisons.
- J'imagine que tu es là pour les mêmes raisons que nous. A cause de cette vague soudain d'électricité.
- C'est l'oeuvre d'Electhor. J'ai été envoyée par Athéna afin de mettre un terme au bouleversement climatique qu'il provoque.
- Pourquoi fait-il cela ? Je croyais que la situation s'était arrangée et que plus personne n'avait rien à redouter des légendaires.
- C'est le cas. Il y a sûrement une explication rationnelle derrière cela. Athéna la connait certainement, mais elle n'a rien voulu me dire. D'après elle, celui qui détient le savoir n'en est réellement digne que s'il l'obtient par lui-même.
- Tu étais avec elle pendant tout ce temps ?
Tina venait de se dégager de l'emprise d'Angus et bravait désormais Léa du regard. Celle-ci l'étudia longuement, l'oeil pénétrant, avant d'acquiescer d'un hochement de tête. Son visage n'exprimait pas le moindre sentiment. Ni joie, ni agacement. Rien.
- Vos pokémon souffriront encore si vous restez seuls. Pour leur bien, je vous conseille de venir avec moi. Après tout, nous partageons un but commun, n'est-ce pas ?
- Tu veux que nous fassions équipe avec toi ? Nous ? Je suis étonnée que tu nous fasses cette proposition. Mademoiselle fréquente les légendaires, maintenant. Mademoiselle est à leur service. Mademoiselle doit sans doute nous juger indigne de fouler le même sol qu'elle, alors pourquoi s'abaisser à nous faire une telle offre ?
Tina n'essayait plus de dissimuler le mépris qu'elle éprouvait en cet instant : il se percevait dans sa voix. Angus voulut poser une main apaisante sur son épaule, cependant elle se dégagea violemment pour faire un pas menaçant en direction de Léa.
- Athéna est très soucieuse de la survie de la Confrérie. Elle ne me pardonnerait pas s'il devait vous arriver malheur.
- Evidemment. Tu es devenue le Caninos de l'Alpha. Te prendrais-tu pour Zeus ?
- Les temps ont changé. J'ai changé. Et je ne suis pas la seule. Suivez-moi, à présent. Nous avons suffisamment perdu de temps ainsi.
- Pas question que je... commença la Championne, mais Angus l'interrompit.
- Il le faut. Nos pokémon ont prouvé qu'ils n'étaient pas de taille à nous tirer d'affaire dans cette grotte.
Léa n'attendit pas qu'ils aient pris leur décision pour tourner les talons. Elle disparut dans le boyau où l'attendait son Empiflor, dont les attaques avaient vaincu la famille du Grolem. Elle le rappela dans sa pokéball, puis poursuivit son chemin. Le porteur du glyphe poison fut le premier à lui emboîter le pas. Tina ne s'y résolut que par défaut.
- Tout à l'heure, tu as utilisé tes pouvoirs, or tu ne portes pas de gants. Comment...
- Grâce à un enchantement. J'absorbe moi-même l'énergie qui se dégage des capacités végétales sans avoir recours à un accessoire. Cela n'a pas été simple à mettre au point, mais c'est désormais nettement plus pratique.
- Tu es capable d'exécuter des sortilèges ? s'étonna Angus. Pourtant Circé...
- Circé n'était pas magicienne et je ne le suis pas davantage. Je le dois à Némésis. Elle a réussi à perfectionner mon glyphe.
Ils marchaient en fil indienne et le grognement de Tina, la dernière du groupe, parvint à leurs oreilles. Le jeune homme lui jeta un rapide regard par-dessus son épaule, néanmoins Léa ne lui accorda pas la moindre attention.
Elle n'avait plus rien à avoir avec l'adolescente qu'elle avait un jour été. Son attitude était altière, ses manières froides et elle les traitait avec autant de distance que s'ils ne s'étaient jamais vraiment connus. Ce comportement semblait blesser Tina plus encore qu'elle ne voulait l'admettre.
- Par ici, ordonna la maîtresse des poisons à une intersection.
Ils s'engouffrèrent dans le boyau qu'elle venait de désigner mais, au même moment, un bruit tonitruant se répercuta en écho sur l'ensemble de l'île. Les parois, à l'instar du plafond, se mirent à vibrer avec intensité. Des rochers se décrochèrent pour s'abattre sur le tunnel, condamnant ainsi son accès.
- Il va falloir prendre à droite, finalement, constata Angus.
- Oui, et très vite. Ce son n'était pas anodin. Nous devons nous dépêcher.
Elle s'élança au pas de course dans la seconde issue, suivie de près par ses deux confrères. Tina se trouvait juste dans son sillage, désormais, le regard assombri par la colère. Sa voix en tremblait lorsqu'elle demanda :
- De quoi s'agissait-il, au juste ? Cela m'a paru familier.
- Pas étonnant, puisque c'est le marteau de Thor.
- Thor ?
Sans même se concerter, les deux amis cessèrent de courir et Léa, dès qu'elle s'en aperçut, fut contrainte d'interrompre sa progression. Ils n'avaient pas oublié cet humain légendaire, dont l'arme pouvait broyer n'importe quel os au point de le réduire en poudre. Il leur avait causé beaucoup de fil à retordre, à chaque fois qu'ils avaient eu à l'affronter. Aucun d'eux n'était pressé de se frotter à nouveau à lui.
- Il ne vous fera pas de mal, affirma Léa, bien que ses propos ne suffirent à convaincre personne. En revanche, si nous ne l'arrêtons pas, la caverne va s'effondrer sous ses coups, avec nous dessous. Il n'y a pas un instant à perdre.
Angus et Tina s'interrogèrent du regard. Si un face à face avec la divinité ne les enthousiasmait pas, ils n'avaient pas pour autant envie de se laisser ensevelir sous des tonnes de rochers. Sans grande conviction, ils se remirent à suivre celle qui les guidait.
Elle paraissait n'avoir aucune peine à retrouver son chemin parmi le dédale que formaient les différents boyaux. Avait-elle développé un sixième sens très aigu, à l'instar des humaines légendaires ? Ils étaient à présent convaincus que plus rien ne pourrait les surprendre à son sujet.
- Elle ne m'inspire pas confiance... murmura Tina.
- C'est Léa, voyons ! Pas un monstre. Si nous avons pu nous fier à Lilith, nous...
- Justement, avec Lilith, nous savions toujours à quoi nous en tenir, c'est-à-dire au pire. Là, je trouve que la situation sent terriblement mauvais, sans avoir la moindre idée de ce qui risque de nous tomber dessus.
- Garde ton calme, tout ira bien. Elle ne peut pas avoir changé à ce point, d'autant qu'elle travaille vraisemblablement pour Athéna. Elle ne permettrait à quiconque de nous faire du mal. Elle était l'alliée de Cassy, rappelle-toi.
- Cassy et ses alliances... Regarde où cela l'a menée.
La Championne s'en voulut d'avoir prononcé ces paroles, qui dépassaient sa pensée. Elle jugea préférable de se taire, par crainte de tenir d'autres propos désagréables sous l'emprise de la colère dont elle était victime à l'heure actuelle.
Un autre bruit fracassant leur perça les tympans, deux fois plus fort que le précédant, signe qu'ils se rapprochaient du but. Par instinct, Tina glissa sa main dans celle d'Angus et la serra avec une telle poigne qu'elle enfonça ses ongles dans sa chair, lui arrachant une grimace au passage.
Arrivée à l'extrémité du tunnel qu'ils longeaient, Léa s'immobilisa. Les deux autres l'imitèrent, en léger retrait, les doigts déjà crispés sur une pokéball. D'un geste, elle les invita venir se placer à sa hauteur. Lorsqu'ils se furent exécutés, ils ouvrirent des yeux ronds comme des Voltorbe.
Un immense tas de rochers occupait le centre de la salle dans laquelle débouchait leur boyau. Thor se tenait juste devant, dans sa cuirasse. Une lumière vive émanait de son marteau, assez puissante pour éclairer l'endroit. Il s'apprêtait à le lever pour porter un nouveau coup aux scories, mais Léa s'interposa au même moment.
- Arrête ! ordonna-t-elle.
Angus et Tina échangèrent un regard blasé. Elle tutoyait un légendaire, mais était-ce si surprenant que cela, dans le fond ? Elle était quasiment l'une des leurs, désormais. Elle franchit la distance qui la séparait du dieu au petit trot, pour desserrer sa main qui cramponnait fermement le manche de son arme.
- Si tu continues ainsi, c'est toute la caverne qui va s'écrouler, avec nous dessous. Que se passe-t-il ?
- Electhor devait survoler la région de Sinnoh pendant que je patrouillais Kanto afin de m'assurer que tout allait bien, néanmoins il ne m'a jamais rejoint. Inquiet, je me suis lancé à sa recherche. Guidé par notre lien, puis par son énergie que je détectais dans l'atmosphère, je suis arrivé ici.
- Et lui ? Où est-il ?
- Là-dessous.
D'un mouvement du bras qui balaya sa cape rouge, Thor désigna l'énorme tas rocheux. Léa cligna des paupières à deux reprises, visiblement choquée par cette révélation. Tina et Angus restaient quant à eux à l'arrière. Ils n'avaient aucune envie de se mêler de leur conversation.
- C'est épouvantable ! Il a du faire halte sur cette île avant de traverser la mer et il a été pris au piège par un éboulement. Depuis combien de temps est-il coincé sous ces tonnes de pierre ?
- Je dirais trois jours, peut-être davantage. Il a dépensé beaucoup d'énergie en tentant de se dégager et le contact de la roche aspire l'électricité contenue dans son corps pour le diffuser dans l'atmosphère. J'ai peur que si nous ne le libérons pas très vite, il finisse par se vider de ses dernières forces.
- Vous voulez dire qu'il va mourir ?
Cette interrogation avait échappé à Angus. Il s'étonnait qu'un pokémon légendaire puisse périr de la sorte, mais il savait également à quel point l'omniprésence de la pierre était néfaste pour les créatures de son type. Celles de Tina n'avaient pas paru au sommet de leur forme au moment de combattre dans cette même grotte.
- Si nous n'agissons pas, cela risque fort de se produire, en effet.
- Alors nous allons vous aider, affirma la Championne. Après tout, vous et nous, nous sommes en paix, non ?
Thor acquiesça d'un hochement de tête avant de repousser les mèches de cheveux blonds qui venaient de tomber devant son visage. Les deux confrères firent courageusement un pas dans sa direction, pour venir se placer entre Léa et lui.
- Si nous employons la force, c'est la grotte entière qui va s'effondrer, et nous perdrions encore plus de temps que nous n'en avons. Il faut y aller doucement, mais sûrement, suggéra la maîtresse des poisons.
- C'est-à-dire ?
- Retirer les pierres une par une. Je crains que nous n'ayons pas le choix.
Elle tira deux pokéballs de son nécessaire et les jeta en l'air. Empiflor et Florizarre se matérialisèrent devant elle. Sans perdre un instant, elle leur intima de dégager le tas de roches pour libérer Electhor. Les créatures végétales se mirent aussitôt à l'ouvrage, aidées de leurs lianes puissantes.
- Luxray, Raichu ! Aidez-les ! ordonna Tina en libérant à son tour une partie de son équipe.
- Nidoqueen, Arbok ! Vous aussi !
Les soins de Léa avaient été efficaces. Si leurs pokémon gardaient encore quelques séquelles du combat, ils étaient tout de même aptes à les aider. Ils se mirent tous à l'ouvrage, soulevant des pierres de tailles diverses, selon ce que les limites de leurs forces leur permettaient.
Thor était de loin le plus fort d'entre eux. Il pouvait soulever des fragments rocailleux qui pesaient à vue d'oeil plus de cinquante kilos. Les trois autres, en revanche, échouaient à chaque fois qu'ils étaient confrontés à un poids supérieur à vingt-cinq.
Les pokémon abattirent une bonne partie du travail, même s'ils avaient l'impression que le tas ne diminuait guère. Il leur fallut plus d'une bonne heure avant d'apercevoir le plumage jaune d'Electhor. Celui-ci ne bougeait pas, sans doute dans l'espoir d'économiser le peu d'énergie qu'il lui restait.
Ils s'empressèrent de déblayer un accès jusqu'à son bec afin que Léa puisse lui faire avaler quelques décoctions, indispensables à la stabilisation de son état précaire. Pendant ce temps, Thor, Angus et Tina redoublèrent d'efforts de façon à le dégager entièrement. En dépit de leur ancienne animosité mutuelle, ils faisaient un beau travail d'équipe.
Le légendaire épargna même la chute au porteur du glyphe poison en rattrapant celui-ci alors que, perché sur une pile de cailloux, elle s'était effondrée sous lui. Le jeune homme le remercia brièvement, avant de se remettre à l'ouvrage. Même s'ils oeuvraient désormais ensemble, il avait du mal à se montrer chaleureux avec un ancien ennemi. Courtois était le maximum qu'il parvenait à faire pour l'instant.
Enfin, l'Oiseau fut libéré. Il peinait à bouger ses ailes, endolories par l'immobilité à laquelle elles avaient été contraintes, cependant il était vivant. Thor tapota amicalement son encolure, soulagé de retrouver son complice de toujours.
- Merci à vous, jeunes humains. Nous n'y serions sûrement jamais arrivés sans votre aide.
- Vraiment ? s'étonna Tina. Je veux dire... Nous ne sommes rien, comparés à vous, et...
- Au contraire. C'est ce qu'Athéna a essayé de nous faire comprendre pendant un millénaire et que nous nous sommes entêtés à réfuter. Tout, dans l'univers créé jadis par Arceus, a sa place, y compris vous. Je suis honoré du soutien que vous m'avez apporté aujourd'hui, en dépit des différents que nous avons pu avoir par le passé.
Thor s'inclina respectueusement devant la Championne de Rivamar, puis serra la main d'Angus avec une déférence identique. Il revint ensuite vers son Oiseau, qui commençait tout juste à se remettre grâce aux décoctions efficaces que Léa tenait du grimoire de Circé.
- Allons, mon ami. Tu as passé suffisamment de temps sur cette île. Il nous faut partir, à présent.
Electhor ploya ses pattes sous lui et son humain vint s'asseoir entre ses épaules musculeuses. Il adressa un dernier salut à l'intention des membres de la Confrérie, et lança au moment de disparaître :
- Ce jour restera gravé dans ma mémoire. Si vous avez besoin d'un service, je suis votre débiteur.
Angus dut admettre qu'Athéna avait accompli un travail fabuleux depuis qu'elle était devenue l'Alpha. Le fait qu'un allié d'Arceus leur témoigne une telle reconnaissance relevait pratiquement du miracle.
Tina semblait penser la même chose, à côté de lui, mais elle se renfrogna dès que son regard se fut à nouveau posé sur Léa. Elle demeurait immobile, les bras croisés sur sa poitrine. Elle n'exprimait aucun soulagement quant à la réussite de sa mission, pas plus qu'au sauvetage d'Electhor. Elle semblait presque inerte, comme dénuée de toute émotion.
- Je vais vous guider jusqu'à la sortie, dit-elle enfin. Je sais où est amarré votre bateau, je peux vous y conduire.
- Tu ferais mieux de retourner auprès de ta maîtresse, c'est là-bas qu'est ta place.
La réplique de Tina était si venimeuse qu'elle parvint à lui arracher l'esquisse d'un froncement de sourcil. Angus s'attendit à la voir rétorquer, néanmoins elle continua d'afficher un calme serein tandis qu'elle se mettait en route, après avoir rappelé ses pokémon.
- Cette fille est un robot ! s'offusqua la Championne sans même se soucier de savoir si ses propos atteignaient l'oreille de l'intéressée. Athéna lui a lavé le cerveau ou je ne sais quoi.
- Elle a changé, tout simplement.
- Les gens changent, d'accord, mais ils conservent tout de même un fragment de leur ancienne personnalité en eux. Entre le jour où j'ai rencontré Cassy et celui de sa mort, tout un océan s'est écoulé, mais je retrouvais encore en elle quelque chose de l'adolescente avec laquelle j'ai étudié à l'école, bien que ce soit infime. De Léa, il ne reste... rien.
La fureur de son ton fut bien vite nouée sous le chagrin. Elle s'était faite à l'idée de ne jamais revoir sa meilleure amie, or la rencontrer à nouveau ainsi, presque dénuée de toute humanité, lui donnait la terrible impression de la perdre une seconde fois. Elle ne pouvait le tolérer.
Angus passa un bras autour de sa taille afin de la réconforter et ses joues rosir lorsqu'il s'aperçut de l'audace de son geste, lui qui était d'un caractère relativement réservé. Tina ne protesta toutefois pas, aussi garda-t-il sa main posée sur sa hanche.
- Je suis désolé que tu sois obligée d'endurer cela, affirma-t-il. Je n'ose imaginer à quel point cette situation doit t'être pénible à vivre.
- Merci d'être là. C'est grâce à toi si je parviens à la supporter.
Le reste du trajet, qui traversait de nombreuses cavernes, se passa en silence. Léa ne se retournait même pas pour s'assurer qu'ils la suivaient. Sans doute entendait-elle le bruit de leurs pas dans son sillage, ce qui rendait cette précaution inutile.
Enfin, ils arrivèrent à l'air libre. La nuit était tombée sur Sinnoh et les lumières de Rivamar brillaient à l'horizon, le long de la côte. A présent que l'électricité contenue dans l'air se dissiper, la ville allait pouvoir retrouver sa tranquillité. Elle ne risquait plus rien, désormais.
- Vous y êtes, annonça Léa d'une voix monocorde. Bon vent à vous deux.
Angus ouvrit la bouche pour la remercier, mais il n'en eut pas le temps. Tina l'empoigna par l'épaule pour la forcer à pivoter face à elle et, le poing levé, s'apprêtait à la frapper au visage. La maîtresse des poisons para son geste avec une parfaite désinvolture, sans que cela ne lui coûte le moindre effort.
- C'est fini, murmura-t-elle en repoussant sa main. Je suis partie et je ne reviendrai pas. Je suis navrée que tu aies perdu ta meilleure amie, mais c'est ainsi que les choses devaient se passer. Ma place est parmi les légendaires.
- C'est faux. Tu portes un glyphe, tu devrais être avec nous !
- J'ai pris la place de Circé dans la Confrérie originelle. Dès qu'Athéna aura résolu certains détails, Némésis me reprendra le pouvoir des plantes pour le confier à quelqu'un d'autre, qui deviendra votre nouveau membre.
- On ne remplace pas les gens, Léa. Surtout pas toi. Comment as-tu pu m'infliger tout cela ? Comment as-tu pu partir et me laisser seule ?
- Tu n'es pas seule, Tina. Il n'appartient qu'à toi de t'en apercevoir.
D'un mouvement de la tête qui agita sa chevelure blonde, elle désigna Angus. Celui-ci se raidit, un peu mal à l'aise, alors que Tina jetait un regard dans sa direction. Gêné, il préféra river ses yeux sur le sol plutôt que soutenir les siens.
C'était sans compter sur Léa, qui vint le prendre par la main. Elle en fit de même avec la Championne et réunit leurs doigts, qu'elle entrelaça. Elle les observa ensuite à tour de rôle, avant de déclarer avec une gravité dont elle ne s'était pas départie depuis qu'elle leur avait sauvé la vie :
- Personne ne sera seul, tant que vous aurez quelqu'un sur qui compter. Circé comptait sur moi. Aujourd'hui encore, elle a plus besoin de moi que vous. C'est son héritage qu'elle m'a transmis. Elle n'avait personne d'autre. Vous, oui. Vous pouvez vous appuyer les uns sur les autres.
- La Confrérie n'est plus aussi unie qu'autrefois. Nous nous sommes séparés et...
- Et vous arriverez toujours à vous retrouver. Il suffit simplement d'un peu de volonté. Ce n'est pas parce que nous nous éloignons des gens que nous cessons de penser à eux, déclara Léa en insistant bien sur chaque mot. Si nous les avons vraiment aimés, sincèrement, alors ils ne quitteront jamais totalement notre coeur.
Elle les relâcha, mais ils ne l'imitèrent pas. Ils restèrent main dans la main, face à elle. La lumière blafarde de la lune faisait scintiller les larmes qui commençaient à poindre dans les yeux de Tina.
- Je te confie ma meilleure amie, Angus. Prends bien soin d'elle.
Sur ces mots, elle tourna les talons. Lorsque la Championne réagit, elle avait déjà disparu derrière un flanc de l'île rocailleuse. Elle cria son nom, tenta de la rattraper, mais en vain. Elle s'était volatilisée.
- Léa ! s'écria-t-elle, debout sur un récif contre lequel les vagues venaient s'écraser. Léa !
- Tu dois la laisser s'en aller, murmura Angus après l'avoir rejointe péniblement. Elle a fait son choix. Il faut que tu le respectes et que tu fasses le tien.
- Le mien ?
- Tu peux continuer à lui en vouloir ou accepter sa décision. En l'acceptant, tu seras à nouveau en paix avec toi-même et tu seras capable d'aller de l'avant. C'est ce qu'elle a essayé de te faire comprendre à l'instant. Tu dois vivre, Tina. C'est ce qu'elle souhaite.
La jeune femme essuya la larme qui venait de glisser le long de sa joue. Elle contempla la mer agitée pendant une longue minute, puis passa son bras autour de celui de son ami. Ses lèvres s'étirèrent en un triste sourire lorsqu'elle murmura :
- Rentrons à Rivamar.