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Echos Infinis de Icej



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» Auteur : Icej - Voir le profil
» Créé le 24/08/2015 à 07:07
» Dernière mise à jour le 04/04/2020 à 05:09

» Mots-clés :   Action   Aventure   Humour   Présence de personnages du jeu vidéo   Présence de shippings

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Épisode 09 : La promenade s'amuse
(Modifié le 04/04/20)

Après avoir signé leur Pacte, Élin, Syd, Elsa et Oscar espérèrent ne plus jamais se disputer et vivre heureux jusqu'à la fin des temps. Seulement, comme leurs premières journées après la Légendaire Déclaration d'Amitié allaient le leur apprendre, bien s'entendre quand on a des personnalités si différentes n'est pas toujours simple...

(La cancre)
— HEY ! LISTEN !

Le cri perçant d'Élin leur arracha tous un nouveau gémissement, et Oscar se boucha carrément les oreilles. Syd quant à lui, tentait de maintenir une indifférence stoïque, et Elsa envoyait des sourires crispés à la blonde dans l'espoir qu'elle se calme... peine perdue. Il avait fallu bien des efforts et des menaces pour la tirer du lit—elle avait même mordu Oscar dans un dernier effort pour garder sa couette !—mais maintenant qu'elle était éveillée, eh bien c'était carrément... trop. Et cela durait depuis presque une semaine—depuis le pacte, elle était infernale, et eux ne venaient toujours pas à bout de cette route, condamnés pour ne pas se perdre à suivre une rivière qui serpentait sans cesse.

Bref, depuis les aurores, Élin alternait entre marcher sur les mains et jouer à saute-Wattouat avec les Pokémon, haranguant Baggy pour qu'il participe—sans succès. Le Pokémon lui renvoyait tantôt une moue blasée, tantôt un ricanement condescendant. Mais le pire était survenu il y a un peu moins d'une heure : la dresseuse avait ramassé une branche de cyprès et envoyait Lucky la chercher très loin—pour soi-disant « travailler sa vitesse ». Vu qu'Élin visait très mal, Baggy se la prenait tour à tour dans les yeux, le nez ou les oreilles.

À part ça, c'était une très belle journée, les seuls nuages à l'horizon étaient d'un blanc pur et éclatant, un soleil doux et agréable se déversait sur les plaines verdoyantes de la...

— HEEEY ! LISTEN ! HEY !

Les adolescents se tournèrent tous vers Élin, lui jetant des regards meurtriers. Ils ne savaient pas d'où venaient ces mots ni en quelle langue ils étaient, mais—AH ! C'était vraiment la blonde qui se déplaçait en position d'araignée ?! On aurait dit une extraterrestre ou un Métamorph du cirque !

— Elle va finir par tomber dans la rivière, annonça Syd d'une voix calme.

Oscar et Elsa lui lancèrent un coup d'œil inquiet—oui, c'était bien avec un sourire réjoui que le dresseur venait de clamer cette terrible éventualité. Le contraste était... frappant... Ils frissonnèrent.

— Nous devons absolument empêcher l'apocalypse, agent Bond... glissa discrètement Oscar à Elsa, profitant d'une accalmie dans la tempête Élin.
— H-heu mon nom de f-famille c'est Hirata... bafouilla la brune en retour.

Surpris, Oscar se frappa le front. Mais oui enfin, à quoi pensait-il ?

Pendant ce temps, la patience de Syd atteignait ses limites. Il avait besoin de calme pour répondre aux textos de sa famille, ou alors il envoyait « à très bite » au lieu d'« à très vite » ! ... oui, ça venait réellement de se passer. Rah mais c'était la faute d'Élin qui le distrayait !

Mais il réfléchissait aussi à sa mission, jouant avec le Badge fendillé qui avait d’Élin, le cœur lourd. Ce Badge ne lui rapporterait que quelques milliers de Pokédollar, qu'il pourrait tirer de son compte au Centre Pokémon d'Ondes-sur-mer. Or l'hôpital privé Meloetta demandait plusieurs dizaines de milliers de Pokédollars par jour pour leurs programmes expérimentaux… Il soupira, découragé, et se demanda s’il n’allait pas devoir chercher une alternative. Il avait été bête de croire qu’il pourrait gagner assez d’argent avec des tournois… Enfin, ce n’était que le début, mais…

Les paroles de Tcheren lui revinrent, et il pensa aux inventions révolutionnaires de Nikolaï. Peut-être que le Champion pourrait lui montrer ces inventions, et peut-être que l'une d'entre elles pourrait guérir Otis. Mais Tcheren avait dit que si Nikolaï avait effectivement construit des engins utiles, le scientifique s'était surtout investi dans la médecine et les protocoles expérimentaux. Pour apprendre de nouvelles méthodes de guérison… peut-être liées aux Pokémon… il faudrait rencontrer Nikolaï lui-même. Mais ça, même en y réfléchissant, Syd doutait qu’il réussisse.

Bien évidemment, la blonde avec ses nombreux cris et demandes d'attention, ne lui permettaient même pas de se concentrer ne serait-ce que deux secondes, donc peut-être qu’il y avait un moyen auquel il n’avait pas pensé !

— Arrête, grommela-t-il en direction de la blonde. Tais-toi. Arrête.
— Roh mais quel rabat-joie !

La gamine était à présent occupée à marcher sur les mains, mais les jambes placées en l'air, en grand-écart. La position lui conférait un air assez ridicule, ses narines et yeux exorbités ressortant d'autant plus qu'ils la voyaient à l'envers. Elle leur tirait la langue, aussi. Mais ce qui inquiétait et irritait Syd depuis le début de la matinée, sans qu'il n'ose l'avouer, c'est que la dresseuse s'amusait juste aux côtés d'une profonde rivière. Ils longeaient son cours cristallin depuis le Ranch, mais depuis ce matin, le flot sombre s'était enfoncé dans la terre. Les ados marchaient maintenant le long d'une falaise.

— À force de faire n'importe quoi, tu vas finir par tomber, insista-t-il tout de même.

La blonde rit et leva les yeux au ciel—enfin au sol, vu la position dans laquelle elle se trouvait, mais peu importe—.

— Mais noon, ne t'inquiète pas ! Viens t'amuser plutôt !
— Tu ne veux pas plutôt entraîner tes Pokémon ? Tu sais, si continues à faire n'importe quoi tout le temps, je vais te battre à notre prochain combat.

Cette réplique attira l'attention d'Élin, qui se laissa tomber à terre puis sauta à ses pieds. Oscar poussa un soupir de soulagement, venant enlacer la blonde, qui le repoussa et lui tourna le dos pour venir se planter devant Syd. Oscar cria, tituba jusqu'au bord de la falaise et Elsa dut le rattraper, oh, elle avait sauvé son amoureux !

— Fais attention aux autres un peu ! s'écria Syd, foudroyant Élin du regard.
— Hein ? s'étonna la blonde, se retournant vers ses amis.
— Laisse tomber... soupira-t-il. Écoute, euh...

Syd se demanda comment il pouvait empêcher la blonde de se tuer et de tous les emporter avec elle. Il fallait absolument la distraire, mais comment ?

— Est-ce que tu veux que je t'apprenne... euh... les bases du dressage ? hasarda-t-il. La gamine s'empourpra.
— Hé mais pour qui tu te prends ? Je t'ai battu j'te signale, t'as rien à m'apprendre !

Ce fut à son tour de s'énerver.

— Moi au moins je suis allé à l'école ! Et je connais le nom des attaques de mes Pokémon ! Et la table de Types ! Et je sais me servir d'un Pokédex !
— Nanananana ! cria-t-elle en se bouchant les oreilles, j'tai battu, je t'ai battu, je t'ai battu !

Il souffla, exaspéré, sur le point de tirer sur ses poignets pour qu'elle soit obligée de l'écouter. Il voulait être gentil et voilà comment elle réagissait ! Heureusement, Oscar intervint avant que les deux rivaux en viennent de nouveau aux mains, se penchant vers la blonde avec un sourire gentil. Elle arrêta de chanter pour l'écouter avec un oeil méfiant.

— Ahh tu sais, moi je trouvais ça saoulant les cours, mais ça peut être intéressant parfois... dit le grand dadais. On a même appris comment les Pokémon se reproduisent ! Y en a qui ont des tentacules !

Élin eut l'air de trouver ça très cool. Syd écarquilla les yeux. Elsa rougit.

— Franchement c'est cool l'école, continua Oscar. Tu peux poser plein de questions et tout ! Et quand les profs sont pas trop énervés contre toi parce que t'as malencontreusement oublié de faire tes devoirs, ils te répondent...!
— Ah ouais, donc Syd c'est comme un prof énervé, si je comprends bien... dit Élin. L'intéressé grommela.

Elsa, qui avait écouté Oscar parler avec un petit sourire, ajouta que c'était tout de même important de faire ses devoirs. Elle expliqua qu'elle lisait aussi beaucoup de livres sur plein de sujets, comme la stratégie Pokémon, et qu'avoir beaucoup de connaissances théoriques pouvait aider un dresseur à s'améliorer en combat.

— Ah bon, comment ? demanda Élin, curieuse malgré elle. La blonde avait décroisé les bras, elle regardait ses amis avec de grands yeux.
— E-eh b-bien déjà tu peux connaître les statistiques de tes Pokémon...
— Les statistiques ?
— Laisse, elle ne connait pas encore la Table des types, intervint Syd.
— Hey ! J'peux tout apprendre sur les statistiques si j'veux, quand j'veux !

Elsa s'empressa de répondre à la gamine avant qu'une dispute n'éclate. Les trois adolescents se relayèrent pour expliquer le fonctionnement des Pokéball et du Pokédex à la blonde, lui parlèrent des différents Types de Pokémon, de la différence entre capacités normales et spéciales. Élin savait déjà tout un ensemble de choses grâce aux cours particuliers qu'elle avait suivi, et aussi en observant son père lors de matchs télévisés, mais elle avait de grosses lacunes. Elsa se demandait comment c'était possible, car l'État Unyssien obligeait tous les enfants à suivre un cursus commun, même ceux qui étaient scolarisés chez eux, comme Élin. Mais elle ne posa pas trop de questions, ne voulant pas véxer la gamine. En tout cas, la petite fut époustouflée d'apprendre que chaque Pokéball pouvait reconnaître l'ADN de tous les Pokémon différents.

— C-Comme ça, on est sûrs q-que les Pokéball ne fonctionnent pas sûr les humains, expliqua Elsa.
— Ah ouais comme dans Captured ! souffla Oscar. Mais si vous avez le film d'horreur qui parle d'un mec qui veut capturer une nana ? Pour la marier ? Et la nana veut pas ?

Elsa fut horrifiée.

— Un tel scénario est impossible, il n'y a que les gouvernements qui savent fabriquer des Pokéball, trancha Syd. C'est un secret aussi bien gardé que l'arme atomique.

Finalement, la conversation dériva. On parla de tout et de rien. Élin fit de nouvelles acrobaties, mais plus loin de la rivière. Ils suivaient un chemin de terre battu entre les hautes herbes. Leurs Pokémon s'entraînaient contre d'autres créatures sauvages, et ils filmaient ces rencontres pour les envoyer à Bianca Lenoir. Élin insista ensuite pour que ses Pokémon s'entraînent les yeux bandés, pour qu'ils soient plus autonomes. En fin de matinée, le portable de Syd sonna. Il sursauta, se demandant avec culpabilité pourquoi il n'avait pas répondu aux textos de sa mère plus tôt, et vit—

[Rechute. On l'a emmenée un jour plus tôt.]
Son cœur se crispa.
Rechute ? Mais l’état d’Otis était normalement stationnaire !

Le garçon souffla lentement. Il ne fallait pas qu'il se laisse distraire. Il ne fallait pas qu'il oublie qu'il avait un seul objectif : sauver Otis. Le cœur lourd, il s'éloigna des autres, et rembarra Élin quand elle lui courut après pour lui poser une autre question sur comment c'était l'École. Ses nouveaux amis n'étaient pas importants... Il fallait qu'il s'entraîne pour battre tous les Champions d'Arène et puis le Conseil Quatre.

(Un déjeuner presque-parfait)
Une bourrasque de vent emporta le cheveu qu'elle tenait, et bientôt, il disparut dans le ciel bleu. Elsa soupira d'aise, se détendant, fit un sourire discret. Enfant, sa tante lui racontait que chaque cheveu emporté était un souci disparu. Cependant, l'adulte catastrophée devant la réaction d'Elsa, avait ensuite ajouté que s'en arracher des touffes entières n'améliorait pas le quotidien, bien au contraire !

La jeune fille avait toujours eu tellement de soucis. Plus que de cheveux.

Ce jour-là, elle ne s'était pas arraché de cheveu, il s'était détaché tout seul alors qu'elle replaçait une mèche derrière son oreille. Sa bonne fortune était assurée ! Peut-être le brin noir coulait-elle à présent le long du fleuve tumultueux qu'ils longeaient, entre deux bulles, dans les ténèbres. Ou peut-être oscillait-il le long de la falaise, perché sur un roc saillant sous un rayon de soleil. Après tout...

— Eh Elsa ! Syd cuisine, tu veux jouer à la pêche ?

Quoi ? À la pêche ? La brune fronça les sourcils et s'approcha des garçons, qui s'étaient arrêtés en haut d'une petite colline afin de préparer le déjeuner. Elle s'imaginait déjà perchée au bord de la falaise, Oscar à ses côtés... illuminé par le soleil couchant... à la chasse aux Magicarpe... euh en fait non ! Piquant un fard, la jeune dresseuse revint à la réalité : Oscar devait avoir bien autre chose en tête, car il ne tenait pas une canne à pêche mais un large éventail de cartes.

— M-mais... bafouilla Elsa, embarrassée. Je c-croyais qu'on ne devait pas s'a-approcher de la rivière... À ces mots, le garçon éclata de rire.
— Mais non, la pêche c'est un jeu de carte !
— A-ah bon !
— Allez viens, je t'explique les règles, l'encouragea-t-il, et elle s'installa dans l'herbe à ses côtés. Alors y a des cartes avec des valeurs différentes, la Millobelus évidemment, la Lokhlass, la Léviator...

Tandis qu'Oscar lui contait l'art et les manières de la pêche, Syd cuisinait. Le dresseur de Gruikui avait déjà démarré un petit feu, et touillait une mixture très odorante dans une sorte de marmite d'un air impassible, ses yeux fixés sur les falaises escarpées autour de la rivière. Son portable vibra, surprenant Oscar en plein milieu de ses explications, et l'adolescent aux yeux d'ambre jura.

— Ç-Ça ne va pas ? s'enquit timidement Elsa.
— Si, très bien.
— ... Magicarpe ! s'exclama Oscar, ses yeux verts exorbités.

Et Elsa mit un moment à se souvenir qu'il parlait du jeu de carte.

Pendant ce temps, une silhouette inquiétante s'approchait des trois adolescents, se dissimulant à travers les hautes herbes. Elle humait l'air d'une manière brusque et animale. Ça sentait bon. Le poisson. Mais pas au vinaigre.
La figure s'immobilisa, observant le groupe... Bientôt la sérénité bucolique des jeunes dresseurs allait voler en éclat. Ce n'était qu'une question de temps...

— Au fait, où est passé Élin ? se demanda soudain Oscar d'un air surpris.
— Peu importe, rétorqua Syd. Elle finira bien par revenir comme un boomerang.
— Hé, mais ça veut dire qu'on va se la prendre en plein dans la tête ça...
— H-heu, vous n-n'entendez pas quelque chose, v-vous ?

Un affreux doute saisit la bande d'adolescents.
Ils se levèrent brusquement mais c'était déjà trop tar—

— HEY !

Hé mais ça ne se fait pas de couper ainsi la parole à la narratrice !

— HEY LISTEN !

Soudainement une souple forme jaune bondit des hautes herbes en plein dans le campement, et faillit s'écraser sur leur déjeuner, en plein dans la marmite. Elle fut rapidement suivie par des éclairs flous—des Pokémon ?!—qui se déplaçaient en parfaites roulades-avants synchronisées, se croisant autour de la marmite.

— Agent Ponchiot ! Agent Gruikui ! Agente Vipelierre ! Agente Moustillon ! Agente Riolu ! Agent BAGGIGUANE ! Parés à décoller !

Hm. Le mystérieux « Baggiguane » avait plus l'air paré à sombrer dans le plus profond ennui qu'autre chose, mais passons. À la grande inquiétude de leur public, les Pokémon se dispersèrent après ces paroles, se fondant dans les hautes herbes alentours. Mince... enfin... au moins pouvaient-ils en profiter pour regarder l'intrus ? Il ou elle portait une combinaison intégralement dorée et moulante, assortie d'une cape noire, brillante, ainsi que de bottes et de gants blancs. Un masque peint de noir et de blanc cachait son visage et ses cheveux, et tout ceci lui conférait un air... mystérieux.

Un seul spectateur se permit de briser le silence qui s'était abattu sur la colline.

— Ça commence à bien faire. On sait qui tu e–
— SILENCE. répondit tout de suite la figure d'une voix spectrale.

Syd se tut en frissonnant et le groupe se resserra sous l'effet de la peur—Oscar chantonnait « I will survive, I will survive... » d'un ton désespéré... Ils étaient cernés, coincés, pris en otage ! C'était la fin !

Et c'est alors que le spectacle commença. Une bête rouge se rua depuis hautes herbes, roulant autour du public, qui parvint au bout de quelques secondes à discerner un Gruikui, mais aussi une petite Riolu. L'attaque utilisée par le cochon de feu n'était pas Roulade mais Boul'Armure, comme l'indiquait la faible lueur bleue qui entourait le Pokémon... c'était Riolu, d'une Vive Attaque, qui faisait avancer la paire, levant les jambes au rythme d'une French Cancan sur Gruikui en boule ! Le duo frôla plusieurs fois les spectateurs, mais surtout la marmite contenant leur repas, suscitant une immense inquiétude.

Puis l'intrus fit un ample geste de la main, ramenant sa cape derrière son dos, et les Pokémon s'immobilisèrent.

Gruikui se déplia soudainement, éjectant Riolu de son dos, et tandis que la Pokémon Aura, quelque part entre ciel et terre, se débattait maladroitement, il la carbonisa d'une immense Flammèche. Le public poussa un cri surpris et inquiet, Oscar se jetant vers le lieu de la terrible tragédie pour sauver la Riolu ! Mais Elsa le retint. Et la Flammèche cessa.

Riolu avait disparu.

Alors le public se remit de ses émotions en tremblant, Gruikui grouinant fièrement. Mais le tour de magie n'était pas fini. La figure masquée n'eut même pas à bouger qu'un Baggiguane à la moue blasé... se traîna... hors des buissons, accélérant un peu seulement après un regard noir de l'intrus.

Il décocha une Balayette bien contrôlée à Gruikui, qui réagit comme tout Pokémon attaqué le ferait : il se roula en Boul'Armure. Et tel un magnifique ballon de foot, il valdingua vers d'autres cieuuux ! Seulement rattrapé par un Ponchiot bien placé, qui d'une charge renvoya le cochon de feu vers Baggiguane ! Bientôt le duo enchaîna les passes, tel deux footballeurs aguerris, fusant à travers le campement à une vitesse toujours croissante. Finalement, ils se retrouvèrent devant un immense but tressé de Fouet Liane, gardé par une Vipelierre surexcitée.

Syd arqua un sourcil.

La gardienne déterminée n'impressionna pas du tout Baggiguane. Il décocha un regard professionnel au Ponchiot, qui hochant du chef, lui envoya Gruikui en un tir haut et arqué. Une trajectoire qui facilita grandement le Coup D'Boule que Baggiguane asséna au cochon de feu...

— OUAIS OUAIS ON VA L'APPELER ZINÉDINE ! ne put s'empêche de s'écrier Oscar.

... donnant lieu à un but retentissant. Mais on ne laissa pas le temps aux fans de cette nouvelle star internationale de se remettre du choc, de la beauté de ce but : aussitôt Gruikui enchaîna avec une nouvelle Flammèche, qui consuma totalement le but végétal, et les hautes herbes autour. On craignit un feu de forêt. C'était sans compter l'intervention d'un tout autre Pokémon... un fin Pistolet A O fusa vers l'épicentre du brasier, l'éteignant en une explosion de vapeur.

Pendant quelques instants, tous furent submergés par un nuage irréel, moite, une chaleur lourde et blanche. Puis elle s'éclaircit, peu à peu, et disparut, emportée par le vent.

Il ne restait que la Moustillon et la Vipelierre. La première était engagée dans un Tourniquet, la seconde dans un Ligotage—l'eau était complètement absorbée par les lianes luisantes, qui conduisaient tout le liquide vers une des tiges. Cette liane solitaire recrachait toute l'eau accumulée en une fine fontaine. Moustillon et Vipelierre, immobiles comme de marbre, ressemblaient à des sculptures anciennes.

Malheureusement le filet d'eau retombait droit dans la marmite de Syd.
Dans leur repas.
Il y eut un moment de silence.

— Rah mais c'est pas POSSIBLE, tu fais toujours tout foirer ! explosa Syd, brisant tout le calme et la sérénité de la campagne.

Le dresseur se rua vers leur pauvre déjeuner.
Les estomacs d'Elsa et d'Oscar ne purent qu'être d'accord avec sa colère, gémissant déjà de faim et de douleur... mais quand est-ce qu'ils allaient enfin pouvoir déjeuner normalement ?!

— SILENCE. tonna de nouveau la figure, mais cette fois, ça n'eut aucun effet.
— Arrête, Élin, ça devient franchement fatiguant, grinça Syd, puis il se tourna vers les Pokémon. Jeans, stop. Tout de suite.
— JE SUIS L'OMBRE JAUNE.
— C-comme d-dans Indochine ? s'enquit Elsa d'une toute petite voix.

Mais on l'ignora. Syd réussit à convaincre Jeans d'arrêter l'attaque, avec l'aide d'Oscar. Toute la petite équipe de Pokémon rejoint le campement depuis les hautes herbes avec des airs penauds, Lucky se ruant vers « l'Ombre Jaune ». On jugea la soupe de poisson irrécupérable, ce qui ne fit qu'accroître la colère de Syd. Le garçon tourna un regard d'ambre furieux vers la figure masquée.

— C'est quoi ton problème au juste ? On passait finalement une journée sympa et t'en fais encore qu'à ta tête !

À cet instant, la figure envoya bouler par la fenêtre toute prestance et décorum.

— Une journée sympa ? Non mais tu rigoles ? On s'ennuyait tous à mourir !

Il n'y avait plus aucun doute, c'était bien la voix d'Élin. D'ailleurs la blonde retira son masque d'un geste rageur et le balança sur Syd, qui l'évita de peu, l'objet terminant violemment sa course contre la marmite.

Élin et Syd se disputèrent, mais leurs paroles ne seront pas retranscrites ici sous peine de suicide de l'auteure.

Les dresseurs avaient l'air sur le point d'un venir aux poings—encore. Élin grondait « puisque tu comprends pas avec un combat, tu comprendras avec une claque ! » et Syd sifflait des injures mal dissimulées, foudroyant la blonde du regard. La situation allait vraiment dégénérer... Alors, Oscar sentit l'irritation d'Elsa gonfler, puis exploser, aussi puissamment que la dernière fois qu'il avait oublié son prénom.

— R-RAH MAIS RESPECTEZ LA P-PREMIÈRE CONDITION !

Silence. Un petit ange tout joufflue passa, fit la bise à chacun, les assomma d'une bonne chape de plomb, les laissant pantois.

— ET LA DEUXIÈME AUSSI ! rajouta Oscar un peu tard.
Nouveau blanc.
— V-vous avez signé un p-pacte, leur rappela Elsa.
— O-Oui, bafouilla Syd, les yeux ébahis.

Il faut dire qu'Elsa commençait vraiment à en jeter... avec ses airs sombres et déterminés... enfin c'en devenait presque inquiétant...

— Pfft, de toute façon moi je respecte le pacte, c'est Syd qui fait son Monsieur l'Insensible, comme d'habitude ! siffla Élin.

Comme quoi certains n'avaient toujours pas appris à se taire, ni à avoir peur d'Elsa... Syd lâcha un soupir irrité, offrant un juron irrité à la blonde.

— Tu es vraiment pitoya—

Et Elsa était sur le point de les engueuler de nouveau. Mais tous les dresseurs sur la colline se figèrent d'un coup. Un nouvel intrus était apparu. Mais cette fois il n'était ni masqué, ni vêtu de doré. C'était un jeune garçon chétif. Qui avait un très gros nez. Ils se penchèrent vers le dresseur, les yeux écarquillés tels quatre Hoothoot.

— Salut à vous, je m'appelle Robert Leafer ! J'ai vu de loin que vous répétiez des enchaînements... ça vous dirait de m'affronter en combat singulier ?

Un ange passa tandis qu'on considéra le petit, qui sans son nez serait probablement très mignon. Que la vie était dure, parfois.

Puis les quatre adolescents échangèrent des regards ébahis. L'événement était anodin pour tout dresseur en voyage initiatique : on rencontrait un collègue, on l'affrontait pour en apprendre plus sur ses techniques de combat, ou le racketter c'est selon... Mais vu à quel point la Route 20 était déserte en ce début d'été, le groupe n'avait pas encore eut d'occasion d'affronter d'autres entraîneurs Pokémon ! Cette confrontation était donc une véritable première, et ils hésitaient tous quant à la marche à suivre. Enfin, comme d'habitude, presque tous.

— MOI JE VEUX BIEN ME BATTREE ! cria Élin avec un sourire ravi.

Enfin un peu de nouveauté ! Un peu d'action ! Quelque chose pour la tirer de l'ennui de la marche et des disputes sans fin ! Woohoo ! Malheureusement pour elle, une réponse claire et nette claqua dans le silence soudain.

Non. C'était Syd qui avait pris la parole. Nous avons déjà fait un match ensemble hier, c'est au tour des autres de s'entraîner.
— Mais je—
Élin. C'est vrai qu'on a aussi besoin de pratique, interrompit Oscar d'un ton ferme. Il avait retrouvé sa superbe : lui aussi pouvait mater les disputes !

Les adolescents se retournèrent vers le dénommé Robert, qui avait pris un air gêné.

— Si je vous dérange, je peux toujours passer mon chemin...
— Non, ne t'inquiète pas, sourit calmement Syd. Je suis sûr qu'Elsa ou Oscar sera ravi de t'affronter, compléta-t-il en désignant chacun des dresseurs de la main.

Il y eut un lourd silence. Puis Élin plissa ses yeux, et décocha un regard noir à l'assemblé. Ce regard devint meurtrier qui il se posa sur Syd.

— Pfft... sale rabat-joie... si c'est comme ça j'me casse !

Et elle mit un point d'honneur à leur tourner le dos le plus lentement possible avant de dévaler la colline, laissant derrière elle une atmosphère électrique et tendue. Oscar soupira, toute sa détermination évaporée, se mordant la lèvre.

— Bon... j'vais la suivre, histoire qu'elle ne disparaisse pas, Elsa, t'as qu'à affronter... Robert... Il envoya un sourire léger à la nouvelle venue, et conclut d'un ton désolé : ravi de t'avoir connu !

Quelques instants plus tard, il devint lui aussi tâche floue et lointaine dans les hautes herbes, et ils l'entendirent vaguement crier le nom de la blonde. Les trois adolescents restants se firent face, déjà plus détendus. Enfin, pour tous sauf Elsa... malheureusement, la brune était morte de trac. Elle avait les joues brûlantes et ses genoux tremblaient. C'était plus fort qu'elle, elle avait trop peur de perdre, devant Syd, d-devant... elle avait trop peur de perdre ! Toute la confiance qu'elle avait acquise ces derniers jours vola en éclats. Dans ses oreilles résonnèrent les moqueries de ses anciens camarades de classes, tous les noms dont Oscar l'avait affublée avant de retenir son prénom...

Melba... Gretza… Elba… Zelda !

— E-euh, balbutia-t-elle. J-je n-ne s-suis vraiment p-pas... t-très forte...

Robert sourit, Elsa eut un hoquet effrayé, y voyant du mépris, de la condescendance, et baissa ses yeux clairs. Syd réprima un soupir, peiné, préférant rester en dehors de tout cela, car la brune avait besoin d'apprendre à se débrouiller seule... Cependant contre toutes les attentes d'Elsa, Robert rit gentiment.

— Tout va bien alors : t'es dans le même cas que moi ! Je n'ai même pas encore commencé mon voyage initiatique, j'étais juste parti faire une randonnée et je suis tombé sur vous.

Elsa releva si vivement le visage qu'elle en eut le tournis. Elle tenta de répondre quelque chose, mais—mais—sa langue avait triplé de volume, sa salive était brûlante et acide, elle s'étouffait ! E-elle s'étouffait...

— Quel type de match préfères-tu, double ou simple ?

Elle n'arrivait pas à répondre. Elle n'arrivait pas à répondre.
Seule sur la colline déserte.

— Elsa... commença Syd, délicatement.

Son prénom lui vint comme une claque froide. Une brusque bouffée d'oxygène. Oui, quelqu'un se souvenait de son prénom. De la personne qu'elle était. Non elle n'était pas insignifiante !

— S-Simple ! s'exclama-t-elle.

Et d'un coup l'adrénaline du combat l'inonda. Elle se sentit vivante.

— Bien, débuta professionnellement Syd. Ce match oppose Elsa de Volucité et Robert...
— Vous pouvez m'appeler par mon nom de famille, Leafer, proposa le garçon. C'est ce que tout le monde fait.
—Ah ? grimaça Syd, fronçant les sourcils. Et pourquoi ça ?
Leafer tourna vers le dresseur avec son petit minois délicat—enfin, mis à part son nez—et rigola.
— Ben, parce qu'à part ma mère, personne n'a envie de m'appeler Robert. Et je crois que même elle regrette !
— ... Ah.

Il y eut un court silence gêné. Puis Syd inspira et termina hâtivement :

— Au vu du nombre de Pokémon des dresseurs, ce match se déroulera en un contre un. Il n'y aucune limite de temps. Seules sont admises les attaques reconnues par la Ligue d'Unys.

Alors les dresseurs se firent face.


(Natation synchronisée !)
— AMARYLLIS, GO !
— BARGANTUA, GO !

M—Merde. Les deux Pokémon plongèrent dans la rivière et les dresseurs coururent vers le bord des falaises, s'accroupissant pour ne pas tomber. Ils ne pouvaient pas voir leur compagnons dans le torrent sombre. Elsa frissonna. Elle fouilla vivement son sac à main, y retrouvant son Pokédex, qu'elle brandit vers la rivière. Leafer, prudent, avait eu la même réaction, et leurs appareils clignotèrent en détectant les Pokémon.

Bargantua, Pokémon Violent, débuta son Pokédex d'un timbre aigu. Les bleus et les rouges se détestent cordialement et se battent dès qu'ils s'aperçoivent. Pourtant, il y en a toujours un ou deux dans un groupe de l'autre couleur. Un Pokémon très violent.

Puis l'appareil clignota, lui affichant en grand symboles rouges : Niveau 14.
Rah, non ! Deux niveaux de plus que son Moustillon ! Elle n'aurait jamais dû accepter ce match, elle—

— Bien, intervint Syd. Il les fixa posément, Elsa, Leafer. Vous pouvez commencer !

Aussitôt, Carla ordonna un Aqua Jet. La silhouette du Bargantua éclata à la surface et se projeta à contre-courant vers la Moustillon d'Elsa. Elsa arracha une touffe d'herbe avec ses mains, stressée. Ok, il fallait qu'elle trouve un moyen de contrer, son esprit fila à travers toutes les possibilités offertes par Amaryllis, elle se concentra son sur petit Pokémon et ordonna :

— Utilise Mimi-Queue pour aller plus vite et Charge !

La silhouette Amaryllis apparut sous les flots un bref instant et puis la petite Pokémon fonça vers son adversaire. La collision entre les deux Pokémon leur arracha chacun des cris rauques, tandis que leurs dresseuses serraient les dents. Heureusement, si Bargantua était plus puissant, il avait le désavantage d'être à contre-courant, tandis Amaryllis usait de la force des flots pour faire pression sur son adversaire.

— Coup D'Boule ! cria Leafer. Elsa réagit au quart de tour.
— ... Pistolet à O ! s'écria-t-elle de toutes ses forces.

Bargantua luisit sous les remous de la rivière et fonça vers Amaryllis. Mais la petite Pokémon cracha un puissant jet d'eau qui, mêlé au courant de la rivière, repoussa le poisson carnivore et—

— Non... souffla Leafer. Brouhaha !

Elsa arracha une autre touffe d'herbe, se demandant à quoi pouvait servir l'attaque, et se penchant plus en avant malgré le danger. Elle scruta les flots à la recherche de Bargantua, qui avait de nouveau disparu—et puis de grand remous troublèrent la rivière, aspirant Amaryllis et la projetant contre les falaises avec force et fracas. C'était Brouahaha dont Bargantua se servait pour perturber le cours de l'eau.

Le sang d'Elsa se glaça.
— A-Amar-rylli—

Elle voyait la tête blanche de sa petite Pokémon, qui perdait ses forces et se laissait happer par les flots. À la vue de l'expression apeurée de sa Pokémon, le sang d'Elsa ne fit qu'un tour.

— A-Amaryllis, Pistolet à O ! Saute sur le rocher !

Heureusement, la loutre avait encore la force d'exécuter l'Attaque. Sous le regard ébahi de Syd et de Leafer, la créature rugit et cracha de l'eau vers le fond de la rivière, s'arrachant au courant ténébreux pour voltiger vers un rocher. Pendant un instant elle resta suspendue en l'air avant de cesser le Pistolet à O et d'atterrir sur la pierre mousseuse, luisant faiblement.

Le cœur d'Elsa bondit de joie, et distraite, elle entendit Syd résumer :

— Moustillon a monté d'un niveau.

Sa Pokémon était maintenant au niveau treize, et à ce stade-là, son espèce apprenait...

— P-Puissance.

Avec cette attaque, et les deux précédentes Mimi-Queue, la prochaine capacité qui touchait Bargantua risquait d'être fatale. Sauf que sa propre Moustillon peinait aussi à continuer, Elsa n'entendait que trop bien sa respiration sifflante se répercutant entre les falaises.

Le dénouement du combat approchait.
Elsa prit une grande inspiration.

— Amaryllis, Pistolet à O, trouve Bargantua.

Mais Leafer répliqua immédiatement.

— Bargantua, Aqua Jet et Coup D'Boule !

Bargantua prit son élan et fusa vers Amaryllis, prenant son élan grâce à Aqua Jet. La loutre s'accroupit sur le rocher pour mieux prendre appui et projeta un gros jet d'eau sur son adversaire, le ralentissant, mais celui-ci gagna du terrain. La collision fut rendue encore plus violente par la Puissance d'Amaryllis. Les deux dresseuses se tendirent, criant des encouragements pour leurs Pokémon. Mais Bargantua percuta le crâne blanc de la petite loutre et elle s'écroula.

— N-Non, souffla Elsa.

Elle ravala des larmes et sa salive, précipitamment, et rappela sa Pokémon avant de la faire sortir de nouveau pour la cajoler. La starter eau lui offrit un regard vert pâle, à demi conscient.

— P-Pardon Amaryllis, j-je n'ai pas s-su... g-gagner... une nouvelle fois, Elsa déglutit. Elle avait perdu, certes... mais c'était de sa faute. Uniquement de sa faute. Sa Pokémon avait été exemplaire. Je suis très fière de toi, ajouta-t-elle doucement, caressant les petites oreilles de la Moustillon.

Elle la rappela de nouveau, se relevant difficilement et observant Leafer. Le dresseur avait aussi fait rentrer son Bargantua après quelques félicitations et la promesse d'un bon repas. Alors les dresseurs s'approchèrent et se serrèrent la main, Elsa tentant de cacher sa déception. Toute la tension, l'adrénaline, s'étaient évaporées. Elle était maintenant face à ses erreurs.

— Leafer a gagné le match, annonça Syd avec un sourire compatissant pour d'Elsa.

Elle fit un hochement de tête gêné. Mais sa plus grande surprise vint une nouvelle fois de Leafer. Le dresseur dans sa besace noire et lui tendit une sorte de fiole en plastique orange encapuchonnée de gris.

— J'aimerais t'offrir cet Antidote, il neutralise n'importe quelle toxine ! sourit-il. J'en empore toujours avec moi quand je fais une randonnée, au cas où. Et puis j'ai cru comprendre que vous vous dirigez vers Ondes-sur-mer, et la championne locale est spécialiste de Type Poison, alors...
— O-Oh, merci, s'étonna Elsa.
— ... de rien, honnêtement, tu t'es super bien battue ! C'est juste que Bargantua a un plus haut niveau.

Syd s'approcha pour discuter de méthodes d'entraînement avec Leafer. Le garçon leur expliqua que sa mère était Pokémon Ranger dans le parc naturel au sud d'Ondes-sur-mer, et qu'il entraînait souvent ses Pokémon dans la mer ou dans des rivières pour développer leur force. Il leur donna l'adresse d'une bonne boulangerie à Ondes-sur-mer, et puis leur sourit.

— Vous savez, y a une manifestation contre la Team Plasma le 22 juin, ça commence à treize heures devant le Centre Pokémon, enfin vous pouvez voir ça aux infos.
— Une m-manifestation ?
— Ben oui... y a les élections parlementaires bientôt et un candidat de la Team Plasma, enfin du Parti Royaliste, va peut-être gagner, expliqua Leafer. Ils sont fous, ils veulent enlever les Pokémon à leurs dresseurs !
— J'ai entendu parler de ça, souffla Syd. Mais c'est illégal, non ? Ils n'ont pas le droit de kidnapper des Pokémon...
— Si assez de candidats de la Team Plasma gagnent dans tout Unys, ils vont peut-être réussir...

Les trois adolescents discutèrent quelques minutes encore, puis Leafer pris congé, leur laissant juste son numéro Vokit, pour le cas où ils voulaient manifester ensemble. Bientôt, le dresseur au gros nez disparut dans les hautes herbes de la Route 20, et Syd et Elsa se retrouvèrent seuls.

Mais Elsa ne parla pas immédiatement. Elle revoyait en boucle son combat, tous ses choix, ses ordres, résonnaient dans sa tête... elle avait fait de son mieux. Finalement, elle pouvait peut-être être fière de ce match, et de l'expérience acquise. Souriante, elle leva ses yeux clairs au ciel, et constata avec bonheur qu'un autre de ses cheveux s'était détaché de ses tempes, et prenait son envol.


(Élin'possible)
Oscar retrouva Élin au milieu d'un ponton, contemplant pensivement une barque en bois à la peinture écaillée, abandonnée. Le soleil de fin d'après-midi dorait le vieux bois. Élin souriait sous la lumière, malgré les mèches emberlificotées partout sur son visage, hochant la tête au rythme d'une musique inaudible.

Quand elle le remarqua elle lui fit un grand sourire très flippant.

Omfg Hello!!

Et comme l'autre fois, il ne comprit pas en quelle langue elle parlait.

— Tu dis pas « yosh » d'habitude ? lui sourit-il néanmoins, s'arrêtant à ses côtés.

Ils étaient à cent, peut-être deux cents mètres de la colline où ils auraient dû déjeuner—d'ailleurs l'estomac d'Oscar grognait, désespérément vide, rah il en avait marre qu'Élin ruine leurs repas !—et ici, les falaises s'estompaient et disparaissaient complètement. La plaine était de nouveau uniformément plate, vaste, presque qu'infinie.

— T'es bien silencieuse... s'aventura-t-il. Encore énervée après Syd ?

Elle le regarda sans comprendre.

— Syd ? ... ah oui Syd ! Bah nan en fait, je m'en fiche... s'il aime pas le cirque c'est son problème...
— T'as ruiné notre repas !
— Il a ruiné ma bonne humeur !
— Mais y a pas que toi qui compte dans la vie !
— Tout à fait d'accord, d’ailleurs il a aussi ruiné la bonne humeur des Pokémon !

Ils se fixèrent impassiblement quelques secondes... puis éclatèrent de rire, laissant tout reproche s'évaporer avec leurs joyeux gloussements. En voilà une manière saine de bien s'entendre : se dire les choses honnêtement, puis les oublier !

— Dis, pourquoi t'as pas combattu la dresseuse ? s'enquit innocemment Élin, jouant avec une de ses mèches d'or.
— Hm ça me disait pas trop... (il n'osa pas avouer « parce que je voulais te suivre », mais embraya sur :) Elsa voulait combattre, je pense.

Tout à coup la dresseuse se renfrogna.

— Elsa ? T'es déjà ami avec elle hein... depuis que tu as retenu son prénom, elle t'accapare !
— Roh mais t'inquiète pas, s'affola-t-il sous son œil outré. Je l'aime bien Melba... enfin Zelda... enfin Zaza... mais jamais personne ne pourra te remplacer !
— Aha ! s'exclama Élin avec satisfaction. J'espère bien !

Oscar haussa les épaules en souriant.

— Je sais pas pourquoi j'apprécie Elsa, en fait. Mais elle est sympa, jamais énervée, puis elle dit des trucs intéressants.
— Ah, parce que moi je suis agressive et ennuyante... s'offusqua Élin.
— Non, t'es juste hyperactive ! rétorqua le garçon aux yeux verts, les levant au ciel.

Ils se sourirent de nouveau et s'avancèrent sur le ponton, qui menaçait de s'écrouler à chacun de leur pas, ce qui ravissait Élin autant que cela inquiétait Oscar. La blonde marcha un instant sur les mains, zigzagant au bord de l'eau avec des rires émerveillés, puis se rétablit à côté du vieux bateau. Elle haussa les épaules d'un air pensif.

— N'empêche cette Elsa, elle a l'air intelligente... je l'ai entendu marmonner deux-trois trucs sur la stratégie, et ouah, elle s'y connaît vachement plus que moi !
— Hm, en même temps c'est pas difficile... ironisa Oscar, haussant les sourcils. Tu connais même pas le nom des attaques de tes Pokémon...
— ... pff mais n'importe quoi, c'est juste que j'en invente...

La blonde lui tira la langue avec la mauvaise foi la plus absolue, mais il laissa passer. L'adolescent devait avouer qu'il était prêt à absolument tout lui pardonner... enfin peut-être pas les repas ruinés mais bon !

— Dis, je crois qu'Elsa a fini son combat, intervint-il en plissant les yeux, tentant de distinguer l'issue du combat depuis leur petit embarcadère.
Mais Élin ne l'écouta pas, jouant avec la grosse corde qui retenait le bateau au pouton.
— Oscar ?
— Quoi...? répondit-il distraitement, toujours préoccupé par le combat d'Elsa.
— Tu le trouves comment, ce bateau ?
— Hein ?

L'adolescent sursauta et lui lança un drôle de regard blasé. Il oeilla rapidement la vieille barque écaillée dans laquelle Élin s’était assise et ne lui trouva rien de remarquable.

— Il est trèèès beau le bateau. Bon, viens maintenant, on va récupérer les autres !

[...]

— Alors alors ? Comment s'est passé le combat ? s'enquit Oscar dès qu'ils s'approchèrent du campement.

Élin entendit bien la réponse de la brune, qu'elle avait perdu mais « beaucoup appris », mais elle était occupée à autre chose. Elle avait eu une idée. Un tour de magie comme ce matin mais en mieux. Et pour la réaliser elle avait vraiment besoin de Lucky et Baggy, ils étaient indispensaaables ! Sous le regard suspicieux de Syd elle leur murmura des instructions—et força Baggy à l'écouter à renfort de regards noirs. Non mais oh. Y avait pu' d'respect. Ils étaient ses Pokémon, ils se devaient de l'écouter !

— Bon, allons-y, ordonna Syd.
— Chef oui chef ! répliqua Élin.

Il se prenait pour qui encore, Arceus ? ... c'était elle la cheffe !

Le dresseur ne répliqua pas, décidant qu'un conflit à cette heure de la journée serait vraiment dommage. En effet, le soleil déclinait, apportant avec lui le calme de la fin de journée, la torpeur de la nuit. Déjà la plaine se teintait de gris et de lavande... une semaine entière s'était écoulée depuis leur départ d'Amaillide, soupira-t-il intérieurement, pensant à Otis. Syd ne pouvait pas dire que sa relation à Élin était facile, et il ne connaissait peu Oscar... mais il aimait bien Elsa, et, plus que cela, il se faisait à la vie en groupe : à la vie avec des gens de son âge, qui commettaient des erreurs et proféraient souvent des énormités pas possible, mais étaient des adolescents comme lui.

Elsa partageait le même sentiment. Avant ce voyage initiatique, elle n'avait jamais eu d'amis, de personnes avec qui elle se réveillait le matin, qui l'attendaient pendant qu'elle mangeait et prenait sa douche, qui lui souhaitaient bonsoir alors que la nuit chassait les dernières braises du couchant. Elle n'avait jamais vécu au grand air, perdue dans le néant des plaines ; elle ne s'était jamais imposée auprès d'un garçon, elle n'avait jamais discuté avec Oscar avant ce voyage ! Leur chemin ensemble marquait un tournant de sa vie, la découverte des fous rires, des hurlements et de la terreur contre la Team Plasma. La jeune fille studieuse sentait que jamais elle n'oublierait le chemin parcouru ensemble.

Oscar, quant à lui, ruminait depuis une semaine sa discussion avec Elsa—le jour où il avait appris son nom. Le hippie n'était pas habitué à se poser des questions. Il n'était pas habitué à ressentir des émotions profondes, à se creuser la tête, lui qui ne travaillait pas en cours, qui était sorti le soir dès ses treize ans. C'était vraiment étrange que Madame Lenoir l'ait sélectionné pour son voyage d'élite, d'ailleurs... À présent, Oscar revoyait sa vie sous un autre angle, fouillait le moindre de ses souvenirs, pour chercher quand il avait pu ignorer Elsa, ou blesser d'autres simplement car il ne les voyait pas... Oscar réalisait qu'il avait vécu une enfance aveugle. Il se sentait stupide. Mais au moins, ce voyage lui avait permis d'enfin ouvrir les yeux, de rencontrer des amis travailleurs, qui lui livraient leurs secrets et le poussaient à se remettre en question. Ça, pensait-il, optant pour privilégier le bon côté des choses, c'était une vraie chance !

Plongés dans leur pensées, les quatre dévalèrent la colline. Ils s’élançaient dans une mer grise où le spectre de la nuit se dessinait déjà, se faufilant entre les herbes rêches, les fleurs sauvages. Le vent battait leurs figures encore enfantines, si frêles face à l'indifférence de la nature.

Aucun d'entre eux ne put deviner le plan d'Élin. Aucun d'entre eux n'eut une chance de protester. Et ils ne surent pas, combien ce « tour de magie », qui allait leur faire gagner un jour entier de voyage, allait changer le cours de leur vie. Peut-être leurs parcours étaient déjà tracés, déterminés depuis longtemps par leur famille, leur personnalité, la fatalité. Peut-être que tout s’était joué à Amaillide, quand ils avaient connu la Team Plasma. Mais une part de hasard persistait toujours envers et contre les lois du monde. Le hasard voulut ce soir-là que Syd reçut un texto d'Otis lui annonçant qu’il allait un peu mieux, qu'Oscar et Elsa soient distraits.

— Et du coup tu traînais avec qui, l'année dernière, enfin en cinquième ?
— P-Personne... je n'avais p-pas v-vraiment d-d'amis.
— Ah... désolé... mais maintenant, je suis ton ami ! Nous sommes là pour toi !

Le hasard voulut ce soir-là que personne ne remarque le sourire malicieux d'Élin, que personne n'entendit les instructions qu'elle chuchota à ses Pokémon. Et ils arrivèrent devant l'embarcadère abandonné. Élin surveilla tout le groupe d'un regard brillant de vitalité, d'enthousiasme, de folles idées. Et Syd comprit, fit la liaison entre « Élin » et « bateau ». Mais c'était déjà trop tard. Élin fit le signal à ses Pokémon, montant vivement en équilibre tandis qu'ils s'élançaient tel des ninjas vers les adolescents.

Cela se passa très rapidement. Baggy faucha Syd d'un Balayage adroit, suivi d'un coup de pied on-sait-où, et le dresseur aux yeux d'ambres s'effondra dans le bateau, sa tête heurta brusquement une planche et envoyant sa conscience danser parmi les étoiles. Oscar et Elsa suivirent en une stupeur muette, encouragée par quelques Charges effrayantes de Lucky.

Personne ne put résister. Et Élin bondit à leur suite dans la barque avec un immense sourire—son rire tranchant avec la sidération du groupe.

— Yes ça a marché ! Merci Baggy, merci Lucky ! Woohoo partons à l'aventuure !

D'un seul coup Baggy trancha la corde qui retenait encore l'embarcation au ponton. Le bateau s'ébranla, porté par les flots sombres et tumultueux de la rivière, et ils plongèrent vers la rive opposée en un hurlement de terreur, tombant les uns sur les autres. Heureusement, ils se rétablirent après un autre remous.

Elsa prit le genou de Syd dans le ventre.
Oscar commença à être complètement malade, ses joues et ses lèvres prenant une teinte verte inquiétante.

—M-M-Mais t'es totalement B-BARRÉE ! s'écria Elsa de rage, les voyant plonger vers un point de non-retour.

Déjà les deux garçons étaient hors-service, elle était seule pour contenir cette force de destruction qu'était Élin, mais mince elle ne s'en sentait pas capable, elle bégayait, elle était moins belle, moins forte moins charismatique...

— Euhh oui ok c'est chaud de se diriger ! admit la blonde en un haussement d'épaules. Mais regarde ça va beaucoup plus vite, et plus besoin de marcheeer !
— T-T'aurais pu nous d-demander quand même, s'étouffa presque la plus grande des deux, complètement abasourdie, complètement paniquée, sa dernière syllabe se transformant en un cri quand la barque tangua de nouveau.
— Ouais mais Syd aurait jamais accepté...

Elles jetèrent un regard au dresseur de Gruikui, totalement dans les vapes.

— Il a-aurait eu r-raison... réalisa soudainement Elsa avec effroi. La b-barque p-prend l'eau...

Elle sentait déjà l'humidité monter, puis un liquide glacial dans ses chaussures. Ce qu'elle avait pris pour de la peinture écaillée était en réalité des faiblesses dans la boiserie.

— Oh merde, souffla Élin.

Elle commençait seulement à réaliser l’ampleur de sa sottise.
Le sang d'Elsa bouillit et elle réagit au quart de tour :

— AMARYLLIS GO ! PISTOLET A O !

Avec un peu de chance la vitesse allait les sauver ! Avec un peu de chance ils allaient survivre ils n'allaient pas couler mais m-merde, dans quelle merde les avaient encore mis l'autre folle ! La Moustillon dû sentir la panique de sa dresseuse, car une fois matérialisée, elle s'adonna au Pistolet A O le plus véhément de sa vie.

Le jet d'eau frappa le fleuve derrière eux avec force et violence, en une explosion de bulles, et brusquement ils se sentirent décoller, puis rebondir contre l'eau un haut le cœur. Oscar vomit tripes et boyaux. Le bateau accéléra. Avec le choc, même Syd se réveilla, restant complètement perdu et désorienté. Seule Élin retrouva la bonne humeur en s'écriant « WOOOHOOOO ! ».

Mais son cri mourut bien vite quand ils se rendirent compte que la rivière débouchait sur une cascade, décollèrent brutalement, firent un immense vol plané dans le vide.

Et s'écrasèrent à travers la magnifique fenêtre ouvragée d'un bâtiment colossal.