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Echos Infinis de Icej



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Informations

» Auteur : Icej - Voir le profil
» Créé le 24/08/2015 à 07:06
» Dernière mise à jour le 04/04/2020 à 05:08

» Mots-clés :   Action   Aventure   Humour   Présence de personnages du jeu vidéo   Présence de shippings

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Épisode 07 : Tensions
(Modifié le 04/04/20)

(Disputes…)
— NOOOON !

Le hurlement, déchirant, vibrant d’émotion, venait sans surprise d’Élin. La blonde s’accrochait désespérément au cadre du lit en position de Stari, toujours en pyjama, les yeux fous et cernés. Oscar et Elsa tentaient de la décrocher de son refuge depuis plus de dix minutes, mais Élin était tenace et ne cédait pas.

La dresseuse de Baggy refusait de se lever aux aurores ! C’était terrible, inhumain, une véritable torture physique et mentale et—

— AHHH !

CRAC. Ça y est, la tête de lit venait de céder. La tête de lit, en bois massif. Complètement choqués et dépassés, les trois ados valdinguèrent à l’autre bout de la pièce, d’abord Elsa, puis Élin, puis Oscar, et s’écrasèrent brutalement contre la cheminée. Les filles roulèrent jusqu’au fond du foyer qui heureusement n’était plus utilisé depuis longtemps, et se retrouvèrent les visages collés, yeux dans les yeux, corps emberlificotés dans le noir. Oscar n’eut pas cette chance. Il percuta violemment le rebord en pierre de l’âtre, et contempla la tête de lit tomber… tomber… tomber… direct sur son crâne en un BONG retentissant.

Le pauvre en resta sonné.

Puis une Jeans surexcitée se mit à joyeusement sautiller autour de lui, poussant de petits cris incompréhensibles qui lui vrillèrent douloureusement le crâne. Enfin, Baggy s’amena, et ricana cyniquement en fixant Oscar, l’air de dire « quand le lit t’a cogné, ça a sonné creux pauv’ type ».

Vraiment, il était le plus malchanceux de la terre bouhouhou… le beau-gosse retint quelques larmes, attrapant sa Starter et la câlinant comme un des doudous de son enfance.

— Jeeeeans si tu savais ce que je suis malheureuux…

Ce fut à cet instant que Syd pénétra dans la chambre, vêtu pour la route, fraîchement douché. Il contempla muettement le massacre, lit décapité, draps complètement déchirés, et Oscar qui pleurait de chaudes larmes de Crocorrible. Étrangement les premiers mots qui lui échappèrent sur un ton monocorde furent les suivants :

— Où est Élin ?

Toujours cachée dans l’âtre, la blonde se recroquevilla avec effroi, suppliant muettement Elsa de ne pas révéler leur position. Syd faisait trop peur. Oui Syd faisait vraiment trop peur. Malheureusement la gamine n’avait pas escompté qu’Oscar puisse se relever et avec un sanglot mélodramatique et déclamer :

— Je crois que la cheminée a englouti les filles !

Il n’en fallu pas plus pour que Syd se penche, les remarque avec un regard désabusé, et les traîne en dehors de leur cachette par les chevilles. Élin et Elsa finirent en un tas de chair confuse sur le parquet, la dernière se détachant bien vite de son amie blonde, inquiète pour Oscar… elle rampa jusqu’à lui, les cheveux ébouriffés et les lunettes de travers. Il lui fit un sourire béat :

— Oh tu es sorti des entrailles du monstre, Elsa !

De quoi illuminer toute sa matinée. Pendant ce temps Syd foudroyait Élin du regard, il pointa la tête de lit arrachée, les draps déchirés, et ordonna sévèrement :

— Range.

De quoi détruire toute sa matinée.

À part ça, la journée avait bien commencé. Déjà, Oscar avait pu poursuivre sa discussion passionnante sur les chemises à carreau et les barbes carrées avec Albert. Oscar était hipster, Albert était bucheron.
 
— Ah ouais ouais, les chemises à carreaux c’est trop beau… soupirait le jeune en tâtant le tissu du vieux fermier, coloré et léger.
— Celle-ci arbore un motif typique de la région ! se vantait l’adulte en roulant les ‘r’ et appuyant les ‘é’, arborant un accent typique de la région.
 
Elsa rit de les entendre discuter ainsi, et bientôt elle s'impliqua elle-aussi dans la discussion, vantant les mérites du coton tandis qu'Albert fustigeait les tissus synthétiques. Goyah, de son côté, s’introduit dans la cuisine pour observer l'assemblage des sandwichs destinés au voyage des adolescents, souriant avec satisfaction en apercevant tous les oignons, feuilles de salades et poivrons déjà hachés menus. Syd écoutait studieusement la cuisinière, déchiquetant le porc braisé avec des mains lavées.
 
— Il vaut mieux qu’il soit en tous petits bouts, c’est plus pratique à manger, expliquait Marie, s’activant à tailler quelques fines lamelles de cornichon.
— Combien de temps cela prend-t-il de le préparer ? s’enquit Syd, ne relâchant pas sa concentration.
— Au moins quelques heures à cuire dans une grande marmite avec du bouillon de volaille maison, du thym, du romarin, du poivre, beaucoup d’oignons et d’ail. La viande rejette naturellement un suc…
 
Marie et Syd était si absorbés par leur tâche qu’ils ne remarquèrent pas l’ombre d’un corps imposant s’approcher d’eux. Ils ne sentirent sa présence que quand cette ombre mystérieuse huma le parfum des ingrédients d’un souffle chaud.
 
Goyah ! sursauta Marie Camus, lâchant presque son couteau.
— J’peux vous aiiiddeer ? bava l’ex-Maître, en toute dignité.
 
Les cuisiniers arquèrent un sourcil dubitatif. Ils échangèrent un coup d’œil sec. Puis la réponse claqua, sans équivoque.
 
— Ah non, certainement pas.
 
Goyah ne put que protester, déçu, puis s’asseoir à l’immense table de la cuisine comme un enfant boudeur. Chacun retourna à ses occupations, l’esprit vide et reposé comme c’est souvent le cas dans les grandes demeures de campagne, au grand air.

Effectivement, la journée aurait pu bien commencer. Mais un énorme vacarme rententit dans la pièce d’à côté, ainsi que des hurlements frustrés. Cette fois Marie en lâcha réellement son couteau, se coupant un doigt avant de se précipiter avec Goyah vers la source des cris.
 
Quant à Syd, il nettoya lentement son couteau à l’eau et au savon, le sécha sur le bord de son tablier, et le reposa. Aucune raison de se presser. Il connaissait déjà la source du tapage, sans pour autant en distinguer les voix : Élin. Levant les yeux au ciel, le dresseur de Gruikui quitta la grande cuisine, et s’accouda à une coiffeuse désertée. Non loin de lui, au cœur du salon, se jouait un véritable drame à l’ancienne.
 
Mais revenons quelques minutes en arrière.
 
Il y a quelques minutes donc, Tcheren avait terminé sa deuxième conférence avec Iris. La Maîtresse lui avait promis d’informer tous les autres Champions, et de mobiliser des dresseurs fiables pour fouiller tous les recoins d’Unys à la recherche de N, de Nikolaï, de Ghétis, et de tous les Sbires Plasma vivant en ce bas monde. S'ils trouvaient une piste, Tcheren serait prévenu. Puis sa supérieure hiérarchique lui avait ordonné de regagner immédiatement le district de Pavonnay, pour superviser les recherches locales. Cela ne dérangea pas l’intellectuel le moins du monde, puisqu’il désirait rentrer à son arène de toutes les manières, et il acquiesça sans résistance quand Iris raccrocha.
 
Il avait donc comme priorités : un, regagner Pavonnay ; deux, fermer l’Arène quelques jours pour se consacrer pleinement aux premières recherches.
 
Tcheren devait prendre congé dans la seconde. C’était tant mieux que les autres adolescents partaient aussi. Il fourra le peu d’affaires qu’il avait sorti dans son sac de voyage, replaça ses lunettes correctement sur son nez, et dévala l’escalier du salon, prêt à faire des au-revoirs hâtifs.
 
Tandis qu'il posait pied sur la dernière marche des escaliers, un boulet de canon blond la heurta de plein fouet. Un grand sourire trop blanc aveugla ses yeux fatigués, tandis qu’une exclamation braillarde l’assourdit.
 
— ÇA Y EST TCHEREN JE SUIS PRÊTE À T’AFFRONTER !
 
Oh que non.
Pas elle.
 
Tcheren recula vivement, tentant de mettre le plus de distance possible entre lui et le monstre, un mal de crâne pulsant entre ses deux yeux. Il soupira. Encore une séance prise-de-tête, une ! Et engagez-vous, rengagez-vous qu’ils disaient !
 
— Je m’excuse Élin, mais je ne peux pas accepter ton défi, j’ai des choses urgentes à faire, commença-t-il poliment, se pinçant l’arête du nez.
 
C’est alors que Syd était rentré, et s’était accoudé à la coiffeuse abandonnée. De l’autre bout du salon sombre, il observa la face souriante d’Élin s’écrouler sous le poids de la déception. La blonde avait espéré gagner son premier badge avant Syd, pour lui prouver qu’il ne ferait pas tout le premier nanananèèreuh, mais… mais…
 
— Mais pourquoi, c’est bien ton boulot pourtant non ? Et puis comment on va faire sans badge, on ne peut rien acheter, on est accrédité à rien et –
— Pas de problème de ce côté, je vous offre le Badge Basique, répliqua Tcheren. Vous l’avez bien mérité, après ce noble combat contre la Team Plasma.
 
Le Champion, pensant avoir repris le contrôle de la situation, s’approcha vaillamment de la petite peste blonde, une des précieuses insignes à la main. Il le lui tendit gentiment, prêt à décamper de la pièce dès qu’elle l’aurait ne serait-ce que frôlé. Mais évidemment il n’eut pas cette chance. Parce qu’Élineera Hei était une gamine prise de tête, elle se renfrogna et lui renvoya la pire des grimaces.

 — Non.
 
RAH. Le mal de crâne de Tcheren s’intensifia, comme si un pic à glace s’enfonçait brutalement, rythmiquement derrière son œil gauche, brûlant ses nerfs. Décidément, il retrouvait beaucoup trop de White en elle—surtout les mauvais côtés.
 
— Comment ça « non » ? grogna-t-il, lui lançant un de ses plus beaux regards noirs et parvenant à peine à rester maître de lui-même.
— Non, je n’en veux pas, énonça Élin, yeux sombres tout aussi flamboyants. Je n’en veux pas si je ne t’ai pas combattu.
— Oh et bien tant pis pour toi, je n’ai pas le temps de marchander ! rétorqua le Champion.
— Ok, tant pis, lui renvoya Élin.
 
… Après quelques secondes de silence, l’expert en Pokémon Normaux souffla d’exaspération… Alors même qu’elle lui laissait l’opportunité de partir il restait parlementer ! Non mais il était fou ou quoi ? S’insultant intérieurement, l’adulte tenta plutôt d’enfourner le Badge Basique de force dans la main de la blonde.
 
— Lâche-moi ! s’écria celle-ci avec véhémence, se soustrayant vivement à son étreinte comme s’il l’avait brûlé.

L’insigne tomba à terre et se fendilla.

— Mais tu l’as mérité ce badge ! siffla Tcheren. Tu as combattu la Team Plasma et tu as sauvé quatre Ponchiot, cela ne te suffit pas peut-être ?
— Non, rétorqua Élin. C’est toi qui devrais juger de mon aptitude en combat, pas quelques cons de Sbire ! En plus qui te dit qu’ils avaient le niveau requis d'un Champion d'Arène ?
— Mais je le sais c’est tout ! s’écria Tcheren, oubliant tout calme et classe. Et ne dis pas de gros mots !
— Pfft. Tu ne les as même pas combattus donc comment tu peux en être sûr ? Menteur.
 
Ah mais cette fois c’en était trop. Tcheren se raidit, tentant d’intimider la jeune fille, agacé au plus haut point. Même le garçon à la queue-de-cheval qui avait l'air complètement neuneu intervint :
 
— Allez Élin, accepte ce Badge ! C’est grâce à toi qu’on a secouru les chiots, tu l’as largement mérité !
 
Mais la jeune fille ne renvoya qu’un « non ! » buté et tapa même du pied sur le carrelage pour prouver de sa détermination. Elle ne voulait pas de traitement de faveur. Elle voulait battre tous les Champions d'Arène à la loyale—sinon comment pouvait-elle atteindre le niveau pour battre son père ?
Tcheren jura—ouvertement cette fois—et fit une dernière tentative pour la convaincre.
 
— Je te préviens, c’est la dernière fois que je te l’offre, je n’ai pas que ça à faire de satisfaire tes caprices.
— Mais j’en veux pas je t’ai déjà dit ! Je t’affronterai quand j’aurais tous les autres Badges, voila !
— Très bien, alors je ne te ferai pas de cadeau.
— Bah oui encore heureux !
 
… Mais rah elle était frustrante cette gamine ! Tcheren siffla un dernier juron, accompagné d’un « et t’as intérêt à renvoyer trèès régulièrement des comptes-rendus à Bianca sinon ! sinon ! ». Il se tourna, de désespoir, vers les autres adolescents, le gamin perturbant aux yeux d’ambres, la mioche qui bégayait et l’autre faux-hipster—Syd, Elsa et Oscar.
 
— Vous non-plus, vous ne voulez pas ce Badge ?
 
Un silence plana. Ils échangèrent des regards, les regards d'enfants qu'un adulte ne pouvait plus décrypter, et lancèrent des coups d’yeux gênés à une Élin qui leur renvoya des grimaces. Comme si accepter ce Badge signerait une trahison de la blonde. Oscar et Elsa, finalement, regardèrent sur Syd avec incertitude.
 
Et contre toute attente—quoique…—le dresseur fit l’opposé d’Élin. Il traversa la pièce, tendit sa main, et ramassa l’insigne fendillée qu’Élin avait fait tombé.
 
— Ce Badge sera-t-il normalement reconnu par la Ligue ? s’enquit-il prudemment, retournant l’emblème de métal dans ses pouces, contemplant ses reflets irisés, striés d’une cassure noire.
 
Il avait besoin de ce Badge. Il repensait à Nikolaï… Pour son plan, pour sauver Otis, il avait besoin d’être un dresseur reconnu. Et rien, ni Élin, ni un quelconque honneur ou sa fierté, n’était plus importante qu’Otis.
 
— Je m’en assurerai personnellement, le rassura Tcheren, soulagé qu’au moins un des rejetons ait la tête sur les épaules.
 
Quant aux autres, ils hésitaient encore. Elsa se mordait la lèvre, indécise, se demandant… si c’était réellement déshonorable, d’accepter un Badge sans avoir combattu le Champion… Tcheren leur disait bien qu’ils l’avaient mérité, non ? C’est vrai, ils avaient combattu la Team Plasma, la vraie Team Plasma ! Quelques secondes après, Elsa acceptait le Badge en bégayant, se cachant derrière ses boucles pour éviter un regard irrité d’Élin. Touchant le froid métal lamé, elle sentait un sentiment de fierté, de travail bien fait, naître en elle.
 
Oscar suivit le même cheminement, il estimait avoir rendu un service important, de plus il mourrait d’envie de tenir son premier Badge au creux de sa paume. Le garçon à la queue-de-cheval se justifia bien d’un :
 
— Bah… on a pas tous la même manière de voir les choses…
 
Mais sa phrase sonna dans le vide. Élin croisa les bras et refusa de les regarder ou de leurs parler. Elle se sentait d’autant plus offensé que Syd avait pris « son » Badge, celui que Tcheren lui avait destiné ! Celui qu’elle aurait pu avoir si elle avait un orgueil moins démesuré. Sifflant des injures, la gamine quitta le salon en claquant la porte.
 
Tcheren s’en alla, et les adolescents prirent quand même la route. Élin rangea pendant que les autres se douchaient, réparant tant bien que mal le sommier, puis fit aussi sa toilette bien qu’avec réticence, traînant Lucky dans son bain. On expliqua le désastre à Marie et Albert Camus, puis un Goyah à moitié endormi descendit leur souhaiter la bonne aventure.

Les aux-revoirs furent chaleureux. Le couple n’ayant jamais eu d’enfants, ils appréciait ces adolescents qui les avaient aidés. Élin marmonna quelques nouveaux remerciements aux gérants du Ranch pour Lucky, et ils l’entraînèrent dans un immense câlin. Elsa et Oscar en rirent, Syd haussa les épaules avec amusement, et même Élin eut un petit sourire. Cependant, la gaieté du groupe fut tempérée par l’ex-Maître. Les brumes du sommeil disparaissaient de son esprit, et plus il était réveillé, plus il repensait à ses discussions avec Tcheren. Il était inquiet.

— Les enfants, faites attention sur la route, conseilla-t-il posément. Une fois que vous avez été mêlé à la Team Plasma, vous avez toutes les chances de la rencontrer encore. Vos destins sont liés.

Cette phrase pourtant bienveillante sonna comme un glas. Aussi, quand les adolescents s’aventurèrent pour la première fois sur la Route 20, telles des ombres dans les lueurs du matin, une humeur étrange planait sur le groupe. Peut-être était-ce un mauvais pressentiment, ou les disputes du matin qui leur revenaient, mais personne ne parlait, et on marchait la tête baissée, en silence.

Ils ignoraient totalement la beauté de la Route 20, une vaste plaine parsemée déci-delà de collines rocailleuses, parfois piquée d’un bosquet d’arbres mais surtout tapissée de ruisseaux, qu’ils devaient souvent franchir ou contourner. Elsa tendit l’oreille, repensant à l’étrange mélopée qu’elle avait entendue sur le chemin d’Amaillide, comme formée par l’air et le ciel, mais cette fois elle n’entendit rien, et ne put que contempler les visages fermés de ses compagnons.

La journée s’annonçait maussade.

Les tensions se ravivèrent au moment du repas. On se rendit compte que malgré toutes les préparations et le temps qu’on avait pris à dire au revoir, on avait oublié les sandwichs. Élin, Oscar et Elsa mourraient de faim, et Syd dut se résigner à cuisiner pour eux, agacé de se voir de plus en plus lié au groupe. Il esquissa un premier mouvement vers son matériel, sortant une marmite et une planche à découper. Mais quand le repas fut prêt Élin refusa d’en manger. La colère de la jeune fille, bouillante, mijotait lentement sous son crâne depuis l’incident du Badge, et son orgueil voulait qu’elle refuse toute aide de Syd.

— Je ne comprends pas, s’irrita Syd. La semaine dernière tu voulais absolument que je cuisine pour vous et maintenant tu refuses.
— C’est bon je veux pas de ta nourriture pourrie !
— C’est très bon pourtant… interrompit Oscar.
— Non, je suis sûre que c'est dégueulasse, répliqua la jeune fille, acerbe.
Syd leva les yeux au ciel.
— Eh bien ne mange pas, qu'est-ce que j'en ai à faire ?

La blonde se leva d'un coup et le foudroya du regard. Elle marmonna quelques insultes avant de s'en aller sous les regards désolés d'Oscar et d'Elsa. Le brun voulut partir à sa suite, mais Syd lui fit signe de se rasseoir et lui dit qu'elle se calmerait toute seule. Alors ils mangèrent en silence.

(… disputes encore...)
Élin marchait trop vite pour Lucky et le chiot aboyait tristement, dépité de ne pas être dans les bras de sa maîtresse. Mais elle fulminait et ne s'occupait pas de lui.

La gamine était désarçonnée que personne n’ait cédé à son caprice. Ce matin, elle s’était attendu à ce que Tcheren finisse par accepter son défi, voie son côté des choses et fasse son boulot. Si seulement les autres avaient été de son côté, il aurait cédé ! Elle en était sûre ! Et ils auraient tous obtenu un Badge—ou au moins Élin, parce qu’avec ses Pokémon pour la soutenir, elle pouvait tout accomplir ! Mais Syd avait tout ruiné, acceptant trop rapidement l’offre du Champion et prenant son Badge.

Chacun gère la colère différemment. Certains ressassent intérieurement, d’autres pleurent, ou encore canalisent leur colère dans une activité productive. Quelques-uns trouvent le moyen de crier et criser jusqu’à avoir gain de cause. Élin était de ceux-là. Elle serra les dents, marcha jusqu’à l’avant du groupe, s’arrêta juste devant un Syd incrédule, grimaça et tendit la main.

— Rends-moi mon Badge.

Il y eut un blanc dans lequel on entendit le ronronnement distant d’un orage. Puis Syd fronçait les sourcils et secouaient la tête sous les yeux inquiets des deux autres, et tentait de la contourner en l’ignorant. Malheureusement pour lui, Élin était tenace et ne fit que sauter à nouveau devant lui, marchant à reculons sans peur de tomber.

— Rends-moi mon Badge ! clama-t-elle un peu plus fort.

Le rectangle de métal fendillé était devenu le symbole de tous les contentieux. Depuis le premier jour, une rivalité s’était établie entre Élin et Syd, et jusqu’à ce matin aucun n’avait pris de longueur d’avance. Ils avaient fait match nul, avaient battus le même nombre de Chacripan, avaient tous les deux défaits deux Sbires Plasma et avaient chacun capturé un Pokémon. Mais Syd avait accepté le Badge destiné à Élin. Personne ne saurait que l’emblème avait été accordé au garçon pour les mêmes raisons qu’il avait été offert à la fille—tout ce que verraient les étrangers, c’est qu’Élin avait échoué là où son rival, et tous ses autres camarades de voyage avaient réussi… Et ça, son orgueil ne pouvait le supporter. Elle refusait que Syd se satisfasse de ce qu’elle avait refusé.

— Rends-moi. Mon. Badge, gronda-t-elle une troisième fois, ses yeux lançant des éclairs.

Mais le dresseur ne fit que s’arrêter brusquement et croiser les bras. Oscar et Elsa l’imitèrent, inquiets.

— Arrête de nous prendre la tête avec ça, menaça le dresseur.
— Ohh j’ai peur ! se moqua Élin avec une moue insolente.
— Non, tu es juste jalouse.
— N'importe quoi ! Je ne suis pas jalouse, je veux juste mon badge, et tu mets drôlement de temps à me le rendre !
— C’est le mien.
— Non le mien !
C’était le tiens, nuance, tu sais conjuguer ?
— Nananaaa, je ne n’entends que des excuses débiles, rends-moi mon Badge !
— Mais moi j’ai ai BESOIN !

Syd venait de crier. Un instant lourd de tension les immobilisa, avec force et malaise, les étouffant peu à peu. Oscar et Elsa échangèrent un regard lassé. S’ils avaient cru une seule seconde que leur intervention arrêterait la dispute, ils se seraient interposés. Mais ils savaient très bien que quand les deux étaient lancés, rien ne pouvait les calmer.

— J’ai besoin de ce Badge ! répéta Syd, furieux. On est pas tous riches comme toi, j'ai besoin de...
— Moi aussi j'ai de bonnes raisons de vouloir ce badge, répliqua Élin. J'ai de super bonnes raisons de partir en voyage initiatique et de gagner tous les badges !

Syd serra les dents. Cette fille ne pourrait jamais comprendre ce que c'était de voir son grand frère paralysé sans avoir l'argent pour le soigner.

— Une gamine aussi riche et pourrie-gâté que toi ? Laisse-moi rire, répondit-il avec amertume. C'est quoi tes raisons, tu veux prouver à papa et maman que t'es la plus forte ? Ils vont t'acheter une voiture quand t'auras battu tous les Champions d'Arène ?

Élin décroisa rapidement ses bras et serra les poings comme si elle comptait coller une droite au garçon. Il ne pouvait pas comprendre ce que c'était d'être enfermé par son père pendant des années. Le seul moyen de gagner son indépendance, c'était de le battre en combat singulier, sinon... sinon elle serait de nouveau emprisonnée dans sa cage dorée.

— Donne-moi ce badge, répéta-t-elle, ou sinon je te fous une raclée.
— Tu crois pouvoir me battre alors que tu ne connais même pas le nom des Attaques de tes Pokémon ? De toute évidence tu es trop nulle pour gagner. Heureusement que tu n'as pas essayé d'affronter Tcheren.

Syd fit tournoyer l'insigne fendillée devant les yeux ronds de la blonde avec un petit sourire.

Cette fois, Élin vit rouge. Elle plaqua le garçon à terre et lui asséna un coup de poing sur le thorax. Mais il attrapa son poignet et le tordit, roula sur le côté. Élin ravala un sanglot de douleur, roulant dans la poussière, et à cours de solution, elle le mordit. Il hurla. Il se releva tant bien que mal et de faire un pas en arrière—elle sauta sur ses pieds et voulut le poursuivre, mais Oscar la retint avec un cri affolé.

Syd lui lança un regard haineux.

— Mais t'es MALADE ! éructa-t-il.
— RENDS-MOI CE BADGE !
— JAMAIS DE LA VIE !
— MAIS ARRÊTEZ !

Les deux adolescents s'immobilisèrent, surpris. Élin cessa de gigoter dans les bras d'Oscar. C'était Elsa qui avait crié, les larmes aux yeux. Elle avait les bras serrés autour de sa poitrine et tremblait comme une feuille.

— A-arrêtez. A-au lieu de vous taper, défiez-vous et... et... c-celui qui gagne r-remporte le Badge !


(Un combat qui dépasse les mots)
Ils choisirent une petite clairière entourée de cyprès. Des nuages d’une noirceur violacée s'amoncelaient dans le ciel, menaçant d’éclater à tout moment. Elsa faisait fonction d'arbitre et Oscar de pompom girl sans pompom, tentant de maintenir un semblant de bonne humeur. Élin et Syd relâchèrent leurs Pokémons. Baggy, Lucky, Riolu et Gruikui se ruèrent vers leurs dresseurs respectifs, qui, tombant à genoux, leur glissèrent quelques mots à l’oreille.

— Vous deux, j’veux vous voir en équipe ! sourit Élin. On va lui coller une vraie raclée.

De son côté, Syd vérifiait le niveau de ses Pokémon. Il s’était résigné. Maniant parfaitement son Pokédex—sa tante lui avait appris à se servir du sien dès ses dix ans—il pouvait même se renseigner sur les attaques des Pokémon adverses. Hm. Gruikui était au niveau douze, tandis que Riolu allait atteindre le niveau dix… chacun avait un niveau de plus que leurs adversaires Baggy et Lucky. Si Syd s’appuyait sur leur entraînement rigoureux de ces dernier jours, il battrait Élin à plat de couture et conserverait son badge.

— Gruikui, n’oublie pas de bien rentrer la tête durant les combats, tu es sur le point d’apprendre Boul’Armure. Riolu, je t’enverrai contre Baggy, ton agilité peut en venir à bout.

Il rencontra le regard d'Élin et se prépara à annoncer les règles du mach simple.

—… Ah oui au fait on fait un combat double ! s’exclama Élin.
— Quoi ? tressaillit-il, agacé. On ne s’est jamais mis d’accord là-dessus !

La jeune fille lui tira la langue d’un air boudeur.

— Oui mais j’ai choisi en premier donc c’est moi qui décide, na.
— C-ce n'est pas comme cela que fonctionne un m-match... tenta Elsa l'arbitre.
— Siiii, insista Élin avec de grands yeux.
— Nooon, imita Syd sarcastiquement.

Ils se fixèrent. Et puis Élin éructa :

— Baggy, tape-le, Lucky, CHAAAARGE !

L’équipe de Syd—et Syd—restèrent complètement abasourdis par son offensive soudaine ! Baggy et Lucky se ruèrent en un rire machiavélique vers leurs adversaires et exécutèrent magnifiquement leurs attaques. Il fallut que Riolu s’écrase truffe la première contre la terre humide, et que Gruikui valdingue loin contre un cyprès avec un « KUIIII » peu élégant, pour que leur dresseur réagisse.

— E-Elsa ! Arbitre ! Ce n'est pas légal ! bafouilla Syd.

Malheureusement, Elsa ne pouvait rien faire pour empêcher le match de continuer, à moins de plonger entre les deux équipes et de se prendre elle-même des Flammèche dans la tête...

— Euh ! cria Syd. Riolu, Riposte sur Baggy, maintenant. Gruikui ? Gruikui, essaie un attaque Charge !

Le sang du dresseur pulsait dans ses veines, contre ses tempes. Il dépassé par la situation. Élin n’avait respecté aucune règle de combat. Le début du match était normalement annoncé par l'arbitre avant les premières attaques. Mais là, tout s’était passé trop vite !

Heureusement pour le dresseur, ses deux Pokémon se reprirent vaillamment. Ils foncèrent vers leurs adversaires restés au centre de la clairière. Riolu glissait vers Baggy, douleur et rancune mêlés dans ses yeux carmins. Gruikui dévorait la distance qui le séparait de Lucky, ses muscles saillants et luisants sous sa fourrure flamboyante. Mais Élin était maligne. Et Élin croisa les doigts. Ses Pokémon comprirent aussitôt.

Aussi ils échangèrent promptement de place, comme lors de l’Attaque du Ranch, ce qui eut pour effet d’annuler la Riposte de Riolu, car l’attaque ne fonctionnait double que sur l’adversaire qui l’avait frappé ! La petite Pokémon dérapa de surprise à quelques centimètres de Lucky, qui lui sauta dessus, crocs déjà luisants d’une Morsure. Gruikui de son côté avait largement manqué Baggy, qui l’avait envoyé au tapis d’une nouvelle Balayette.

— YES ! s’écria Élin.
— Tu m'as pris au dépourvu, gronda Syd. Ce match est déjà nul et non avenu parce que tu n'as pas respecté les règles !
— Mais on s'en fout des règles !

La dresseuse jeta un regard fier à ses compagnons, leur criant des encouragements chaleureux. Oscar, sur le côté du terrain, fit une chorégraphie le pompom boy enthousiaste.

Syd grinça les dents. Lui n’avait pas triché, progressait selon les règles et s’appliquait beaucoup plus qu’Élin. Où était passée toute sa force ? Ce n’était pas possible, d’échouer devant deux lamentables tours de passe-passe ! Tout à coup, il se sentit immensément fatigué, découragé, et ses Pokémon lui jetèrent un regard inquiet.

— Si tu n'as aucun respect pour les règles, tu n'as aucun respect pour les autres... siffla-t-il.
Élin croisa les bras.
— Toute mon enfance j'ai dû respecter des règles idiotes, marmonna-t-elle. Je n'avais pas le droit d'avoir de Pokémons, pas le droit de sortir seule, pas le droit d'aller à l'école même. Alors maintenant, j'emmerde les règles !

Sur les côtés du terrain, Elsa et Oscar échangèrent un regard. Même Syd cligna des yeux, étonné. Il ne se doutait pas que... Mais il se reprit. Si Baggy et Lucky fonctionnaient très bien en équipe, il suffisait de les séparer : une stratégie viable, en-veux-tu-en-voilà.

— Gruikui, Flammèche—comme on a vu cet après-midi ! s’écria-t-il alors d’une voix posée, ne laissant rien filtrer de son trouble. Riolu, Vive Attaque !

Syd retint sa respiration. Son starter isola Lucky dans un cercle de flammes, qu’il contrôlait avec toute sa force mentale pour ne pas qu’elles ne se propagent. Les hautes herbes autour du Ponchiot rougeoyaient, et le petit Pokémon, apeuré, ne pouvait que trembloter et plaquer ses oreilles velues contre son crâne. Il était une cible parfaite.

Quant à Riolu, la chienne bleue fusait autour de Baggy en un dangereux flou azur. Le Baggiguane ne savait où donner la tête, sifflant ce qui devait certainement être des injures Pokémonesques, mais ne parvenant pas à atteindre la chienne de ses Balayette. Élin se mordait la lèvre, inquiète, et allait crier un ordre quand Syd s’exclama :

— Maintenant, Charge et une nouvelle Vive Attaque !

Gruikui fonça à travers son propre cercle de feu, vers Lucky. Quelques flammèches s’accrochèrent à sa fourrure ignifugée, ne l’affectant aucunement mais brûlant méchamment les joues du Ponchiot, qui se fit éjecter un peu plus loin. Baggy s’était quant à lui écrasé dans la mare stagnante au bord de la clairière, une Riolu triomphante lui aboyant dessus. Syd se tourna vers Élin.

— Les règles c'est important. Par exemple, normalement, on a pas le droit de conduire à cent à l'heure en ville. Mais une fois, un camion de livraison... un gros camion conduisait super vite dans ma rue...

Il ne put pas en dire plus. Sur le côté du terrain, Elsa hocha tristement de la tête, comprenant où il voulait en venir, tandis qu'Oscar cessait de danser. Élin se mordit la joue.

— Ce camion a envoyé mon frère à l'hôpital, termina Syd.

Élin acquiesça. Elle ferma les yeux. Il attendit sa réponse, se demandant si elle allait pouvoir le comprendre. Peut-être qu'elle pouvait être mature. Mais finalement la blonde sourit.

— Baggy, SURPRENDS-LES !

Et le Baggiguane exécuta une Feinte, se retrouvant directement derrière… Lucky, qui sursauta brusquement. Syd fronça les sourcils. Ne l'avait-elle pas écouté ? Il lui avait révélé... et puis comment pouvait-elle discuter et combattre en même temps ? Et puis, et puis, il ne comprenait pas où la dresseuse voulait en venir ! Allait-elle attaquer ses propres Pokémon ? Cela n’avait aucun sens !

— Ok, on va pousser le travail d’équipe à son maximum ! rigola la blonde, loin de tous les soucis de Syd. Baggy, JET DE PONCHIOT !

Soudain le Baggiguane attrapa son homologue par les pattes arrière, faisant fi de l’expression perdue du petit chiot, et l’envoya brutalement s’écraser contre Gruikui en un « POOON » paniqué. Le cochon de feu se fit vivement repousser jusqu’au bord de la mare, un Ponchiot surpris assis sur son arrière train. C’est alors que Syd comprit.

— Chiot ? s’interrogea le Pokémon, ouvrant grand les yeux.

Les dresseurs partagèrent un regard survolté et, sentant leur sang bouillir, réagirent au quart de tour :

— LUCKY, SAUTE DANS MES BRAS !
— GRUIKUI, BOUL’ARMURE !

Malheureusement pour Syd, c’était Lucky, chien souple et léger, qui avait la plus grande vitesse. Le chiot se retourna brusquement vers sa maîtresse souriante, et débordant d’amour pour elle, courut se jeter dans ses bras. Ses pattes arrière lattèrent Gruikui d’un grand coup dans le postérieur… ce qui eut pour effet d’envoyer le Pokémon feu bouler vers la mare. Syd pâlit d’un seul coup, il se rua vers son Pokémon pour l’empêcher de tomber mais se ravisa, grimaçant, le cœur se battant avec sa cage thoracique—un dresseur n’avait pas le droit d’intervenir dans un match Pokémon !

— Riolu ! siffla-t-il, s’arrachant presque quelques cheveux, et la Pokémon s’illuminant brusquement, se lançant dans une nouvelle Vive Attaque.

Alors s’écoulèrent quelques secondes lancinantes, chacun retenant son souffle pour savoir ce qu’il adviendrait du pauvre Pokémon feu… le destin oscillait entre un sauvetage in extremis et un K.O certain.

UN.

Riolu était à moins d’un mètre d’un Gruikui paniqué, dévalant vers l’étang.

DEUX.

Élin finalement, ne se préoccupait pas tant que cela du Destin, car elle avait récupéré Ponchiot en un grand éclat de rire et se lançait à corps perdu dans un immense câlin.

TROIS.

Riolu était sur le point de sauver Gruikui… mais d’une Feinte, Baggy envoya les deux bouler ensemble dans la mare. Élin sourit d’un air machiavélique, une aura noire suintant presque autour de sa silhouette.

— Haha, j’avais tout prévu. Baggy, fais-nous un Zinedine.

Syd n’eut pas le temps de prévenir ses Pokémon. Et quand bien même, ses équipiers ne l’auraient pas entendu, plongés dans l’eau boueuse, luttant désespérément pour atteindre la surface. Quand ils remontèrent finalement à l’air libre, Gruikui et Riolu n’eurent aucune chance : ils se prirent un énorme Coup d’Boule en pleine face, lâchèrent des cris de douleur et sombrèrent dans l’étang et l’inconscience. Syd lui-même ne put que balbutier une exclamation perdue et les rappeler en urgence.

Baggy se redressa aux côtés de l’étang, n’ayant pas même l’air fier de lui, et poussa un soupir blasé.

Syd inspira, se sentant si tendu qu’il en avait le tournis. Puis expira, complètement relâché, fatigué. Il avait perdu.

— P-pardon… murmura-t-il à ses Pokéball, épuisé.

Il s'approcha d'Élin et lui tendit son badge. La blonde était rayonnante de bonheur, elle tenait à présent ses deux Pokémon dans ses bras et ils semblaient presque en souffrir tant elle les serrait fort. La jeune fille semblait même ne pas savoir quoi dire, une fois n’est pas coutume ! Mais bien vite elle retrouva sa langue perdue.

— WOOHOO J’AI GAGNÉÉÉ ! Bravo Baggy, bravo Lucky vous êtes les meilleurs !

Face à tant de fierté, Syd ne put réagir que par l’amertume.

— Calme-toi deux secondes. Tu gagnes seulement parce t’utilises des Attaques non-réglementaires.
— Oh ça va ! lui renvoya Élin. T’es juste jaloux !

Il plissa dangereusement les yeux, sentant une sourde colère monter en lui. Lui au moins faisait preuve de maturité, contrairement à cette gamine, et lui au moins apprenait de réelles techniques à ses Pokémon, contrairement à ce que l’autre s’autorisait—et il avait perdu son Badge et—

— WOOHOO j’ai gagné !
— Tiens, prends mon Badge, dit-il avec amertume.
Elle lui sourit.
— Non, garde-le.

Il cligna des yeux, abasourdi devant tant de gentillesse, et fut sur le point de la remercier. Mais elle enchaîna :

— Je ne veux pas le Badge d’un loser, tout compte fait !
— Mais quoi ? Je ne suis pas un loser ! Et puis ! Tu as insisté toute la journée pour l'avoir, prends-le !
— Non !
— Mais si prends-le !
— Non !
— Bon bah je le garde, grommela-t-il, déboussolé.
— Je m'en fous de ce Badge, j'ai GAGNÉ… T'as intérêt à avoir pris plein de belles photos Oscar !

Et c’est alors que Syd se souvint d'Oscar et d'Elsa. Les deux adolescents avaient l'air d'avoir beaucoup discuté durant leur match. Le garçon à la queue-de-cheval se rapprocha d’eux, suivie de près par la dresseuse timide, un air solennel peint sur le visage. Mais Syd les ignora.

— Tu n’as pas gagné à la loyale, souffla Syd.
— Roh mais arrête ! On s’refait un match quand tu veux, et je t’écrase !
— Ça reste à voir.

Ils se fixèrent dangereusement, et s’approchèrent l’un de l’autre jusqu’à s’attraper par leurs cols respectifs, mais Oscar intervint. Il les sépara brutalement et, d’un air important qui lui allait pas du tout, annonça :

— Stop. Il faut qu’on parle.