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Entre infini et au-delà de Cyrlight



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» Auteur : Cyrlight - Voir le profil
» Créé le 08/04/2015 à 20:02
» Dernière mise à jour le 29/05/2015 à 20:17

» Mots-clés :   Action   Drame   Fantastique   Mythologie   Suspense

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Film 4 : Hey, brother

Hey, brother - Avicii


Ce bonus se déroule deux ans avant le chapitre 1.


Comme tous les matins, Eric se réveilla en même temps que le soleil. C'était une habitude due à un vieil adage que son père répétait souvent : "l'avenir appartient à ceux qui se lèvent tôt." Déjà qu'il trouvait que le temps passé à dormir était du gaspillage, il ne voulait pas en perdre davantage.

Sa chambre était de loin la plus grande de toute la maison. Il fallait bien cela pour arriver à contenir tout son laboratoire personnel. De part et d'autre de son lit se tenaient des bibliothèques pleines à craquer, tandis qu'un plan de travail recouvert de fioles diverses et d'ustensiles alambiqués occupait toute la largeur du mur opposé.

Agé de seulement dix ans, cela ne l'empêchait pas d'être un véritable génie scientifique. Il avait déjà lu des centaines de livres, la moitié étant des encyclopédies presque aussi lourdes que lui, et engrangé des connaissances nettement supérieur à la moyenne.

Il se demandait souvent d'où lui venait cette intelligence. Son père était bricoleur, mais lui aimait inventer. Sa mère connaissait les plantes, mais lui savait en extraire les agents chimiques utiles. Sa logiques et ses capacités de réflexion dépassaient de loin celle d'un adulte. Pas une énigme ne lui résistait.

Depuis plusieurs semaines, il étudiait l'ADN des pokémon. Au cours de l'année précédente, il s'était amusé à coupler entre eux les gênes d'un pommier et d'un pêcher, ce qui lui avait permis d'obtenir de délicieuses baies uniques en leur genre, avec la douceur des Pêchas et l'acidité des Pommos à la fois.

A présent, il rêvait de faire la même chose avec les pokémon. La seule idée d'un Scarabrute maîtrisant des attaques dragons ou un Coxyclaque des capacités aquatiques illuminait son regard. Ce serait l'avant-garde des créatures du futur.

Les yeux rivés sur les loupes grossissantes de son microscope, il regardait les cellules qu'il avait récolté se mouvoir et annoter diverses remarques sur son calepin à côté de lui. Pour le moment, il n'obtenait guère de résultats concrets, mais il finirait par trouver. Il trouvait toujours.

Il était cependant frustré par le manque de moyen. Un génie comme lui avait besoin de matériel digne de son intelligence, or il n'avait rien à sa disposition, hormis quelques tubes à essais et diverses revues scientifiques. Chaque jour, il passait des heures à réaliser des calculs complexes qui se répétaient à l'infini. N'y avait-il pas un outil un peu plus évolué qu'une calculatrice afin de lui faire gagner du temps ?

Les ordinateurs... Il avait croisé ce mot à plusieurs reprises en parcourant des thèses. Lorsqu'il avait demandé à son père de lui en acheter un, cependant, ce dernier avait refusé en prétextant que cela coûtait une fortune et qu'il ne devait plus s'amuser à faire de tels caprices. Pris d'un remord de conscience, il lui avait tout de même offert une centrifugeuse, particulièrement utile pour ses recherches.

Une série de coups enthousiastes fut frappée à la porte. Eric, jusqu'alors muré dans le silence le plus total, sursauta et lâcha la fiole qu'il tenait à la main. Elle s'éclata sur le sol, libérant un contenu à l'odeur nauséabonde.

Furieux, il donna un violent coup de pied dans les tessons de verre avant d'aller ouvrir le battant à la volée. Sa petite soeur, Katharina, se tenait sur le seuil, son écriteau "Ne pas déranger" à la main.

- Donne-moi cela, toi ! tonna-t-il en le lui arrachant presque. Qu'est-ce que tu veux, encore ? Tu sais très bien que je déteste être dérangé lorsque je travaille.
- Justement, tu en fais trop. Tu devrais venir te promener un peu avec moi.
- Je n'en ai pas envie.
- S'il te plaît, Eric.
- Non.
- S'il te plaît.
- J'ai dit non.
- S'il te plaît.
- Non !

Il lui claqua la porte au nez, ce qui ne l'empêcha pas de poursuivre de l'autre côté. De sa petite voix aiguë, elle continuait de lui porter sur les nerfs. Il ne connaissait pas plus capricieuse que sa cadette, mais s'il tentait de s'en plaindre à ses parents, ce serait automatiquement lui qui aurait tort.

- D'accord, je viens ! finit-il par s'écrier. Une balade rapide et après tu me laisses me concentrer, c'est clair ?
- Oui ! Oui ! Oui ! s'exclama-t-elle en bondissant de joie quand il la rejoignit dans le couloir de l'étage.

Il emporta avec lui trois tubes à essai fermés par des bouchons de liège au cas où sa route vienne à croiser celle d'un Aspicot ou d'un Dardargnan. Il avait besoin d'un échantillon de leur venin pour valider l'une de ses nombreuses théories.

Bien que l'automne approche à grands pas, les températures étaient toujours très élevées et, à cause de la canicule qui avait régné sur le sud-ouest de Sinnoh, provoquant ainsi des sécheresses, les récoltes avaient beaucoup de retard. L'eau n'était pas tombée en quantité suffisante pour parfaire leur croissance.

- Papa et maman disent que ce sera une mauvaise année, déclara Kathy en passant à hauteur d'un champ de betteraves.
- S'ils y avaient un moyen de contraindre les pokémon à lancer Danse-Pluie au-dessus de nos terres, cela n'arriverait sûrement pas.
- Le dressage d'un pokémon sauvage prend des années. Ils ne sont pas aussi dociles que ceux qui sont élevés en captivité.

Eric se contenta de répondre par un haussement d'épaules. Qui savait ? Peut-être un jour inventerait-il un moyen de rendre les pokémon soumis par un habile procédé scientifique. Après cela, leurs parents ne souffriraient jamais plus des aléas de la météorologie.

Ils se dirigèrent vers le bois qui cernait une bonne partie de la ferme après avoir une halte dans la bergerie pour caresser les Wattouat. Ils avaient le droit de se promener un peu partout, à condition de ne jamais trop s'éloigner. Kathy aimait passer beaucoup de temps à l'air libre, contrairement à son frère qui était un véritable Rattata de bibliothèque.

- Il faut toujours que tu emmènes ces trucs avec toi, geignit-elle en désignant les tubes à essai qu'il tenait à la main.
- Je te ferai remarquer que mes recherches n'avancent pas toutes seules.
- Sauf que je préfèrerais que tu passes plus de temps avec moi qu'à jouer les savants fous.

Elle fit la moue, les bras croisés sur sa poitrine, le regard lourd de reproche. Eric esquissa un sourire avant de lui ébouriffer les cheveux d'un geste affectueux. Malgré ce que les apparences laissaient paraître, il aimait bien sa petite soeur, autant que la réciproque était vraie.

- Elle ne t'a pas plu, cette poupée avec les vêtements qui changent de couleur ?
- Si... concéda la fillette à contrecoeur.
- Inventer est tout un art. Tu sais qu'il m'a fallu des jours pour la mettre au point ? C'est vrai, c'est beaucoup, mais à la fin, tu es satisfaite du résultat. C'est tout ce qui compte, non ?
- Moui...

En plus d'être remarquablement doué en sciences, Eric était également un orateur hors-pair. Il n'entendait rien à la politique car ce sujet ne l'intéressait guère, d'autant qu'il était trop jeune pour s'en soucier, néanmoins il possédait une éloquence qui aurait rendu plus d'un député jaloux. Il arrivait toujours à démontrer qu'il avait raison, même lorsqu'il n'avait aucune preuve à sa disposition.

- A quoi penses-tu ? demanda soudain Kathy en le voyant perdu dans ses pensées.
- Qu'à défaut d'arriver à contrôler le climat comme les pokémon, je pourrais peut-être fabriquer un engrais capable de permettre aux plantes de pousser, même en période de sécheresse.
- Ce n'est pas vrai ! Tu es dehors, au grand air, alors profites-en un peu pour respirer au lieu d'être toujours en train de réfléchir !

Sans crier gare, elle le tira par la manche de sa blouse blanche qu'il revêtait toujours par-dessus ses vêtements afin de ne pas les salir pendant ses expériences et elle s'élança en courant dans la forêt en le trainant à moitié dans son sillage.

- Le dernier arrivé est un Roucool mouillé ! s'exclama-t-elle joyeusement après l'avoir lâché.

Eric leva les yeux au ciel, blasé par une telle immaturité, puis esquissa un sourire avant de lui emboîter le pas. Même si tout ce qui nécessitait le moindre effort physique ne relevait pas particulièrement de ses compétences, il pouvait au moins faire cela pour satisfaire sa petite soeur.

- J'ai gagné ! J'ai gagné ! s'écria-t-elle quelques minutes plus tard d'un ton enfantin.

Elle était perchée sur un rocher moussu, autour duquel ils venaient souvent s'amuser l'été ou, plus exactement, quand Eric daignait sortir de sa chambre-laboratoire, ce qui était très rare. Son absence causait toujours beaucoup de peine à Kathy et il le savait, mais s'il aimait sa soeur, il lui préférait davantage ses recherches. Cela ne l'empêchait pas de vouloir lui faire plaisir de temps en temps.

- C'est bon, je crois que j'ai suffisamment pris l'air pour la semaine, marmonna-t-il, une main sur les côtes car il souffrait d'un douloureux point de côté.
- Tu es peut-être un génie, mais qu'est-ce que tu te plains !

Elle lui tira la langue d'un air moqueur. Eric rajusta sa blouse, un sourire mauvais sur les lèvres, et ramassa une baie maron pour la jeter sur elle. Sa coque solide lui arracha un petit cri. Elle sauta à terre pour répliquer à son tour.

Une véritable bataille s'ensuivit. Kathy était plus prompte à tirer, mais son aîné, par le biais de savants calculs qu'il réalisait mentalement, ne ratait presque jamais sa cible. L'issu du combat se solda par un match nul qu'ils renoncèrent à poursuivre à cause de la fatigue qui les gagnait.

- Ne t'avise plus jamais de me critiquer, Katharina ! haleta Eric en lui ébouriffant les cheveux alors qu'ils reprenaient la direction de la ferme.

Il n'utilisait d'ordinaire jamais son nom complet, sauf lorsqu'il était vexé ou en colère. Il savait très bien que sa cadette avait dit cela juste pour le taquiner, mais il n'avait jamais apprécié les piques qu'on pouvait lui lancer, même anodines. Il avait horreur que l'on pointe du doigt ses failles, surtout celles qu'il n'était pas encore parvenu à combler.

- Tu crois que maman et papa vont bientôt rentrer ? interrogea-t-elle au moment où ils repassaient devant les champs desséchés. D'habitude, ils ne tardent pas autant lorsqu'ils vont vendre leurs produits au marché.
- Ils n'ont pas le choix, à mon avis. Ce n'est pas avec la récolte de cette année qu'ils vont faire beaucoup de bénéfices.
- Qu'est-ce qui se passera s'ils n'ont plus d'argent ?
- La vie sera plus dure pendant un moment. Plus de jouets, plus de livres, plus de bonbons...
- Oh ! gémit Kathy, l'air dépitée.
- Allons, même si cela devait se produire, ce ne serait que temporaire. Je doute que nous subissions une sécheresse deux étés de suite, alors cela irait mieux l'an prochain.

Il passa un bras réconfortant autour des épaules de la fillette qui vint se blottir contre lui. Il n'était pas toujours aussi tendre avec elle, alors elle profitait de ces moments à chaque fois qu'ils se produisaient.

- A quoi cela devait te servir ? questionna-t-elle en désignant les tubes à essai qui dépassait de sa poche.
- A rien. J'avais besoin de venin pour une expérience, mais je m'en passerai.
- De quel pokémon ?
- D'Aspicot ou de Dardargnan, afin de vérifier une hypothèse sur les insectes.
- Je sais où tu peux en trouver, si tu veux.

Eric observa sa cadette d'un oeil étonné. Il avait tendance à oublier qu'elle passait le plus clair de son temps dehors, à jouer les aventurières dans les environs de la ferme, si bien qu'elle rentrait souvent avec ses collants déchirées, au grand dam de leur mère.

Il la suivit jusqu'à l'enclos des Wattouat, qui paraissait presque vide depuis que leur père s'était vu contraint de vendre une grosse moitié du troupeau. Elle enjamba la barrière en bois tandis qu'il empruntait le portail et le refermait dans son sillage. Elle commença à courir, mais il l'interrompit aussitôt :

- Ah non, s'il te plaît, prends ton temps ! La course de tout à l'heure m'a déjà épuisé.

Elle haussa les épaules et ralentit l'allure jusqu'à ce qu'il l'ait rejointe. Il savait qu'il était clairement le stéréotype du garçon intellectuel qui ne sortait jamais le nez de ses livres, toutefois il n'avait pas encore trouvé comment pallier à cela. A quelques reprises, il avait songé à faire un peu de sport, cependant des journées de vingt-quatre heures suffisaient à peine à ses expériences, alors il ne risquait pas de pratiquer un éventuel loisir à côté de cela.

Kathy le guida jusqu'à un arbre touffu, à l'autre extrémité du pré, aux branches duquel pendaient des Coconfort. Quelques Aspicot rampaient mollement autour du tronc et le bourdonnement qui s'échappait des alentours laissait supposer que des Dardargnan n'étaient pas très loin.

- Je te l'avais bien dit ! lança l'enfant avec fierté.

Eric lui adressa un bref sourire, puis s'approcha de l'un des insectes, un tube à essai à la main. Il attendit que le pokémon ne prête pas attention à lui pour plaquer le récipient longiligne sur l'espèce de corne pointu qui orne le sommet de son crâne. Une fois cela fait, il l'attrapa par la queue et le retourna. Quelques gouttes d'un liquide violacé s'échappèrent de son appendice pour s'écouler le long des parois.

- Je crois que j'en aurai assez, déclara-t-il après quelques instants, alors que le tube n'était rempli qu'au tiers.

Il remercia maladroitement sa soeur, lui qui n'en avait pas l'habitude, puis ils traversèrent à nouveau l'enclos en sens inverse pour regagner la ferme. Ils ne verrouillaient jamais la porte d'entrée derrière eux car presque personne ne s'aventurait jusqu'ici et, de toute façon, il n'y avait rien à voler.

- Kathy... commença Eric lorsqu'ils pénétrèrent à l'intérieur de l'habitation. Tu sais, j'ai encore deux ou trois trucs à faire dans ma chambre, mais si tu veux, après, nous pourrons jouer aux cartes en attendant le retour de nos parents. Qu'est-ce que tu en dis ?
- Oh oui, oui, oui ! s'exclama-t-elle en frappant dans ses mains avec enthousiasme.

Il la laissa seule dans le salon, où elle comptait faire des coloriages pour patienter, tandis que lui gravissait l'escalier qui donnait accès à l'étage. Il s'enferma avec le verrou dans son laboratoire de fortune et reprit son expérience là où il l'avait interrompue.

Il étudia d'abord la composition du poison, qu'il annota avec soin dans son calepin, puis testa sa réaction au contact de divers produits chimiques. A chaque fois, il en obtenait une différente et propre à chaque type. Il devait absolument trouver des similitudes entre elle pour parvenir à atteindre son objectif.

Il s'apprêtait à verser quelque goutte d'un liquide explosif dans l'un des tubes à essai lorsqu'un cri poussé derrière sa porte le fit renverser la moitié du flacon. Une petite déflagration se produisit, recouvrant sa paillasse, son visage et sa blouse de suie.

- Eric ! Eric !

Il serra les poings à l'écoute de la voix de sa soeur. Cette fois, c'en était trop ! Il avait beau faire tous les efforts du monde avec elle afin de paraître sympathique, elle même n'en faisait jamais pour le laisser tranquillement.

- Je commence à en avoir assez ! hurla-t-il en ouvrant la porte à la volée. Tu me fais cela tous les jours et à chaque fois, à cause de toi, une catastrophe se réalise. Je t'ai demandé de m'attendre, mais apparemment, même cela, c'est au-dessus de tes forces !

Elle le regarda d'une mine attristée. Visiblement blessée par ses propros, elle paraissait d'ailleurs au bord des larmes. Sa lèvre inférieure tremblait, néanmoins cela ne suffit pas à attendrir le jeune prodige scientifique.

- Il y a une femme, en bas, hoqueta-t-elle d'une toute petite voix. Elle est... très étrange.
- Sans doute quelqu'un qui a besoin de produits de la ferme.
- Sauf qu'elle se promène dehors. Enfin, on dirait plutôt qu'elle rode, comme si elle cherchait quelque chose.
- Kathy, il faut vraiment que tu arrêtes le lait entier au petit-déjeuner, cela te rend paranoïaque, j'ai l'impression.
- S'il te plait, laisse-moi rester avec toi... J'ai peur.
- Bon... soupira-t-il en levant les yeux au ciel, conscient que sinon, elle ne le laisserait jamais tranquille. Tu vas me montrer où est cette mystérieuse femme et je vais essayer de savoir ce qu'elle nous veut.
- Et si on se barricadait plutôt dans ma chambre ? On pousse l'armoire devant la porte, on tire les rideaux et on se cache sous le lit.
- Kathy, cela suffit. Qu'est-ce que c'est que cette histoire, enfin ? Personne ne nous veut du mal.

Il se dirigea vers l'escalier en entrainant sa cadette par la main. Celle-ci tenta de résister de toutes ses forces, mais grâce à sa détermination, il réussit à la trainer à sa suite sur toute la volée de marche.

- Je l'ai vue par la fenêtre de la cuisine, informa-t-elle dans un murmure.

Eric n'avait même pas prêté attention à la pluie qui s'était mise à tomber. Cela ferait plaisir à ses parents qui craignaient que la sécheresse ne s'étende également sur tout le mois de septembre. D'ailleurs, à la vue du vent qui s'était levé d'un coup et des énormes gouttes qui s'abattaient à l'extérieur, cela ressemblait davantage à un orage qu'une simple averse.

- C'est fou comme le temps change vite ! constata-t-il, le nez accolé à la vitre. Par contre, je ne vois personne nulle part.

***
Latias fit un écart de côté pour éviter l'un des éclairs de Zeus. Artémis se cramponna fermement à son encolure afin de ne pas tomber. Elle avait été folle de quitter sa cachette dans l'espoir de retrouver Scathach qui, apparemment, avait refait surface depuis peu. A présent, c'était elle qui venait d'être démasquée.

Elle survolait le sud-ouest de Sinnoh. D'ordinaire, les humains légendaires ne s'approchaient jamais autant des zones habitées par les mortels, néanmoins elle n'avait pas le choix si elle voulait essayer de le fuir. Il avait trouvé l'instant propice pour l'attaquer : une tempête venait juste de se lever et la foudre n'étonnerait personne en de telles circonstances.

Latias exécuta une vrille et, là où n'importe qui serait sûrement tombé, celle qui la chevauchait réussit par miracle à rester sur son dos. Elle gagnait du terrain, elle le sentait. Zeus avait beau être puissant, il n'était pas assez rapide pour suivre son éon. Il aurait mieux fait d'envoyer Apollon sur sa piste s'il avait vraiment tenu à la capturer.

L'un des éclairs frappa un arbre à quelques mètres d'elle, qui s'affaissa sous le coup. C'était au moins le dixième. Une odeur de bois brûlé s'échappa de son tronc, mais Artémis avait déjà parcouru de nombreux mètres avant qu'elle ne soit en mesure d'atteindre ses narines.

Elle le distançait. D'ici quelques minutes, il aurait perdu sa piste et elle serait hors d'atteinte. Elle devrait toutefois réfléchir davantage à l'avenir avant de prendre des risques aussi inconsidérés, même pour sa meilleure amie.

***
- Allez, ne fais pas ta peureuse, pour une fois !

Eric tira Kathy jusqu'à la porte d'entrée afin de lui prouver qu'il n'y avait personne dans la ferme et qu'elle avait sûrement rêvé. Au moment où il poussa le battant, un puissant éclair déchira le ciel au point de les éblouir.

Quand ils recouvrèrent une vue normale, une femme se tenait face à eux. La fillette émit un petit couinement apeuré et même son aîné sursauta. Entièrement vêtue de noir, de ses bottines en cuir à son chemisier trempé par la pluie, en passant par son pantalon, sa tenue s'accordait parfaitement avec la couleur de ses yeux et de ses cheveux. Sa bouche écarlate contrastait avec la blancheur de sa peau et celle de ses dents, qu'elle révéla en leur adressant un sourire loin d'être rassurant.

- Qui êtes-vous ? demanda Eric en s'interposant entre l'inconnue et Kathy afin de protéger cette dernière.
- Cassidy.
- Cassidy comment ?
- Peu t'importe mon nom, il ne te serait d'aucune utilité. Je suis venue pour une affaire urgente.
- Vous tombez mal, nos parents ne sont pas là.

Il comprenait désormais mieux la crainte que sa cadette avait pu éprouver à la vue de cette mystérieuse femme. Une aura menaçante semblait émaner d'elle, au point que lui-même n'était pas rassuré et perdait toute son assurance au moment de lui parler.

- Tu peux peut-être me renseigner à leur place, alors.
- A quel sujet ?
- J'avais prévu de leur acheter quelques pièces de leur troupeau d'Ecrémeuh. Est-ce que tu aurais l'amabilité de me montrer les pokémon, afin que je vois si elles me conviennent ?
- Sous cette pluie ? Il y a de quoi attraper un mauvais rhume. Venez patienter à l'intérieur, je vous conduirai à l'étable après.
- Malheureusement, répondit l'autre avec un regard insistant, je suis particulièrement pressée, aussi vaut-il mieux que nous y allions maintenant.

Eric haussa les épaules et finit par céder à contrecoeur. Il fit signe à son interlocutrice de lui emboîter le pas, néanmoins elle ne bougea pas d'un pouce. Elle s'était totalement désintéressée de lui pour observer Kathy qu'il ne dissimulait désormais plus.

- Ta soeur devrait venir, elle aussi.
- Pourquoi ?
- Ce n'est pas prudent de laisser une enfant seule sans surveillance.

Ils s'apprêtaient à répliquer, mais finalement ni l'un ni l'autre ne le fit. Cette femme était en apparence le genre de personne à qui il était difficile de ne pas obéir et, comme la pluie couplée au vent commençait à les glacer, Eric préférait en terminer au plus vite.

- D'accord. Kathy, viens avec nous.

Il attrapa la main de sa soeur dans la sienne et ils ouvrirent la marche jusqu'à l'étable. La dénommée Cassidy avançait dans leur sillage sans prononcer le moindre mot, jusqu'à ce qu'ils aient atteint le vieux bâtiment, à l'extrémité de la cour.

Ils la laissèrent étudier les Ecrémeuh pendant un instant et le garçon en profita pour l'observer elle aussi : elle n'avait rien d'une paysanne. Elle avait un maintien noble, une beauté exceptionnelle, des manières raffinées et des habits d'une grande élégance. Pourquoi s'intéressait-elle à un troupeau de bétail ?

- Hum... Non, finit-elle par lâcher de sa voix autoritaire. Elles sont bien trop grasses. Cela ne m'intéresse pas.

Eric leva les yeux au ciel. Il se doutait bien que cette femme leur ferait perdre son temps. Ils ressortirent dans la petite tempête qui venait de se lever sur le sud-est de Sinnoh et Kathy fermait la marche, grelottante. Elle ne portait rien d'autre qu'une fine robe en coton.

Un bruit tonitruant se fit entendre alors qu'ils refermaient la porte de l'étable. Ils sursautèrent en même temps lorsque l'arbre gigantesque qui bordait leur maison s'effondra sur la toiture dans un craquement sinistre. Le toit s'affaissa sous lui, à l'instar du mur, à l'endroit exact où se trouvaient leurs chambres respectives.

- Oh non ! s'exclama Kathy.
- Une chance que nous n'ayons pas été à l'intérieur, cela aurait très bien pu nous tuer.

Encore sous le choc, ils ne s'aperçurent pas immédiatement que la mystérieuse femme avait disparu. Quand Eric en prit conscience, il fronça les sourcils. Quel personnage énigmatique... Une chose était certaine, en tout cas : par le plus grand des hasards, elle venait sans doute de leur sauver la vie.

***
- Zeus n'a rien remarqué de suspect ?

Némésis frotta le bas de son pantalon contre lequel de la boue avait giclé et prit appui sur l'aile de Lugia afin de se hisser sur son dos. Il secoua la tête en signe de dénégation pour répondre à sa question.

- Quel imbécile... Arceus et lui seraient bien capables de détruire ma Confrérie par accident si je ne prenais pas grand soin de veiller sur eux.

Avec un sourire, elle observa la ferme en contrebas tandis que le légendaire prenait de l'altitude. Elle avait mis des années à peaufiner son plan et, à présent, elle ne laisserait personne le réduite à néant.

- J'aime bien le dragon, avoua-t-elle pour elle-même. Elle cache en elle un potentiel que personne ne pourrait soupçonner. Elle sera vraiment le clou de ma création : l'arme parfaite.