Secrets - One RepublicArceus quitta les ruines Sinjoh avec Athéna et Cassy regagna Ebénelle sur le dos de Lugia en compagnie de Némésis et de Satan. Ils devaient rallier la Confrérie à leur cause avant de retrouver l'Alpha à Sinnoh, plus précisément à Célestia, d'où ils pourraient guetter la venue de Cronos au Mont Couronné.
- Elle n'acceptera jamais, tu le sais, murmura le Malin à l'oreille de la dresseuse.
- Je crains hélas que Lilith n'ait pas le choix. Elle devra bien s'y résoudre.
- Tu connais son orgueil. Elle refusera et je la comprends. Tu ne peux pas lui demander cela.
- J'en ai conscience, cependant il n'y a aucune autre alternative. Si nous n'arrêtons pas Cronos, il plongera l'univers tout entier dans les ténèbres. C'est facile pour vous, vous y vivez constamment, mais pas pour nous.
- Tu te moques bien des humains, Cassidy, et si tu les as protégés contre la Team Galaxie, c'est uniquement parce que cela te permettait de te venger de ton frère.
- Je ne veux pas qu'il arrive malheur à ceux que j'aime. Oui, sûrement un grand nombre d'entre eux mérite de mourir, mais il y a Cynthia, Sandra, Régis... Je ne tiens pas à ce qu'ils vivent dans un monde contrôlé par un démon.
Elle resserra sa cape autour de ses épaules. Comme ils se trouvaient à une altitude très haute, les courants ascendants étaient particulièrement froids, malgré la douceur actuelle des températures à Kanto qu'ils survolaient.
Satan lui prit la main alors qu'elle s'égarait peu à peu dans ses pensées. Elle essaya de lui adresser un sourire, cependant elle ne réussit qu'à esquisser une grimace. Il avait toujours eu de l'affection pour elle et réciproquement. Elle savait qu'elle pourrait compter sur lui, même s'il n'avait pas davantage de chance qu'elle de convaincre Lilith.
- Nous serons à Johto d'ici quelques minutes, informa Némésis en venant s'asseoir auprès d'eux.
- Vous devriez rester à l'écart. Si jamais les humains légendaires vous voient, ils...
- Ils vont paniquer ? Une panique est toujours moins longue que des heures d'explications et nous n'avons pas de temps à perdre. S'ils ont confiance en vous deux, il vous suffira de leur dire que je mords pas... Pour l'instant.
Cassy gémit légèrement lorsqu'elle ressentit une petite douleur dans le bas du ventre. En regardant plus attentivement, elle s'aperçut que son foetus remuait et qu'il venait de lui donner un coup de pied. C'était la première fois.
- On dirait qu'il s'agite... murmura la déesse avec une ébauche de sourire. Tu permets ?
La jeune femme acquiesça d'un signe de tête et elle vint poser sa main sur son ventre arrondi. Elle demeura quelques instants dans cette position, les paupières mi-closes, les lèvres entrouvertes. Enfin, quand elle recula, elle laissa échapper un petit rire.
- Qu'y a-t-il ? s'enquit immédiatement la dresseuse.
- Ta détermination m'amuse.
- Pourquoi cela ?
- Parce que tu viens de conclure une alliance avec Arceus en lui promettant que tu veillerais au bon déroulement du plan.
- Et j'en ai l'intention.
- Ah oui ? Que fais-tu de la faille à laquelle vous allez être confrontés ?
- Quelle faille ?
- Il faut que Cronos soit frappé des dix-sept types à la fois. Dix-sept plaques, donc...
- Dix-sept glyphes.
- Tu n'en as plus que quinze, rappela Némésis.
- Arceus remplacera mon frère, l'insecte.
- Et les ténèbres ?
- Si vous me faites cette remarque à cet instant précis, c'est que vous savez quelque chose. Rassurez-vous, je l'ai senti, moi aussi.
Le regard de Satan passa de la meneuse de la Confrérie à l'humaine légendaire. Tout dans son expression laissait deviner qu'il ne comprenait strictement rien à la tournure que prenait la conversation. Cassy effleura à son tour son ventre avant de déclarer :
- J'ai éprouvé cette étrange sensation à l'instant même où j'ai... où Sven est mort. J'ai l'habitude du pouvoir du dragon qui parcoure mes veines, mais là, c'était différent. J'ai clairement été submergée par les ténèbres. Les glyphes sont transmissibles, n'est-ce pas ? Le foetus possède celui de son géniteur.
En dépit de sa grossesse désormais plus que bien entamée, la jeune femme peinait toujours à prononcer le mot "bébé", sans doute à cause de son instinct maternel complètement inexistant.
- Observe...
Némésis tendit ses deux mains devant elle, les paumes tournées en direction de l'éther. Elle les agita légèrement de gauche à droite en arc de cercle, jusqu'à ce qu'une sphère lumineuse apparaisse à hauteur de son buste.
Elle tournait lentement sur un axe invisible, pareille à l'une des planètes du système solaire. Elle était petite, d'une demi-douzaine de centimètres de diamètre environ, et possédait une couleur jaune tirant sur le gris-vert. Le symbole du type insecte flottait à l'intérieur.
- Au début, il y en avait dix-sept. Je vous ai sélectionnés un à un et je vous ai tous remis vos pouvoirs. A la mort de ton frère, le sien est revenu vers moi en attendant que je lui trouve un nouveau maître.
- Il peut donc y avoir plusieurs porteurs d'un même glyphe ?
- Oui, mais un seul à la fois.
- Pourquoi ne pas le redonner à quelqu'un, alors ? s'étonna Cassy.
- Cela va certainement me prendre des années pour localiser une âme compatible. Sven et ton enfant partagent la même chair, le même sang. Il est donc normal qu'il est hérité du sien. Eric, lui, n'a pas de successeur direct. Je ne choisis pas les humains au hasard, sans quoi cette magie ancestrale risquerait de les tuer s'ils n'ont pas les qualités adéquates pour la recevoir.
Lugia cria doucement pour les préparer à la descente. Ses ailes immenses déployées, il plana en exécutant des petits cercles jusqu'à atterrir sur la falaise qui surplombait l'Arène d'Ebénelle, coupant court à leur discussion. Ils descendirent tous les trois de son dos pour mettre pied à terre.
- J'imagine que rien ne saurait vous convaincre d'attendre ici ?
- Rien, en effet, répondit Némésis. Si Lilith refuse de t'aider, je peux toujours lui en donner l'ordre.
- Elle n'obéit à personne.
- Je ne suis pas personne.
Un soleil tiède réchauffait la ville qui s'éveillait à peine. Cassy détacha la boucle de sa cape et la porta sur son bras. Bien que sa tenue de dracologue soit plutôt légère, elle avait chaud. Satan fermait la marche dans son sillage, en silence.
- Où sont-ils ? interrogea Némésis une fois au pied de la falaise, autrement dit à proximité de l'Arène.
- La Confrérie se trouve probablement à l'intérieur du bâtiment. Les humains légendaires, eux, sont dans l'Antre du Dragon.
- Katharina !
Cette exclamation les invita à lever la tête vers l'une des fenêtres du premier étage, à laquelle Sylvain y était accoudé. Il lui adressa un signe de la main, mais ne tarda pas à réfréner son enthousiasme en voyant la femme qui se tenait à ses côtés. Il ne la connaissait pas, cependant il ne lui fallut qu'une fraction de seconde pour faire le rapprochement.
- Oh ! Euh... Je vous prie de bien vouloir accepter toutes mes excuses, ma dame.
- Sylvain Galaksija, le glyphe roche, répondit Némésis avec un sourire poli. Je suis ravie de te voir.
Le Topdresseur s'empourpra jusqu'aux oreilles, aussi mal à l'aise que flatté qu'elle ait pris la peine de s'adresser à lui en personne. Il se retourna un instant vers l'intérieur, puis un nouveau visage le rejoignit dans l'encadrement, celui de Yohanna.
- Comment va Crios ? questionna Cassy à son attention.
- Il est toujours... absent, répondit-elle avec un soupir attristé. Il ne me reconnait plus et j'ai l'impression de m'occuper d'un enfant. Il est tellement... tellement... Je ne sais même pas quel adjectif conviendrait.
- Il est toujours sous le choc de sa rencontre avec Cronos ? s'enquit l'humaine légendaire.
- Les potions de Circé, les gants de Léa et les soins que nous lui apportons au quotidien ne servent à rien. Il ne souffre plus de l'hystérie dont il était victime lorsque vous nous avez secourus, mais on dirait qu'il n'est à présent rien de plus qu'une coquille vide. Ne pourriez-vous rien faire pour l'aider ?
- Rien ne m'interdit d'essayer, cependant même la plus puissante des magies est souvent inefficace face aux blessures de l'esprit. Où est-il ?
- Dans le dortoir de l'étage. Yohanna, tu veux bien la guider, s'il te plaît ?
L'intéressée s'empressa d'acquiescer d'un hochement de tête et disparut de la fenêtre pour venir à leur rencontre. Comme il ne restait plus que Sylvain, Cassy lui demanda où elle serait susceptible de trouver Lilith.
- Elle a emmené Giratina à l'est d'ici afin qu'il n'attire pas l'attention et je crois qu'elle avait l'intention de rester avec lui jusqu'à son réveil.
La dresseuse le remercia brièvement et interrogea Satan du regard. Elle n'eut pas besoin de prononcer le moindre mot qu'il lui répondit déjà par l'affirmative, ce qui la soulagea. Elle se voyait mal expliquer la situation seule à la reine des Succubes et des Incubes.
- Tu as peur de sa réaction ?
- On m'a un jour dit que si elle venait à apprendre tout ce que je manigançais dans son dos, en particulier ce qui se rapportait à Némémis, elle me briserait les os un par un. Vue la crainte qu'elle éprouve à son encontre, je n'en doute pas une seule seconde.
- Qui t'a dit cela ?
- Seth.
Cassy n'avait jamais parlé de leur rencontre à quiconque, mais au point où elle en était, cela ne faisait plus grande différence. Elle leur avait dissimulé tant de choses qui se révélaient désormais au grand jour qu'elle n'avait plus aucune raison de taire sa connaissance du frère d'Osiris.
- L'as-tu apprécié ?
- Pas vraiment. Il est... très étrange. Et il est instable, dans le mauvais sens du terme.
- Inari t'approuverait si elle t'entendait.
- Je sais qu'il a été son amant après la mort d'Isis. Finalement, c'est peut-être le lot de tous les humains légendaires.
- A quoi fais-tu allusion ?
- Qu'aucun d'entre vous n'est heureux en amour. Il s'agit toujours de triangle amoureux. Soit deux personnes aiment la même, soit... soit l'une d'elle en aime une autre dont le coeur est déjà pris.
Elle lança un regard entendu à Satan qui détourna précipitamment le sien. Lilith devait sans doute connaître les sentiments qu'il éprouvait à son égard, sans quoi elle ne se permettrait peut-être pas de le manipuler à sa guise ainsi qu'elle le faisait depuis toujours.
- N'oublie pas, Cassidy. C'est notre petit secret.
- Des secrets, il n'y a plus que cela, désormais, marmonna-t-elle, amère.
Elle pressa le pas. Une tâche délicate et difficile l'attendait, or elle ne voulait plus trainer, surtout pas à présent que la fin n'avait jamais été aussi proche.