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La petite fille et la mer de MizukiAna



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» Auteur : MizukiAna - Voir le profil
» Créé le 15/11/2014 à 10:50
» Dernière mise à jour le 15/11/2014 à 11:10

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Chapitre 2 : L'orage
Salut Vai',

Merci pour les gâteaux, ils étaient excellents. Tu vois, il suffisait de laisser le temps à Goélise de devenir un coursier hors-pair, mauvaise langue ! Bon, c'est vrai que son évolution a pas mal aidé, mais ce n'est pas une raison, ha ha !

Sinon, c'est vraiment rageant que le bateau ait été annulé pour une simple alerte tempête ! Surtout qu'elle n'a pas l'air aussi terrible, d'après le Pokénav. On avait tout préparé pour ton arrivée à la maison, et... bref. Tant pis, ça se fera la prochaine fois, je suppose.

De ton côté, sois tout de même prudente. Je suppose que tu n'as pas besoin que je te le dise, et que vous êtes déjà tous en train de monter les niveaux de sécurité à Pacifiville, mais quand même. Ne sors pas de chez toi pour aller vérifier que les Corayon vont bien, cette fois, hein ? L'année dernière, il avait fallu te repêcher en catastrophe, alors que tes Pokémon s'étaient sagement mis à l'abri, comme tout le monde te l'avait dit... (oui, je te le rappellerai toujours, je te l'avais dit que ça te poursuivrait longtemps :P)

A bientôt, et SANS FAUTE cette fois, hein ?

Bises,

Timéo


Vaimiti rangea la lettre dans sa poche, tandis qu'un voisin lui signalait qu'un appel l'attendait au Centre Pokémon. Elle se leva donc du pont sur lequel elle s'était installée pour lire, et se rendit sur la place centrale, à l'intérieur du grand bâtiment de soin. Une infirmière lui indiqua d'un mouvement de tête un des appareils de visio-communication, avant de repartir s'occuper des touristes qui se retrouvaient coincés à Pacifiville pour la nuit. La fillette s'approcha de la machine, qui clignotait pour indiquer un appel en attente, et se connecta en décrochant le combiné. Les visages inquiets de ses parents apparurent à l'écran. Sa mère tenait le téléphone. La femme aux cheveux châtains coupés au carré semblait tracassée, comme le montrait son regard turquoise.

« Ah ! Ma puce, comment vas-tu ?

- Ça va. Le vent ne s'est pas encore trop levé, et j'ai passé le début d'après-midi à vérifier l'étanchéité de la maison, il n'y a pas de problème.

- Bon, très bien, très bien... Ma chérie, je suis désolée mais ton père et moi n'allons pas pouvoir rentrer de Poivressel aujourd'hui... »

Malgré l'air désolé de sa maman et celui, plus agacé par le contretemps, de son papa, Vaimiti ne put retenir une mimique désapprobatrice. Elle savait bien que ce n'était pas de leur faute, qu'ils avaient été pris de cours par la mauvaise météo après avoir fait le marché de la ville maritime, mais quand même, ils avaient bien choisir leur jour pour la laisser seule !

« Ne fais pas cette tête, Vaimiti... Tu pourras rester au Centre Pokémon, les gens s'occuperont de toi. Et on sera de retour le plus tôt possible.

- Je sais bien, maman. Mais je vais rester à la maison, elle a déjà connu pire, et je peux me débrouiller toute seule. Ça va aller. »

La fillette fit un sourire qui se voulait rassurant à ses parents, qui n'avaient pas l'air emballés plus que ça par sa proposition. Mais ils devaient admettre qu'elle n'avait pas tort : la tempête de la nuit prochaine semblait plutôt faiblarde comparée à ce qu'ils avaient déjà eu l'occasion de subir à Pacifiville, malgré les inquiétudes des compagnies maritimes. Les deux adultes firent à leur fille les recommandations de base, comme celle de ne pas sortir de la maison sauf en cas d'urgence, qui aller voir, où étaient les bougies et les lampes torches si le courant sautait. En somme, que des choses qu'elle savait déjà, mais qu'elle appréciait qu'on lui rappelle malgré tout. De son côté, elle rassura ses parents sur les rajouts d'imperméabilisant qu'elle avait déjà faits, ceux qu'elle comptait faire, et non, elle ne sortirait pas pour vérifier que les Corayon allaient bien, cette fois (décidément, cette histoire la suivait partout).

Il n'y avait rien de plus à faire, de toute façon. Vaimiti raccrocha le téléphone après de longues minutes de conversation, puis retourna chez elle finir ses préparatifs. En cette fin d'après-midi, le ciel était encore à peine couvert, mais le vent soufflait de plus en plus fort, et les nuages avançaient de plus en plus vite. Il allait falloir vérifier les accroches de la maison sur la plateforme, et celles de la plateforme dans la roche sous-marine – ses camarades s'occuperaient de cette partie-là. Ensuite, elle allait devoir s'assurer que les volets étaient suffisamment bien accrochés pour ne pas s'envoler, de même que la porte. Et ce serait tout... Malgré leur apparente fragilité, les « petites cabanes » de Pacifiville savaient résister aux vagues. C'était plutôt les ponts qui cassaient, en général, mais ce n'était pas le plus dur à reconstruire.

Il commençait à peine à pleuvoir quand la petite fille s'enferma chez elle, prête à passer la nuit de la tempête au chaud et au sec, mais seule. Les gouttes, bien plus grosses qu'à l'accoutumée, s'écrasaient avec fracas sur les murs de bois de sa hutte, et le bruit des vagues n'avait plus rien d'apaisant. Le vent faisait grincer les lattes de bois, mais rien ne bougeait à l'intérieur, preuve que son souffle ne pénétrait pas la maison. Seuls les sons témoignaient de la force de la tempête, et ils n'effrayaient pas Vaimiti. La petite fille occupa sa soirée en mangeant son dîner et en lisant en silence. Cette quasi inactivité était inhabituelle chez elle, mais, malgré toute sa frustration, elle savait qu'il n'y avait rien d'autre à faire pour l'instant, à part attendre. Après une heure, et même s'il était encore tôt, elle se résolut à aller dormir, songeant que le temps passerait plus vite ainsi.

Mais alors qu'elle se préparait, elle entendit un bruit inattendu à l'extérieur. Un cri, d'une voix qui semblait appeler à l'aide. Curieuse et légèrement inquiète, elle attrapa une lampe torche et ouvrit la porte de sa maison, tout en la retenant bien pour que la violence du vent ne l'emporte pas. Dans l'obscurité et la danse des vagues, elle ne pouvait pas discerner grand-chose même avec le faisceau lumineux de sa lampe de poche, mais elle aperçut une silhouette à l'eau. Oubliant toutes ses promesses, elle sortit de chez elle, simplement vêtue de son pyjama qui se retrouva trempé en quelques instants, pour se précipiter en direction de la créature en détresse. Mais elle n'était pas la seule à l'avoir vue : quelqu'un d'autre, qu'elle reconnut immédiatement, s'était lancé dans l'eau pour secourir le malheureux. Mais les deux étaient en train de se faire emporter du côté du Chenal 132, dont les rapides devaient être plus dangereuses que jamais...

« Cory ! »

Vaimiti plongea dans les eaux tempétueuses. La première règle des nageurs de Pacifiville était de ne jamais s'approcher du Chenal à l'Ouest. La seconde était de ne jamais le faire sans équipement de plongée adéquat. Avec seulement son pyjama et son appareil de respiration, la fillette les ignorait proprement toutes les deux. Mais elle craignait trop pour la vie de son ami pour s'en soucier. Poussée par le vent et les vagues, elle parvint à le rejoindre en quelques brasses, pour découvrir qu'il avait secouru un jeune Goélise en train de se noyer. Mais retourner vers la ville s'annonçait difficile voire infaisable ; ils s'en éloignaient de seconde en seconde, et nager à contre-courant ne servait à rien à part à les épuiser inutilement. Et personne ne semblait les avoir vus depuis la ville.

Le trio se fit donc emporter par la masse d'eau, sans pouvoir l'empêcher d'aucune façon. Regagner le village n'était plus la priorité, il fallait commencer par rester en vie. Les occasions de mourir ne manquaient pas, malheureusement. Plusieurs fois, les vagues les enfoncèrent de plusieurs mètres sous la surface, les faisant rouler et perdre leurs repères spatiaux. D'énormes rochers apparaissaient sournoisement sur leur trajectoire, qu'il fallait esquiver in extremis pour ne pas s'écraser dessus. En fait, le seul point positif à la tempête était peut-être que les prédateurs ou les créatures dangereuses, comme les Tentacool ou les Sharpedo, ne risquaient pas de s'attaquer à eux.

L'adrénaline dans le corps de la jeune fille l'empêchait de réfléchir à autre chose que sa survie immédiate et celle de ses compagnons d'infortune – esquiver le rocher, nager vers la surface. Ne surtout pas lâcher Cory ou le Goélise. Mais après quelques minutes, le froid, la peur et la certitude de ne pas échapper à la noyade eurent raison des forces de Vaimiti. Elle se sentit submergée par l'épuisement et le désespoir, et s'abandonna à l'Océan furieux.

À ce moment, Cory décida de reprendre les rênes. Était-ce l'instinct, ou connaissait-il déjà l'endroit ? Quoi qu'il en fût, il plongea de lui-même dans les profondeurs de la mer, entrainant avec lui l'humaine et l'oiseau. Sans comprendre, mais avec confiance, Vaimiti se laissa tirer là où son Corayon souhaitait la conduire, plaçant son dispositif de respiration dans sa bouche. Mais, si le Pokémon rose pouvait respirer sous l'eau sans problème, cela ne semblait pas être le cas du Goélise, qui se tortilla dans son bras serré. La fillette retira son appareil et tenta de l'insérer dans le bec du volatile, afin de lui fournir de l'air, mais il n'avait absolument pas été conçu pour fonctionner ainsi. Elle le remit en place et enlaça le Pokémon, comme pour lui transmettre tout son courage, terrorisée à l'idée qu'il ne meure. Pour sa survie, il fallait que Cory les emmène rapidement en lieu sûr...

La fillette remarqua que les remous se faisaient bien moins sentir ici qu'à la surface. Elle avait l'impression d'être dans l'œil du cyclone. Pourtant, ils n'étaient pas encore sortis d'affaire. Le Corayon nageait toujours aussi vite qu'il le pouvait, et Vaimiti nageait à sa suite, tenant dans ses bras le petit oiseau marin sans oser vérifier qu'il était toujours en vie. Dans l'obscurité, elle ne remarqua pas que le corail mouvant l'avait conduite dans une grotte sous-marine, et fut extrêmement surprise en émergeant à l'air libre, si surprise qu'elle but la tasse en se laissant retomber dans l'eau. Tandis qu'elle toussait et essayait de reprendre sa respiration, Cory lui rouspéta dessus pour qu'elle n'oublie pas le Goélise dans ses bras. À l'aveugle, elle nagea donc à la recherche d'une berge sur laquelle monter, sortit de l'eau et déposa délicatement l'oiseau au sol.

« Je... je ne vois rien... Cory, est-ce qu'il va bien ? »

Vaimiti ne parvenait pas à trouver son Pokémon. Tout autour d'elle était noir, et ses tâtonnements ne lui faisaient toucher que les roches sur le sol. C'est alors qu'elle se souvint de la lampe qu'elle avait prise avec elle. Entre l'eau et les remous, les chances qu'elle fonctionne toujours étaient maigres, mais la fillette sortit malgré tout l'appareil et l'alluma. Par chance, une lueur faiblarde éclaira la pièce où ils se trouvaient tous les trois. Avant de s'intéresser à l'endroit où ils étaient tombés, elle préféra s'assurer de l'état de santé du Goélise. Par bonheur, celui-ci respirait encore, mais il avait dû avaler pas mal d'eau. Son poitrail se levait et s'abaissait régulièrement. Vaimiti s'autorisa un long soupir de soulagement. Ils n'étaient pas morts... pour le moment. Certes, ils étaient perdus au milieu de l'Océan, personne ne savait qu'ils étaient là et la tempête faisait rage au-dessus d'eux, mais, pour l'instant, ils étaient en vie, hors de danger. Cette première pensée rassurante en tête, elle observa autour d'elle pour essayer de déterminer où ils avaient bien pu arriver.

« Qu'est-ce que c'est... que ça... ? »

La salle était immense, maintenant qu'elle y accordait de l'attention. Mais son agencement n'était pas entièrement l'œuvre de la nature. Dans la grotte, brute et sauvage, se trouvaient de nombreuses stèles gravées par une main humaine, sans le moindre doute. Pour autant, à la faible lueur de sa lampe de poche, la jeune fille était bien incapable de les lire. De toute façon, même une lumière plus puissante n'aurait pas suffi : elle constata, en posant sa main sur la roche froide et humide, que les mots étaient formés de creux et de bosses, bien différents de l'alphabet auquel elle était habituée.

« Mince de mince... »

Le chuchotement de l'enfant résonnait sur les murs, amplifiant le moindre son. Des gouttes tombant sur le sol tintaient régulièrement tout autour d'elle. Il ne faisait pas particulièrement froid, bizarrement, mais l'humidité était partout. Vaimiti n'en revenait pas qu'il puisse y avoir une telle chose, relique d'un passé lointain et mystérieux, si près de Pacifiville. Elle était presque certaine que personne n'en savait rien, en plus ; jamais un villageois n'avait évoqué un temple sous-marin de ce côté-là de la mer. Il fallait dire qu'il était assez rare de s'aventurer dans les rapides, pour un plongeur. Elle avait donc fait une découverte... Une découverte historique, même ! Mais pas sûre que cela soit assez convainquant pour que ses parents lui épargnent l'énorme punition qu'elle allait recevoir en rentrant, si elle expliquait être partie du côté du Chenal 132 en pleine tempête. Hum. Cela méritait réflexion.

Peut-être serait-il préférable de garder le secret à propos de ce lieu... Outre les conséquences que cela aurait sur elle, cela risquait d'attirer les touristes et les explorateurs, qui n'auraient pas forcément la chance insolente qu'elle avait eue aujourd'hui et se blesseraient, ou pire, en essayant d'atteindre ce sanctuaire mystérieux ! C'était beaucoup plus raisonnable de ne rien dire. En plus, comme ça, cette superbe grotte resterait son secret, rien qu'à elle.

La jeune fille en était là de ses réflexions quand sa lampe rendit définitivement l'âme, la laissant soudain aveugle. Une chance qu'elle n'ait pas peur du noir, même si elle n'était pas totalement rassurée, coincée ainsi sous la mer, avec au moins un de ses cinq sens rendu inutile. Courbée, les mains devant elle pour repérer d'éventuels obstacles, elle chercha à rejoindre ses camarades d'infortune.

« Cory ? Tu es où ?

- Corayon ! »

Se guidant à la voix du Pokémon, Vaimiti fit quelques pas dans l'obscurité, manquant de trébucher sur les pierres roulant au sol.

« Cory ?

- Corayon ! »

Trois pas supplémentaires, le cri venant de plus près. La fillette se mit presque à quatre pattes pour essayer de retrouver le corail vivant, et tâtonna le sol autour d'elle. Une pierre à la forme familière, et remuant à son contact de manière tout à fait inhabituelle, vint ainsi à sa rencontre. Rassurée d'avoir retrouvé son ami, Vaimiti s'assit au sol, le Corayon venant se lover contre elle. Le Goélise qu'ils avaient aidé les rejoignit dans cette « étreinte des naufragés ». Malgré le fait qu'elle ne pouvait rien voir, sentir leur chaleur et leur présence avait un effet apaisant sur la jeune fille.

« Vous pensez qu'on va pouvoir sortir d'ici ? On n'a aucune idée de la météo extérieure... et on ne voit rien... »

Les deux créatures dans ses bras s'agitèrent, mais elle ne pouvait deviner s'ils disaient oui ou non de la tête, ou même s'ils n'étaient pas simplement en train de trembler ou de se mettre plus à l'aise, moins soucieux de leur survie à long terme qu'elle ne l'était. Cependant, le poids sur ses jambes diminua, et un « plouf » résonna à côté. Elle ne sentait plus que des plumes contre sa peau ; Cory était parti. La peur forma une boule dans la gorge de Vaimiti : son ami l'abandonnait-il ici, dans l'obscurité d'une grotte sous-marine ? Elle s'efforça de garder son calme, en respirant doucement. Plus probablement, le Corayon était parti chercher de l'aide, à Pacifiville. Ou peut-être à Poivressel.

Les deux théories prirent l'eau lorsqu'un nouveau bruit indiqua le retour du Corayon, seul, et bien trop rapide pour qu'il ait eu le temps de faire l'aller-retour vers une ville. Découragée et épuisée, la jeune fille s'affaissa sur le sol, pour se retrouver allongée contre les pierres humides. Cory s'approcha de son visage pour coller son front à celui de son amie, comme pour lui donner un peu de courage.

« On va s'en sortir, Cory ? »

Cory n'en savait rien. Et quand bien même il aurait su, il n'avait pas les mots pour le dire. Sans s'en rendre compte, Vaimiti ferma ses yeux et plongea dans un demi-sommeil sans rêves.