Family.
- Mademoiselle, réveillez-vous, il est plus de dix heures du matin.
Yaen se leva en sursaut. Elle avait dormi aussi longtemps ?! Son premier réflexe fut de chercher le livreur. Il était là, devant le comptoir, se tenant droit sans bouger. Un peu trop solennel. Elle le rejoignit sans prendre ses affaires, ne faisant même pas attention à l'infirmière Joëlle qui venait de la réveiller.
- Mademoiselle Yaen ?
- Oui c'est moi !
- Votre carte de dresseur, s'il vous plait.
Evidemment, ce colis devait être trop important pour qu'on fasse confiance à n'importe qui. Elle sortit ce justificatif d'identité, indiquant photo et nombre de badges acquis, et le tendit au livreur. Il y jeta un coup d'œil rapide avant de lui céder une boite en carton un peu lourde. Cela piqua sa curiosité. Il demanda une signature de la part de Yaen, pour preuve qu'elle avait bien réceptionné son dû, et sortit du centre Pokémon. La dresseuse retourna sur le canapé où elle avait laissé ses affaires et ouvrit le colis précipitamment. Il y avait un Pokénav flambant neuf et un œuf de Pokémon, elle l'avait bien reconnu, ayant été éleveuse durant toute son enfance.
Avant de partir, le livreur poursuivit :
- Monsieur Rochard m'a aussi remis ceci pour vous.
Une lettre manuscrite. Yaen la prit et l'ouvrit immédiatement. L'écriture était élégante, légèrement italique.
« Mademoiselle Yaen,
Veuillez accepter ces quelques présents qui vous aideront, j'en suis certain, dans la réalisation de vos rêves. Mon père est le directeur de la Devon SARL, qui fabrique ces petits bijoux de la technologie. Mon numéro y est déjà enregistré.
Prenez aussi soin de cet œuf, qui appartient à l'un de mes Pokémons. Je suis sûr qu'il est entre de bonnes mains.
Au plaisir de vous revoir,
Rochard Pierre »
Elle ne put retenir un sourire. Ses parents n'avaient pas les moyens de lui payer un Pokénav. Et cet œuf... Il lui rappelait des souvenirs de son enfance, quand elle se rendait tous les matins à la couveuse pour vérifier l'éclosion des œufs. Elle se demandait donc quel Pokémon pouvait bien se trouver à l'intérieur de l'œuf. Elle le berça maternellement et le glissa dans son sac à dos, calé sur la couverture pliée. Elle avait conscience du temps qu'elle devrait consacrer à l'œuf pour qu'il éclose, et était prête à le faire en tant que digne fille d'éleveurs.
Elle sortit du centre Pokémon, sans quitter son sourire. La matinée était magnifique, le marché battait son plein au milieu de la ville. Yaen s'empressa de s'y rendre pour découvrir ce que les étalages avaient à lui proposer. Potions, balls, poupées, poudres médicinales... Il y avait de tout pour se préparer à de nouveaux combats. Elle acheta le nécessaire pour continuer son aventure et quitta le marché bondé. Le musée attisa son envie de visiter, mais l'entraînement était un appel plus grand. Yaen devait augmenter le niveau de ses Pokémons avant de continuer la chasse aux badges. Ainsi, elle serait sûre de gagner le prochain. Elle fit sortir ses trois Pokémons et les conduisit dans les hautes herbes, au Nord de la ville. Roucool semblait avoir beaucoup appris de ses précédents combats, car il ne lui fallut que peu d'entraînement pour évoluer en un brave Roucoups. Arcko s'améliorait nettement, mais ne semblait pas encore prêt pour l'évolution. Yaen avait beau l'encourager et montrer qu'elle avait confiance en lui, il craignait de ne pas être à la hauteur, une fois évolué. Ténéfix, lui, n'aurait pas d'évolution. Mais il avait beaucoup de techniques de combat à apprendre, son type spectre serait un atout intéressant dans la stratégie d'attaque à mettre en place contre le prochain champion. Les Pokémons sauvages avaient un niveau variable, et les faiblesses de type étaient à mettre en jeu pour remporter la victoire. Quelques dresseurs se joignaient à l'entraînement et proposaient des combats pour laisser les Pokémons sauvages se reposer. L'ambiance était très agréable, à midi ils prirent tous ensemble le déjeuner, Pokémons sortis, pour profiter de la journée ensoleillée. Ils discutaient de leurs exploits, de la façon dont ils avaient acquis leurs badges, des objets qu'ils préféraient utiliser. Yaen avait beaucoup à apprendre auprès d'eux. Elle ignorait que les autres dresseurs étaient aussi sociables et prêts à donner autant de conseils. Elle n'en avait pas affronté beaucoup, mais ceux du Bois Clémenti étaient aussitôt partis après leur défaite.
Ils commencèrent à parler de leurs villes respectives.
- Je viens d'Algatia, c'est très loin d'ici, mais je devais obligatoirement commencer à Bourg-en-Vol. Ma famille me manque un peu, mais dès que mes Pokémons vol pourront me porter, nous nous envolerons pour retrouver mes proches !
- Moi de Vermilava, personnellement je préfère la chaleur du volcan. Ici, le paysage est trop plat.
- Tu rigoles ?! La mer, y a qu'ça d'vrai ! On peut tout faire ici, se baigner, bronzer, manger sur la plage... Il y a tellement plus d'activités sur la plage que sur les montagnes...
- On voit que t'as jamais eu de bicyclette ! Avec un vélo cross, sur le Sentier Sinuroc, c'est le pied !
Yaen ne participait pas à cette conversation. Elle savait qu'elle retournerait bientôt à Lavandia et retrouverait ses parents. Ils seraient tellement fiers d'apprendre l'obtention de ses deux premiers badges !
- Et toi, d'où viens-tu ? Lui demanda une dresseuse, qui n'avait pas parlé jusqu'à maintenant.
Elle tourna la tête vers son interlocutrice. Elle était brune, habillée d'une grande cape blanche et de vêtements sombres. Elle donnait des pofiteroles à son Chuchmur. Yaen lui répondit :
- De Lavandia, une ville très fleurie.
- Je vois, ça n'est pas très loin d'ici il me semble, tu vas dans cette direction ?
- Oui ! Pour le prochain badge.
- Moi aussi, nous aurons sûrement l'occasion de nous revoir.
La conversation finie, Yaen prit congé et retourna en ville pour visiter le musée. Cette conversation lui avait donné envie de retrouver ses parents. Elle consacrerait une heure à la visite du musée et prendrait la route jusqu'à Lavandia.
Le musée de Poivressel stockait d'innombrables matériels de mer ainsi que des tableaux. On avait vite fait de faire le tour, mais on en ressortait avec beaucoup de nouvelles informations en tête concernant la vie de marin, la construction de navires...
Mais Yaen était pressée, elle fit donc un tour rapide du musée. Elle ne retint pas grand-chose de sa visite et eut même l'impression d'avoir dépensé son argent pour rien. Elle n'avait qu'une seule chose en tête : revoir ses parents, sa ville de naissance et les habitants de Lavandia. Elle affronterait aussi le champion Voltère, qu'elle avait toujours vu avec ses yeux d'enfant comme un ami et protecteur de la ville. Ses affaires étaient déjà fin prêtes. Yaen jeta un coup d'œil rapide à son œuf et prit la route vers le Nord, là où elle s'était entraînée en début de journée. Il n'y avait plus personne, juste des Pokémons sauvages qui prirent la fuite en voyant Yaen courir. Manquant de bicyclette, elle emprunta la route herbue sous la piste cyclable qui reliait Lavandia à Poivressel. Le trajet ne fut pas long, car Yaen avait de l'endurance et ne s'arrêtait pas de courir. Elle arborait un sourire radieux et trépignait d'impatience. Quelques Goélises accompagnèrent la jeune femme dans sa course, ils volaient à la même vitesse qu'elle sans pour autant comprendre pourquoi elle courait avec tant de joie. Le temps était toujours aussi ensoleillé, la brise disparaissait au fur et à mesure qu'elle s'éloignait du bord de mer. Et elle l'aperçut enfin : l'entrée de Lavandia !
Yaen ralentit le rythme pour savourer ces images de son enfance. Le casino, touche de modernité, l'arène, les magasins... Mais son objectif était l'Ouest de la ville, juste à la sortie. Une vaste plaine où les éleveurs avaient élu domicile. C'était vers une chaumière à toit rouge qu'elle se dirigeait. Une large barrière la collait, contenant des Pokémons de tout type et tout âge. Ils semblaient paisibles et profiter de l'herbe fraîche à leur disposition. La dresseuse alla toquer à la porte en s'écriant :
- Papa, maman, c'est moi, Yaen !!!
Elle entendit des manifestations de joie derrière la porte, qui s'ouvrit à la volée pour laisser passer une femme brune, de taille moyenne, avec un tablier noué autour de la taille et un foulard rose sur la tête. La femme prit Yaen dans ses bras, au bord des larmes. Elle était très émotive et attachée à sa fille unique.
- Tu nous as tellement manqué à ton père et moi !
Le père en question passa le cadre de la porte. Il n'était pas très vieux, la quarantaine au maximum, avec des cheveux noirs coiffés en brosse. Il portait une chemise propre mais un jean sali par la boue et l'herbe. Il adressa un sourire à sa fille sans dire un mot, car la mère ne lui permettait pas.
- Viens donc te mettre à l'aise, tu es essoufflée ! Tu as couru pour venir ici ? Tu n'es pas en danger au moins ? Tes vêtements sont propres ?
Yaen ne pouvait répondre aux questions sans en avoir une autre à la suite. Elle s'assit sur un canapé à la demande de sa mère. Rien n'avait changé depuis son départ. Ils possédaient toujours leurs meubles en bois, leur canapé large à angle, la véranda où elle avait souvent bronzé... Pour des éleveurs, ils avaient une vie confortable. A vrai dire, tous ces meubles étaient des cadeaux, des réductions de prix de la part des commerçants de Lavandia pour les remercier de prendre soin de leurs Pokémons. Quand ils avaient besoin de massages, Lise, la maman de Yaen, était toujours présente. Joshua, le père, s'occupait des reproductions. C'était un couple serviable mais qui souffrait de la concurrence. En effet, deux autres éleveurs vivaient sur ces plaines. Heureusement, ils se partageaient les clients de Vergazon et ceux de Lavandia.
Lise se rendit dans la cuisine pour servir un verre d'eau à sa fille. Joshua prit place sur un petit fauteuil pour s'adresser enfin à sa fille.
- Tout se passe bien pour le moment ?
- Oui ! J'ai capturé deux Pokémons et rencontré quelques dresseurs qui m'ont donné des conseils pour mon voyage.
- Bien, bien. L'important, c'est que ça te plaise.
Yaen savait que son père regrettait de ne pas avoir eu d'autres enfants. En accouchant, Lise avait perdu l'usage de ses gamètes. Ils ne purent concevoir d'autre enfant, eux qui géraient un élevage avec de nombreux Pokémons et possédaient un terrain assez grand pour élever des enfants. Yaen aurait été l'unique héritière de l'affaire de ses parents, mais faire de l'élevage au même endroit toute sa vie ne l'intéressait pas. Peut-être qu'en grandissant, elle réfléchirait à s'installer dans un endroit fixe. Mais la jeunesse poussait au voyage. Et ses parents ne voulaient pas la forcer, car en voyageant elle grandirait et apprendrait des choses qu'eux-mêmes ne connaissaient pas. Bien qu'ils aient vécu eux aussi leur propre voyage Pokémon, les époques n'étaient pas les mêmes, les choses à apprendre étaient différentes...
Lise apporta trois verres de grenadine sur un plateau en plastique. Elle les remplit d'eau et en tendit un à Yaen, et un à Joshua. Ils burent en silence et regardèrent par-delà la véranda.
- On sort ? Proposa Lise avec un sourire malicieux.
La dresseuse acquiesça et laissa ses Pokémons en liberté à l'extérieur. Ténéfix regarda dans tous les sens et trouva un coin d'ombre où se cacher, car il supportait mal le soleil.
- Alors, tu vas affronter Voltère ? Demanda Joshua.
- C'est en effet le prochain champion que je dois battre...
- Ah la la ma fille, l'interrompit Lise. Ces bouquins sur les Pokémons Légendaires t'ont donné des rêves.
- Nous devrions espérer qu'ils se réalisent, puisque nous sommes ses parents.
- Oui c'est vrai, mais j'ai tellement peur qu'il t'arrive quelque chose. On a vu aux infos que la Team Aqua avait perquisitionné la grotte Granite, au Village Myokara !
Yaen n'osa pas lui avouer qu'elle était sur place à ce moment-là. Elle ne voulait pas inquiéter sa mère. Emotive comme elle était, elle refuserait de laisser Yaen repartir.
- Tu comptes rester combien de temps ? Demanda-t-elle.
- Je reste dormir cette nuit, puis je repartirai demain dans la matinée. Il faut que je change d'habits et de sac.
En parlant de sac, elle se souvint qu'elle voulait montrer l'œuf à son père. Elle alla chercher son sac à dos sur le canapé et en sortit l'œuf encore chaud grâce à la couverture qui l'enveloppait. Il ne bougeait ni ne faisait aucun bruit. Son père le prit délicatement et le porta à son oreille. Il eut un petit sourire. Yaen reconnaissait cette expression. Son père savait quel Pokémon contenait l'œuf, en éleveur professionnel qu'il était.
- Alors, c'est quoi ?
Il lui rendit l'œuf sans lui répondre.
- L'impatience de le savoir te rendra encore plus attentionnée avec ce Pokémon. Prends-en grand soin. Où l'as-tu trouvé ?
- On me l'a donné.
- Ah bon ? Qui ça, si ce n'est pas indiscret ?
- Vous ne le connaissez peut-être pas, c'est Pierre Rochard.
Ils hochèrent tous les deux la tête.
- Vous le connaissez ?!
- Pourquoi ? La questionna sa mère. Il t'a donné un œuf et tu ne sais pas qui c'est ?
Yaen fit la moue. Elle avait honte de cette ignorance.
- Ca aussi, tu devras le découvrir par toi-même. Allez, va te laver !
La jeune femme ne dit rien de plus et monta à l'étage. Il s'y trouvait toutes les commodités pour l'hygiène : les toilettes, la salle de bains, la penderie... Ainsi que les chambres. Elle se rendit d'abord dans sa chambre pour trouver des vêtements propres et un sac plus large. Un sac à bandoulière lui convenait mieux que son sac à dos, et il contenait des poches plus ergonomiques pour ranger ses pokéballs et ses potions.
La douche lui fit un bien fou, elle se sentait enfin propre. Il fallait vraiment qu'elle trouve le moyen de se laver pendant les voyages, car elle était trop timide pour se laver dans les rivières, au risque de se faire surprendre par des dresseurs.
Elle passa devant le miroir pour attacher ses cheveux en queue de cheval. Ils étaient d'un brun aux reflets noisette. Ses yeux verts paraissaient fatigués, une bonne nuit de sommeil était de mise. Elle enfila un débardeur noir et un pantacourt large et fin, pratique en cas de grosse chaleur. Ses baskets blanches contrastaient avec le reste, mais étaient ses seules chaussures confortables pour les longs voyages. Elle rejoignit ses parents et profita d'être avec eux pour raconter son voyage, depuis que son père l'avait déposée à Bourg-en-Vol. Après un copieux repas, elle alla se coucher et récupéra les heures de sommeil qui lui manquaient.
Dès huit heures du matin, elle était déjà prête à partir ! Voir ses parents l'avait rassurée, ils se portaient très bien et n'avaient pas l'air débordés. Yaen pouvait repartir en paix. Elle récupéra ses Pokémons qui l'attendaient dehors, cala l'œuf dans son sac et dit au revoir à ses parents, émus eux aussi d'avoir revu leur enfant. Elle repartit en promettant de donner de ses nouvelles régulièrement.
Le trajet jusqu'à Lavandia ne prit qu'une dizaine de minutes, l'arène était ouverte et Yaen put y accéder. Voltère reconnut la jeune fille immédiatement et l'accueillit chaleureusement. Il ne s'attendait pas à un affrontement pour le badge, mais s'y plia avec enthousiasme.
- Je vais vérifier si tu as bien retenu tout ce que tes parents t'ont appris sur les Pokémons !
Le match était lancé. Les premiers Pokémons choisis furent Ténéfix et Dynavolt. Les règles étaient devenues un peu plus difficiles. Voltère possédait quatre Pokémons, Yaen devait en mettre trois KO pour décrocher la victoire. Elle ordonna à Ténéfix de lancer une attaque Combo-Griffe, mais Dynavolt était plus rapide et lança en premier une attaque Onde de Choc. Ténéfix fut pris d'une secousse, le choc électrique lui avait fait quelques dégâts non négligeables. Il n'arrivait même plus à bouger.
- Ténéfix, attaque Ténèbres !
Comme cette attaque ne demandait pas de bouger, le Pokémon put se concentrer pour instaurer son élément de prédilection. La lumière disparut pour laisser place à l'obscurité la plus totale, on ne pouvait plus voir le bout de son nez. Dynavolt envoya une première attaque Etincelle, qui éclaira l'arène en partie. Puis, avant que Ténéfix ne puisse se remettre de la paralysie, il lui asséna une Vive-Attaque qui le mit dans un état critique.
- L'électricité fournit une lumière non négligeable, qui a indiqué à mon Dynavolt dans quelle direction attaquer. Ne nous sous-estime pas !
Comme Ténéfix ne pouvait plus bouger et était au bord du KO, Yaen le renvoya se reposer dans sa pokéball pour envoyer Arcko. Avec un peu de chance, il ne se ferait pas paralyser. La lumière revint, et Arcko put repérer son adversaire pour envoyer sa propre Vive-Attaque. Dynavolt avait foncé en même temps et les deux se percutèrent, provoquant un « boum » inquiétant. Ils furent sonnés quelques secondes, laissant leurs dresseurs abasourdis. Arcko fut le premier à se remettre de ce choc, peut-être avait-il la tête plus dure que la moyenne. Yaen profita de cette aubaine.
- Vol-Vie !
Arcko obéit et aspira l'énergie restante de Dynavolt. Premier KO en faveur de Yaen. Voltère envoya en second lieu son Magneton. Il était beaucoup plus résistant grâce à son type Acier. Le champion choisit Sonicboom comme première attaque. La puissance d'éjection fit faire une roulade arrière au Pokémon arboricole. Il devait avoir perdu près de la moitié de son énergie depuis son entrée au combat. Il fallait faire attention, car même si Vol-Vie avait rendu des forces à Arcko, l'attaque n'était pas très puissante et le taux d'énergie rendu ne représentait que la moitié des dégâts infligés. L'attaque n'était donc pas rentable. A force de réfléchir, Yaen se fit devancer par son adversaire.
- Magneton, attaque Eclair !
Arcko fit une roulade sur le côté pour éviter le coup de tonnerre. Il s'en était fallu de peu. Yaen réagit immédiatement.
- Grincement !
Le Pokémon émit un son insupportable, qui résonna même à l'intérieur du Magneton. Voltère voulut renvoyer son Pokémon mais la réactivité de Yaen était toujours présente.
- Arcko, Poursuite !
Avant de pouvoir atteindre sa pokéball, Magneton fut rattrapé par un Arcko avide de le blesser. Il ne fut pas mis KO mais reçut des dégâts considérables. En retour, Voltère envoya Elecsprint.
- C'est le moment de finir ce combat en beauté. Elecsprint, Crocs Feu !
Une attaque dont Arcko était faible ! Elecsprint courait bien trop vite pour esquiver la ruade.
- Essaie de l'esquiver !
Elle partait avec de gros désavantages. Trois Pokémons au lieu de quatre, un Roucoups faible aux attaques électriques, un Ténéfix pratiquement hors-jeu... Arcko le comprit, et s'entoura d'un halo d'une lumière intense. Elecsprint, aveuglé, s'arrêta de charger. Yaen reconnaissait cette manifestation : Arcko évoluait. Et c'est un magnifique Massko aux feuilles verdoyantes qui apparut. Il avait l'air plus en forme, et prêt à reprendre le combat. Voltère n'en sembla pas dérouté et ordonna à son Pokémon de lancer la même attaque. Evolution ou pas, le Pokémon de Yaen possédait les mêmes faiblesses. Massko n'attendit pas les ordres de Yaen pour réagir, car il avait appris une nouvelle attaque que Yaen ignorait, il devait la lui montrer. Il fut aussi rapide qu'Elecsprint, chargea dans sa direction comme il l'avait fait contre le Dynavolt. Mais au lieu de le percuter, il se décala sur le côté et utilisa une des feuilles sur son bras pour le taillader.
- C'est l'attaque Taillade, l'informa Voltère. Plus on l'utilise, et plus elle est puissante.
Ce conseil donna l'impression à Yaen que Voltère abandonnait, qu'il sentait sa défaite approcher. Elle l'écouta donc et demanda à Massko de réitérer son attaque. Mais Voltère profita de ce moment pour renvoyer Magneton à la place d'Elecsprint. Le Pokémon métallique ne sentit rien ! Taillade ne lui ferait aucun effet, elle en avait conscience.
- Pas grave, on se contentera de ça... Vive-Attaque !
Massko se pencha en avant et mit toute sa puissance dans ses jambes pour courir aussi vite qu'il le pouvait. Ainsi, il ne frappa pas une fois son adversaire, mais à plusieurs reprises sans qu'on ait le temps de le voir filer. Le lézard était incroyablement rapide et résigné à gagner ce match. Magneton tentait de le paralyser mais en vain. Massko le mit KO avant qu'il ne parvienne à le toucher. Il ne restait plus que deux Pokémons à Voltère, il renvoya Elecsprint.
- J'espère que tu sauras être plus rapide, Elecsprint. Vive-Attaque !
En effet, Elecsprint était extrêmement rapide et Massko, bien que capable de rivaliser avec lui, se prit le coup de plein fouet.
- Recommence Taillade Massko, ne t'arrête surtout pas !
Le Pokémon acquiesça, il n'y avait rien de mieux à faire que d'utiliser une attaque à puissance progressive. Il chargea en direction de son adversaire, qui ne bougeait pas. Yaen se demanda pourquoi, mais avant d'avoir eu le temps de stopper son Massko, les crocs d'Elecsprint s'enflammèrent et sa mâchoire embrasée attrapa le lézard au beau milieu de sa course. Il l'avait attrapé par le cou. Il le plaqua ensuite sur le sol et posa ses deux pattes avant sur lui pour le maintenir.
- Lance-Flammes !
C'était fini pour Massko. Il s'était bien battu mais le set d'attaques d'Elecsprint lui était fatal. Il ne restait plus qu'un Pokémon en forme du côté de Yaen. Mais si elle battait Elecsprint, elle avait gagné. Roucoups engagea le combat en lançant un Ouragan. Une stratégie parfaite pour ralentir la vitesse de course d'Elecsprint. L'oiseau battit plus rapidement des ailes pour piéger Elecsprint dans un tourbillon d'air et de plumes. Puis il le projeta au sol et lui lança un regard foudroyant. Elecsprint répliqua avec Onde de Choc, mais Roucoups tourbillonna sur lui-même avec frénésie pour repousser les étincelles envoyées par son ennemi. Il avait l'air furieux, et la fureur ne le rendait que plus puissant !
- Vive-Attaque !
Roucoups fonça en piqué et percuta Elecsprint de plein fouet, qui ne résista pas à cette attaque d'une violence inouïe. Yaen avait gagné grâce à la fureur meurtrière de son Roucoups. Mais ce comportement l'inquiétait.
- Bravo. Tu as là un Pokémon très réactif, mais gare à ses excès de violence, cela pourrait se retourner contre lui.
- J'en ai conscience.
Il lui remit le badge Dynamo et la laissa partir avec une capsule technique qu'il appréciait particulièrement : Onde de Choc.
En sortant de l'arène, elle entendit une série de « bip » venant de son sac. Elle avait totalement oublié qu'elle possédait un Pokénav désormais. Elle le sortit de la petite poche où elle l'avait rangé et décrocha. Elle ne s'était même pas douté que cela pouvait être Pierre Rochard, alors qu'il était le seul à avoir son numéro.
- Yaen, avez-vous bien reçu mon colis ?
- Oui... Monsieur...
- Ne faites pas tant de formalités et appelez-moi Pierre. Cela vous a-t-il plus ?
- Oui, beaucoup. Mais pourquoi tant d'attention ?
Elle sentit son hésitation au bout du fil, il mit quelques secondes à répondre.
- J'ai décelé quelque chose d'unique en vous. J'aurais aimé vous appeler plus tôt mais j'avais des affaires urgentes à régler.
Encore cette histoire d'affaires à régler. Mais qui diable pouvait être cet homme débordé et aussi bien habillé ?
- Où êtes-vous ?
- A Lavandia, j'ai vu mes parents et acquis mon troisième badge. Répondit-elle, non sans une pointe de fierté.
- Mes félicitations ! Nous devrions fêter ça, non ?
Nous ? Il s'intéressait à elle à ce point-là ?
- Que diriez-vous d'une troisième rencontre ? Je me trouve actuellement à Algatia, mais je pourrais être à Lavandia dans une heure. Ça vous va ?
Yaen ne savait que répondre. C'était tellement soudain.
- Heu... Oui, pourquoi pas ? Où dois-je vous attendre ?
- Le centre Pokémon fera l'affaire. J'espère arriver plus rapidement que prévu, les conditions météorologiques risquent de me freiner, mais je ferai mon possible pour ne pas vous faire attendre trop longtemps.
Quel homme galant. Elle lui souhaita bonne route et raccrocha. Il fallait qu'elle se prépare pour fêter son troisième badge. La dresseuse entra dans le centre Pokémon et sortit l'œuf de son sac. Il était encore bien maintenu au chaud, aussi bien que dans les couveuses de ses parents. Puis elle brossa ses cheveux de sorte à ce qu'ils se lissent et retombent proprement sur ses épaules. Ils perdirent rapidement la forme que la queue de cheval leur avait donnée. Elle défroissa son pantacourt et attendit tranquillement sur le canapé en expirant longuement. Ce moment de calme lui permit de réfléchir aux évènements récents. La violence de Roucoups, l'attention que Pierre Rochard lui portait, la longue et fastidieuse collecte des badges... Plus elle y pensait, plus elle se demandait si son aventure n'était pas des plus banales : acquérir des badges, battre la Ligue... Peut-être y avait-il d'autres moyens de rencontrer des Pokémons Légendaires. Elle eut la soudaine impression d'être partie sur un coup de tête, qu'elle n'avait pas bien évalué ses possibilités et ses projets d'avenir. La jeune femme se demanda si les autres dresseurs passaient aussi par cette étape de doute et de réflexion profonde sur leur avenir. Après tout, ils étaient tous livrés à eux-mêmes dans ce monde dangereux. Etait-ce une bonne idée de partir aussi jeune à la quête de la gloire ?
Elle aperçut la brune au Chuchmur, assise de l'autre côté du canapé. Cette dernière l'avait remarquée aussi et s'était approchée.
- Excuse-moi ! Je n'ai pas eu l'occasion de me présenter tout à l'heure. Amaryllis, et lui c'est mon ami Chuchmur.
- Chuuuuch !
- Enchantée, je m'appelle Yaen.
Amaryllis fixait l'œuf que Yaen tenait sur ses genoux.
- Quelle chance, je n'ai jamais eu à m'occuper d'un œuf de Pokémon. Quel Pokémon en sortira, tu le sais ?
- Non ! C'est un mystère, sauf pour mon père. Mes parents sont éleveurs, j'ai donc déjà vu beaucoup d'œufs avant celui-là.
Yaen l'invita à porter l'œuf pour qu'elle découvre la sensation d'avoir un petit être fragile près de soi. Amaryllis sourit, le caressa du bout des doigts et le rendit à sa propriétaire. Elles discutèrent longuement de leurs voyages et de leurs découvertes. Amaryllis restait toujours une fille mystérieuse pour Yaen, elle ne savait pas d'où elle venait ni quels Pokémons l'accompagnaient. Néanmoins, elle sentit en elle une grande bonté et un amour fort pour les Pokémons. Elle lui donna même un sachet de pofiteroles.
Soudain, une main se posa sur son épaule. Elle tourna la tête par réflexe, elle vit une main blanche aux longs doigts blancs ornés de bagues argentées. Elle leva la tête pour voir qui se permettait de la toucher. Pierre Rochard lui adressait un sourire rassurant.
- Je ne vous dérange pas j'espère ?
- Non... Bien sûr que non. Vous avez fait vite !
- Je suis parti dès que vous avez raccroché. Par chance, les conditions de vol étaient en ma faveur.
Puis il s'adressa à Amaryllis, elle se présenta, jeta un petit regard malicieux à Yaen, et s'éclipsa pour les laisser seuls. Il l'aida à se lever et remarqua l'œuf posé sur le canapé.
- Cela vous plait-il ? La questionna-t-il en pointant l'œuf du doigt.
- Oui ! Je l'ai même montré à mes parents. Ils sont éleveurs.
- Je l'ai donc confié à la bonne personne.
Yaen rangea toutes ses affaires et le suivit à l'extérieur. Elle se risqua à demander quel Pokémon contenait l'œuf, mais il ne lui répondit pas. Le mystère resterait jusqu'à l'éclosion.
- Où m'emmenez-vous ?
Il s'arrêta à l'entrée du centre Pokémon et sortit Airmure de sa pokéball.
- Chez moi, ça devrait vous plaire.
Il lui renvoya ce clin d'œil qui la désemparait tant, puis l'aida à grimper sur Airmure. La peau du Pokémon n'était que cuirasse dure et froide au toucher. Il prit place devant elle et lui ordonna de le tenir fermement. Elle s'exécuta, peu confiante, et Airmure battit des ailes avec force pour soulever leur poids. Il s'élevait à hauteur acceptable, frôlant presque les nuages les plus bas pour leur offrir un magnifique spectacle aérien. Les maisons étaient devenues minuscules et l'océan était visible, paraissant comme un voile bleuté, brillant et paisible. Yaen s'accrochait du mieux qu'elle pouvait, craignant de glisser. Ils survolaient désormais une grande ville, puis la mer. Elle était vaste, parsemée de rochers saillants et de tourbillons d'écume. Il y avait quelques petites îles inhabitées aux abords d'une plus grande, un peu plus loin, probablement à deux kilomètres de là où ils se trouvaient.
- C'est Algatia, l'informa-t-il. Nous y serons dans quelques minutes.
Et en effet, il ne fallut qu'un peu de temps pour parvenir à l'île. Airmure se posa doucement sur la vaste plage qui bordait Algatia et il fut renvoyé dans sa pokéball avec des remerciements. Pierre guida Yaen vers des escaliers de pierre, afin de rejoindre le sol herbu et les petites maisons de brique. Il expliqua qu'elles étaient construites ainsi pour résister aux fortes tempêtes qui s'abattaient par moment. Sa maison était la plus reculée, tout au bout de la ville. Il sortit une clé de sa poche et fit entrer Yaen la première. Elle découvrit l'univers du jeune homme, des étagères décorées de magnifiques pierres aux couleurs et formes qu'elle n'avait jamais vues auparavant. La maison comportait quelques pièces annexes dont les portes étaient fermées. En l'absence de certains meubles, elle se doutait que ces pièces pouvaient être la chambre et la cuisine. Pierre referma la porte derrière lui et l'invita à se rendre dans la pièce de droite. Il s'agissait en effet de la cuisine, mais celle-ci différait des autres. Elle était décorée !
- Qu'est-ce que... ?
Il la poussa doucement pour qu'elle prenne place sur la table décorée de petites fleurs typiques d'Algatia. Elles ressemblaient aux orchidées et étaient de couleur blanche. Les assiettes et couverts brillaient comme s'ils étaient neufs. Des cookies étaient entreposés dans un panier, au milieu de la table. Yaen se retourna pour le regarder. C'était trop soigné pour être une simple célébration de son troisième badge. Pierre comprit son incompréhension et la fit s'asseoir.
- Je ne savais pas comment vous féliciter, alors j'ai pris ce qui venait.
Il s'était tourné vers le plan de travail, elle ne vit donc pas son visage. Il revint avec des verres et alla chercher une bouteille de jus de fruits dans le frigidaire. Yaen trouvait l'attention charmante, mais trop mise en scène. Elle n'osa cependant pas lui dire. Elle se contenta de siroter son jus de fruit en scrutant les alentours. La décoration de base était épurée, voire vide. S'il n'y avait pas moyen de décorer avec des pierres, il n'y avait pas de décoration. Pierre Rochard brisa le silence.
- Ce sont des Lava Cookies, ils viennent du Mont Chimnée, c'est l'unique volcan d'Hoenn.
- Ah, d'accord... Je n'y suis jamais allée.
- J'espère que cela arrivera car c'est très joli. Il y a un téléphérique pour atteindre Vermilava.
Elle eut l'impression que Pierre voulait combler le vide, c'en était très gênant. Elle l'aida donc à briser la glace.
- Alors comme ça, on fête mon troisième badge ? Pourquoi n'avons-nous donc pas trinqué ?
- Un oubli de ma part, toutes mes excuses, mademoiselle Yaen !
Ils remplirent leurs verres et trinquèrent. L'ambiance semblait être redevenue comme avant. Peut-être que Pierre n'avait pas l'habitude d'inviter des gens chez lui. Yaen se risqua donc à un interrogatoire plus poussé pour mieux le connaitre.
- Vous vivez seul ici ?
- Oui, mon père reste constamment à Mérouville pour ses affaires, c'est moi qui lui rends visite.
Elle n'osa pas aborder le thème de la mère, de peur de faire une bêtise.
- Pas de petite copine ?
- Pas pour le moment.
Il posa son regard gris sur elle, lourdement. Il semblait plus enclin à répondre aux questions. Elle se rappela ce qu'il lui avait avoué au Pokénav.
- Vous disiez avoir décelé quelque chose d'unique en moi, alors que je suis tout ce qu'il y a de plus banal.
Il l'interrompit.
- Faux ! Vous êtes très mature par rapport aux autres dresseurs que j'aff... Bref, vous êtes plus mature que la moyenne, et vous avez un projet que je peux vous aider à réaliser. Vous voulez battre la Ligue... Il serra les lèvres, comme s'il tentait de retenir les mots qu'il allait prononcer. Je... Je suis la Ligue.