Chapitre 1 : La fuite
Chapitre 1: La Fuite
Vautré dans le canapé, un homme d'une quarantaine d'années regardait un match Pokémon à la télévision. Il lâchait parfois un commentaire sur telle ou telle action. Dans sa main un verre de whisky bien rempli, contrairement à la bouteille posée sur la table basse.
J'en profitai pour mettre mon plan à exécution. J'ouvris le placard où se trouvaient ses Pokéballs, la majorité étaient occupées. Je pris discrètement celle de son Caninos et la glissais dans ma poche. L'animal était actuellement à côté de l'homme qui me servait de père. Il venait de terminer son verre, car il se leva pour aller chercher une nouvelle bouteille, non sans tituber. Je m'empressai de refermer le tiroir, son comportement me fit comprendre qu'il n'avait rien vu.
J'en profitai pour prendre la direction de la sortie.
-Où vas-tu ? me demanda le seul autre humain présent dans la pièce.
-J... je vais chercher du bois pour le feu, avant que la nuit ne tombe. Arkan, tu viens m'aider ?
-Ni ! me répondit le chien de feu en se levant.
Je récupérai mon blouson rouge. Dehors, la pluie tombait depuis déjà plusieurs heures. Je sentis son regard sur moi, mais je fis comme si de rien n'était. Dès que j'eus mis mes chaussures il m'interpella :
-Viens là un instant.
Une sueur froide glissa le long de mon dos, mais je me résolus à le rejoindre. Il fallait que je reste le plus naturel possible. Je devais relâcher ce Pokémon de feu, il ne méritait pas un maître pareil.
-Il y a un problème ? demandai-je le plus innocemment possible.
-Donne-moi ce que tu as pris, répondit-il en tendant la main.
-J... je ne vois pas de quoi tu parles.
-C'est ça ! Prend moi pour un imbécile ! ajouta-t-il en hurlant.
Sa main partit en arrière, sachant ce qu'il allait se passer, je le poussai. Il perdit l'équilibre et tenta de se rattraper à la table faisant tomber sa bouteille qui explosa sur le sol. Sans attendre, je lui tournai le dos, attrapai mon sac banane et sortis de la maison.
-Tu ne t'en sortiras pas comme ça! me cria-t-il. Un bruit de chute accompagna cette phrase, il devait avoir vraiment trop bu ce soir.
J'avais à peine eu le temps de traverser le jardin que j'étais trempe jusqu'aux os. Mes cheveux noirs s'aplatirent sous l'averse, me couvrant les yeux. Je les écartai et, sans ralentir ma course, pris la direction de la forêt. Je rabattis entre temps la capuche de sa veste. Mes vêtements de couleur feu me protégeaient un peu de l'eau qui ne pouvait être retenue par le feuillage des arbres.
Je m'arrêtai pour reprendre mon souffle et écouter les alentours. J'étais sur un terrain dangereux et sans protection. Je me glissai sous un sapin dont les branches touchaient presque le sol et me recroquevillai pour préserver le peu de chaleur qui émanait de mon corps. Très vite, je me mis à trembler, la peur, l'angoisse et toute la tension cumulée se relâcha. Je laissai mes larmes courir le long de mes joues.
Qu'avais-je fait ? Jamais je n'aurais dû m'enfuir, j'aurais dû attendre et endurer une fois de plus. S'il me retrouvait, la punition serait des plus amères. Non, trop tard, il fallait fuir, je devais m'éloigner le plus loin possible avant que mon géniteur soit assez remis de sa boisson pour lancer ses Pokémons à ma poursuite. Cela raviva le souvenir de ma dernière tentative. Il avait ordonné à son Colossinge de me donner une leçon, le Pokémon ne s'était pas retenu. J'avais passé un moment effroyable sans compter le temps qu'il m'avait fallu pour m'en remettre.
Le craquement d'une branche me ramena aussitôt à la réalité quelque chose se rapprochait, lentement. La peur me paralysa, je ne bougeai plus, tout juste arrivai-je à respirer. Je ne voyais rien, la nuit était tombée depuis peu et les nuages de pluie bloquaient la lumière de la lune. L'intrus avançait doucement, trop lentement à mon goût.
-Cani ?
La surprise laissa rapidement place au soulagement. Poussant un soupir, j'appelai le Caninos :
-Arkan, je suis là, c'est bon.
Le chien de feu se rapprocha et vint se coller contre moi. Je l'enlaçai, ignorant ses poils humides.
-Ne me fais plus de peur pareille, s'il te plaît.
-Ni !
Restant dans cette position, je profitai de sa chaleur. Au bout d'un long moment je repris la parole :
-On va partir d'ici Arkan, je ne peux plus revenir. On devrait aller ...
Je marquai une pause et réfléchis. Jadielle était la ville la plus proche, c'était aussi le premier endroit où l'Autre se rendrait. Bien entendu, la boisson et la perte de son plus fidèle flair le retarderait. Mais pour combien de temps ? Tout allait se jouer dans les jours à venir.
-Arkan, on doit aller à Jadielle et en repartir avant samedi, soit cinq jours.
-Caninos !
-Bien. Tu te rappelles où j'ai caché le sac ?
-Ni !
Le chien de feu s'élança dans la pénombre sans hésitation. Heureusement que j'avais eu la bonne idée de cacher un sac avec du matériel en prévision d'un jour comme celui-ci. Cet endroit était une véritable prison. J'étais toujours surveillé, je ne pouvais pas m'éloigner seul. La télévision était le seul moyen que j'avais pour m'évader, découvrir un autre monde. C'était aussi elle qui m'avait permis d'en apprendre plus sur les Pokémons. J'avais regardé bon nombre de documentaires et matchs Pokémon pour avoir une bonne connaissance du sujet. Je me rappelais surtout d'une émission intitulée « histoires de dresseurs », qui retraçait le parcourt des plus grands d'entre eux. Des challengers qui avaient fait parler d'eux, aussi bien grâce à leurs compétences que par leurs actes. Les meilleurs étaient originaires du Bourg Palette, ils avaient affrontés tous les champions et avaient pu se mesurer à la ligue Pokémon. L'un était devenu maître, place aussitôt ravie par un de ses amis lors d'un superbe match. Il avait par la suite repris l'arène de Jadielle. Celui devenu maître Pokémon avait continué sa route et demeurait introuvable. Enfin la troisième une mystérieuse jeune fille avait elle aussi disparu de la circulation. Tous les trois avaient œuvré pour détruire l'organisation criminelle nommée la Team Rocket dont, malheureusement le chef Giovanni et ses certains de ses acolytes avaient disparu de la circulation après s'être échappés de prison, il y a dix ans déjà.
Un bruit attira mon attention, le Caninos revenait avec un sac à dos terreux dans la gueule. Sans faire d'histoires, je nettoyai la terre qui se trouvait dessus en utilisant le tapis feuillu de la forêt, puis je l'ouvris. Je regardai les rares objets que j'avais pu prendre sans que leur disparition ne puisse informer mon tortionnaire de mes actions futures. On avait de quoi manger pour trois jours maximum en faisant durer, il était impératif de trouver des baies, sinon nous n'arriverions jamais à destination. Je sortis une couverture de survie et m'enroulai dedans. Puis je m'allongeai sur le sol contre mon Pokémon. Si celui-ci m'avait suivi, c'était qu'il voulait bien de moi comme maître.
J'avais mal dormi, le moindre bruit me réveillait. Il fallait bien avouer que la forêt n'était pas un des meilleurs endroits pour ça, encore moins quand il pleuvait. Bien que celle-ci s'était arrêtée, le vent, lui, n'avait pas cessé.
Arkan m'avait réchauffé toute la nuit, bien qu'il était aussi trempe que moi. Je regardai les alentours. Le ciel s'éclaircirait, l'aube n'allait pas tarder. Je me relevai et détachai le sac que je portais autour de la taille. Ce dernier me permettait de transporter quelques affaires en cas d'entraînement. J'avais là deux potions, quelques barres vitaminées, une petite bouteille d'eau et la seule Pokéball que je possédais. Après avoir partagé les barres vitaminées en guise de petit déjeuner, nous nous mîmes en route.
Nous avancions à une allure assez rapide, ce rythme me réchauffa peu à peu. Arkan regardait les environs aux aguets. Mon père l'avait capturé dans le but de l'entraîner pour remplacer son défunt Magmar et me surveiller. Finalement, comme c'était moi qui m'en occupait le mieux, je pris peu à peu sa place en tant que maître. Malgré tout, je n'arrivais pas à comprendre les raisons qui l'avaient fait changer à ce point. Et pourquoi venir se perdre ici, loin de toute civilisation ?
Le soleil se leva enfin et commença à réchauffer la terre de ses rayons lumineux. Autour de nous, les Pokémons commençaient à s'éveiller. On pouvait entendre ici et là, le chant de certains oiseaux. Nous continuâmes notre route plus prudemment ; il n'était jamais bon pour un humain de quitter les sentiers normaux. Il fallait bien avouer que le fait que les hommes capturaient et utilisaient certains Pokémons comme s'ils n'étaient que des objets ou pire, les mangeaient, aurait engendré la situation actuelle. Les Pokémons encore sauvages attaqueraient les humains, pour se défendre bien sûr, mais aussi pour délivrer leur semblables.
Aux alentours de la maison, ils me connaissaient donc ils savaient que je ne leur ferais rien. Mais pas ici. Je regardai Arkan ouvrir la marche, il se retournait parfois pour voir si j'arrivais à le suivre. Soudain un cri retentit plus loin dans le bois faisant s'envoler les Roucool et les Piafabec. Le Caninos leva sa truffe et flaira l'air ambiant, puis continua son chemin.
J'ignorai ce que cela pouvait bien être mais son comportement signifiait qu'il n'y avait rien à craindre. Pourtant, l'appréhension me gagna, je ne cessai de regarder autour de moi.
-Vivement que j'arrive à Jadielle, pensai-je.
Nous continuâmes notre chemin pendant encore un long moment, la forêt devenue silencieuse n'était pas ce qu'il y avait de mieux pour me rassurer. Les oreilles de mon chien de feu ne cessaient de tourner dans tous les sens puis s'aplatirent lorsqu'il s'arrêta en haut de la colline. Je restai en arrière, pas besoin de mettre de l'huile sur le feu, son adversaire ne m'avait pas vu autant en tirer parti.
-Chenipan !
-Caninos !
Je laissai mon ami discuter, non pas que je détestais les combats mais l'endroit regorgeait de Pokémons. En attaquer un signifiait en avoir des tas sur le dos. Je m'accroupis sans bruit et patientai. Si nous étions tombés sur un Chenipan, cela signifiait que nous avions atteint la forêt de Jade. Autrement dit, l'une des forêts les plus évitées en raison du fort nombre de Pokémons insectes vénéneux. Ils n'étaient pas spécialement forts, mais leur nombre pouvait poser problème. Bien qu'Arkan maîtrisait l'attaque flammèche.
Mon Pokémon revint vers moi et me fit signe de le suivre. Je vis le Chenipan s'éloigner sans un regard en arrière, toutefois le chien de feu changea de direction. Au lieu de continuer tout droit vers l'ouest, il avait pris la direction du sud. Je le suivis sans rien dire, il devait bien y avoir une raison. Celle-ci arriva quelques heures de marches plus tard, quand nous commençâmes à croiser des Aspicot. Il devait y avoir un nid rempli de Dardargnan dans les environs. Après avoir massacré ces pauvres Pokémons, pour la simple et bonne raison qu'ils auraient pu donner l'alerte un moment ou un autre, nous continuâmes la route en silence.
- Arkan, je pense qu'on peut faire une pause là. On doit être assez loin pour faire un feu sans problème, il faut que je me sèche et toi aussi. On n'atteindra jamais la ville intacts comme ça.
- Ni !
Je ramassai le peu de bois sec que je trouvais ici et là. Puis après avoir allumé un bon feu, je me dévêtis et déposai mes affaires autour du feu, avant de m'enrouler dans la couverture de survie. Celle-ci était trempe sur l'envers, je me positionnai dos au feu pour la faire sécher elle aussi. Caninos m'imita tout en restant aux aguets. Heureusement qu'il n'y avait personne par ici, je me voyais mal expliquer pourquoi j'étais à poil.
J'en profitai pour sortir deux boites de conserves. Chacune représentant une portion, je n'en avais que sept, il allait falloir économiser pour le reste du trajet. Je les ouvris puis les déposai près du feu pour les réchauffer. Arkan les regarda avec envie, il fallait bien avouer que le repas de ce matin était peu calorique. Une fois les boites chaudes, j'attrapai un chiffon et les sortis du feu pour verser leur contenu dans des bols en bois. Je les avais faits moi-même, ils étaient donc d'une forme irrégulière et plutôt moches, je devais bien l'avouer, mais ils remplissaient leur office.
Caninos fut le premier sec et s'empressa de faire sécher mes habits à l'aide de petites flammèches. Au bout d'un long, trop long, moment pour moi, tout fut sec. Je me dépêchai de me rhabiller et de ranger tout mon matériel dans mon sac. Après avoir éteint le feu et l'avoir recouvert de terre pour le rendre plus discret nous repartîmes.
Les jours suivants furent similaires, nous marchions jusqu'à ce que la nuit nous empêche de voir où l'on mettait les pieds. Le lendemain, une fois réveillés par le soleil nous nous étions mis en route, cueillant et mangeant les baies sur notre chemin. Plusieurs Pokémons nous attaquèrent, mais mon fidèle compagnon leur régla aussitôt leur compte. J'en aurais bien capturé un ou deux pour pouvoir laisser Arkan se reposer, mais je n'avais pas de Pokéball sur moi.
Le cinquième jour fut particulièrement éprouvant, depuis la veille je ne mangeais que des baies pour laisser les dernières rations à mon Pokémon qui était plus sollicité que moi. Mon ventre grognait de temps à autre de frustration, mais je ne pouvais rien y faire. Le début d'après-midi arriva et je tombai sur le passage d'humains. Des Pokémons gisaient ici et là, leurs corps sans vie présentaient de nombreux coups, comme on les avait frappés à mort. Arkan grogna face à cela, ce n'était pas de l'autodéfense, c'était un massacre en pure et due forme. Mon estomac manqua de se retourner à plusieurs reprises. Nous suivîmes les traces pour retrouver leur source. Soudain un bruit de combat se fit entendre, Caninos s'élança en courant et je le suivis.
-Il vient vers toi ! Ne le laisse pas s'échapper ! cria une voix proche.
-C'est bon ! Alors, comme ça, on veut fuir ? Désolé, mais j'ai besoin de toi ! fit une autre personne.
Sans faire dans la dentelle, nous déboulâmes mon compagnon et moi au milieu d'un combat. Ou plutôt d'une fin. Deux jeunes dresseurs portant des tenues semblables, un pantalon noir et un t-shirt blanc pour l'un et vert pour l'autre, avaient acculé un Pikachu contre un arbre. Leurs Pokémons se figèrent à la vu de Caninos dû à son intimidation naturelle. Le Pikachu, ralenti par les sécrétions du Chenipan qui lui collait les poils, en profita pour tenter de s'échapper mais le Rattata le repoussa contre l'arbre d'une violente charge. Le Pokémon électrique s'écroula sur le sol. Détournant leurs regards de moi, les dresseurs reprirent leur combat, faisant comme si je n'existais pas. J'imaginais que je ne devais pas être beau à voir, après une randonnée de plusieurs jours.
-Chenipan, sécrétion !
-Rattata ! Maintenant finis-le !
-Arkan, Flammèche !
Le chien de feu bloqua l'attaque du rongeur en dressant un mur de feu devant lui et brûla la sécrétion qui tomba en petit morceaux enflammés sur le sol.
-On peut savoir ce que tu fais ? s'écria celui en t-shirt blanc en se retournant furieux vers moi.
-C'est plutôt à moi de vous poser la question ! C'est un massacre que vous faites là !
-C'est pour entraîner nos Pokémons ! Mon Chenipan est sur le point d'évoluer !
-Ce n'est pas une raison ! m'écriai-je. Vous n'avez pas besoin de les tuer !
-Quoi ? Ils nous attaquent sans raison, quelques-uns de moins rendra ce lieu plus sûr, m'expliqua son camarade. Je sais ! On va faire un combat, celui qui le gagnera finira ce Pikachu.
-Inutile, je vais vous massacrer, rentrez chez vous !
-Regarde-moi ça, en plus de nous interrompre en plein combat, monsieur se permet de nous donner des ordres. Rattata, attaque charge sur le chien !
-Hurlement !
Mon Pokémon poussa un rugissement terrifiant, le Rattata s'arrêta en pleine course et fit demi-tour pour se cacher derrière son maître.
-Que ?!
-Abandonnez, répétai-je d'une voix menaçante.
-Rattata attaque !
Le rat hésita, un coup de pied aux fesses de la part du garçon, acheva de le convaincre. Il s'élança à toute vitesse.
-Ark' bloque le et morsure.
Conformément à mes ordres, Arkan arrêta le Rattata en lui sautant dessus. Son poids stoppa sa victime et, avant qu'elle tente de s'échapper, il lui planta les dents dans la queue. Le rongeur violet poussa un cri de douleur, puis il fut balancé aux pieds de son maître. Il se releva difficilement et attendit le prochain ordre.
-Merde ! cria l'humain en rappelant son Pokémon.
Il prit une autre Pokéball et en sortit un autre Rattata.
-Rattata, mimi queue !
-Chenipan, sécrétion !
-Flammèche sur le Chenipan !
La sécrétion et l'insecte tombèrent en même temps. Mais le chien de feu ne put esquiver la charge qui suivit.
-Chenipan !
-Il n'est pas mort normalement, mais le prochain qui n'est pas fair-play, je ne garantis rien. D'ailleurs il vous reste combien de Pokémon ?
-Tu as peur de perdre ?
-Non, je voulais juste savoir si après avoir mis une raclée à ton autre Rattata, vous aurez toujours un combattant d'attaque pour faire le chemin du retour.
Cela l'arrêta un instant, puis un sourire se dessina sur son visage et il répondit :
-Tu devrais plutôt t'inquiéter pour toi. Vive-attaque !
-Hurlement !
Comme précédemment, le Rattata arrêta son attaque, mais cette fois, il retourna dans sa Pokéball. Son maître jura traitant son Pokémon de tous les noms possibles puis me foudroya du regard avant de rétorquer :
-Tu ne perds rien pour attendre ! Je me vengerai ! Evan, viens, on rentre ! On fera évoluer ton Pokémon une autre fois.
Son camarade regarda son Chenipan avec inquiétude et suivit son ami, lui aussi furieux de la tournure des événements. Je les regardai s'éloigner en courant ; apparemment Arkan y avait été un peu fort avec le Pokémon insecte. Je me retournai vers le seul Pokémon sauvage encore en vie des environs. Le Pikachu était en très mauvais état, du sang s'échappait de nombreuses coupures, il ne tiendrait pas longtemps. Je n'avais plus de potions, je les avais toutes données à Arkan les jours précédents. N'ayant pas d'autres choix, j'attrapai le Pokémon. Enfin, je le touchai avant de me prendre une décharge électrique. Je poussai un glapissement peu viril. Apparemment, il n'était pas inconscient, j'attrapai une petite branche à côté de moi.
-Caninos ?
Arkan, curieux, regardait ce que je faisais. Il esquiva une décharge de peu. La souris ne voulait pas qu'on la touche apparemment. Je continuai de le titiller jusqu'à ce qu'il ne tente plus de m'électrocuter. Les décharges n'étaient pas très fortes, mais dans mon état, cela ne m'aiderait pas.
Une fois calmé ... ou évanoui, je ne savais pas, je sortis la couverture de survie et l'enroulai dedans. Il ne pourrait ni me griffer, ni me mordre comme ça.
-Arkan, utilise ton flair pour trouver le chemin.
-Ni !
Je suivis mon compagnon en trottinant, je ne savais pas à quelle distance je me trouvais de la ville, autant préserver mes forces.
-Bienvenue au Centre Poké...
-C'est pour une urgence, dis-je en coupant la parole à la femme aux cheveux roses en tenue d'infirmière qui me faisait face.
Son regard descendit sur moi puis sur mon colis, je posai le Pikachu sur le comptoir et lui enlevai la couverture.
-Faites-le rentrer dans une Pokéball et je le soignerai aussitôt, dit-elle d'une voix inquiète.
-J'en ai pas.
Elle me regarda surprise, puis elle regarda aux alentours les dresseurs.
-Suis-moi.
Elle prit la souris électrique dans ses bras et ouvrit le comptoir pour que je la suive. Elle s'engagea dans le petit couloir et ouvrit une des portes. La pièce était remplie de nombreuses machines, dont je devinais l'utilité. Elle referma la porte dès qu'Arkan fut entré et se retourna vers moi. Elle déposa le Pokémon jaune sur le sol et me fourra une Pokéball dans les mains.
-Situation exceptionnelle, solution exceptionnelle ! Je te préviens si tu l'as amené ici avec l'idée que je te fournirais de quoi le capturer, tu vas passer un sale quart d'heure !
Je la regardai totalement surpris. Sans réfléchir, je répondis :
-Hein ?
Plus débile, on meurt. En tout cas ma réponse sembla la satisfaire car elle enchaîna :
-Vas-y, il a besoin de soins rapidement.
Je m'accroupis auprès du Pokémon et le touchai avec la balle. Celle-ci s'ouvrit dans ma main et un faisceau rouge attira le Pikachu à l'intérieur. Je regardai la balle immobile dans ma main, jusqu'à ce qu'un « ting » m'annonce que j'avais capturé mon premier Pokémon. J'étais tout de même un peu déçu de la manière dont ça c'était passé.
L'infirmière m'arracha la balle des mains et se dirigea vers une machine. Elle déposa la balle et pianota dessus. Un tube transparent descendit et aspira la Pokéball qui restait en suspend avant d'un liquide transparent ne remplisse le tuyau.
-Bien, maintenant il faut attendre.
Elle tourna son regard bleu vers moi. Je me sentais gêné d'être dévisager de la sorte, je baissai le regard et vis Arkan, comme hypnotisé par la machine de soin.
-Pourriez-vous aussi soigner mon Caninos, s'il vous plaît ?
-Bien sûr.
Je sortis sa Pokéball et rappelai mon Pokémon. Je le regardai à travers la partie transparente de la balle.
-Je sais que tu veux voir la machine, mais d'abord repose-toi. Tu en as assez fait. Merci.
Je tendis l'objet contenant mon ami à l'infirmière et la regardai procéder de même. Une fois qu'elle eut terminée, elle m'adressa un sourire. Son second depuis que j'étais entré :
-Voilà, ton Caninos sera prêt d'ici une dizaine de minutes. Pour ton Pikachu, il faudra bien plus de temps.
-Merci beaucoup. Je peux attendre ici ?
L'idée de me séparer d'Arkan ne me réjouissait guère, bien qu'il ne pourrait pas affronter l'Autre.
-Oui, mais je pense qu'un peu de repos ne te ferais pas de mal.
Mon regard dériva sur mes vêtements, couverts de boue et de feuilles. Je ne devais pas être très propre et ni sentir la rose.
-Euh ... oui ... vous savez où je peux me décrasser ? C'est la première fois que j'entre dans un centre Pokémon.
-Tu n'es pas un dresseur ? m'interrogea-t-elle.
-Je viens de débuter, mentis-je aussitôt.
-Je vois, tu as ta carte ?
-Ma carte ?
-Ta carte de dresseur.
-... j'en ai pas.
L'infirmière poussa un soupir, comme désespérée. J'avoue, c'était aussi mon cas, je ne connaissais pas grand-chose mis à part ce que disais la télévision.
-Les dresseurs de nos jours ! Bon je vais te donner une chambre, tu iras de nettoyer et te reposer. Je n'ai pas envie de te récupérer comme tes Pokémons. Quand tu auras fini, viens me voir, je te dirais quoi faire.
Je ressortis à sa suite. Elle me donna une carte électronique et m'indiqua quoi faire. Je me dirigeai à gauche en direction des escaliers qui me permettraient d'accéder aux chambres. L'étage était une très spacieuse salle d'attente qui laissait entrer la lumière grâce à une grande baie vitré. Peu de tables étaient occupées et la plupart des dresseurs parlaient de stratégie en vue d'affronter le champion de Jadielle. Au fond contre les murs se trouvaient des machines, je vis quelqu'un qui parlait au téléphone en même temps que sa Pokéball disparaissait dans la machine.
Sans faire plus attention, je me dirigeai vers le couloir qui était sur ma gauche. Au bout de celui-ci, je vis d'autres tables et sentis une bonne odeur, sûrement le self, je reportai mon attention sur les portes qui se trouvaient de part et d'autres. Dès que je trouvais celle correspondant à ma carte, j'entrai. C'était une petite chambre, tout de suite sur la gauche se trouvait une salle de bain entièrement carrelée de blanc avec un bain, les toilettes et un lavabo. Tout de suite après, un lit double place remplissait tout l'espace, laissant tout juste passer un bureau dans un coin. Celui-ci était éclairé par la fenêtre à proximité. La pièce était dans les tons de crème, donnant au lieu une impression de quiétude.
Je me dirigeai tout de suite dans la salle de bain et posai tout à terre. Je commençai à me déshabiller après avoir ouvert le robinet en prévision d'un bain. Je m'arrêtai rapidement. Je n'avais pas de vêtements de recharge ! Quel crétin je faisais ! Je me rhabillai en râlant et après une petite réflexion, je redescendis voir l'infirmière Joëlle.
Celle-ci me regarda d'un œil curieux. J'attendis qu'elle en ait fini avec la personne qui me précédait, puis je me penchai sur le comptoir et lui demandai tout bas :
-Vous ne savez pas où je pourrais trouver des vêtements propres ?
Elle rigola à ma question, avant de m'indiquer une boutique dans la ville. Puis elle s'arrêta en regardant mes vêtements et ajouta :
-Les vendeurs sont sympas, mais je ne pense pas qu'ils acceptent que tu entres dans leur boutique dans cet état.
-Non, sans blague ? Fus-je tenté de lui répondre.
-Je vais voir ce que l'on a en réserve.
Elle repartit dans son « couloir » et revint avec un grand sac rempli de vêtements.
-Les dresseurs sont parfois étourdis et laisse des vêtements à la laverie. Quand ils ne nous les donnent pas. Prends ça et trouve-toi des affaires à ta taille.
Elle ajouta après un petit clin d'œil :
-Après tout ils ne devaient plus en avoir besoin.
Je la remerciai une fois de plus, puis je récupérai le sac avant de remonter à l'étage.
Je ressortis un peu plus tard, propre de la tête au pied. Le bain m'avait fait beaucoup de bien, j'avais réfléchi à ce que je voulais faire. Devenir dresseur de Pokémon était le meilleur choix. Je voyagerais, j'entraînerais mes Pokémons à être plus forts. Et, si un jour Il me retrouvait, je pourrais le vaincre et être définitivement libre de son emprise ! Mais je ne pouvais pas me reposer actuellement, Il était en chemin.
Le sac de vêtement était bien rempli, il y avait de tout. Je m'habillai d'un pantalon noir, avec un t-shirt blanc et d'une veste à manche courte aussi de la couleur des ténèbres. Elle était légèrement « brûlée » à la base mais rien de vraiment problématique et surtout elle avait des poches. Je pourrais mettre ma ... mes Pokéballs dedans au lieu de les avoir dans mon sac. Et puis, quitte à me changer, autant me rendre le moins voyant possible. Je récupérai d'autres habits en plus pouvant m'être utile. Je disposai tout sur le lit, avant d'aller nettoyer mon sac à dos et passer un coup sur mes chaussures. Je rangeai les vêtements qui n'étaient pas à ma taille, ainsi que les vêtements pour fille. Je trouvai à la fin un bandana noir avec un demi-cercle au côté bleu ciel représentant une Pokéball. Il était un tout petit peu grand, mais me permettrait de ne plus avoir les cheveux dans les yeux.
Une fois prêt, je ressortis de la chambre. Après avoir vérifié qu'Il n'était pas là, je descendis voir l'infirmière. Elle faillit ne pas me reconnaître, ce qui me rassura. Elle échangea le sac de vêtements contre mon Caninos.
-Pikachu n'est pas encore remis, repasse un peu plus tard. D'ailleurs tu comptes en faire quoi ? me demanda-t-elle curieuse.
-Je ne sais pas, j'aimerais bien avoir quelqu'un de plus dans l'équipe. Mais s'il ne veut pas je le relâcherai dans la forêt.
-Je vois. Bon maintenant, tu vas me faire le plaisir de t'inscrire convenablement comme dresseur. Va à l'arène, ils ont tout là-bas pour t'inscrire.
-D'accord. Euh ... je voulais vous demander ... si on me demande ... vous m'avez jamais vu ...
Je gardai le silence, espérant qu'elle accepte sans me poser de questions. Elle me lança un regard suspicieux.
-Tu n'as pas volé ce Pokémon ?
-Hein quel Pokémon ? Arkan ? Non, non ... en fait ... mes parents n'étaient pas d'accord pour que je devienne dresseur. Vous pouvez demander à mon Pokémon si vous voulez. Alors ...
-Je comprends, tu n'es pas le premier. Je ne te ferais pas un rappel des risques, tu dois le savoir. Promets-moi juste que tu seras prudent et que tu ne prendras pas de risques.
-Promis, répondis-je sans hésitation. C'est ce que je suis actuellement en train de faire, pensais-je ironiquement.
-A tout à l'heure alors !
-Oui.
Je ressortis du centre et me dirigeai vers l'arène. Le soleil avait bien décliné. Dans une ou deux heures, il aurait passé l'horizon. Je traversai la ville, qui je devais bien l'avouer, était plus grande que dans mes souvenirs. Je trouvai l'arène à la sortie de cité, elle était immense et bon nombre de personne y entraient et sortaient.
Le hall était découpé en deux zones. Une pour les inscriptions et l'autre pour les spectateurs. Je me dirigeais automatiquement vers la première. Une femme dans un uniforme bordeaux se tenait derrière un guichet et tapotait sur son clavier.
-Bonjour, la saluais-je. Je viens pour m'inscrire en tant que nouveau dresseur de Pokémon.
Elle tourna son regard vers moi et glissa une de ses mèches blondes qui devait la gêner derrière son oreille, enfin elle rajusta ses petites lunettes.
-Un instant.
Elle bidouilla encore quelques trucs sur son pc avant de me demander les différentes formalités. Une fois terminée, elle me demanda de patienter à nouveau. Elle revint avec une sorte de montre noire. Elle la connecta au pc, puis me la donna, avant d'ajouter :
-Ceci est le nouveau Pokématos, il est simultanément offert à tout nouveau dresseur. J'ai inséré ta carte à l'intérieur. Actuellement tu peux l'utiliser comme montre, carte de dresseur et carte de paiement. Tu sais comment l'utiliser ?
Je lui fis un signe négatif de la tête et elle enchaîna :
-Je vais te donner un manuel après. Donc pour commencer, quand tu te bats contre d'autres dresseurs, donne ton numéro.
Elle me reprit l'objet des mains et me montra comment l'utiliser. Elle afficha mon profil, dessus était inscrit maintenant Rei Ozaki, dresseur numéro 35856, 0 badges. Ainsi que différentes informations.
-C'est ce numéro. Une fois le combat terminé, valide pour le payer en cas de défaite ou l'inverse si tu le bas. Le transfert se fera automatiquement.
-D'accord.
Elle m'expliqua plusieurs choses, sur le fonctionnement de ce Pokématos. Je compris pourquoi le Pokématos était gratuit, les options intéressantes étaient toutes payantes. Et une fois mis au poignet impossible de l'enlever, il s'ajustait à la bonne taille. Seul le fait de résilier la carte dresseur ou la mort permettraient de l'enlever. Vraiment le dernier mot était rassurant, si je crevais quelque part, on pourrait toujours savoir à qui appartenaient les restes, le top.
Après avoir refusé de m'inscrire pour un combat contre le champion, je la remerciai avant de céder à la tentation et de monter à l'étage voir un match. Avec l'Autre à mes trousses, je ne pouvais m'attarder ici. Le simple fait de passer la nuit dans la ville me paraissait dangereux. Alors, faire un match pour être sous les feux des projecteurs, non merci !
Je m'installai dans les gradins et regardai le combat qui se déroulait face à moi. Je les avais toujours vus depuis mon écran de télévision, en face ce n'était plus la même chose. Un dresseur concourait pour son cinquième badge, le combat touchait à sa fin. D'après le panneau de contrôle, il ne lui restait qu'un Pokémon de valide, un Tauros qui présentait de nombreuses coupures. Il devait être à bout de force.
Face à lui le champion en avait encore deux, dont un qui se battait actuellement. Un terrifiant Léviator qui déclencha un ouragan dans la salle qui eut raison du Pokémon adverse. Celui-ci rappela son Pokémon avant de serrer la main du Champion et de repartir.
Je restai à regarder les combats suivants, si j'avais pu j'aurais fait sortir ce curieux d'Arkan. Mais, pour le moment, il devait rester dans sa Pokéball, ce n'était pas le moment de me faire repérer.
Quand je ressortis, la nuit était déjà tombée, je me dirigeai automatiquement vers le Centre Pokémon, où un repas normal devait m'attendre. Dès que j'entrais, l'infirmière m'interpella pour me remettre la Pokéball de Pikachu.
-Elle se repose pour le moment. Laisse-la dormir et demain, elle pétera la forme !
-« Elle » ?
-Oui, c'est une fille.
-Comment vous le savez ?
-Nos appareils nous l'indiquent. Mais tu peux le savoir avec un Pokédex.
-Ah oui, on m'en a parlé. C'est une option du Pokématos, non ?
-Oui, le professeur Chen a travaillé dessus. C'est une véritable encyclopédie Pokémon, c'est très important pour un dresseur Pokémon.
-C'est sûr. Encore merci pour Pikachu !
-De rien. Tant que j'y pense, viens avec ton Pokématos près de l'ordinateur.
J'approchai mon bras gauche, sur lequel je l'avais attaché. Un « bip » sonore retentit.
-Merci, maintenant tu auras les soins, la chambre et le couvert gratuitement.
-Pardon ?
-Les services du centre sont uniquement gratuits pour les dresseurs. Vas-y avant qu'ils aient tout mangé.
Après avoir rangé la Pokéball de Pikachu dans ma poche, je montai à l'étage. Après m'être restauré avec Arkan, je retournai dans la chambre. Je m'étonnai encore de voir mon Pokémon tout propre. Lui qui détestait la douche, la machine faisait vraiment des miracles ! J'hésitai à sortir la Pikachu mais je suivis les recommandations de l'infirmière et la laissai tranquille. Je retournai ensuite dans la chambre et celle-ci s'ouvrit quand je passai mon Pokématos à proximité de la serrure. La technologie, c'est super, mais je ne voudrais pas être là le jour où il y aurait une panne de courant.
Arkan tourna dans la pièce et flaira tout ce qui était possible. Le laissant à son occupation, je rangeai les objets sur le lit dans mon sac maintenant sec. Une fois terminé, je me changeai avant de rejoindre Arkan vautré sur le lit.
-Ça fait du bien de se reposer.
-Ni !
-Demain la journée sera longue. On s'entraînera pour battre le champion d'Argenta, si mes souvenirs sont bons, les Pokémons roches sont sa spécialité ou un truc du genre. Cela nous permettra de voir notre niveau.
-Ninos
-Ouais, on ne part pas avantagés. Mais je vais devenir dresseur, un jour on sera plus fort que Lui et on pourra faire ce que l'on voudra sans problème.
-Ni canos !
-Mais pour le moment, au lit !
Mon compagnon me regarda éteindre la lumière. Une fois sous les draps, il vint se coller contre moi.
-Arkan, je sais que tu es content mais j'aimerais dormir ! Arrête de bouger ta queue !
-Ca cani nos !
Je cherchai un instant sa tête et la caressai d'une main. Aujourd'hui, j'étais vraiment sur le point de prendre un nouveau départ, repartir de zéro. J'étais quelqu'un d'autre. À présent, je m'appelais Rei Ozaki et j'étais un dresseur Pokémon. Bon je n'avais pas un rond, et ça, c'était un chouilla problématique. Demain, je descendrai vers le Bourg Palette. J'en profiterai pour affronter des dresseurs et remplir mon porte-monnaie. Tandis que je réfléchissais à d'autres virtualités, la fatigue s'empara de moi et je m'endormis d'un sommeil sans rêves.