III- Sauve-la
- Reprend-en encore un peu, mon chaton. Tu n'as rien mangé.
- Maman, c'est la troisième part de Tarte aux baies Pêcha que tu essaies de me faire avaler. Ne t'inquiètes pas, je ne suis pas sous-alimenté ni perfusé.
- Obéis à ta mère, Ryan.
Fin de dîner chez mes parents. Ils sont vraiment adorables, m'ont toujours encouragé et soutenu, et je peux dire que je leur dois une fière chandelle!
Mais pourquoi est-ce qu'à chaque fois, ma mère me nourrit comme si je revenais d'un camp de concentration?
- Au fait, tu emportera les restes du curry Tamato de ce soir pour ton appart. Les tupperwares sont dans le frigo.
- Ok, Maman.
Après le repas, nous regardons la télé en famille.
Ma petite soeur est là, aussi. Elle aura 12 ans l'hiver prochain.
Elle s'avance vers moi, avec un regard de Skitty battu en me calinant par dessus le fauteuil
- Mon Ryan chéri, t'es le meilleur frère que j'ai jamais eu, et je suis très fière de toi...
- Bon, tu veux quoi Lili?
Elle éclate de rire
- Grillée. Tu peux me prêter ton Roserade et ton Momartik, s'il te plait? J'ai envie de jouer avec eux.
- Ok.
Je les fais sortir de leurs Pokéballs.
- Momartik?
- Elle s'avance vers moi en flottant.
- Je sais que tu n'aimes pas ça, mais je t'en conjure, laisse-toi faire si elle essaie de te coiffer, maquiller ou enrubanner. Ne me refais pas le coup de la dernière fois!
Momartik baisse la tête. On pourrait presque l'entendre râler. La dernière fois que ma soeur a voulu la déguiser, elle a utilisé Blizzard.
Heureusement que Roserade est plus arrangeante.
- Merci mon frère! Suivez-moi!
Elle les emmène dans la chambre pour finir la soirée en beauté.
Tiens, c'est la pub à la télé. C'est souvent ce moment que mon père choisit pour argumenter, débattre, ou simplement en placer une.
- Tu as eu des nouvelles de ce mystérieux individu qui a déboulé pendant le match du Tournoi des Professeurs?
- Comment t'es au courant, papa?
- Mais enfin chéri, lança ma mère, l'information a circulé depuis Mérouville et s'est répandue comme une trainée de poudre!
- Je n'ai pas eu plus de nouvelles. Apparemment, il se fait soigner à l'hôpital de Mérouville. Je vous laisse, je vais prendre un peu le frais dehors.
Je pousse la baie vitrée et m'assoit sur la balancelle de la terrasse du jardin.
Je préfère leur épargner tout ce que j'ai appris aujourd'hui: ma mère se fait toujours un sang d'encre pour moi, et mon père serait allé chercher les flics...
Je ne leur ait pas dit non plus que j'avais posé ma semaine...
Et si je faisais prendre l'air à mes autres compagnons? Super, la piscine n'est pas bâchée.
- Milobellus, Brasegali, Lucario, Gardevoir, allez-y!
Ils ont quand-même fière allure
Milobellus pique une tête. Lucario décide de se poser sur une des branches du gros arbre, tandis que Gardevoir et Brasegali jouent ensemble sur le gazon.
Ils sont heureux, et c'est tout ce qui compte pour moi, pensai-je, animé par une pointe d'excitation et de mélancolie.
Demain, j'irai voir la mère d'Anna. Elle doit savoir pour sa fille.
J'espère que cela ne va pas trop l'accabler, ni la ramener dans ses heures les plus sombres. Surtout que le père d'Anna l'a quittée peu après le drame.
Et puis merde. J'ai dans ma poche la carte du lieu où se trouve sa fille, je ne vais pas me taire plus longtemps!
- Gaaaaardevoir?
- Qu'y-a-t-il? Non, me fais pas ces yeux-là, on dirait Lili? Tu veux un Pokébloc?
Elle acquiesce en se frottant les mains... Je lui tends de la boite Pokéblocs.
- Tiens, gourmande. Partage avec les autres.
Gardevoir utilise Psyko pour faire léviter les bonbons et les envoyer aux autres! Ils la remercient d'un signe de la main.
Je les ai bien élevés quand-même.
Allez, dodo tout le monde, demain ne va pas être facile...
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- Allez, rentre bien mon chéri.
- Ils t'épuisent à cette école, non? Allez, courage Fiston.
- Bye, Ryan.
- Passez une bonne fin de semaine, je vous aime!
Ca y est je quitte la maison.
J'ai récupéré Momartik maquillée comme pour une soirée de tapin et Roserade en Sadako... J'ai du les passer à l'hydrocanon de Milobellus pour les démaquiller, les pauvres. Je les chouchouterai pour me faire pardonner...
Mais ce matin, je ne rentre pas chez moi à Mérouville. Je prends la direction de la maison d'Anna.
J'y suis.
Mon estomac se noue toujours à la vue de cette maison. Je n'y suis pas retourné depuis le drame.
Ma gorge se serre, j'ai du mal à déglutir.
J'effleure la sonnette, puis choisit finalement simplement de toquer à la porte.
La porte s'ouvre.
- Mme Kamo? C'est moi, Ryan! Vous me reconnaissez?
- Ryan! Entre donc!
Elle me serre dans ses bras. Anna était vraiment le portrait craché de sa mère. Mais quel idiot je fais, je n'ai plus besoin de penser à elle au passé, alors que je vais tenter de sauver son futur.
- Entre vite! Mais que me vaut cette visite? Je sais que tu n'as pas beaucoup de temps avec ton emploi à l'école des Dresseurs!
Son intérieur est soigné, cosy. Elle m'invite à prendre place dans son canapé.
Les photos d'Anna décorent presque tous les meubles et les murs de son intérieur.
- Que veux-tu boire? Du thé, du café, une infusion?
- Je veux bien un peu de café, s'il vous plait.
- Ca marche!
Elle s'assied à côté de moi après avoir posé les tasses fumantes sur la table basse en bois.
- Alors dis-moi pourquoi tu es venu me voir ?
Est-ce que j'ai bien fait de débarquer comme un cheveu sur la soupe? Je ne peux plus reculer maintenant, je plonge.
- Mme Kamo, je viens vous parler à propos de ... de....
Son visage se fige.
- J'ai compris. Tu viens me parler d'Anna.
Son sourire est s'évaporé.
- Dans ce cas, finis ton café et va-t-en. Je ne veux pas remuer le passé.
- Mais, Madame...
- Est-ce que tu t'imagines au moins comme ça a été dur pour moi?
Elle hurla ces paroles en se levant d'un bond du canapé.
- Dur de me reconstruire après la disparition de ma fille, le départ de mon mari? Et toi, tu viens remuer tout ça.
- Fermez-la!
Je me suis levé aussi et la regarde droit les yeux. J'ai haussé le ton aussi fort qu'elle.
- Je suis venu vous aider bordel, et vous, vous me dites de vous casser! Vous vous prenez pour qui? Vous reconstruire, alors que votre maison entière est un mausolée d'Anna! Y'a des photos de partout!
J'ai la veine qui palpite et le coeur qui s'emporte. J'y suis peut-être allé fort, mais on ne refuse pas l'aide de quelqu'un qui va redonner un sens à votre vie, nom de Dieu!
- Elle reste interdite, comme sonnée, puis d'un seul coup s'effondre dans mes bras, la voix entrecoupée de sanglots.
- Suis désolée...Tu as raison, je n'arrive pas à... à.... à surmonter ça.... Je ne suis qu'une idiote... Pardon... Pardon...
- Ca va, ça va... Je m'excuse moi aussi pour tout ce que j'ai dit... C'était sur le coup de...
- L'emotion...
Elle part chercher des mouchoirs dans la salle de bains.
- Vas-y, je ne couperai plus. Dis moi ce pourquoi tu es venu.
- Je sais où est Anna.
- Ryan...
Elle me prend les deux mains, les yeux encore embués de larmes;
-Mon petit Ryan, je sais ou se trouve ma fille.
J'en suis abasourdi. Je vois défiler les mots dans ma tête, je les retourne, les analyse, mais non, c'est bel et bien la phrase qu'elle a prononcé.
- Mais comment, alors vous savez pour...
- Pour la secte. Absolument.
Jackpot.
- Madame Kamo
- Arrête de m'appeler comme ça.
- D'accord. Nathalie...
Elle lève les yeux au ciel en soupirant.
- Ryan. ce ne sont ni mon prénom, si mon nom. Kamo était certes le nom de mon mari Jay, mais Nathalie, c'est le nom d'emprunt que j'ai pris. En réalité, mon vrai prénom, c'était Marina.
- D'accord Marina. Mais pourquoi un pseudonyme?
- Pourquoi change-t-on d'identité, Ryan?
- Pour échapper à quelqu'un qui vous poursuit.
Elle soulève la manche de son bras droit. Il est tatoué. On dirait une sorte de sceau avec un globe au centre, entouré de sortes de hiéroglyphes. Au centre du globe se trouve le kanji japonais «海», «l'Océan».
Elle a donc fait partie de la secte, c'est on ne peut clair.
- Madame Ka... Euh, Marina. Vous étiez une...
- Oui, Ryan. J'étais une des Filles de Kyogre. Ne me juge pas s'il te plait.
Comment juger quelqu'un qui se fait vampiriser par un malade? Ils savent exploiter la moindre de n'importe qui!
- Mais vous en êtes sortie de la secte! Vous avez eu votre enfant ensuite! Vous vous en étiez tirée!
- Ryan. Anna n'était pas la fille de mon mari.
Soudain, tout s'éclaire.
- Vous voulez dire qu'Anna est la fille de Triton?
- Exactement.
Enfin une percée, une lueur d'espoir!
- Mais alors, s'il vous a violée, vous pouvez porter plainte, le trainer devant les tribunaux, lui faire payer!
Elle secoua la tête.
- Il ne m'a pas violée. J'étais totalement consentante. Je l'aimais follement. Jusqu'au jour où Jay m'ouvrit les yeux. Il travaillait avec moi au Centre Commercial de Nénucrique Grâce à son aide, je me suis échappée de la secte. Je pensai être tranquille. De plus, j'avais caché à Jay ma grossesse. En m'arrangeant dans le calcul des mois et en prétextant une légère naissance prématurée, cela collait... Mais ce monstre l'a su, m'a retrouvée, et a récupéré sa fille...
Cette femme s'est tue pendant toutes ces années. Ce Triton est un monstre, il a ruminé sa vengeance pendant douze ans pour la torturer. Ce que je trouve inhumain, c'est de lui avoir fait croire qu'elle s'en était sortie en les laissant "tranquilles" tout ce temps...
Elle a du tout avouer à son mari, voilà pourquoi leur couple a volé en éclats.
- Marina, je peux la sauver. Vous êtes au courant pour l'homme qui s'est effondré hier à l'Ecole des Dresseurs?
- Oui, et alors?
- C'est un ancien adepte de la secte. Il s'appelle Terrence, et m'a communiqué le plan de la grotte sous-marine de la secte. Cet homme s'est échappé pour me retrouver, car le seul nom dont Anna se souvenait était le mien. Mais le temps presse: Terrence m'a avoué qu'il la tuerait dans trois jours.
Marina éclata à nouveau en sanglots
- Il veut encore me faire souffrir. Ce malade va encore s'en sortir. Ce qui me faisait tenir, c'était que ma petite fille était encore en vie...
- C'est un pervers, Marina. Les dégénérés ne supportent pas de perdre le contrôle. Le cas échéant, ils détruisent la personne qui a osé se rebeller.
Elle me regarda dans les yeux, joignit mes mains sur les siennes.
- Tu es le seul qui puisse la sauver maintenant. Alors qu'attend-tu? Fonce. Sauve-la.
Nous nous serrons fort dans les bras l'un de l'autre...
C'est le deuxième voyage de ma vie, et c'est aujourd'hui qu'il commence...