La Ballade du Poisson-Rêve de PeterCynthia

Les fenêtres grandes ouvertes laissaient entrer une brise légère qui faisait danser les rideaux aussi blancs que de la neige. La lumière chaleureuse du soleil pénétrait la pièce et éclairait la tête du dormeur qui restait étalé sous sa couette, ne voulant surement pas bouger et souhaitant profiter de ce doux sommeil que lui proposait son magnifique lit double. Des voix de femmes discutant gaiement se faisaient entendre au dehors. Le bruit tira peu à peu l'homme endormi qui rouspétait de mécontentement, se préparant à réprimander les pies qui parlaient dans la cour.

Ce n'est qu'un quart d'heure après une longue séance d'étirements et de bâillements dignes d'un Chaglam, que le jeune homme décida enfin à soulever son édredon et à se diriger vers sa salle de bain pour se débarbouiller. Il ressemblait à un Ronflex extrêmement mal réveillé. Il gratta sa joue gauche couverte d'une fine barbe de la veille. Ses yeux bleus marines semblaient complètement vides à cause du réveil et ses cheveux bruns complètement décoiffés traduisaient parfaitement la situation. Après avoir jeté de l'eau sur la figure, l'endormi se dirigea vers la fenêtre pour saluer les deux femmes qui discutaient toujours. Il leur fit un grand signe de la main.

- Ah enfin Thomas se réveil ! Ce n'est pas trop tôt ! s'écria la plus vieille.

- Excusez-moi Victoria ! J'ai eu beaucoup de mal à quitter mon lit, je viens vous aider tout de suite.

- Les rêves, les rêves, c'est bien beau mais il faut un peu vivre dans la réalité. Il est temps de se réveiller, un mariage ça ne se prépare pas en claquant des doigts, bougonna la dénommée Victoria.

- Maman, laisses-lui le temps de vivre, c'est son dernier jour de liberté, gloussa l'autre femme.

- Ecoute Marine, ce n'est pas parce que c'est ton futur époux que tu dois sans cesse le défendre. Je vous ai déjà dit que je n'organiserais pas ce mariage tout seul, donc les deux Rhinolove bougez-vous, on a du pain sur la planche !

Victoria était une femme forte. Elle avait élevé sa fille Marine seule car le père avait mis la clef sous la porte juste après la naissance de la petite. C'était une femme d'une cinquantaine d'années, fière, souriante et toujours heureuse d'aider les autres. Elle pouvait cependant être très bougonne et particulièrement cassante. Elle vouait un certain mépris aux hommes qui tournaient autour de sa fille, par peur que l'histoire ne se répète. La mère et la fille se ressemblaient comme deux gouttes d'eau, même cheveux longs, bouclés et blonds – sauf que Victoria les attachait souvent avec une pince en nacre de Coquiperl – les mêmes yeux turquoises et le visage quasi-similaire. On voyait parfaitement bien que les deux femmes avaient un lien de parenté.

Marine, quant à elle, était beaucoup plus ferme que sa mère, elle savait parfaitement ce qu'elle voulait. Elle était cependant complètement déjantée et fêtarde.

Les deux femmes se turent quelques instants et écoutèrent les cris des Goelise qui étaient répercutés par les falaises qui entouraient la ville.

Thomas apparut enfin dans la cour, coiffé, habillé et souriant. Il boitait cependant légèrement depuis son naufrage il y a cinq ans. Personne, pas même lui, ne savait ce qui c'était passé, il avait du recevoir un gros choc aux quadriceps ou quelque chose comme ça.

Victoria l'avait retrouvé il y a cinq ans échoué sur une plage près de Nénucrique alors qu'elle pêchait. Elle l'avait pris sur son bateau et l'avait emmené chez elle puis au centre Pokémon pour le soigner. Quelques jours après Thomas ressortait en pleine forme avec pour seul problème sa jambe. Ne sachant où aller, ne connaissant personne et étant dans l'incapacité de prendre la mer, Thomas fut recueillit par la mer de Victoria qui l'hébergea pendant plus de quatre années, jusqu'à ce qu'il demande Marine en mariage. Il était fou amoureux d'elle et elle aussi. Il travaillait pour Victoria. Celle-ci tenait un magnifique restaurant sur la plage, plutôt spacieux et très achalandé. Le jeune homme, du haut de ses 25 ans, devait tout à la famille de Marine qui avait tout fait pour lui. Étrangement, il ne se souvenait pas du tout de sa vie d'avant, il était amnésique et n'avait donc aucune raison de quitter Hoenn.

Le jeune trentenaire s'approcha de sa bien-aimée et lui donna un tendre baiser avant de la prendre dans ses bras. Victoria soupira.

- Thomas j'ai besoin de toi ce matin pour aller chercher des baies Alga. Il en pousse dans les bois au bord de la plage près de l'entrée de la grotte. J'en ai absolument besoin pour ce soir. Tu auras besoin d'un Pokémon doté de capacités coupantes pour pouvoir arracher les fruits de leur arbre.

- Très bien, vous aurez besoin de moi au restaurant après ou pas ? demanda le fiancé.

- Non mais je crois que Marine aura besoin de toi, n'est-ce-pas ma chérie ?

- Oui mais je t'en parlerais après, d'abord va accomplir ton devoir, répondit la jeune fille en riant.

Après ces quelques indications Thomas quitta la maison et se dirigea vers le port. Il resta quelques temps sur une des nombreuses terrasses qui composaient la ville et admira le paysage. Atalanopolis était vraiment une ville extraordinaire. Le soleil faisait scintiller l'eau du bassin intérieur et les falaises blanches qui entouraient la cité étaient éclatantes. La maison de Marine et de Victoria se trouvait dans les hauteurs de la ville et ils avaient donc la chance, lui et sa futur belle-famille, d'admirer chaque jour cette vue extraordinaire. Le jeune homme repéra la dite forêt où se trouvait les plants de baies Alga. Elle était cachée par les toits bleus des maisons de la ville. De nombreux Goélise pointaient vers cette direction, surement parce que leur nid se situait là.

Le fiancé prit une grande inspiration, emplissant ainsi ses poumons du doux air marin et descendit les escaliers pour se diriger vers le port.

Le marché aux poissons, renommé dans toute ma région, se tenait sur les quais comme tous les matins. Une délicieuse odeur de fonds marins se dégageait des nombreux étalages où des Remoraid, des Lumineon, des Relicanth et autres créatures aquatiques attendaient de se faire acheter. Thomas adorait cet endroit. Il avait rarement quitté la ville par lui-même car il ne possédait aucun Pokémon maîtrisant la capacité Plongée. Cela devrait être grisant d'explorer les abysses d'Hoenn, de découvrir des merveilles sous-marines. Le jeune homme passa son chemin et poursuivit sa route vers la périphérie de la cité.
Il arriva sur une grande place donnant sur la mer. Une fontaine déversait son eau claire. Sur celle-ci était sculptée une imposante statue de Kyogre, le dieu des mers. Sur le socle de la sculpture se trouvait une pancarte disant ces mots : « Kyogre, le Poisson-Rêve ». A chaque fois qu'il apercevait se nom, le « Poisson-Rêve », Thomas frissonnait et il ignorait pourquoi, c'était comme si ce mot était lié à son passé car il ne se souvenait pas avoir vu ce qualificatif du Pokémon Marin auparavant. C'était étrange.
Un quart d'heure après, le jeune homme arriva à l'entrée de ce petit bois qui bordait la ville. Il y allait souvent pour entraîner son unique Pokémon : Mangriff. Il le libéra pour qu'il puisse se dégourdir les pattes et surtout les griffes. Les plants d'Alga se trouvaient un peu plus loin dans les fourrées. Thomas laissa son Pokémon partir chasser les Rattata pour se nourrir et continua sa route. Il arriva quelques instants plut tard devant trois arbres sur lesquels poussaient de longs fruits composés de torsades bleues et mauves. Le jeune homme attendit quelques instants avant de voir surgir des buissons son Pokémon sur ses quatre pattes avec la bouche encore tâchée de sang. Le Mangriff avait du dévoré un Zigzaton ou un Rattata et se régaler. Il se plaça aux pieds de son dresseur.

- Mangriff, tu vas utiliser Combo Griffes sur les fruits pour les décrocher mais fais attention de
ne pas trop abîmer la chair.

Le Pokémon poussa un cri d'approbation puis fit surgir ses longues et fines griffes qui devaient être tranchantes comme des rasoirs. Il bondit vers les arbustes et avec la vitesse d'un éclair il entaillait les queues des fruits qui étaient dures et sèches pour faire tomber les baies qui s'écrasaient lourdement sur le sol. Les baies Alga étaient des fruits à la chair plutôt sèche, elles ne risquaient donc pas grand-chose des coups de griffes du Pokémon. Les arbres en contenaient une quantité impressionnantes et le Mangriff agissait si rapidement que Thomas avait du mal à récupérer tous les fruits. Au bout de cinq minutes le Pokémon s'arrêta, la respiration haletante. Ce n'est que dix minutes après cela que Thomas ramassa la dernière baie. Il avait remplit trois pleins paniers. C'était une récolte fructueuse. Le dresseur se posa quelques instants au pied d'un palmier, il sortit de son sac une canette de Soda Cool qu'il but d'une traite tandis que Mangriff était blottit à ses pieds. Il régnait un calme tout à fait apaisant, c'était comme un rêve. Le jeune homme, qui caressait son Pokémon qui poussait un ronronnement de contentement, aurait pu rester là des heures à écouter le vent, la mer et les oiseaux qui chantaient dans les branches des palétuviers et des palmiers

Soudain Mangriff souleva brusquement la tête, à l'affut. Il se leva et se dirigea vers d'épais taillis. Thomas le regarda, étonné. Il n'y avait eu aucun son. Le dresseur n'y prêta aucune intention et resta immobile jusqu'à ce qu'un rugissement venant des mêmes taillis le fit sursauter. Il se dirigea vers l'endroit où son Pokémon avait disparut, s'enfonçant ainsi dans les fourrés. Il ne voyait pas ses pieds qui avaient disparu sous une épaisse couche de fougères. Un lourd silence se faisait entendre, seuls les pas de Thomas le perçaient. Les oiseaux ne chantaient plus du tout. Où Mangriff était passé ? Quel était ce rugissement ? Le jeune homme perdait du temps, il devait absolument retrouver Marine avant midi et voilà qu'il jouait à cache-cache avec son Pokémon. Il s'arrêta quelques instants, se grattant lentement la tempe, comme pour montrer qu'il réfléchissait : « Mangriff ? Mangriff ? T'es où ? » Il continua à avancer puis trébucha sur ce qui ressemblait à un rocher, il s'écroula sur le sol et tomba sous terre, roulant sur la roche froide. Il chutait dans un énorme gouffre. Avant de disparaître sous le sol, il avait aperçu une ombre aussi noire que les plus horribles cauchemars. C'était surement elle qui l'avait poussée. La chute sembla durer de longues minutes alors que cela faisait à peine une seconde. Il atterrit violemment sur le dos puis continua à rouler sur des rochers avant de perdre connaissance.