Pikachu
Pokébip Pokédex Espace Membre
Inscription

Le Sauveur du Millénaire de Malak



Retour à la liste des chapitres

Informations

» Auteur : Malak - Voir le profil
» Créé le 13/08/2014 à 10:21
» Dernière mise à jour le 30/08/2018 à 23:02

» Mots-clés :   Aventure   Fantastique   Médiéval   Présence de Pokémon inventés   Région inventée

Si vous trouvez un contenu choquant cliquez ici :


Largeur      
Chapitre 7 : Départ du royaume
J'ai connu beaucoup de personne, et j'en ai vu mourir tout autant, tandis que je continuais à exister. Une vie d'immortel est plus une malédiction qu'une bénédiction. Deux de mes plus anciennes amies, Solaris et Dracoraure, m'ont quitté il y a peu. Mon fils ne sait pas qui je suis et ne s'en soucie guère. Je me sens si seul...



*****



L'heure était venue.

Nirina s'était efforcée de rester patiente, prenant le temps de préparer son évasion et la suite dans tous les détails. Cela prit un bon moment, ce qui expliquait qu'elle dût attendre des jours entiers en plus dans ce trou infect. Nirina se savait être une femme intelligente. Ce n'était pas de l'arrogance, juste un fait. Elle était née et avait grandi dans un royaume moyenâgeux, mais ça ne l'avait pas empêché d'avoir les meilleures notes qu'il était possible d'avoir à la Haute Académie Velgos de Bakan. Le problème, c'était que si dans la théorie elle s'y connaissait, la pratique était autre chose. Etant reine, elle avait l'habitude de commander, et de laisser autres se charger du pourquoi et du comment. Le plus souvent, c'était Ryates qui se chargeait de la réflexion. De ce fait, Nirina avait perdu l'habitude de concevoir et d'agir par elle-même.

Tout n'était pas encore au point dans son plan, mais elle savait qu'elle ne pouvait plus attendre. Ses « alliés » prisonniers étaient de plus en plus impatients. Si Nirina s'avisait de les décevoir et de les faire trop attendre, ils pourraient bien vite se retourner contre elle. Elle les tenait en main uniquement grâce à l'espoir. Et un espoir déçu lui serait fatal avec eux, elle le savait. De toute façon, elle ne les avait pas intégrés à la suite de son plan. Tous ces pouilleux étaient uniquement là pour l'aider à s'évader. Elle les avait tous réunis et avait pris de la hauteur pour tous leur parler.

- Compagnons, c'est aujourd'hui que nous remontons à la surface ! C'est aujourd'hui que nous prendrons notre revanche sur ceux qui nous ont jeté là, ceux qui nous oppriment et se gavent !

Les détenus l'acclamèrent. Nirina ne pouvait s'empêcher de toujours être stupéfaite par leur bêtise. Ils avaient fini par la prendre pour l'une des leurs, alors qu'elle était la première de ceux qui « les opprimaient et se gavaient ». De parfaits crétins manipulables à souhait.

- Notre plan est très simple, poursuivit Nirina. Nous allons conquérir la cité.

Un moment de silence. Puis revinrent les acclamations, plus fortes que précédemment. Bien sûr, tous ces gars étaient trop stupides pour comprendre que ce que proposait Nirina était impossible. Mais impossible seulement en temps normal.

- Le nouveau roi a quitté le royaume avec son armée ! Il ne reste plus que quelques gardes qui protègent la cité. Si nous parvenons à prendre le palais et à capturer le régent, nous aurons gagné. Notre objectif premier est l'armurerie, pour récupérer épées et armures. Je sais où c'est, je vous guiderai. Vous pouvez tuer les gardes, mais ne touchez pas aux civils. Il serait idiot de les retourner contre nous. Une fois dans le palais, il nous faut trouver le régent Deornas et le prince Alroy. Ils sont la clé du pouvoir en l'absence du roi. C'est pourquoi il nous les faut vivants. Vous avez compris ? Interdiction de leur faire le moindre mal tant que je ne l'ai pas décidé !

Elle insista bien là-dessus. Ces sauvages dégénérés étaient tout à fait capables d'aller éventrer son fils Alroy simplement parce qu'il était prince. Une fois Deornas et Alroy sous sa garde, et le palais conquit, Nirina avait prévu d'en confier la garde à Jenos, l'homme avec qui elle avait sympathisé dans le Puits. C'était le seul ici qui semblait avoir un semblant d'intelligence. En tant qu'ancien notable travaillant à la cour, il pourrait bien gouverner Cinhol. Et s'il ne pouvait pas, eh bien tant pis. Nirina se fichait totalement de ce que pourrait devenir le royaume, à présent. Si son plan fonctionnait comme elle l'avait prévu, elle allait revenir dans le Monde Réel. Et y rester définitivement.

Première étape donc, sortir du Puits. Ceux qui l'avaient creusé avaient sans doute pensé que ce serait impossible. Le Puits Carcéral ne faisait que deux cent mètres de profondeur, autrement dit bien plus petit que nombre d'immeubles que Nirina avait vu à Fubrica, la capitale de Bakan, la mégalopole la plus peuplée et la plus impressionnante du monde. Mais même deux cents mètres, c'était très haut à escalader, et très difficile, surtout sans aucun équipement. En fait, les concepteurs du Puits avaient raison : s'y échapper était impossible... tout seul.

Mais Nirina n'était pas seule. Elle avait une centaine d'hommes avec elle, qui lui obéissait au doigt et à l'œil. À son signal, ils arrachèrent la corde du monte charge. Ils durent s'y mettre tous, et pendant près d'une demi-heure, mais la corde fini par lâcher, amenant avec elle l'ascenseur en bois par lequel on descendait dans le Puits. Cela fit un vacarme épouvantable, mais Nirina avait bien choisi son heure. À ce moment là de la soirée, les quelque gardes qu'il y avait en haut étaient trop occupés à boire et à jouer aux cartes pour entendre un bruit à deux cent mètres plus bas.

Ils déroulèrent la longue corde qui faisait toute la longueur du puits, et se l'attachèrent entre eux. Nirina était la première, devant leur montrer la façon de procéder. Ces derniers jours, elle leur avait fait découper les barreaux de son ancienne cellule, à une taille bien précise et de façon à ce qu'on puisse enfoncer le bout dans la terre durcie qui faisait office de mur autour d'eux. Mais ils n'en avaient qu'une vingtaine, soit un à utiliser chaque dix mètres.

Nirina s'aida d'un morceau de barreau pointu pour grimper. Au bout de dix mètres, elle en enfonça un dans le mur avec un morceau de planche du monte charge, et enroula sa corde autour avec un nœud qu'elle espérait solide. Puis le second derrière elle, Jenos, monta à sa suite, s'aidant cette fois de la corde attachée. Quand il fut arrivée au stade de Nirina, il lui donna son morceau de barreau pointu. Nirina se détacha du premier tandis que Jenos prenait sa place, et grimpa dix mètres plus haut pour enfoncer le second, et s'attacher à nouveau.

Et ils continuèrent ainsi, lentement, un par un, étape par étape. C'était long, mais c'était le moyen le moins dangereux que Nirina avait trouvé. Ainsi, si quelqu'un tombait, il serait rattrapé par la corde accrochée au prochain barreau ainsi que par l'homme qui s'y trouvait. Le vrai danger était que Nirina ne tombe, elle. Car elle était la première, et n'aurai pas de corde au dessus d'elle pour la rattraper. Si elle chutait, elle ferait sûrement tomber une bonne partie du groupe avec elle. Mais si elle avait choisi de passer la première, c'est justement parce qu'elle avait plus confiance en elle qu'en les balourds qui l'accompagnaient.

C'était pourtant difficile. Même avec l'aide d'un morceau de barreau en guise de piquet d'alpiniste, trouver des prises correctes sur cette façade lisse et granuleuse n'était pas aisé. Du reste, comme ils montaient lentement, Nirina s'épuisa vite, et elle n'était pas à la moitié de l'ascension qu'elle sentait déjà ses bras souffrir. Nirina n'avait pourtant jamais dédaigné l'entraînement de son corps. Sa mère Hasteria, qui venait de la Tribu des Chevaux, là où l'entraînement physique était presque une religion, ne l'aurait jamais toléré. Et puis, une princesse et future reine se devait d'être aussi forte mentalement que physiquement. Son oncle Astarias avait veillé à son entraînement. Nirina était devenue forte. Elle savait manier l'épée comme une pro, elle avait l'endurance d'un athlète, et pouvait étaler bien des hommes au combat à main nue. Mais bon, elle n'avait encore jamais eu à escalader un trou de deux cent mètres.

Au bout des cent cinquante mètres, six prisonniers étaient déjà tombés, et quatre d'entre eux n'avaient pas pu être retenus par les premiers barreaux enfoncés qui s'étaient détachés sous le poids combinés, et s'étaient écrasés au sol. Nirina, elle, sentait enfin l'air frais du soir sur son visage, mais elle était prête à tout lâcher. Elle n'avait plus aucune force dans les bras, et peinait à trouver son souffle. Monter encore cinquante mètres lui paraissait relever de l'utopie.

Tu renonces bien facilement. Ce n'est pas très « Haldar ».
Personne n'avait parlé. Cette phrase était venue à l'esprit de Nirina, comme un souvenir. C'était ce que lui avait dit l'esprit d'Uriel quand elle avait été amenée dans le Puits et qu'elle avait perdu tout désir de vivre. Uriel avait totalement disparu, mais Nirina sentait comme si une partie de sa volonté était restée en elle. Elle lui criait de ne pas abandonner. Elle lui demandait de remettre son épée à celui à qui elle était destinée...

Nirina n'avait pas oublié la dernière mission d'Uriel. Il lui avait bien dit de donner son épée à son héritier, celui qui était censé vaincre Castel. Mais cette quête amenait plusieurs problèmes. L'un d'entre eux était de savoir de quelle épée Uriel avait-il parlé. S'agissait-il de Sifulis, sa toute première épée, à la lame argentée, ou de la noire Peine, forgé par le Trio des Ombres, qui avait été sa prison de désespoir et de haine durant des siècles ? Que ce soit une ou l'autre, Nirina ignorait où elles étaient. Castel les avait peut-être fait détruire ?

Et l'autre problème était de trouver l'héritier d'Uriel. Ryates ne lui avait jamais dit que le Rejeté de la Lumière avait eu une descendance. Et si elle existait, comment la retrouver ? Cela semblait être une mission impossible que lui avait confiée Uriel. Mais Nirina sentait qu'il n'y avait que lui qui savait comment se débarrasser de Castel une fois pour toute. Le but de Nirina était de quitter ce monde et de rejoindre le monde réel, où elle pourrait vivre avec Alroy en paix, mais si elle n'arrêtait pas Castel, le monde réel ne serait jamais en paix. Alors elle écouterait Uriel. Elle prendrait les deux épées avec elle, au cas où.

Penser à Uriel lui donna un peu plus de force. Cet homme avait été un homme bon jadis. Le meilleur ami de Castel, un dresseur exemplaire comme lui. Tous deux avaient fondé le royaume de Cinhol dans l'Ancien Monde et lutté contre la domination absolue de la République de Bakan. Mais, ayant perdu la femme qu'il aimait, Castel avait sombré peu à peu dans la folie et l'extrémisme, au point de vouloir anéantir le monde entier. Pour l'en empêcher, Uriel avait sacrifié son âme à trois Pokemon maléfiques et corrupteurs. Ils lui avaient donné Peine pour vaincre Castel, mais en échange, ils avaient perverti son esprit.

Son corps ayant été détruit, son âme s'était réfugiée dans la lame de Peine, et alors avait commencé sa chute dans les ténèbres pendant près de cinq cents ans. Quand Ryates avait trouvé l'épée et rencontré Uriel, ce dernier n'était plus qu'un esprit désincarné plein de haine, qui l'avait corrompu. Puis Uriel avait retrouvé son corps et sa santé mentale en ressuscitant pour quelques minutes, juste avant de périr des mains de Castel. La vie d'Uriel était tragique, mais son œuvre méritait d'être contée. Cet homme avait tout sacrifié : ses amis, son pays, ses Pokemon, sa réputation, et même son âme, pour tenter de sauver le monde. Il avait été le Sauveur du Millénaire, mais au final, il n'avait pas pu arrêter définitivement Castel.

Nirina comptait bien être celle qui reprendrait sa suite. Par vengeance envers Castel, pour arrêter ses projets fous, pour protéger le monde réel qu'elle aimait, mais aussi pour faire en sorte que son fils Alroy puisse grandir sereinement, ce qui ne serait pas le cas s'il restait sous la coupe de Castel. Le visage de son fils de quatre ans s'interposait au souvenir de l'esprit d'Uriel, et décupla ses forces et sa volonté.

Sans s'en rendre, elle parcourut les derniers mètres qui la séparaient de la liberté. Alors seulement, elle s'effondra au sol, ses bras presque paralysés, le souffle pantelant. Mais elle ne pouvait pas se reposer longtemps. Il devait y avoir des gardes non loin. Ils devaient les éliminer rapidement. Elle attendit que Jenos et deux autres la rejoignent pour se mettre à l'affut des gardes. Comme Nirina l'avait prédit et espéré, ils en trouvèrent deux, occupés à se saouler en chantant des chansons paillardes. Bien que possédant des épées, dans leur état, ils furent des cibles faciles. Les compagnons de Nirina leur brisèrent le cou avant qu'ils n'aient pu émettre un seul son d'alerte. Nirina prit l'une des deux épées, et lança l'autre à Jenos. Ils attendirent que tout le monde les ait rejoint hors du Puits, puis Nirina leur fit signe.

- Maintenant, suivez-moi en silence. Inutile de traverser toute la cité. Il y a des passages souterrains qui montent jusqu'au palais.

Nirina ne les avait encore jamais empruntés, mais connaissait leur existence, comme tous les rois et les reines qui s'étaient succédés. Ce genre de tunnels secrets étaient toujours utiles pour filer discrètement si le palais était assiégé et faisait l'objet d'un Coup d'Etat, comme il y en a eu des dizaines dans toute l'histoire du royaume. Si elle se souvenait bien, celui pour rentrer directement dans le palais se trouvait dans une auberge du quartier médian de la cité. Ça tombait bien, car avec le peu de gardes qui restaient, plus personne ne protégeait le quartier médian, seulement les hauts quartiers près du palais.

Nirina et sa troupe pénétrèrent dans la cité, n'accordant pas un regard aux quelques passants qui se trouvaient encore dans les rues à cette heure ci. Comme la plupart d'entre eux étaient des mendiants, des catins ou des détrousseurs, la réciproque fut vraie. Les rares personnes respectables qu'ils croisèrent se dépêchèrent de filer chez eux à la vue de cette troupe pittoresque. Aucun ne semblait avoir reconnu leur ancienne reine. Nirina ne pouvait pas leur en vouloir. Elle devait faire peur à voir après avoir passé près de deux semaines dans ce trou infect. L'auberge, le Haut Vol, était quasiment vide, mais le patron et les quelques clients présents tombèrent des nues en voyant Nirina et sa petite armée de sauvages rentrer. Nirina s'empressa de les rassurer.

- Nous ne voulons de problèmes. Et vous, est-ce que vous en voulez ?

L'aubergiste cligna des yeux, et fit signe à tous les autres de filer, ce qu'ils s'empressèrent de faire. Une fois que les clients furent partis, l'aubergiste alla fermer la porte.

- Pas le moins du monde, Votre Majesté, fit-il enfin.

- Ah, enfin quelqu'un qui m'a reconnu ?

- Ma famille sert la votre depuis des générations. Je suis le gardien du passage menant au palais. C'est pour ça que vous êtes là ?

- En effet. Ça ne vous pose pas de problème que nous l'empruntons ?

- Pourquoi cela m'en poserait ? Mon devoir envers les Haldar est de permettre à chacun d'entre eux qui le demandent de le traverser.

- Eh bien, j'ai été déchue de mon trône, et le nouveau roi pourrait vous faire arrêter pour m'avoir aidée.

- Comme j'ai dit, qu'importe le Haldar qui emprunte le tunnel, je me dois de le garder ouvert pour chacun d'entre eux. Le reste ne regarde que vous, Majesté.

Il descendit un escalier vers le sous-sol et leur fit signe de le suivre. Après avoir déplacé quelques tonneaux de bières, il déverrouilla une trappe bien dissimulée.

- Vous savez où donne ce chemin ? Demanda-t-il à Nirina.

- Si je me souviens bien, dans le quartier des domestiques, non ?

- C'est exact. J'espère que vous n'avez pas d'intentions belliqueuses à leur égard, Votre Majesté. Ma fille travaille au palais comme femme de chambre.

- Je n'ai pas escaladé un puits de deux cents mètres de haut pour aller tuer des domestiques. Je vais juste reprendre mon palais. Les seuls qui pourront pâtir de ma colère seront ceux qui se mettront au travers de ma route.

L'aubergiste hocha la tête, alluma quelques torches et les leur tendit. Puis il les salua avant de se retirer. Nirina descendit la première. Le passage était constamment en petite pente vers le haut, mais toujours droit. Ils mirent à peu près vingt-minutes à atteindre le bout. Après avoir monté une nouvelle trappe, ils émergèrent derrière une tapisserie du quartier des domestiques, en effrayant les quelques femmes qui s'y trouvaient, certaines en train de dormir. Leurs cris allaient donner l'alerte, mais Nirina fit signe à ses hommes de les laisser.

- Peu importe que les gardes de Deornas sachent que nous sommes là. Ils ne seront jamais assez nombreux pour nous arrêtés. Dépêchons-nous. À l'armurerie !

Ils croisèrent une dizaine de gardes entre eux et l'armurerie. Bien qu'en armure et avec épées, les gardes furent vite submergés par la masse de cette cohorte enragée, et quand tous eurent pris épées et haches, Nirina ne doutait plus que le palais lui appartenait déjà.

- Jenos, je vous confie la suite. Dispersez les hommes partout dans le palais, à toutes les entrées et les sorties. Puis allez chercher mon fils. Je compte sur vous.

- Bien Majesté. Et vous ?

- Je vais aller demander sa reddition à mon cher cousin.

Elle aurait dû aller elle-même chercher Alroy qui allait être effrayé par tous ces inconnus, mais elle ne pouvait résister à l'envie d'aller surprendre Deornas dans ses propres appartements. Mais elle ne le trouva pas dans les quartiers royaux. Bien sûr, Deornas était quelqu'un de si attaché à l'honneur... Il n'aurait jamais pris pour son compte les appartements du roi alors qu'il n'était que régent. Elle le trouva dans ses anciens quartiers, un de ceux réservés aux nobles du palais. Malgré l'agitation et les cris de dehors, Deornas était profondément endormi dans son lit. Nirina sourit et alla discrètement lui mettre le bout de son épée contre sa gorge. Il se réveilla en sursaut et dut cligner cinq fois des yeux pour se convaincre qu'il ne s'agissait pas d'un rêve.

- N-Nirina ?!

- Bonsoir, cousin. Désolée de te tirer du lit si tard, mais je voulais juste t'informer que je te reprends la garde du palais.

- Que... Mais... Comment as-tu...

- Je t'ai dit que quand je déciderai de sortir, je n'aurai pas besoin de ton autorisation, tu te souviens ? Maintenant lève-toi. Vas dire à tes quelques gardes de rendre les armes avant que mes amis ne les massacrent tous.

L'air maussade, Deornas se tira du lit. Il s'habilla rapidement sous la menace de l'épée de Nirina, puis suivi sa cousine jusqu'au hall royal, où il ordonna à ses gardes de poser les armes. Enfin, à ceux qui restaient. Les prisonniers du Puits n'y étaient pas allés de mains mortes. Jenos revint avec à sa suite Alroy, en chemise de nuit, qui se précipita dans les bras de sa mère.

- Maman !

Nirina le serra contre elle, se sentant tout de suite revigorée. Elle n'avait jamais trop accordé d'attention à son enfant, fruit d'une union charnelle précoce et secrète. Il avait été un embarras constant. Pourtant, c'était elle qui avait décidé de le garder. Padreis lui avait conseillé de s'en débarrasser avant qu'il ne vienne au monde. Ryates avait des potions pour cela. Ce ne serait pas acceptable qu'une princesse d'à peine sortie de l'adolescence ait un bâtard si jeune alors qu'elle n'était même pas montée sur le trône, disait-il. Mais Nirina n'avait pas cédé, et elle avait gardé Alroy.

Pourquoi ? Elle ne le savait pas vraiment, à l'époque. Elle s'était dit que c'était sa nature jalouse de toujours garder ce qui lui appartenait. Peut-être aussi voulait-elle, par le biais de ce bébé, montrer à sa mère qu'elle était adulte maintenant. Peut-être voulait-elle l'embarrasser en lui donnant un petit-fils bâtard, elle qui était tant attachée au protocole et au sang royal. Bref, si elle avait choisi de garder son enfant, ce n'était que pour des raisons purement égoïstes. Elle ne pensait alors qu'à ce que cet enfant lui apporterait. Aujourd'hui, c'était différent. Elle pensait à ce que elle pourrait lui apporter. Une vie normale, loin de ce monde infect et arriéré, et ce malgré son nom mille fois maudit de Haldar.

- Contente de te voir, mon trésor. Tu as bonne mine...

- Tu es revenue ! Comme cousin Deornas l'a dit !

- Oh, alors il a vraiment transmit mon message ?

Deornas haussa les épaules.

- Je l'ai fait, mais je lui ai dit de ne pas trop y croire. Apparement, j'ai sous-estimé ta capacité à tenir tes promesses.

- Je fais rarement de promesses, mais je les tiens toujours. Deornas, tu vas dire à tout le monde que tu me remets le contrôle du royaume.

Deornas s'exécuta devant les personnes réunis, nobles, gardes et domestiques, mais une fois terminé, il se tourna vers Nirina.

- Ce que tu fais est inutile. Tu ne pourras pas garder le royaume quand le roi et son armée rentreront de l'Ancien Monde.

- Tu as raison, acquiesça Nirina. Mais je ne vais pas attendre Castel ici. Je vais aller à sa rencontre. Deornas, mon cher, je pars pour l'Ancien Monde, et tu vas venir avec moi, en tant qu'otage, et afin que tu ouvres les yeux sur ton roi adoré.

- C'est absurde. Le roi a pris les quatre anneaux en partant. Nous n'avons aucun moyen de nous y rendre !

- Si, nous en avons un. Mais d'abord, deux choses. Où sont les épées Sifulis et Peine ? Je les veux ?

Surpris, Deornas répondit néanmoins.

- Sifulis est dans mes quartiers. Le roi m'a autorisé à la garder. Quant à Peine... elle est toujours avec la météorite.

- Apporte-les-moi. Mais avant, dis-moi ce que vous avez fait de Surervos.

Surervos était un des Hauts Protecteurs de Nirina, ces quatre dresseurs d'élite qui ne répondaient que devant elle. Le père de Deornas, Astarias, avait été l'un d'eux, mais il l'avait trahi pour se ranger du coté d'Adam. Le Premier Ministre de Bakan, Marius Tibaltin, avait été tué, et Venisi, la Veuve Grise, s'était trouvée être une créature de Castel depuis le début. Il ne restait plus que Surervos pour la servir. C'était un jeune homme un peu déjanté qui venait de l'Ancien Monde. Nirina l'avait rangé à sa cause en lui promettant de s'amuser dans Cinhol, en lui donnant pouvoir et importance, ce qu'il n'avait jamais eu dans le monde réel.

- Surervos ? Répéta Deornas. Euh... il est dans les cellules du palais. Le roi n'avait pas encore tranché sur son sort.

- Bon. Va me trouver les épées, et rejoins-moi là-bas. Alroy, viens avec moi.

Tout contant de retrouver sa mère et de pouvoir la suivre, l'enfant se mit à sautiller en marchant. Comme prévu, Nirina retrouva Surervos dans la prison du palais, en train de broyer du noir. Il s'anima quand il vit Nirina devant lui.

- Yoooooo, mais c'est la patronne quoi ! Spicy ! J'pensais qu'ces bolosses t'avaient cloitré dans leur puits d'mes couilles, quoi !

- Ils l'ont fait, mais je n'aimais pas trop le coin, donc je suis remontée.

- Déliiiiiiire quoi ! Tu viens m'tirer là, patronne quoi ? Marre d'ici. J'veux rentrer dans l'monde réel quoi ! Ça va faire deux semaines que ne j'ai pas pu jouer à League of Legend sur mon ordi quoi ! La loooooooose !

- Oui, on va rentrer. Mais on va devoir voyager un peu avant. Je n'ai plus d'anneaux de transfert. Le sagouin qui m'a volé le trône me les a pris aussi.

- Spiiiiiicy ! Comment ce n'est pas cool quoi !

Nirina sortit Surervos de sa cellule, et demanda qu'on lui rende sa Pokeball. Le Pokemon de Surervos, Kaïdastros, leur serait bien utile, car Nirina n'avait plus les siens. Deornas revint avec les épées. Quand Nirina prit Peine en main, elle ne ressentit plus rien de la sombre puissance qui s'en échappait auparavant, signe qu'Uriel avait bel et bien disparu.

- Pourquoi en as-tu besoin ? Voulu savoir Deornas.

- Je dois rendre une des deux à l'héritier d'Uriel, qui se trouve dans l'Ancien Monde.

- Encore avec ces stupidités... Même si c'était vrai, je t'ai dit qu'on n'avait aucun moyen de se rendre dans l'Ancien Monde !

- Et moi je t'ai dit que si. Tu as toujours été bon en histoire, Deornas. Peux-tu me dire comment mon grand-père, Festil le Conquérant, a fait pour rattacher la Tribu des Chevaux au royaume, il y a à peu près vingt ans ?

Surpris par la question, Deornas cligna des yeux.

- Ben... Le roi Festil a fait la paix avec Lyaderix, le chef de la Tribu, en passant un marché. En échange de la soumission de la Tribu au royaume, il a donné la main de son fils Rushon à sa fille Hasteria, pour que le futur héritier de Cinhol ait du sang de la Tribu, comme Lyaderix le voulait. Tu devrais le savoir non, vu que cet héritier en question, c'est toi.

- Oui. Mais ce n'est pas tout à fait complet. Festil a donné autre chose à mon grand-père Lyaderix. Plus précisément, c'est Ryates, qui a arrangé les négociations, qui a fait ce don. C'était un anneau de transfert. Quand Ryates est arrivé ici, il en avait cinq en sa possession. Lyaderix en possède un, bien que je doute qu'il ne s'en soit jamais servi...

- Alors on va aller dans la Tribu des Chevaux ? C'est une très mauvaise idée. Malgré la paix entre nous, ils détestent toujours autant Cinhol et encore plus les Haldar !

- Lyaderix est mon grand-père. J'ai beau être une Haldar, je suis quand même de son sang, et Alroy aussi. Il ne nous fera pas de mal.

- Tu crois ? Même en sachant que tu as fait assassiner sa fille, ta propre mère ?

Nirina haussa les épaules.

- Grand-père se fichait de ma mère. Il l'a donné comme poule reproductrice à Cinhol afin d'avoir ce qu'il désirait tant : un Haldar avec du sang de la Tribu.

Toutefois, Nirina partageait quelque crainte avec Deornas. C'était vrai que quand on s'appelait Haldar, la Tribu des Chevaux était loin d'être un refuge idéal. De plus, Nirina connaissait son grand-père. Il était roublard, calculateur, et n'hésiterai pas à la tuer s'il y trouvait un quelconque avantage. Nirina espérait juste qu'il n'en trouverait aucun.

- On fait comme j'ai dit, conclut Nirina. Surervos viendra avec nous avec son Pokemon, pour plus de sécurité. Toi, Deornas, tu viens pour porter les provisions.

- Y'a toujours mon auto-speeder dans le palais, spicy, fit Surervos. Ça ira plus vite qu'à pieds, quoi !

- Bonne idée, approuva Nirina.

- Oui ! Chantonna Alroy. L'auto-speeder de Surervos ! Je veux conduire, je veux conduire !

- Attends voir, s'inquiéta Deornas. Tu ne comptes pas amener Alroy dans cette quête folle ?!

- Bien sûr que si, il vient, riposta Nirina.

- Bien sûr que si, je viens, répéta Alroy d'un même ton.

- C'est de la folie ! Un enfant de quatre ans, à travers tout le royaume, vers la Tribu des Chevaux...

- Lui et moi, on rentre dans l'Ancien Monde, coupa Nirina. J'en ai assez soupé de Cinhol.