Firework - Katy PerryEtonnamment, les autres membres de la Confrérie ne cillèrent même pas à l'annonce du retour de Sven. Certes, Chloé ne cacha pas sa rancoeur à son égard, à l'instar de Marion, mais toujours est-il qu'elles ne se plaignirent pas. Visiblement, tout le monde avait compris que l'heure n'était plus aux protestations.
Le jeune homme avait réquisitionné une bonne partie du terrain d'entraînement afin d'y installer une forge de fortune où il fabriquait des couteaux de jet, des grenades et autres shurikens pour organiser leurs armements. Cassy se demandait s'il connaissait cela du temps où il oeuvrait pour la Team Galaxie ou si Artémis le lui avait enseigné.
Les entraînements se poursuivaient. La dresseuse n'était pas mécontente que Sandra l'ait reprise en main : aussi exigeante que Lilith, mais nettement moins dangereuse, elle lui apprenait à ne plus s'écarter du droit chemin comme elle l'avait en obligeant ses pokémon à se battre jusqu'à épuisement.
Esméralda passait plus d'une heure, chaque jour, à tenter de localiser Léa par diverses méthodes, y compris les rituels de contact, sans obtenir le moindre résultat tangible à la clé. Elle aurait tout aussi bien pu disparaître de la surface de la Terre que les choses ne seraient pas différentes pour autant.
De temps en temps, Cassy contactait Cynthia, qui continuait en vain ses recherches sur la mystérieuse boîte de Pandore. Elle s'était réjouie en apprenant que, suite à une dispute, elle avait choisi de se séparer de l'épouse de Giratina, cependant la jeune femme avait affirmé qu'elle ne tenait pas à s'étendre sur le sujet.
De temps en temps, les autres assistaient Sven à la forge. Le plus souvent, il s'agissait d'Hitaki, étant donné qu'il ne possédait aucun grief personnel contre lui -bien que Marion ait mis à maintes reprises les nouveaux en garde au sujet de son comportement pour le moins particulier.
Un matin, le tueur à gage vint chercher la porteuse du glyphe dragon dans la salle de sport, où elle s'exerçait en compagnie de Tina. L'adolescente s'éreintait à courir sur un tapis roulant tandis qu'elle-même frappait sans relâche un punching-ball, nettement moins risqué pour le foetus qu'un adversaire humain.
- Qu'est-ce que tu veux ? demanda-t-elle en attrapant in extremis la bouteille d'eau qu'il lui lançait pour qu'elle se désaltère.
Elle but une gorgée, ramassa sa serviette qui gisait sur le banc de musculation et essuya sa nuque moite de sueur avant de se tourner vers lui. Avec le sourire qu'il arborait habituellement lorsqu'il faisait quelque chose de sadique, il l'invita à la suivre.
- Allons bon... souffla-t-elle au moment de lui emboîter le pas. Qui as-tu essayé de tuer, cette fois ?
Un feu incandescent brûlait dans un angle de l'Arène, d'où s'échappait une fumée brunâtre. Des tables l'entouraient, disparaissant pour la plupart sous des fragments de métal ou des armes inachevés.
- J'ai un cadeau pour toi.
Sven attrapa un écrin élégant posé à quelques centimètres de lui, à côté du marteau qu'il utilisait pour modeler le fer, et le lui tendit. Cassy hésita quelques secondes à s'en emparer : avec lui, elle pouvait s'attendre à tout.
- Du vitriole ne va pas t'exploser à la figure si tu l'ouvres, la rassura-t-il en devinant ses pensées.
Loin d'être convaincue, elle prit tout de même le petit coffret et tira son minuscule loquet. D'un doigt, elle fit basculer le couvercle vers l'arrière, pour dévoiler un intérieur tapissé de velours rouge. Le contenu était autrement plus intéressant : une série de six couteaux de jet, tous finement gravés au bas du manche par la lettre "C" calligraphiée avec soin, s'alignait à côté de deux grenades de vitrioles, de trois shurikens et d'un poignard au manche si noir qu'il paraissait taillé dans du charbon.
- Ma propre panoplie de tueuse, comme c'est gentil de ta part.
Malgré la pointe d'ironie qu'elle tenta de glisser dans sa voix, elle ne put s'empêcher de sourire. Ces armes étaient réellement splendides et, lorsqu'elle s'empara de l'une des lames, elle constata qu'elle avait une taille parfaite pour sa main, au contraire de celles qu'elle empruntait d'ordinaire au jeune homme, beaucoup plus longues.
- Merci, finit-elle par admettre, bien que cela lui en coûte un peu.
- Tu n'espérais pas affronter Eric les mains vides, quand même ? Et il y en a d'autres. La petite rouquine...
- Tina.
- Peu importe. Elle avait l'air de bien s'en sortir avec la sarbacane, alors je lui en ai fabriqué une nouvelle.
Du revers de la main, il désigna un long tube en acier, sur lequel était posé une petite bourse en cuir contenant probablement des fléchettes imbibées de poison. Rapidement, il fit un inventaire des armes déjà achevées.
Hitaki, en suivant ses conseils, était parvenu à se forger lui-même une paire de nunchakus, presque identiques à ceux que Scathach utilisait parfois. Diverses dagues s'étendaient sous ses yeux, ainsi que des bombes fumigènes.
- Tu crois vraiment que cela suffira ? demanda Cassy en levant vers lui un regard sincère.
- L'important, ce n'est pas l'équipement...
D'une voix pareille à un murmure, il se plaça dans son dos, une main sur ses hanches, sa bouche au creux de son oreille. Il effleura sa joue du bout des lèvres, avant de prendre dans l'écrin qu'elle tenait toujours ouvert un shuriken. Celui-ci émit un sifflement lorsqu'il le lança, pour aller sectionner le pied de la table le plus éloigné.
Alors qu'une bonne partie de ce qu'elle supportait s'écroulait sur le sol, la dresseuse ne put s'empêcher de lui jeter un regard impressionné. Il alla ramasser l'arme, avant de terminer :
- ... Ce qui compte, c'est la dextérité.
Il replaça l'étoile tranchante dans le coffret, puis le referma doucement entre les mains de Cassy qui n'avait pas bougé, abasourdie par une telle maîtrise.
- Nous sommes loin d'avoir ton niveau.
- Cela se travaille.
- Tu te perfectionne depuis ton enfance, or ce n'est pas notre cas. Personne ne saura manier de telles armes aussi bien que toi.
- Tant qu'ils ne s'empalent pas eux-mêmes dessus, ce sera déjà un bon début, tu ne crois pas ? se contenta-t-il de répondre en haussant les épaules. Tiens, puisque tu es là, tu vas pouvoir en profiter pour m'aider à aiguiser toutes ces lames.
Il lui désigna un petit tas pierres rugueuses d'un signe de tête. Elle s'en empara aussitôt d'une sans protester et ils se mirent à l'ouvrage. Ils formaient une bonne équipe, qu'elle le veuille ou non, et Sven était indispensable à la Confrérie : il possédait ce grain de perversion naturelle qui manquait aux autres, de même que la force d'Emily.
La jeune femme avait cependant eu l'occasion de voir ses pokémon à l'oeuvre. Quoique bien entraîné, leur puissance ne transcendait pas vraiment l'image que l'on pouvait se faire d'eux. Personne, pas même elle et ses dragons, n'avait une équipe adéquate pour affronter celle de la shasseuse, en particulier son redoutable Arcanin.
- Cassy !
Ce cri l'obligea à lever la tête de son travail pour faire face à Sylvain qui se précipitait dans sa direction au pas de course. En même temps, il venait d'attirer les regards d'Angus, d'Esméralda et de Yohanna qui s'exerçaient dans l'Arène, sans pour autant leur accorder la moindre attention.
- Qu'est-ce qu'il y a ?
- Il faut que je te parle, c'est important. Tu veux bien venir avec moi ?
Elle interrogea Sven d'un simple coup d'oeil, qui ne laissa rien transparaître sur son visage, ni qu'il voulait la voir rester, ni qu'elle pouvait partir. Elle reposa donc le poignard qu'elle tenait à la main, de même que la pierre à aiguiser, et sauta au bas de la table sur laquelle elle était assise.
Elle suivit son cousin qui la conduisit dans les couloirs du bâtiment réservé aux invités de la Ligue, autrement dit là où ils logeaient à l'heure actuelle, tout en lui donnant quelques explications :
- En fait, c'est Bridget qui a trouvé quelque chose d'intéressant. Tu ne vas pas le croire mais, malgré ce que les apparences laissent paraître, elle s'y connait parfaitement en informatique.
Cassy ne put s'empêcher d'esquisser un sourire. Il n'avait pas échappé à sa sagacité que le Topdresseur passait de plus en plus de temps en compagnie de l'étudiante, avec laquelle il semblait être devenue particulièrement proche. Elle se félicitait de cette relation naissante entre eux, quoiqu'encore platonique, car cela la soulageait de savoir que Sylvain commençait enfin à se détourner de ses sentiments pour elle.
- Voilà, c'est ici.
Il ouvrit une porte qu'il l'invita par politesse à franchir la première. Bridget se trouvait déjà à l'intérieur de la salle, une petite bibliothèque aux étagères bien fournies, au fond de laquelle se situaient deux ordinateurs. Elle était installé devant l'un d'eux.
- Ah, vous voilà. Tu lui as expliqué ? demanda-t-elle en se tournant dans leur direction dès qu'elle les entendit.
- Non, je me suis dit qu'il valait mieux que tu lui montres.
D'un signe de tête, il enjoignit sa cousine à avancer jusqu'à l'écran. La porteuse du glyphe normale pianota sur quelques touches de son clavier et une page s'ouvrit aussitôt, rempli de divers dossiers. Tous commençaient par la lettre G.
- J'ai réussi à me connecter sur le réseau de la Team Galaxie et pirater à distance son contenu. L'ennui, c'est qu'ils sont tous cryptés, et il faut un mot de passe pour les déverrouiller.
- Nous avons essayé "Galaksija", précisa Sylvain, mais cela n'a pas fonctionné. Ni en slovaque, ni dans toutes les autres langues.
- Je dois être en mesure de contourner le barrage, précisa Bridget en ouvrant déjà deux nouveaux onglets, cependant pour le cryptage, il va me falloir un code.
Elle attrapa une feuille dans l'imprimante où une série de caractères inconnus étaient inscrits à l'encre noire. Cassy les étudia un instant : ils n'avaient rien à voir avec les pictogrammes du dossier Gijinkas qu'Emilien avait déchiffré par le passé.
- C'est l'un des seuls documents qui n'était pas verrouillé.
- Je vois, même les symboles, Eric les a modifiés. Concentre-toi sur le mot de passe, essaye de le casser. Pendant ce temps, nous allons nous efforcer de traduire ce nouveau code. Décidément, mon frère ne se lasse pas de ses petites démonstrations d'intelligence. En tout cas merci, Bridget. Tu as vraiment fait un travail formidable.
Les joues de l'intéressée s'embrasèrent et son regard se mit à pétiller. Il en était ainsi à chaque fois qu'elle recevait un compliment. La dresseuse fut heureuse d'avoir une occasion de la féliciter, car cela lui permettait de prendre davantage confiance en elle. A cette allure, elle serait bientôt prête à recevoir à son tour ses gants de combat.