Le Sauveur du Millénaire de Malak

L'expérience de ma longue vie m'a enseigné la patience et le pardon. Il y a bien des gens auxquels je dois pardonner. Car si l'on ne pardonne pas aux autres, on ne se pardonnera jamais à soi-même. Et des choses à me faire pardonner, j'en ai beaucoup. Combien d'erreurs un homme peut-il commettre en six cents ans ?



*****



La nuit tombait enfin sur Ampuhosg, comme pour apporter un peu de répit à cette ville après toute une journée sanglante. Car du sang, il y en avait eu. Castel et ses troupes se montraient de moins en moins regardants sur les pertes civiles, malgré la promesse du roi à Leaf et à Stormy Sky de tout faire pour épargner les innocents. Mais pourquoi s'en soucierait-il alors que son vœu le plus cher était de mettre le monde réel à feu et à sang ? Leaf se sentait bien seule. Elle ne savait plus vers qui se tourner. Anis était partie, Isgon et Astarias étaient acquis à Castel, et Leaf n'osait même plus trop parler avec son amie Syal, ne connaissant pas le degré de loyauté de Stormy Sky envers le trône de Cinhol. Elle était seule à jouer les espionnes dans une armée d'ennemis.

Mais tant pis. Elle n'avait jamais renoncé pour si peu. Elle avait toujours travaillé plus ou moins seule tout au long de sa vie. D'abord pour la Néo Team Rocket, en tant qu'Enfant Masqué, puis pour elle-même, en tant que voleuse et escroc. Ce n'est qu'après avoir rencontré des gens comme Red, Régis et le professeur Chen qu'elle s'était mise à compter sur les autres aussi. Et justement, elle avait des amis en dehors de Bakan. Peut-être était-il temps d'en appeler un à la rescousse ?

C'était pour cela qu'elle était sortie, ce soir. Elle avait pris soin d'éviter les gardes de Cinhol, car Castel avait décrété un couvre-feu le soir pour tous les civils. Techniquement, même si elle semblait faire partie des troupes à Castel, Leaf était une civile. Puis comme ce qu'elle s'apprêtait à faire était un acte de trahison envers le roi, autant tâcher d'être discrète. Leaf ignorait ce que Castel pourrait faire d'elle si jamais il la soupçonnait de traîtrise, mais ça ne serait guère réjouissant.

Tandis qu'elle esquivait habilement une patrouille de soldats au travers des habitations en ruine, Leaf entendit son ventre gargouiller bruyamment. Elle lui tapa dessus comme pour lui ordonner de se taire. Elle n'avait pas mangé ce soir. Elle avait passé tout son temps jusque là à soigner les blessés de la bataille avec son Grodoudou et son Melodelfe. Stormy Sky prenait en charge les soins dans leurs vaisseaux, mais il n'y avait pas assez de place pour tout le monde. Et bien sûr, il semblait que personne dans l'armée de Cinhol ne soit médecin. Ou alors ils s'en fichaient royalement. Mourir pour leur roi était une source de fierté, pas quelque chose à éviter. Donc Leaf aidait autant qu'elle pouvait. Bien sûr, ses Pokemon pouvaient soigner uniquement les petites blessures. Les cas les plus graves, c'était Stormy Sky qui s'en occupait.

Juste après avoir quitté ses patients, Leaf avait discrètement appelé son père pour lui faire son rapport quotidien. Le Sénat ne pourrait pas ignorer la prise d'une ville importante comme Ampuhosg. Il allait réagir, et Leaf ne tenait pas à se trouver là quand il appellera l'armée. En dehors de Stormy Sky et de Castel, l'armée de Cinhol n'aura rien à opposer aux chars et aux rafales de Bakan. Leaf se demandait vaguement quel était le plan de Castel. Il ne pouvait espérer renverser à lui tout seul l'armée de la République.

De son coté, son père lui avait dit que lui et son alliée la sénatrice Alston avaint commencé à réunir des sénateurs loyaux et sûrs pour se préparer au combat contre Castel plus vite que le Sénat - toujours très lent à la détente - ne le ferai. Leaf était leur source d'information principale, et à Anis aussi. Elle avait conseillé à son père de tenter de se rapprocher de l'historienne à l'Académie Velgos.

Mais récolter des informations ne suffisait plus. Leaf devait elle aussi se préparer. Elle pourrait surprendre l'armée de Castel de l'intérieur avec ses Pokemon, mais il lui fallait de l'aide. Une aide d'une autre région. Mais qui appeler ? Certainement pas le professeur Chen, qui était relativement proche du gouvernement de Kanto. C'était trop tôt. Le Sénat devrait faire une demande d'assistance officielle. Ou alors le père de Leaf s'en chargerait, mais une autre région ne pourrait pas intervenir si vite.

Red, Régis ou Sacha ? Ils étaient les garçons qui avaient commencé leur voyage initiatique à Bourg-Palette en même temps qu'elle. C'étaient de bons amis et de bons dresseurs, et elle leur faisait confiance, mais le problème était qu'ils étaient trop proches du professeur Chen, et donc risquaient d'impliquer tout Kanto.

Non, il fallait quelqu'un qui ne soit lié à personne d'autre qu'à lui-même. Un solitaire, comme Leaf l'avait été. Et justement, Leaf avait en tête la personne idéale. Un garçon qui avait partagé une grande partie de son destin. Quelqu'un qui comme elle avait été un Enfant Masqué de la Néo Team Rocket, quelqu'un qui avait ensuite sombré dans la délinquance comme elle, et qui, finalement, avait repris le chemin de la droiture. Son meilleur ami. La personne qu'elle considérait comme son petit frère.

Vérifiant que personne n'était aux alentours, elle sortit son Pokématos. C'était moins pratique qu'un simple portable pour contacter quelqu'un, mais Castel avait fait détruire tous les réseaux de communications quand il avait pris la ville, et justement le Pokématos ne fonctionnait pas sur les mêmes lignes. Quand son ami décrocha, son visage s'afficha sur le Pokématos de Leaf. C'était un jeune homme de dix-huit ans, aux yeux sombres et aux cheveux rouges. Son visage était d'ordinaire dur et antipathique, mais Leaf était l'une des rares personnes qui pouvait faire naître chez lui une ébauche de sourire.

- Leaf !

- Salut Silver, ça gaze chez toi ?

Le vrai nom de ce garçon était Kurt, mais comme il était en très mauvais terme avec ses parents, il avait conservé le nom de code qu'il avait dans la Néo Team Rocket, à savoir Silver. Leaf l'aimait bien, bien qu'il soit d'une nature assez sombre. Elle l'avait connu très jeune. Elle devait avoir huit ans et lui six. Ils avaient travaillé des années ensemble pour le cruel Masque de Glace, avant de s'enfuir tous les deux. De là, ils ont pris des routes différentes, mais toujours en gardant le contact. Leaf avait rencontré Red, Régis et Sacha à Kanto, tandis que lui s'était lié à deux dresseurs de Johto. Ils avaient fini par se retrouver pour affronter leur ancien geôlier, Masque de Glace, puis plus tard la cruelle Saki, une Agent Spéciale de la Team Rocket.

Silver était très lié à la Team Rocket, même s'il la détestait de tout son être. Son père était en effet nul autre que le Boss Giovanni en personne, et sa mère, Ariane, avait été une officier de l'organisation avant de revêtir l'habit des Enfants Masqués. Par son ascendance, Silver s'était toujours senti comme sali, et sa très mauvaise opinion de lui-même se reflétait dans sa façon d'interagir avec les autres.

- Je te la fais courte, poursuivit Leaf. J'aurai besoin de toi dans la région Bakan. Un fou furieux venu d'un monde parallèle avec toute son armée veut envahir et détruire notre monde. Il a avec lui dix mille chevaliers en arme, toute une flotte de Stormy Sky, une épée magique et un Pokemon légendaire qui peut se transformer en fourche contrôlant le feu. Tu marches avec moi ?

Silver ne prit pas de temps inutile à poser des questions qui l'étaient toute autant. Leaf avait besoin de lui, et il n'avait jamais rien refusé à Leaf, quelque soit l'adversaire.

- J'arrive dans deux jours.


***


Astarias Haldar, prince de Cinhol et anciennement Haut Protecteur du trône, revenait du camp de son bataillon. Il avait passé une bonne partie de la soirée à boire et à fêter avec eux la victoire sur cette ville. Astarias était un homme plutôt sobre ; faire la fête n'était pas vraiment son truc, pourtant, il s'y forçait. Il était commandant d'un bataillon, et personne ne comprenait mieux les soldats que lui. Les hommes avaient besoin d'un commandant qui était comme eux, proche d'eux, et alors, ils pouvaient lui faire confiance. Les guerriers risquaient leurs vies pour leur roi ; ils méritaient, une fois la bataille remportée, de pouvoir se détendre, vider quelques barils de bières auprès d'un bon feu, et rire avec leurs camarades. Quelque femmes en plus pour les distraire aurait été un bonus bien accueilli, mais Astarias avait veillé au grain. Le roi avait ordonné une guerre propre. Les civils devaient être bien traités. Si quelqu'un s'amusait à violer une habitante de l'Ancien Monde, il devra être exécuté.

C'était là les ordres de Sa Majesté Castel II, mais Astarias avait deviné qu'il avait ordonné cela dans le but de rassurer leurs alliés de la Stormy Sky. Le roi n'avait pas trop l'air de se soucier du peuple qu'ils allaient faire souffrir en envahissant la République. Chose étrange que cela, car Adam Haldar, le fils de son frère Rushon, lui avait paru être un jeune homme sensible et doux. Hors, le roi Castel II qu'il était devenu était l'archétype parfait du Haldar conquérant et sans pitié, comme le fut le roi Festil, le père d'Astarias et de Rushon, ainsi que de nombreux autre Haldar au cours de l'histoire.

Enfin, ce n'était pas à lui de juger son neveu. Il lui avait juré allégeance, et il tiendrait parole, d'autant que le roi gardait Nirina prisonnière. Si Astarias s'avisait de se parjurer et de trahir le roi, ce dernier n'aurait plus aucune raison de respecter sa propre promesse, à savoir épargner Nirina. Astarias avait juré à Rushon, son frère et son roi, de veiller sur sa fille, d'être son chevalier lige jusqu'à la mort.

Que de promesses... Astarias avait toujours suivi une vie rigide basée sur l'honneur. Il avait fait nombre de promesses, et tâchait de toutes les respecter. Ce n'était pas toujours facile. Mais il s'y tenait. Il était le second fils, celui qui serait toujours prince, mais jamais roi. Son frère Rushon était né pour régner, et lui pour servir. Il ne s'en plaignait pas, et était prêt à servir les enfants de Rushon comme il l'avait servi lui, et leur père avant lui. Selon lui, il était plus difficile de régner que de servir. Il n'avait jamais envié son frère promit au trône. Il n'avait jamais voulu être roi, ne serait-ce qu'une fois. Peut-être était-il tout simplement lâche ?

Il leva la tête aux cieux, contemplant la lune, pleine au trois quarts. Y'avait-il, en ce moment même, la même lune à Cinhol ? Que devenait son fils Deornas là-bas ? Le roi lui avait demandé de rester au pays pour gouverner en son absence, ce qui convenait parfaitement à Astarias. Deornas était un jeune homme sage et sérieux, doté d'un grand sens moral, et en cela il faisait la fierté de son père. Bien qu'il affirmait ne pas vouloir régner, il semblait être fait pour cela.

Et Nirina, comment allait-elle, enfermée dans ce puits infect avec tous les pires détritus du royaume ? Astarias ne pouvait s'empêcher d'en éprouver une certaine amertume à l'égard du roi. Il a bien été prouvé que Nirina, en tant que reine, agissait sous la férule et le contrôle de ce sorcier de Ryates, et sous l'influence de l'âme noire d'Uriel par le biais de l'épée Peine. Elle ne méritait pas ce qui lui arrivait. Elle méritait de venir vivre en paix dans l'Ancien Monde avec son fils Alroy, comme elle l'aurait sans doute voulu. Astarias avait juré de la protéger, en tant que chevalier lige, mais il était aussi son oncle, et en l'absence de son père, il en avait été un pour elle. Il aimait Nirina, malgré ses défauts évidents. C'était pour cela aujourd'hui qu'il partait à la guerre contre des gens qui ne lui avaient jamais rien fait. Pour tenir ses engagements envers Castel II et ainsi assurer l'avenir de Nirina. Son ami le duc Isgon faisait de même pour Alroy, son petit-fils.

Marchant sans but dans les rues de la ville, encore marquée par la bataille de cet après-midi, il entendit dans la nuit une voix. Une voix de femme. Astarias fronça les sourcils. Il n'y avait aucune femme dans l'armée de Cinhol, et les Stormy Sky ne quittaient pas leurs vaisseaux. Quant aux villageois effrayés, ils n'auraient jamais osé désobéir au couvre-feu du roi. Il ne restait donc qu'une seule possibilité : il s'agissait de dame Leaf, l'amie de l'Ancien Monde du roi.

Que faisait-elle donc la nuit dans les rues malgré le couvre-feu ? Et à qui pouvait-elle parler ? Astarias s'avança jusqu'au bruit de la voix, qui ne mit pas longtemps à s'arrêter. Elle l'avait sans doute entendu arriver. Mais, au détour du tournant, ce ne fut pas Leaf qu'Astarias vit devant lui, mais le roi en personne ! Castel II fronça les sourcils à son arrivée, d'un air mécontent. Astarias s'inclina.

- Je suis navré de vous déranger, mon roi ! J'avais entendu...

Oui, il était sûr d'avoir entendu Leaf. Et il ne devait y avoir à cela qu'une seule raison. Leaf parlait au roi, et comme elle n'était plus là, ce devait être une discussion plutôt intime, surtout à en juger par l'air furieux du roi. Il était connu de tous que le roi était plutôt proche de cette jeune femme de l'Ancien Monde. Et s'il pouvait trouver avec elle quelque réconforts d'avoir perdu Ylis, qui était-il, lui Astarias, pour l'espionner ?!

- Je suis désolé, reprit Astarias. Je vous laisse, Majesté.

Il s'éloigna en toute hâte. Quand il fut assez loin, il se passa quelque chose de bizarre avec Castel II. Son visage et ses habits semblèrent fondre sur eux-mêmes. Ils dégoulinèrent en une substance rose et élastique, révélant en dessous d'eux Leaf. Elle souffla et s'adossa contre le mur d'une maison.

- Juste à temps. Bien joué Métamorph.

La substance rose qui avait pris l'apparence de Castel II en recouvrant Leaf reprit sa forme habituelle en s'enroulant autour du bras de sa dresseuse. Leaf savait ce qu'Astarias devait se dire. Que Castel II était en train de filtrer avec elle, et qu'il ne voulait pas que ça se sache. Eh bien, qu'il continue donc à le penser. Loyal comme il était, Astarias ne dirait jamais rien à personne, et Leaf pourrait maintenir sa couverture.


***


Iridien et Clarisse avaient réussi à réunir deux autres sénateurs sur lesquels ils pensaient pouvoir compter. Glen Kearney était sénateur depuis peu, assez jeune, mais déjà reconnu pour son intégrité et son service du bien commun. Il était en outre un dresseur Pokemon, et Iridien avait appris du professeur Chen que les dresseurs étaient généralement plus honnêtes que la plupart des gens. Le second était Dusan Karsio, un sénateur plus expérimenté, qui maîtrisait la politique comme personne. Il faisait un peu office de vieux sage au Sénat, et avait beaucoup d'influence. Par le biais de ces deux là, Iridien et Clarisse espéraient pouvoir réunir beaucoup d'autres sénateurs dans leur petit comité secret.

Ils s'étaient réunis dans l'appartement sénatorial de Clarisse, à l'abri des regards indiscrets. Bien que rien n'interdisaient à des membres du Sénat de se rencontrer en dehors des séances, ils ne tenaient pas à ce que tout le monde ait vent de leur association. Du moins pas encore. Mais vu comment la situation évoluait d'heures en heures, ça ne saurait tarder. Le Sénat avait enfin rendu public l'invasion dont la région était victime. Ampuhosg, le centre régional de l'est, était tombé sous la coupe du roi de Cinhol, et donc ainsi toute une partie de la région. Le Sénat avait décidé à l'unanimité qu'il était temps de réagir, et comptait bientôt envoyer l'armée. Le problème était qu'il ne savait pas à qui il avait à faire...

- Des nouvelles de votre fille, ambassadeur Elson ? Demanda le sénateur Karsio.

- Elle m'a annoncé la prise d'Ampuhosg une heure avant que le Sénat ne le fasse. Selon elle, Castel ne semble pas vouloir aller plus loin dans son avancée pour le moment.

- Bien sûr, fit le sénateur Kearney. Il a assez titillé le Sénat comme ça, et doit attendre sa réaction.

- Le Sénat ne votera jamais pour l'envoi de la totalité de l'armée, déclara Clarisse Alston. Il voudra d'abord en savoir plus sur l'ennemi. On peut s'attendre à ce qu'il décide d'envoyer un groupe de reconnaissance, voir même une délégation pour négocier. Ce qui nous laisse du temps pour nous préparer. Maintenant que le Sénat l'a officiellement annoncé, je vais prévenir mon mari et requérir l'aide des Dignitaires de Kanto en cas de crise.

Le père de Leaf la regardait d'un air sceptique.

- Les Dignitaires répondront-ils à notre appel ? Je doute que la situation à Bakan ne les intéresse.

- C'est certain, sourit tristement Clarisse. Mon époux Balthazar ne lèvera pas le petit doigt, et va sûrement insister pour que je renvois notre fils Erend à Kanto. Mais si Kanto est au courant, alors nous pourrons peut-être compter sur l'aide d'autres personnes. Iridien, vous êtes ami avec le professeur Chen, non ? Et lui est ami avec votre général Peter Lance, le commandant de l'armée de Kanto ?

- C'est le cas, avoua Iridien. Mais Lance ne pourra pas intervenir sans l'aval des Dignitaires. Ceci dit, il pourra intervenir lui-même, en tant que G-Man et Maître Pokemon. Peut-être même le Conseil des 4 de Kanto au grand complet.

- Ce serait déjà ça, acquiesça Kearney. Et la Team Rocket ? J'ai cru comprendre que Kanto était un peu son quartier général.

Le sénateur Karsio parut indigné.

- Vous ne suggérez pas de demander de l'aide à ces criminels ?!

- Nous avons une délégation de la Team Rocket au Sénat, répondit Kearney. Si nous les reconnaissons comme entité politique, à l'inverse de Kanto, je ne vois rien de choquant à leur demander de l'aide. De plus, ils seront sans doute ravis d'avoir une raison pour combattre les Stormy Sky, non ?

- La Team Rocket n'est pas vraiment en guerre avec Stormy Sky, fit Iridien. Disons qu'ils sont plutôt... concurrents. Je ne sais pas si Giovanni serait prêt à entrer en conflit ouvert avec elle. De plus, qui pourrait-dire si la Team Rocket ne ferait pas, en l'occurrence, comme Stormy Sky en s'alliant avec Castel ? Il a sans doute bien plus à leur offrir que nous.

- Mais la Team Rocket pourrait nous être indispensable, insista Kearney. Ils ont des milliers de Pokemon, et c'est justement de Pokemon dont nous avons besoin contre les armées de Cinhol.

- En parlant de Pokemon, j'ai été contacté ce matin par Anis, l'amie de Leaf qui enseigne à la Haute Académie.

- Celle qui est membre du Conseil des 4 d'Unys ? Demanda Clarisse.

- Celle-là même. Leaf lui a apparemment conseillé d'entrer en contact avec moi. Elle est en train de recruter des dresseurs Pokemon à l'Académie, en prévision de la guerre. Et elle a trouvé pour cela un allié inattendu : votre fils Erend, Clarisse.

La sénatrice fit un geste d'impuissance.

- J'imagine qu'il aurait été impensable d'imaginer qu'il se tienne gentiment à l'écart maintenant qu'il sait tout...

- Il est descendant d'Uriel tout comme vous. Il doit penser que cela le concerne aussi tout autant.

- Donc on peut peut-être compter sur quelques jeunes dresseurs de l'Académie, résuma Karsio. Pensez-vous que cela sera suffisant ? Vous nous avez bien dit que Castel possédait un Pokemon légendaire aux pouvoirs infinis, en plus de cinq autres relativement puissants.

- Vous devriez plutôt poser cette question à ma fille, Dusan, renchérit Iridien. Moi, je suis tristement ignorant en ce qui concerne les Pokemon et les dresseurs. Il vaut mieux laisser cela à ceux qui s'y connaissent, comme Anis. Concentrons-nous nous sur le conflit purement militaire.

- Notre armée régionale est de taille à affronter la flotte des Stormy Sky, dit Kearney, si toutefois il n'y en a qu'une. L'Amiral Rashok et sa Quatrième flotte, oui, mais pas les six flottes de Stormy Sky à la fois, là, c'est clairement impossible.

- D'après ce que sait Leaf, Rashok a passé ce marché avec Castel de son propre chef, sans en informer les autres Amiraux de Stormy Sky, dit Iridien. Nous ne devrions pas craindre, pour l'instant, que le reste de Stormy Sky se pointe. Leur Grand Amiral préfèrera attendre de voir qui va l'emporter. Ainsi, si c'est nous, il pourra toujours prétendre que Rashok l'a trahi et que lui-même n'a jamais envisagé d'envahir notre région, et ainsi il pourra poursuivre nos relations.

- Oui, et si Rashok l'emporte, il viendra récolter le butin, ajouta sombrement Clarisse.

Karsio eut un sourire sans joie.

- Nous parlons du Grand Amiral Skadner. Sa tactique a toujours été d'essayer d'être gagnant dans toutes les situations. C'est un opportuniste né. Voilà pourquoi je doute qu'on l'ait dans les pattes, du moins maintenant.

- Très bien, conclut Kearney. Donc j'imagine qu'il ne nous reste plus qu'à attendre pour voir comment évoluent les choses ?

- En effet, approuva Clarisse. Attendons de voir ce que Castel compte faire et comment va réagir le Sénat. Plus nous gagnons de temps, plus nous pourrons élargir notre résistance souterraine. En espérant que nous n'en n'ayons jamais besoin...

- J'aime bien ce terme de résistance, sourit Kearney. On se croirait dans un film !

Iridien ricana.

- Je crois que vous êtes resté trop longtemps à vous ennuyer sur les bancs du Sénat, Glen.

- C'est certain. Je suis déjà désabusé de la vie, et pourtant je n'ai que trente deux ans. La politique nous fait tous vieillir prématurément. En ce sens, une invasion et un comité secret de résistance nous permettra tous de nous ressourcer un peu. Rendons grâce à Sa Majesté Castel pour cela !

Les autres rigolèrent de bon cœur.

- Nous devrions nous trouver un nom, proposa Karsio. Un nom uniquement connu de nous seuls.

- J'y ai pensé, fit Iridien. Pourquoi pas les Adeptes d'Uriel ? Après tout, Uriel était le grand ennemi de Castel, celui qui l'a empêché d'anéantir cette région. Son nom résonne encore aujourd'hui à travers la présence de Clarisse.

Cette dernière rougit.

- Ce n'est pas nécessaire...

- Je crois que si, intervint Kearney. C'est vous, Clarisse, qui êtes allée nous chercher, Dusan et moi. Vous êtes la chef de notre groupe, en plus d'être l'héritière d'Uriel. Pour la plus grande crainte de ce fou de Castel, nous serons donc les Adeptes d'Uriel !