Chapitre septième : Le chemin oublié
Aéroport d'Unionpolis
L'aéroport d'Unionpolis possédait cinq terminaux à partir desquels les appareils des diverses compagnies aériennes opérant à Sinnoh connectaient le reste du monde à la région. L'avion à destination d'Illumis était un aéronef de dimensions standards, volant aux couleurs de la société Flygon Jinn (NdlR : Pour ceux qui n'ont pas compris le jeu de mots, renseignez-vous du côté de Qui-Gon Jinn). Alizée et Phillipe se rendirent tout d'abord au guichet afin que ce dernier puisse acquérir un billet en classe affaires (payé au frais de l'entreprise employant la jeune femme), puis s'engagèrent dans la coursive menant à leur terminal. La tour de contrôle ne tarda pas à donner son feu vert au pilote qui aligna alors l'énorme monstre d'acier sur la piste. Le vol jusqu'à Illumis dura un peu plus que celui de l'équipe J², ce qui permit aux deux jeunes personnes de se connaître un peu plus.
Alizée, âgée d'à peine vingt-et-un ans, était douée dans le domaine des affaires. Elle avait terminé ses études d'économie et de management à l'âge de dix-neuf ans avant de se lancer seule dans une carrière commerciale. Ses débuts furent des plus difficiles, car bien qu'elle fût douée, elle n'avait pas encore les contacts nécessaires pour percer dans le milieu. Par un concours de circonstances des plus extraordinaires, un ancien professeur de l'université l'avait recommandée auprès d'une importante compagnie d'import-export et ce fut le début de son succès. Son tempérament dynamique, son charisme et son physique avantageux lui ont permis de gravir les échelons rapidement; de même que ses idées quelques fois originales, voire loufoques, mais efficaces ont pu montrer à plus d'un son potentiel hors du commun.
Il y a de cela un peu plus d'une année, elle rencontra un jeune homme, Maxime, avec qui elle se mit rapidement en ménage. Lui bossait dans le domaine de la sécurité. Il dirigeait une équipe spécialement entraînée dans les actions rapides, et qui pouvait intervenir à tout moment de la journée. Cependant, depuis quelques temps, Alizée pressentait qu'il lui cachait quelque chose et ne se satisfaisait plus des excuses de son compagnon au sujet de ses absences répétées. Quoiqu'il en soit, elle était contente de pouvoir parler à quelqu'un tel que Phillipe, qui, au premier abord pouvait paraître niais, au fond était une personne charmante et intéressante. Il l'écoutait et riait à ses blagues dont le niveau touchait plutôt le fond des mers qu'ils survolaient que les cieux dans lesquels ils se mouvaient. Grand, la peau claire et yeux châtains, cheveux courts et assez fort pour enfoncer une porte (jusqu'à maintenant, il n'a jamais tenté d'enfoncer une porte blindée), son côté maladroit et son air niais lui donnaient un certain charme; le cœur sur la main, toujours à rendre service, il était un sympathique compagnon.
Mais derrière ces airs, il était au service du gouvernement et se devait d'être astreint à un certain protocole en matière de rencontres : officiellement, il était inspecteur en second à la PI; cependant, il lui arrivait parfois d'être amené à collaborer sur une opération commune avec des agents de PISE. A l'inverse des autorités communes, les services secrets tentaient d'opérer dans le plus grand secret, afin que rien ne filtre: bien sûr, il était difficile, voire impossible, de pouvoir cacher à tout le monde leur existence, et rares étaient les personnes qui pouvaient délibérément en parler. De ce fait, le jeune homme ne dévoila à Alizée que son quotidien. Il fit passer sous silence sa véritable mission en prétextant qu'il apportait un dossier concernant une affaire en cours à la PI, en tâchant de bien faire passer ce mensonge.
La manière dont Phillipe fut recrutée par la PI est aussi intrigante qu'un Axoloto utilisant Dynamopoing. Intéressé par les films policiers et les romans de détective depuis sa plus tendre enfance, il avait grandi dans l'espoir d'un jour réaliser son rêve : devenir un Sherlock Holmes, un Maigret, bref un Kogoro Mouri. Lorsque Millie fit la une des journaux lors de l'arrestation des derniers criminels opérant sous le drapeau de la Team Flare, il avait décidé de se présenter au Bureau d'Enquêtes d'Illumis afin d'y être engagé en tant qu'assistant. Après une opération anodine à premier abord mais qui, au final, avait permis de mettre à bas un trafic illégal de Métamorph de grande ampleur, la Police Internationale s'est intéressée de près à Millie et son Bureau. Ils avaient vu en elle une enquêtrice zélée, douée, et décidèrent de l'intégrer dans leurs rangs. La jeune fille avait alors demandé à ce que son fidèle assistant soit également de la partie, car elle n'avait pu se décider à s'en séparer.
Le voyage devait durer au minimum six heures et les deux jeunes gens, étant fatiguée, s'endormirent rapidement et bruyamment, leurs ronflements rivalisant avec les turbo-réacteurs de l'appareil. L'avion se posa finalement à Illumis peu après une heure de l'après-midi, et les cent vingt-trois passagers du vol ILL23 purent respirer un air nouveau. Sitôt leurs bagages récupérés, Phillipe remercia chaleureusement Alizée pour son aide, qui, dans un pincement de lèvres, lui demanda s'il était possible de garder contact. Rougissant jusqu'à la pointe des cheveux, il lui remis sa carte de travail qu'elle glissa dans sa poche. Le jeune homme prit alors la direction de la sortie et héla le taxi le plus proche, le sommant de l'amener de toutes urgence au QG de la PI.
Le QG de la Police Internationale, contrairement à celui de PISE, était beaucoup plus moderne, et plus voyant. La PI n'était pas à proprement dit un organisme secret, et donc n'avait pas besoin de se cacher des regards indiscrets. Cependant, il n'en restait pas moins qu'on n'y entrait pas comme dans un moulin (NdlA : Je ne suis jamais rentré dans un moulin, donc je ne sais pas comment on y rentre) et Phillipe dut montrer patte blanche avant d'y pénétrer. Le bâtiment était un building tel qu'on peut en voir à Céladopole. Une parallélépipède d'une centaine de mètres de haut, tout fait d'acier, et de verre. On aurait dit une immense boîte magique. La lumière du soleil frappait en cadence sur les vitres teintées, et, se reflétant, illuminaient les rues voisines dans un bouquet de couleurs diverses (NdlR : Nous estimons que cela fait très MLP).
Phillipe déboucha alors dans le hall d'entrée, en se demandant par où il fallait aller, quand un homme en noir vint à sa rencontre et lui dit sur un ton formel :
— Monsieur, vous êtes attendus. Veuillez me suivre.
Un peu déboussolé par cette apparition, aucun mot ne sortit de sa bouche. Il emboîta néanmoins le pas à l'inconnu qui prenait déjà la direction de l'ascenseur. Insérant une clé dans une serrure, puis une autre, puis encore une, il les fit tourner. Alors apparut un scanner biométrique sur lequel le regard de l'homme en noir se posa. Il demanda poliment à l'autre occupant de bien vouloir poser sa main dessus. Les différents capteurs se mirent en action, scannant le réseau sanguin de Phillipe, et le comparant à la base de données centrale située dans les sous-sols du bâtiment jusqu'à émettre un bip sonore, suivi d'un clignotement d'une diode verte. L'ascenseur entama alors une descente rapide, pour s'arrêter finalement quinze étages plus bas. Jamais Phillipe n'avait imaginé que l'on avait creusé si profondément, mais cela ne l'étonnait guère car il savait que rares étaient les personnes à connaître dans les moindres détails l'architecture complexe du QG.
N'ayant cette fois-ci pas de portes à enfoncer (vu que l'ascenseur avait décidé d'ouvrir ses portes le plus rapidement possible), il émergea dans un couloir blanc au bout duquel il y avait une porte. Se demandant ce qu'il fallait faire, il se retourna dans l'espoir de questionner son guide, mais il avait déjà disparu dans l'ascenseur qui était déjà au rez-de-chaussée. Avançant prudemment, il ouvrit la porte avec une délicatesse qui ne lui était pas habituelle et faillit tomber à la renverse lorsque quelqu'un l'appela d'une voix forte :
— Phillipe ! Je vous attendais de pied ferme. Voudriez-vous avoir l'obligeance de me remettre le colis que vous êtes censé apporter de la part de M. ?
C'était Mathieu, le Directeur de la Section 3, la section consacrée à l'analyse des différentes preuves récoltées au cours d'une enquête et à la recherche de similitudes dans la base de données. Mathieu était un petit homme que Phillipe avait dû rencontrer une ou deux fois à la cafétéria, mais à qui il n'avait jamais adressé la parole. Un peu surpris de se trouver en face d'un directeur si important, qui arborait un look un peu touristique, il mit quelques secondes à se remettre, et au bout du compte, il tendit alors l'attaché-case qu'il gardait précieusement depuis qu'il était parti d'Unionpolis.
Mathieu lui adressa un sourire en compliment, et voyant l'air un peu décontenancé du jeune homme, l'invita à le rejoindre pour l'analyse du cristal. Les deux agents pénétrèrent alors dans une salle qui contenait toutes sortes de machines. Ordinateurs, scanners, centrifugeuses, il y avait de tout. Mathieu choisit un spectromètre de masse, ainsi qu'un microscope électronique afin d'observer la structure et la composition du cristal. Découpant au laser un petit fragment à peine visible, il le mit dans une petite machine qui avait pour but de préparer l'échantillon pour les analyses à venir. Après passage au spectromètre, et vérification de la structure au microscope, le directeur lança une recherche sur l'ensemble des données de la PI. Il leur fallu patienter une bonne dizaine de minutes avant qu'un résultat ne sorte. Si Mathieu et Phillipe avaient eu une attitude joyeuse, souriante depuis leur rencontre, les traits du premier se décomposèrent lorsqu'il lut le rapport, et ceux du second s'effacèrent lorsqu'il regarda par-dessus son épaule.
Le cristal n'était présent que dans une région éloignée, une région presque oubliée. Le cristal provenait d'Almia. Et le rapport possédait une note à l'attention des lecteurs qui les orientait vers un dossier confidentiel, un dossier concernant un certain Beladonis et une autre personne dont le nom était censuré.
Almia, en cette nuit orageuse
La pluie continuait de tomber. Almia était entièrement sous la flotte, frappée par des éclairs, battue par des vents violents. Dans le buisson l'homme se disait : « Mon Dieu, mon Dieu, il ne va jamais réussir.. Je n'aurais jamais dû le laisser aller... ». Il ne pouvait distinguer son coéquipier, mais il l'imaginait s'approcher de la Tour Loyau, et pénétrer dans ce qui pourrait devenir son tombeau.
Il n'avait pas tout à fait tort. Son coéquipier progressait vers son objectif à pas de loup, surveillant ses côtés et ses arrières. Mais il ne se dirigea pas vers l'entrée principale. Il savait qu'une porte dérobée existait et il avait décidé de l'emprunter. En effet, s'il tombait sur quelqu'un, il ne pouvait s'agir que d'eux. Sur quoi il tomberait, il n'avait pas d'idée. Arrivée aux abords du passage secret, il le chercha à tâtons, palpant chaque millimètre carré de la surface de la façade. Sa patience et sa détermination furent récompensées. Il décela un levier cacher, l'activa, dévoilant le Talon d'Achille de la super-structure. Aucun garde. Connaissant les plans du bâtiment de manière sommaire, il savait où il devait se rendre mais ne savait pas encore comment. Continuant sa progression, il prenait garde à chaque pas, de peur de tomber dans un piège. Mais c'était comme si la bâtisse voulait qu'il aille à son but, comme si elle lui indiquait le chemin à suivre. Il ne rencontra aucun croisement, aucun endroit où il aurait dû faire un choix. Le chemin était linéaire, et plus il avançait, plus il se rapprochait de son but. Au tournant d'un angle, il se trouva face à une immense porte, qui pouvait rappeler celle d'un temple. C'était sûrement derrière qu'il se cachait. Alors il poussa la porte et pénétra dans la salle à demi-éclairée.
— Ainsi, tu es venu, susurra une voix dans l'ombre.
— Tu vas regretter pour ce que tu as fait ! s'écria alors l'autre. J'ai juré que je ne te laisserai pas, que je te traquerai, jusqu'à ce que tu finisses derrière les barreaux, dans une cellule infestée de vermine pour y expier tes crimes.
— Que de grands mots pour de petits maux, s'esclaffa la voix. Tu crois que je n'ai pas vu ton petit manège ? Tu penses que j'étais assez stupide pour ne laisser personne à la garde de la porte ? Je t'ai tendu un piège et tu es tombé droit dedans. Tu n'as rien appris. J'ai toujours été le plus fort, rappelle-toi.
Sur ces mots, le lustre de cristal s'alluma, et inonda de sa lumière la pièce. Les deux individus se faisaient face, mais un avait le regard empli de haine, l'autre une expression d'intense plaisir.
— Non! c'est fini, tu ne feras plus de mal à quiconque. Ton plan avec Raynor a échoué. Les PKMN Rangers sont sur le point d'investir le bâtiment, et ils te trouveront. Tu n'arriveras pas toujours à t'écha– !
— Ha ha ! l'interrompit son ennemi d'une voix forte. Penses-tu seulement que je vais me laisser faire par des boys scouts ? Ou peut-être tu veux m'arrêter, toi ? Toi, le grand agent, le meilleur agent de la PI à ce qu'on dit.
— Les renforts sont en route et nous verrons bien qui de nous deux sera libre ! fulmina l'agent de la PI.
— Que des mots et jamais d'actions. Ah! la jeunesse. Oh, mais tu ne t'es jamais présenté. Comment t'appelles-tu ? répondit naïvement son adversaire.
— ...
— Ma chère défunte cousine disait toujours : « s'oublier c'est disparaître ! ». Ô rage, ô désespoir, quelle tristesse qu'elle ne soit plus de ce monde.
— Ne parle pas de — !
— L'heure court mon cher, il est temps pour moi de te quitter et d'aller manger.
Sur ces paroles, le criminel saisit une télécommande et pressa l'unique bouton. Une cage tomba alors du plafond et emprisonna le malheureux agent, sans qu'il ne puisse faire quoique ce soit. Il tenta de l'enlever mais les barreaux étaient électrifiés. Alors qu'il pensait qu'il ne pouvait pas être en pire posture, des dizaines de Voltorbe et d'Electrode apparurent, chacun dans un cage.
— Vois-tu, il me suffit de presser encore une fois sur ce bouton, et tous ces joyeux Pokémon vont faire une super Boum. Tu vas voir, tu vas bien t'éclater avec eux. Mais je vais être gentil, je vais te laisser un cadeau : ton identité. Au revoir, mon cher #####.
Et l'inconnu disparut dans le sol, empruntant une trappe dérobée, laissant là son prisonnier dont le rugissement et le hurlement de rage rivalisaient avec la tempête.
Illumis, en après-midi
Mélanie, JT et Jérémie sortirent d'un restaurant après s'être bien empiffrés des meilleurs plats de la région, et décidèrent de se rendre sur les lieux du crime afin d'éclaircir le plus rapidement possible l'enquête en cours. Leur point de rendez-vous étant situé assez proche, ils ne hâtèrent néanmoins pas trop le pas, regardant à travers les multiples vitrines des magasins qui parsemaient les rues d'Illumis. Derrière une vitrine étaient exposées quantité de peluches représentant des Pokémon et même de humains. Il y avait même des figurines des sept Sages d'Unys, ou de N. Un enfant demanda alors à sa mère :
— Dis maman, pourquoi tant de N ?
— Continue avec tes jeux de mots pourris et je frappe.
Arrivés au domicile du défunt Voltero Ampere, ils s'attelèrent à la tâche qui était la leur. Ils prirent connaissance des derniers éléments de l'enquête, et discutèrent longuement avec Millie quant au mobile du meurtre. Sans attaches familiales, ou sans connaissances directes, Ampere était un fantôme, si l'on pouvait dire. Au bout de la journée, il fut difficile de tirer un point positif sur les investigations menées car ils avaient beau à se creuser la tête, ils n'avaient rien trouvé de mieux. Le corps avait déjà été emmené afin que l'on pratique une autopsie plus approfondie que les déductions préliminaires faites sur place, mais on n'espérait pas grande chose de ce côté-ci. L'équipe J² décida d'éplucher toutes les recherches récentes d'Ampere, les amis (bien que très peu nombreux), bref toute sa vie de A à Z, et le travail qui s'annonçait n'était pas mince.
Pendant ce temps, à Safrania
Aleph avait réussi la première phase de son plan, c'est-à-dire éliminer le Dr. Ampere. Mais il leur fallait maintenant passer à la suite, et cela allait être plus ardu. La tâche confiée à « la Keckleon » était aussi simple en apparence que celle de Chang, mais elle nécessitait cette fois-ci une plus grande organisation. Il fallait kidnapper un savant qui opérait dans l'ex-projet Mewtwo. Le hic c'est qu'il était, premièrement, surveillé de près par les autorités, et les organisations criminelles concurrentes, et que deuxièmement, il était censé être mort : il s'agissait du Dr Fuji. L'ex-savant de la Sylphe Sarl, Voltero Ampere, avait travaillé pour Aleph dans le but de mettre cet enlèvement à exécution. Et la professionnelle avait maintenant les outils pour mener à bien sa mission.
Elle devrait en premier lieu éliminer l'agent de permanence qui avait comme devoir de surveiller et protéger Fuji. Venait après la question des autres criminels. Aleph avait lancé un message à toutes les agences criminelles, les menaçant de les dissoudre si jamais ils avisaient de les doubler. Car elle était puissante, elle pouvait faire disparaître presque n'importe qui, et peu des personnes osaient s'attaquer ouvertement à elle. Finalement, Fuji devait être amené, en vie, dans les quartiers scientifiques de l'Organisation et pourrait ainsi faire avancer le projet « Alpha & Oméga ».
La kidnappeuse choisit d'observer un temps le scientifique, afin de savoir quand agir et comment. Bien qu'elle ait déjà un dossier sur ses habitudes, elle voulait vérifier de ses propres yeux. Elle logea ainsi dans un petit appartement de Safrania, qui faisait face à la demeure du scientifique présumé mort, et entama son attente. Elle tenait dans ses mains une PokéBall normale, et jouait négligemment avec elle. Concernant l'agent de PISE chargé de la protection, elle avait déjà contacté un recrue prometteuse qui se ferait un plaisir d'y participer. Elle savait que Maxime serait dans son élément.
Sous-sol d'un bâtiment
Maxime faisait les cent pas. Il ne savait plus quoi faire. Il savait qu'Alizée le soupçonnait de quelque chose, mais il ne pouvait pas lui dire ce qu'il faisait. Non, c'était trop dangereux, tant pour lui que pour elle. Non, il ne pouvait pas dire qu'il était un assassin professionnel, ou plutôt celui qui monte l'opération de meurtre. Mais ce qu'il avait vu le hantait. Il ne pouvait pas non plus les laisser faire ceci, il ne pouvait pas.
Il y a de cela une vingtaine d'années, une fuite de gaz déclencha une explosion dans un quartier populaire de Charbourg. Parmi les victimes figurait un jeune couple qui venait d'avoir un enfant. Les parents succombèrent dans l'accident, mais par un miracle inexpliqué le nourrisson en réchappa. Élevé par son oncle paternel, il ne tarda pas à demander où étaient ses parents. Ainsi, il apprit à l'âge de six ans qu'ils étaient morts dans cette tragédie, tout comme trente autres personnes, parmi lesquelles figurait un ancien banquier célèbre. Il ne se laissa pas démonter, et mit du zèle dans son travail, voulant rendre ses parents, de là où ils étaient, fiers de lui. Brillant et séduisant, il n'avait rien à envier de la plupart des célébrités. Mais le malheur ne lâche pas quelqu'un quand il l'agrippe une fois. Après avoir obtenu son diplôme vers vingt ans, son oncle mourut dans un accident de la route, lors d'une nuit pluvieuse. Sa mort ébranla violemment le jeune homme, si bien qu'il tomba dans une profonde dépression. Son désir de réussir dans la vie s'effaça au moment où il apprit cette nouvelle; il laissa par la suite tout tomber, ses amis, s'enferma chez lui, ne sachant que faire. Un soir, alors qu'il ruminait des idées noires, deux hommes tout vêtus de noir lui rendirent visite. Ils se présentèrent comme des entrepreneurs cherchant des hommes de confiance. Ils lui proposèrent d'entrer à leur service en tant que modélisateur. On lui proposait un problème, il devait le résoudre. À court d'argent, et de but dans la vie, il accepta leur offre.
Au début, on lui proposait le problème sous forme d'histoire inventée. Par exemple, comment faire pour sortir d'une salle fermée sans laisser de trace. Cela étonnait le jeune homme qu'on lui pose ce genre de problèmes, et il fit part des ses questions à son directeur. Il voulait savoir ce à quoi son travail servait. Au début, on l'ignorait, ou on lui disait que c'était pour des clients voulant rester anonymes. Ce n'est que bien des opérations après qu'on lui révéla qu'il était devenu instigateur de meurtres. Les deux hommes qui l'avaient recruté étaient au service de la toute-puissante Aleph afin qu'il mette ses talents innés à leur disposition. Mais il était trop tard pour faire marche arrière, il ne pouvait pas. Aleph éliminait ceux qui leur cherchaient des puces. Et il le savait, car il devait orchestrer les opérations. Il connaissait que trop bien leurs méthodes. C'est à peu près au même moment qu'il fit connaissance avec Alizée. Comme nous le savons, ils eurent le coup de foudre et décidèrent de se mettre ensemble. Mais Maxime ne pouvait simplement pas lui avouer son véritable emploi. Et depuis, il vivait dans le secret, et dans le remords. Car c'était un criminel, alors qu'elle était une femme de droit et n'aurait jamais été tentée par une quelconque combine douteuse.
Il était prêt à vivre dans le mensonge pendant toute sa vie jusqu'à ce qu'il tombe un soir par hasard sur un dossier qui traînait sur son bureau. Il s'agissait d'un ancien rapport de mission en attente d'être classé. Ce qui l'intrigua cependant était la date d'archive. Il s'agissait, à quelques jours près, de sa date de naissance. Bien qu'il sache qu'il s'exposait à de dangereuses conséquences, il ouvrit le rapport et le lut en diagonale. Il prit conscience que ce dernier relatait l'assassinat d'un homme. Et cet homme, il le connaissait : c'était le banquier tué lors de l'explosion de gaz. Saisi d'effroi, il était sur le point de brutalement refermer le dossier quand une note manuscrite, datée d'il y a deux ans, attira son attention. Son nom y était écrit, et en-dessous la mention « À recruter ». Il comprit enfin que le présumé accident de son oncle était en fait un coup monté, et qu'Aleph voulait le recruter dès le début. A partir de ce moment, il ne savait quoi faire. Ces personnes avaient tué son oncle juste pour arriver à leurs fins. Elles l'écœuraient. Mais il n'osait ni ne pouvait faire marche arrière.
Maxime voulait fuir Aleph et emmener Alizée avec lui. Le problème était que cette dernière était plutôt célèbre, ce qui rendait difficile toute fuite. Il ne pouvait pas passer sa vie en cavale, cherchant à fuir ses assassins. Il savait que le seul endroit où il serait en sécurité serait de se rendre chez PISE et y dénoncer Aleph, mais il devait protéger Alizée. Sitôt qu'il les trahissait, Aleph s'arrangerait pour qu'elle soit torturée et exécutée en guise de vengeance. Mais pour se rendre auprès des services secrets, il lui fallait plus qu'un simple dossier concernant deux ou trois meurtres insignifiants, cas qui ne pourraient mettre un coup d'épée suffisamment mortel à l'Organisation. Pris entre deux feux, rongé de tous les côtés, il était dans une impasse. Jusqu'à ce jour. Jusqu'à ce qu'il attendit arriva enfin.
Quand l'ordre de monter une opération visant à assassiner un agent de protection à Safrania arriva à Maxime, ce dernier saisit cette occasion pour gagner du temps et organiser sa fuite. Alors qu'il faisait les cents pas dans les couloirs du bâtiment, il remarqua un bureau entre-ouvert, avec un ordinateur qui projetait une image étrange. Toutes les opérations qu'il avait montées avaient connu un franc succès et il avait rapidement gravi les échelons de l'Organisation. Il n'était donc pas étonnant de le voir entrer comme bon lui semblait dans certains bureaux. S'assurant que personne ne le regarde, il pénétra dans la pièce et jeta un rapide coup d'œil à l'écran. On pouvait y distinguer les silhouettes d'un Mewtwo-X et d'un Mewtwo-Y, aux côtés d'un Mewtwo normal. Outre l'étrange mention « Mewtwo XD » sous ce dernier, une carte d'une région que Maxime ne reconnaissait pas était affichée sur le second écran. Il n'y avait que l'initiale R. au centre de la carte, ainsi qu'un point rouge en plein mer.
Bien qu'il ne comprît pas la signification exacte de sa découverte, il savait que que son importance était tout sauf anodine. Le projet Mewtwo avait été abandonné il y a fort longtemps, et cette image n'était sûrement pas un simple fond d'écran. Il détenait enfin quelque chose à donner à PISE.