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Entre deux mondes de Xabab



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» Auteur : Xabab - Voir le profil
» Créé le 30/06/2014 à 14:33
» Dernière mise à jour le 30/06/2014 à 14:33

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Chapitre 17 : Paul
Les deux jeunes hommes descendirent de la calèche une fois dans la cour. Luc tenait sous son bras un paquet contenant des souliers spécialement conçus pour les pieds du roi, faits sur mesure et nécessitant deux bonnes semaines de travail. Mais la fortune qui avait été promise par le régent de Kalos valait bien tant de mal. Et c'était seulement pour cet argent que l'apprenti cordonnier, qui haïssait toujours le pouvoir en place, avait bien voulu se déplacer.
« Je n'aime pas cet endroit, murmura-t-il à l'adresse de son ami en se penchant vers lui.
– Détend-toi. Ce ne sont que les jardins d'un château ; magnifiques qui plus est. »

On ne pouvait qu'être de l'avis de ce dernier au niveau de la décoration de l'extérieur du château du roi, à moins d'être de mauvaise foi.
De grandes haies se perdaient à perte de vue, découpant des allées lavées sans doute tous les jours de la semaine et au-dessus desquelles se dressaient des arcades parcourues de lierre et de fleurs en tout genre. Alors qu'ils marchaient dans l'une d'elle Paul aperçu au loin l'entrée du château devant laquelle avait été érigée une immense fontaine. Au centre de cette dernière une bataille faisait rage. Sur le dos d'un pokemon marin un home brandissait son trident, pourchassé de tous côtés par diverses créatures hybrides dont les langues pendantes recrachaient de l'eau dans le bassin. Dressé sur son char le guerrier semblait presque vivant, comme si l'artiste avait donné à sa sculpture une dimension nouvelle qui dépassait la simple image.

« Regarde-moi tous ces nobles venus pour lui lécher les pieds, reprit Luc en pointant d'un signe de tête les gens qui se pressaient autour de la fontaine. Ils me dégoûtent tous plus les uns que les autres. C'est affligeant. »
Paul ne releva pas sa remarque et se contenta d'avancer, les mains dans les poches de sa veste. Il avait déjà eu assez de débats à propos de la royauté avec son ami et préférait ne pas continuer sur le palier du roi. En vérité il n'était pas plus enchanté que son frère à l'idée de se rendre dans la salle du trône, même si n'avait aucun ressentit sur le régent.

Paul ne prenait jamais parti lorsque son ami menait ses pensées révolutionnaires au sein d'une discussion. Il préférait l'écouter, réagir de manière calme avant de repartir à ses affaires. Cela ne l'intéressait pas réellement et c'était dans des moments comme ceux-là qu'il se sentait proche de Fargas.
« Nous sommes des lunes, lui avait dit un jour l'homme avec lequel il travaillait, gravitant au loin de la masse, suivant leurs propres buts. Les conflits des hommes ne nous intéressent pas, l'amour ne nous touche pas et la mort ne nous atteint pas. Je serais un autre, j'envierai ce que nous sommes. »

Mais alors qu'il était plongé dans ses pensées le jeune homme n'entendit as s'élever des cris de tous les côtés. Un tumulte montait soudain dans le fond des jardins, venant de la grille qu'ils venaient de franchir.
« Pas de quartier ! Pour Kalos ! »
Les deux enfants se regardèrent. La peur défigura un instant le visage de Paul alors que celui de Luc se teintait d'un courage nouveau qui montait brutalement en lui.

« Des révolutionnaires ! cria-t-il sans cacher sa joie. Des révolutionnaires, ici, alors même que nous sommes en visite chez le roi ! »
Paul ne répondit rien. Il eut envie de lui demander de se taire mais sa voix aurait été couverte par celles des hommes qui couraient dans les allées ainsi que par le tintamarre des armes des soldats frappant contre leurs cuirasses. Une milice venait de franchir l'entrée de château et se dirigeait vers la fontaine.
Elle semblait prête depuis des jours à contrer cette attaque, prête à défendre leur roi contre une horde de gens du peuple brandissant leurs équipements de fortune.

Ne voulant être mêlé à cela Paul prit la main de son ami et se précipita à l'arrière de la fontaine, le forçant à se baisser alors que la troupe de soldats les dépassaient pour se rendre face à l'allée dont ils venaient de sortir.
« Qu'est-ce que tu fais ? maugréa Luc en repoussant son geste.
– Je te sauve la vie, imbécile ! »

Tandis qu'il disait ces mots les deux garçons virent apparaître dans l'allée les quelques hommes dont les voix portaient plus haut que celle d'une troupe armée jusqu'aux dents. Seulement une vingtaine de pauvres venus de provinces couraient vers le château, brandissant fourches, arcs et fusil pour l'un d'entre eux. Leurs visages étaient déformés par une haine sans nom que leurs cris ne faisaient que porter.
« Révolution ! Tuez le roi ! »
Face à eux se dressait un mur humain d'une quinzaine de soldats, tous avaient l'arme à l'épaule et le doigt sur la détente. Les jeunes hommes, cachés derrière la fontaine, ne voyait que de dos reluire leurs armures mais cela suffisait pour comprendre l'issue du combat, du massacre…

« Révolution ! Mort au roi, mort à la… »
Les canons retentirent. Les balles fusèrent comme des projectiles de feu, traversant les gorges et les crânes de ceux qui se hissaient contre l'autorité. De là où ils se trouvaient les deux amis voyaient toute la scène.
L'un des révolutionnaires, celui portant un fusil, fut fauché au niveau des jambes. Deux autres n'eurent pas le temps de prier avant de quitter ce monde, leurs cervelles répandues dans la haie. Le sang coula, gicla, brûla sous l'averse de balles. Quand la première salve fut terminée, tous les soldats rechargèrent en même temps et tirèrent de nouveau. Réduisant en charpie ce qu'il restait des morts, terrassant les derniers encore debout. L'un des bougres se traînait, tenant son ventre pour que ses entrailles ne se répandent dans la terre, il criait pitié quand une balle pénétra son front et l'envoya sur un mètre en arrière.

Quand les rafales prirent fin il ne reste qu'un survivant, le seul révolutionnaire qui était venu, chargé d'un fusil. Ce dernier ne pourrait plus jamais se servir de ses jambes s'il survivait mais cela ne comptait pas pour lui ; il voulait simplement montrer sa colère.
Il tendit le bras, pointa le canon sur l'un des soldats et tira. La balle ricocha sur l'armure de sa cible, ne lui faisant pas le moindre dégât. Et aussitôt une nouvelle salve fut lancée, entièrement dirigée sur cet unique survivant dont les flots de sang s'élevèrent au-dessus d'un corps qui sans crier gare devint méconnaissable.

Une vaine colère avait arpenté un instant la cour du roi, une haine alimentée par une pauvreté sans limite que quelques hommes avaient voulu crier.
Mais déjà des balayeurs avançaient vers le lieu du massacre et posaient les cadavres dans des chariots ; ils semblaient avoir l'habitude de ce genre d'attaques. Les soldats rentraient pour leur part au château. L'un, alors qu'il se tournait vers la fontaine, remarqua les deux jeunes hommes qui s'y cachaient.
« Que faites-vous ici ? lança-t-il calmement comme si tout ce sang ne l'avait troublé, comme s'il n'était pas marqué par la douleur qu'il avait infligée.
– Nous venons porter des chaussures au roi, répondit Paul en prenant dans les mains de son ami incapable de parler le paquet. C'est de la part de Chen. »

Le soldat se contenta de prendre le colis des mains du jeune homme et de les renvoyer chez eux au plus vite.
« Ce n'est pas un endroit pour vous, se contenta-t-il d'ajouter avant de partir. »