CHAPITRE XIII : Retour au foyer [2/2]
Un soir, ils s'arrêtèrent pour camper, à quelques centaines de mètres de la route, sur un petit à-pic depuis lequel on avait une vue à 360° sur tous les alentours. Les discussions entre Connor et Brown, en dehors des entraînements, étaient rares, mais souvent intéressantes. Cette fois-ci, alors qu'ils prenaient ensemble leur repas du soir, ce fut Connor qui décida de briser le silence.
— Belle vue, n'est-ce pas ?
— Plutôt, oui. Mais il commence à faire sombre, on l'appréciera sans doute encore mieux demain.
— Certes.
Connor se racla la gorge.
— Ca fait depuis longtemps que je n'avais plus voyagé avec quelqu'un. Ça me fait un peu bizarre. La dernière fois, c'était avec Michael. Tu sais, le jeune homme qui t'avait prêté son Galeking à Boulocity.
— Oui, je m'en rappelle plutôt bien, fit Brown en fronçant les sourcils et en détournant le regard.
— Tu te tracasse encore à cause de cet incident, n'est-ce pas ? Allons, oublie tout ça. Tu vois, même-moi, j'ai finis pas passer l'éponge.
Brown resta silencieux, mais son visage se détendit un peu.
— Je ne devrais plus t'embêter longtemps, fit Connor. Je pense que nous allons nous séparer d'ici trois ou quatre jours. Je dois moi aussi me rendre à Bluecestia, mais, avant, il faut que je fasse un saut à Turkoisia. L'E.d.S. s'est aussi implantée là-bas, et ça représente tout de même un joli petit détour. Tu penses rester combien de temps à Bluecestia ?
— Une ou deux semaines, j'imagine. Je verrais. Ça dépendra aussi de l'avance de Grey et Pauline. Ils ne doivent plus être loin de Bluecestia, maintenant, et j'ai l'intention de repartir en même temps qu'eux.
— Ca devrait être amplement suffisant.
Connor resta silencieux durant quelques instants, puis ajouta soudain :
— Tu as des frères et sœurs ?
— Pourquoi est-ce que vous me demandez ça ? S'étonna Brown.
— Pour rien, pour rien. Je réalise juste que je ne sais presque rien sur toi, en fin de compte. C'est une façon comme une autre d'entrer en matière.
— Ah… Non, je suis fils unique.
Brown, hésita un peu, puis, se sentant en confiance, continua :
— En fait, mes parents n'ont jamais vraiment voulus avoir d'enfant. Ils me l'ont dit. Mais… Il se trouve qu'ils m'ont eu, par la force des choses, et qu'ils ont tout de même acceptés de s'occuper de moi.
— Tu n'étais pas un enfant dé… ? Quoique… Non, ça ne me regarde peut-être pas, en fin de compte.
— Si, si… Après tout, c'est moi qui ai commencé à aborder le sujet. En fait, c'est pas que j'étais un enfant non-désiré… J'ai été adopté.
Connor parut soudain ému. Brown, qui ne le regardait pas, mais maintenait son regard fixé vers le soleil couchant, depuis près d'une minute, ne s'en rendit pas compte.
— Adopté ? C'est étrange. Pourquoi tes… parents, auraient-ils fait une demande d'adoption s'ils ne souhaitaient pas avoir d'enfant ?
— C'était une adoption un peu particulière. Ils n'étaient pas du tout obligés. Je leur dois énormément pour ça…
— Si tu n'as pas envie d'en parler, je ne te force pas.
— Bah… Maintenant que j'ai commencé, autant aller jusqu'au bout. En fait, je leur suis en quelque sorte tombé dessus. Ils m'ont probablement rencontré le jour de ma naissance. En tout cas, j'étais encore un minuscule nourrisson. Pour les anniversaires, on considère ce jour comme celui de ma naissance, c'est plus simple. Un soir, alors qu'ils rentraient chez eux, ils ont rencontrés un jeune homme paniqué qui s'est présenté comme étant mon père et qui m'a confié à eux, disant qu'il s'agissait d'une urgence. Il n'aurait eu le temps que de leur laisser un numéro de téléphone auquel ils n'ont jamais pu le joindre. C'est ce qu'ils m'ont dit en tout cas. C'est vrai que c'est très étrange. Mais ce n'est pas si étonnant, je ne ressemble pas du tout à mes parents.
Brown tourna de nouveau son regard vers Connor. Mais celui-ci détourna presque aussitôt le sien.
— Oui, ce n'est vraiment pas banal, en effet. On dirait presque le début d'un roman. Je ne m'attendais pas à cela. Et donc, tu n'as aucune idée de l'identité de ton père ?
— Non, aucune. Mais je me dis que ce n'est peut-être pas si mal.
— Sans doute, sans doute…
Les dernières lueurs du soleil disparaissaient à l'horizon.
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Deux jours plus tard, Brown reçut un appel de Pauline sur son Pokématos. Elle lui dit qu'elle et Brown arrivaient en vue de Bluecestia. Brown répondit que, selon ses estimations, il devrait arriver d'ici quatre, cinq jours maximum, s'il traînait un peu. Pauline se réjouit de la nouvelle, et ajouta qu'elle était pressée de le revoir, bien qu'il tire la tronche les trois quarts du temps. Grey, saisissant le Pokématos de Pauline, conclus sur un « à bientôt Brown ».
Aucun autre évènement notable n'eut lieu durant les deux jours suivants. Puis, le matin du troisième jour, Connor annonça à Brown qu'ils approchaient de la route 151, menant vers Turkoisia, et qu'il était temps qu'ils se séparent. Sans autre cérémonial qu'un « Eh bien, à bientôt ! » hésitant de Brown, Connor sortis son Airmure, l'enfourcha, décolla et disparut bientôt, au loin. Brown poursuivi sa marche.
Deux jours après, enfin, aux alentours de midi, Brown commença à distinguer au loin le sommet des plus hauts immeubles de la capitale d'Alaubia, Bluecestia. « Enfin de retour au foyer ! » pensa-t-il, un peu ému. Après plus de deux mois de voyage, il était de retour chez lui ! Il se dépêcha d'en informer ses amis. « Super ! fit Pauline. Je suppose qu'après tout ce temps, tu as hâte de rentrer chez toi, n'est-ce pas ? On pourrait se retrouver là-bas. Tes parents sont d'accord, à priori, non ? Tu penses être là quand ? ». « Je serais très certainement arrivé d'ici dix-huit heures, répondit Brown. » Il raccrocha. Ses parents… Oui, peut-être valait-il mieux les appeler avant de débarquer à l'improviste. Ils le prendraient mieux, sans doute.
Brown fut surpris de la joie que sembla éprouver sa mère à cette annonce. En vérité, cela se rapprochait de l'hystérie. « Heureusement que j'ai pensé à prévenir avant » se dit Brown. Son père cependant sut un peu mieux se modérer, et se contenta de le gratifier d'un « Bon retour à la maison fiston. À tout à l'heure, tu nous raconteras tout ce que tu as fait durant tes pérégrinations. »
Effectivement, comme il l'avait prévu, Brown franchit les portes de la capitale sous les coups de dix-huit heures. Il lui fallut encore une vingtaine de minutes pour se rendre jusqu'à chez lui. Mais il connaissait Bluecestia comme sa poche, et plus il approchait de chez lui, plus il repérait, avec émotion, des endroits familiers devant lesquels il était passé maintes et maintes fois, avant son voyage. En deux mois, la ville était toujours telle qu'il l'avait laissée. Ca semblait évident, certes, mais Brown était rassuré de le constater par lui-même. Après avoir parcouru tout ce chemin, vu et vécu tant de choses, et même risqué plusieurs fois sa vie, ça lui faisait bizarre de simplement rentrer chez lui. Il devrait certes repartir dans un peu plus d'une semaine, mais, maintenant, après ces deux mois d'endurcissement, il se sentait près.
Il arriva enfin devant chez lui. Il trouva Grey et Pauline déjà installés sur le canapé du salon, comme s'ils étaient chez eux, en train de comparer leur Pokédex respectif. En le voyant arriver, ils levèrent les yeux.
— Regarde Pauline ! C'est Brown !
L'intéressé ne put retenir une grimace instinctive. La dernière fois qu'il avait entendu cela, il avait passé un très mauvais moment. Mais il se rassura presque aussitôt en se disant qu'en principe, aucun membre de la team Delta ne devait rôder à l'intérieur de l'appartement de ses parents. Et, effectivement, le seul être humain potentiellement menaçant qu'il vit surgir presque aussitôt était sa mère, bientôt suivie par son père. Après de chaleureuses retrouvailles qui mirent Brown très mal à l'aise devant ses amis, et une petite avalanche de questions de la part de sa mère, Brown gagna enfin le privilège de pouvoir souffler un peu dans le canapé.
— Alors, Brown, fit Pauline, on ne t'as pas trop manqué ? Je me rappelle qu'au début de notre voyage, tu voulais tout le temps rester collé avec nous.
Brown aurait pu mal prendre cette pique de Pauline, mais, cette fois, il était de bonne humeur, et il n'allait pas se gâcher le moral pour si peu.
— Comme quoi, fit-il, on dirait que ce voyage m'a été bien plus profitable que ce que j'aurais imaginé.
— J'étais sûr que ça ne pourrait que te faire du bien, fit Grey. Enfin, n'en profite pas pour trouver à chaque fois un prétexte pour t'éloigner de nous.
— Ne vous inquiétez pas, les rassura Brown, ce n'est absolument pas mon intention. Et puis, comme je vous l'ai dit par Pokématos, j'étais avec Connor, je ne voyageais donc pas seul. Et il m'a beaucoup aidé à progresser.
— C'est qui ça, Connor ? demanda la mère de Brown.
— Un des chefs de l'E.d.S. répondit-il. Tu sais, l'espèce d'association dont je t'avais parlée. J'ai noué pas mal de relations intéressantes grâce à ce réseau, je t'en parlerais.
— C'est clean au moins comme structure ? répondit-elle. J'avoue que ça ne rassure pas beaucoup de te savoir avec un groupe d'adultes dont je ne connais pratiquement rien. Enfin, après tout, tu prends ton indépendance, j'imagine que je vais devoir me faire une raison.
— Ne t'inquiète pas maman, c'est parfaitement clean, comme tu dis. J'ai rencontré des gens formidables. Je te raconterais tout, promis.
— Si tu es sûr de toi, je te fais confiance.
La mère de Brown sortit du salon. Son père n'y était déjà plus depuis un moment. Brown, Grey et Pauline se retrouvèrent seuls.
— Alors comme ça, fit Pauline d'un ton amusé, tu nous as faussé compagnie pour aller t'entraîner seul dans ton coin, hein ?
— Et bien…
— Ok. Demain. Onze heures. Place des Rosalias. Combat solo classique six contre six. Objets du sac interdis. Pokédex autorisé. Cette fois, je suis prête, Brown. Tu n'y couperas pas.
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Le grand Pokémon ailé se posa sur le sol, dans une petite clairière. Un homme en descendit. Il rappela son Pokémon, puis marcha dans la clairière, se faufila entre les arbres et repéra bientôt un minuscule sentier, tracé seulement par le passage régulier d'une poignée de personnes. Il entrait dans un monde de végétation et de silence. Il suivit cette route quelques minutes, jusqu'à arriver dans une zone bien précise qu'il avait appris à repérer.
Là, face à lui, se tenait quatre grands chênes. Il prit quelques secondes pour les détailler un à un. Il n'entendait rien d'autre que le bruit de sa respiration. 2-4-3-1. Tel était le code. Il repéra les quatre points secrets : milieu de la grosse racine à découvert, zone vermoulue à hauteur du visage, troisième petit champignon en partant de la gauche et milieu du gros nœud sur le tronc. Il posa sa paume gauche quelques secondes sur chacun des points, puis se repositionna entre les quatre chênes.
Presque aussitôt, il senti le sol s'abaisser sous ses pieds. Autour de lui, toute la forêt semblait monter vers le ciel. L'homme rentrait dans la terre. Quoique, non, passé quelques centimètres de terre, le trou dans lequel il se trouvait se transformais vite en étroit tunnel cimenté. Après une descente d'une dizaine de mètres environ, le sol sous ses pieds se stabilisa. L'homme fit deux pas en avant. L'étrange ascenseur qui l'avait mené jusque-là remonta, pour reprendre sa place initiale, ne laissant qu'un trou d'environ un mètre de profondeur dans le sol maintenant bétonné de ce nouvel endroit.
Quelques ampoules basses consommation alimentaient de leur faible lumière le tunnel dans lequel il se trouvait actuellement. Il fit quelques mètres, jusqu'à se trouver devant une porte fermée, en acier. Il toqua cinq fois, selon un rythme bien précis : un coup, une pause, trois coups rapides, une pause, un coup.
— Mot de passe ?
— L'Arc-en-Ciel veille.
Un déclic sonore résonna.
— Bienvenue.
La porte s'ouvrit. L'homme entra. Il reconnut la personne qui lui avait ouvert.
— Tiens, c'est toi ? Tu n'es pas chargé d'ouvrir la porte, d'habitude.
— En fait, je suis tout seul ici, depuis quelques heures. Tous les autres sont en vadrouille un peu partout, ou occupés à leurs affaires personnelles. Habituellement, c'est vrai qu'il y a toujours ou moins deux ou trois personnes ici. Un concours de circonstances.
— Journée plutôt calme, donc, j'imagine. Mais dis-moi, pourquoi te sens-tu toujours obligé d'être aussi formel ? Tu t'es bien rendu compte que c'était moi, sur la caméra.
— On se relâche, on se relâche, pensant que tout est sous contrôle, et puis un jour, sans qu'on s'en rende compte, on se fait planter un couteau dans le dos. Personnellement, j'ai déjà donné une fois. Je préfère respecter le protocole à la lettre. Ne serais-ce que pour ne pas l'oublier.
— Je comprends… Mais c'est vrai que c'est un peu pénible, parfois.
— À ce propos, tu as bien vérifié que tu n'avais pas été suivi ?
— Comme chaque fois, ne t'inquiète pas. Qui me soupçonnerait ?
— Va savoir. Peut-être beaucoup plus de monde que ce que tu imagines.
Les deux hommes allèrent s'installer à une table. Celui qui avait ouvert la porte sortit une bouteille de vin à la baie Résin et deux verts. Le lieu dans lequel ils se trouvaient, bien que situé sous terre, possédait à peu près tout ce que l'on pouvait attendre d'une grande maison, du mobilier, un frigo, une télévision et ainsi de suite… Ils se servirent chacun un verre et commencèrent à le siroter lentement.
— Mais dis-moi, qu'est-ce qui t'amène part ici ? Je ne pensais pas te revoir avant des semaines. Tu n'étais pas censé être occupé à l'autre bout de la région ? Ça doit te faire un détour de folie de passer par ici !
— Je suis partis hier matin. Ca fait depuis deux jours que je vole presque sans pose. Mais il fallait absolument que je vienne. J'ai peut-être découvert quelque chose d'une très grande importance. Et il est bien trop risqué de communiquer à distance. Crois-moi, tu ne vas pas regretter que je sois venu.
— Quoi ? « Ils » sont passés en phase B ?
— Je ne suis sûr de rien, mais j'ai de très gros soupçons. Je ne suis pas au courant de tout, mais je pense que ça s'est déjà fait depuis au moins deux semaines. Mais c'est loin d'être une surprise, on s'en doutait déjà. Non, ce n'est pas pour ça que je viens.
— Pour quoi alors ?
— Ca concerne le jeune Brown.
— Qui ça ?
— Brown, tu sais, ce jeune dresseur qui a reçu un Pokédex. Je suis sûr qu'on t'en a déjà soufflé un mot.
— Ah, oui, Brown… Ca me dit quelque chose… Et bien ?
— Et bien j'espère que tu es bien assis sur ta chaise. Tu ferais mieux de lâcher ton verre, aussi. J'ai de nouvelles informations sur lui. Ça semble complètement fou mais… Tout à l'air de concorder !
— Et bien, quoi ?
— Tu es sûr que tu es bien assis ?
— Oui ! Quoi enfin ? !
— Et bien. Tout porte à croire qu'en réalité, Brown est…
Equipe de Brown :
Escroco F N°35
Noeunoeuf M N°34
Luxio F N°38 @ Poudreclaire
Galifeu F N°33
Etourvol F N°35
Kadabra M N°36
PC :
Caninos M N°19
Nodulithe M N°14
Chacripan F N°16
Nenupiot M N°12
Rattatac M N°31
Magicarpe F N°10
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