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Entre deux mondes de Xabab



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Informations

» Auteur : Xabab - Voir le profil
» Créé le 16/06/2014 à 13:32
» Dernière mise à jour le 17/06/2014 à 12:48

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Chapitre 2 : Keluyah
« Turkya, stop ! »
Le pokemon s'arrête soudain au son de la voix de la fillette qui le chevauche. Il laisse la petite descendre de son dos tout rayé de noir, ou de blanc suivant le point de vue de l'observateur, et va s'isoler un peu plus loin sur la falaise. La fillette ne se préoccupe pas de ce que fais celui qui l'a guidé ici. Elle se contente de s'asseoir face au vent, en tailleur avant de fermer les yeux et de se laisser bercer.

Venir sur cette falaise était un rituel pour Keluyah et elle ne manquait jamais l'occasion de s'y rendre. De plus ce serait honteux de s'en passer avec un vent comme celui qui soufflait sur les montagnes ce matin-là.
L'air frais venait caresser avec volupté son corps nu de petite fille, faisant en même temps voler en arrière sa longue chevelure brune. Elle se laissait faire sans sourciller, prenant plaisir à goûter du silence qui l'environnait. Dans son dos Turkya était sans doute partit paître au bas de la falaise, rejoignant les plaines qu'ils avaient traversés ensemble pour gagner ce lieu sacré. Dans une heure il remonterait lentement la pente, la pousserait tendrement dans le dos et ils iraient rejoindre le village.

Keluyah venait d'une petite tribu installée dans la forêt au pied des collines, mi-chemin entre la plage et les montagnes. Au début nomades les Tortarshs avaient cessé de bouger, construisant des maisons dans les arbres et se préoccupant de développer pour la première fois une petite société vivant de chasse et de pêche.
Bien entendu la conquête d'un territoire aussi important que celui d'une forêt située entre terre et mer ne s'était as faite du jour au lendemain. D'autres tribus des environs avaient des vues sur un tel terrain. Un partage équitable fut au départ convenu mais cela ne fut pas suffisant. Il se trouvait parfois des Tortarshs sur le territoire de chasse des autres et inversement ; cela ne pouvait finir autrement qu'en une guerre ouverte.

Après de longues années de combats, car les indigènes respectaient le cycle de la terre et ne se livrait bataille que lors de la tombée des feuilles, les Tortarshs sortirent vainqueurs et les autres furent expulsés. Certains prêtèrent serment au clan vainqueur mais la plupart, vouant un culte bien plus important à la notion d'honneur, préférèrent prendre la route avec femmes et enfants dans les mains.
Keluyah n'avait jamais connu cette époque. La fillette n'avait que six ans, un âge étonnant pour quelqu'un capable de chevaucher et de tirer à l'arc de manière exemplaire, mais c'était pourtant son cas. Fille du guerrier de son village, celui que l'on considérait comme chef car détenteur de la force la plus importante de la tribu, elle avait été très tôt initiée à de tels arts. Elle se devait en contrepartie d'être un modèle pour les femmes Tortarshs, ce malgré son jeune âge.

Ainsi elle s'isolait parfois, une fois tous les deux jours, sur cette falaise qui surplombait les plaines, la forêt et d'où elle pouvait voir la mer, immense. Un sentiment de liberté l'envahissait, un bonheur sans limite.
Quand le poids du regard des autres femmes se faisait trop pesant la jeune fille allait dans sa cabane, prenait le morceau de cuir qui s'y trouvait et le posait sur le dos de Turkya. Vif comme l'éclair ce dernier comprenait directement qu'elle avait besoin de se détendre et il courait en direction de cette falaise. Elle s'y reposait une heure, se prélassant à l'air du vent avant qu'il ne vienne la tirer de cette sérénité.

Cette fois encore elle ne vit pas le temps passer et le pokemon vint taper dans son dos. Elle se releva sans mot dire, sachant que c'était terminé. Elle installa sa selle de fortune, monta et lui demanda de partir à l'aide de quelques mots à l'oreille. Il était temps de revenir au village.
Le pokemon se lança en avant et déboula en un instant le sentier de pierre qui descendait vers les plaines. Keluyah tourna durant un instant les yeux pour observer les pierres bleues qui se mettaient à briller au contact de la lumière du soleil. Les Estras, des esprits de la montagne qui gardent son clan depuis des centaines d'années. Personne ne devait les toucher et les anciens prévenaient quiconque de ne pas troubler leur conseil silencieux.

Mais à peine les apercevait-elle que Turkya regagnait les plaines et les ôtait à son champ de vision. Il chevauchait maintenant en direction de la forêt, sans doute impatient de regagner par la suite les étendues d'herbe où il pourrait se reposer en paix. Du moins jusqu'à ce que la fillette n'ait encore besoin de ses services ; il ne pouvait rien lui refuser.
La distance qui restait à parcourir fut bientôt dévorée et le pokemon s'arrêta brusquement à l'orée des bois. Keluyah descendit, reprit le morceau de cuir et tapota son encolure d'un geste doux. « Merci encore mon ami. »

Celui-ci se sauva une fois ces mots prononcés et la fillette s'en retourna à la forêt. Elle marcha d'un pas silencieux sur les tapis de feuilles mortes qui s'accumulaient à l'approche de l'hiver, se demandant si Mamy allait la gronder pour sa sortie matinale. L'ancienne n'aimait pas trop que les jeunes quittent seuls les frontières du village mais elle n'osait pas lui dire grand-chose. Elle était aventureuse, téméraire et son père était le fer de lance du clan.

Néanmoins quand Keluyah se trouva au niveau des premières habitations de bois, vétustes mais d'apparence solides, elle croisa le regard de Mamy. La vieille dame l'attendait, sa main serrée autour de sa canne. Son corps usé ne semblait subir les douleurs de la fraîcheur de l'aube et ce malgré sa nudité. Elle se tenait droite et fière.
Keluyah baissa immédiatement le regard.

« Aucun Estra ne t'as encore appelé Keluyah. Ils restent silencieux à tes prières ne répondent pas aux miennes te concernant. Le sais-tu ?
– Oui Mamy, répondit-elle honteuse.
– Tu es pure encore et le sang n'aura pas coulé que tu seras déjà femme, je n'en doute pas. Mais il en va de notre devoir d'attendre ta dixième année pour que tu sois libre. Tu es trop jeune.
– Je suis désolé. »
Elle ne releva pas les yeux pour constater le sourire de l'ancienne qui était fière de cette fillette. Sa jeunesse était un atout brillant, autant que sa fougue et sa détermination. Elle était curieuse, attentive et aimante. Aucun autre enfant ne pouvait se vanter de posséder autant de qualités. Et ainsi il ne faisait nul doute pour l'ancienne qu'elle serait bientôt élue par les Estras, peut-être avant même sa dixième année.

« Nous avons à faire Keluyah. Les hommes partent chasser et nous devons montrer l'exemple aux femmes qui les attendent. Ce soir l'astre de nuit brillera de mille feux, ne le décevons pas par une fête qui ne gagne pas ses honneurs. »