Pokémon version Arc-en-Ciel T.1 : L'assassinat de Milolaidus

Après avoir vérifiés une dernière fois que Brown n'allait pas changer d'avis au dernier moment, Grey et Pauline repartirent le lendemain après-midi. Ils auraient un long trajet à faire jusqu'à Bluecestia, la ville où ils habitaient, et qui avait été le point de départ de leur voyage. Heureusement, ils pourraient s'arrêter un peu sur le trajet, sur le carrefour où se trouvait le stade, là où ils avaient assistés au combat entre Pierre Rochard et Goyah. Après, ils repartiraient vers l'Est de la région, en passant par la route 166.

Durant les jours qui suivirent, Brown se rendit régulièrement à l'E.d.S. Il voulait se familiariser avec l'association, son fonctionnement et ses membres. Il accomplit plusieurs missions plus ou moins intéressantes, allant du simple service d'intérêt général, comme nettoyer une plage de l'île de Pourprion particulièrement polluée par les détritus, à des missions plus trépidantes, comme celle où lui et les membres avaient dû gérer quelques Volcaropods tombés d'une montagne, à la suite d'un séisme, et qui menaçaient d'aller incendier une petite forêt située juste à côté. Brown avait même réussi à surmonter, du moins un petit peu, sa nouvelle angoisse des lieux hauts perchés, et à aider les autres membres à déblayer des gravas en montagnes, qui avaient chutés à cause de ce même séisme. Il fut néanmoins beaucoup plus prudent, cette fois-ci. Presque trop, même.

Plusieurs fois, son Rattata rejoignit de nouveau son équipe, pour certaines missions. Brown ne tenait pas à le laisser tomber, et voulait continuer à l'utiliser. Durant le déblayage des gravats, après avoir fait beaucoup d'efforts, son Pokémon, qui commençait à être trop puissant pour un simple Rattata, évolua en Rattatac. Le reste du travail fut ainsi fini bien plus rapidement.

Quelques fois, Connor accompagnait Brown dans certaines missions. Le chef de l'E.d.S. de Boulocity avait cessé d'être désagréable envers le jeune garçon, et pouvait même s'avérer, parfois, presque sympathique, quand il se détendait. Il gardait cependant, d'une façon générale, une certaine distance et une certaine froideur, en toute situation. Mais ce devait tout simplement être sa façon d'être.

Brown fit aussi la connaissance de Pedro, le chef de l'E.d.S. de cette ville. C'était un homme aux cheveux grisonnants, mais dont on devinait encore la bruneur, et au sommet du crâne dégarni. Il portait une petite moustache, des vêtements simples, et avait un drôle d'accent qui le faisait rouler les « R ». Brown avait essayé de se rappeler de quelle région cet accent était typique, mais sans succès. Tout comme Connor, Pedro fut lui aussi présent lors de certaines missions. Mais il y eu plusieurs missions où ni Connor, ni Pedro n'accompagnèrent Brown. Celui-ci pu cependant compter sur le soutien et l'esprit d'équipe des autres membres, et ne se senti jamais vraiment délaissé.

Était-ce dû à son jeune âge ? À sa « réputation », qui l'avait précédé ? Le fait est que l'enthousiasme, l'implication et la persévérance du jeune Brown au sein de l'E.d.S. fut rapidement remarquée. Il était encore un peu malhabile en tant que dresseur, et manquait quelquefois d'assurance, mais il s'appliquait à accomplir chacune des missions qu'on lui proposait, même celles qui semblaient peu passionnantes, avec beaucoup de bonne volonté. Brown lui-même, qui s'était toujours connu timide, mal assuré, et un peu replié sur lui-même, se découvrait le contact facile avec les autres membres. Ici, il n'avait pas peur de proposer des choses, d'être jugé, de tenter, de rater aussi, parfois. En fin de compte, il retrouvait lentement quelque chose qu'il n'avait pourtant pas vraiment eu conscience d'avoir perdu : sa confiance en lui.

Quatre jours après l'arrivée de Brown à l'E.d.S. de Pourprion, Pedro proposa à Connor de profiter de son passage pour « aller se faire un resto » comme il disait, tranquillement, entre chefs de l'E.d.S. Connor accepta volontiers. Durant le repas, la discussion varia sur toute sorte de sujets. Ils commencèrent bien évidemment par parler de l'E.d.S., mais, vu que presque tout avait déjà été dit à la dernière réunion, le sujet s'épuisa bien vite. Ils dérivèrent sur le temps qui variait sans cesse, le cours du Pokédollard qui s'effondrait, le nouveau projet de loi sur les combats de Pokémon dans les endroits non-dégagés qui faisait polémique... Connor demanda à Pedro la façon dont ça se passait, avec sa femme. Il lui répondit qu'elle était insupportable et que s'il avait su, il ne se serait jamais marié, et serait resté seul. Deux minutes plus tard, Pedro demanda à Connor quand il avait l'intention de s'en trouver une, de femme, plutôt que de rester célibataire et dans son coin, comme un ermite. Si ce n'était pas malheureux, à trente-huit ans ! Finalement, vers la fin du repas, de fil en aiguille, ils en revinrent subitement à parler de l'E.d.S. Ce fut Pedro qui relança le sujet :

— Au fait, c'est parce que tu surveilles le petit nouveau que tu n'es toujours pas reparti, non ?

— Oui. D'ailleurs, ce n'est pas vraiment un secret. J'avais déjà dit durant la réunion que je comptais profiter de mon « tour de contrôle » pour garder un œil sur Brown.

— Du coup, ta prochaine destination, ce sera Turkoisia je suppose ?

— Oui, à priori. Mais je viens juste d'apprendre que l'installation de l'E.d.S. à Bluecestia avait enfin été acceptée. Je ne sais pas si on t'a déjà mis au courant.

— Ah non. Alors ça y est ? Et bien, ce n'est pas trop tôt, comme qui dirait !...

— Je ne te le fait pas dire. Du coup, le président est en train de chercher qui pourrait prendre la place de chef dans cette nouvelle annexe. Bluecestia a été jusque là assez éloignée des différents groupes de l'E.d.S. Nous avons peu de membres habitants la capitale. Et je vois mal un membre déménager simplement pour l'Equipe. Il n'y a plus qu'à trouver un profil particulier, qui correspondrait à la situation. Enfin, ce n'est pas la première fois que l'E.d.S. s'exporte, ça ne devrait pas poser de soucis.
Bref, je m'arrêterais sans doute un moment à Bluecestia, pour aider à l'installation. Mais la question est de savoir si je le ferais avant ou après Turkoisia. À priori, ce sera plutôt après. Ou alors je ferais une petite visite, puis je reviendrais plus tard.

Pedro fronça les sourcils, puis sembla se rappeler quelque chose :

— Oui, très bien ! Mais, avant que j'oublie, pour en revenir au petit nouveau... J'aimerais savoir, qu'est-ce que tu en penses, personnellement ?

— Pourquoi tout le monde veut avoir mon avis sur le gosse ? fit Connor, agacé. On verra bien ce qu'il en adviendra, enfin, que veux-tu que je te dise ?

— Moi, je le trouve quand même bien, ce jeune. Il est encore inexpérimenté, mais on l'a tous étés à son âge. Il a l'air très motivé, participatif, il met une bonne ambiance dans le groupe. C'est de jeunes comme ça dont on a besoin pour booster l'image de l'E.d.S., et pour renforcer l'esprit de groupe ! Un jeune qui s'engage si tôt, c'est vraiment bien, je trouve.

— Oui, mais il faut quand même être prudent avec ça. Si on commence à engager trop de jeunes, ça risque de jaser. Mieux vaut éviter d'avoir des parents sur le dos. On pourrait raconter toutes sortes de choses, ça peut aller très vite. Enfin, de toute façon, peu de très jeunes, habituellement, sont tentés par ce genre d'aventures.

— Oui, bien sûr, je suis d'accord ! Mais, je trouve tout de même ce Brown très prometteur. Ce sont souvent ceux qui commencent jeunes qui font les meilleurs éléments. Regarde ton Michael, à Boulocity. Il est arrivé à vingt-et-un ans, si je ne me trompe pas ? Il en a aujourd'hui vingt-cinq. Tu viens juste de le nommer comme chef provisoire, pour te remplacer durant ton voyage. Et puis encore plus fort : la jeune Eva Nilaime, tout juste dix-sept ans, engagée depuis seulement quelques mois. On parle d'elle jusqu'à Végétiaume ! La question est juste de savoir si elle passera toujours à l'E.d.S., quand elle sera devenue la nouvelle maîtresse de la ligue Pokémon.

Pedro sourit, comme amusé parce qu'il venait de dire.

— Tu n'exagèrerais pas un tout petit peu, tout de même ? répondit Connor.

— Attend, c'est que tu ne l'as pas vu combattre ! Pour quelqu'un de son âge, elle est hyper douée ! Elle a déjà décrochée le badge Abysses, à Verdion-les-Champs, jugé souvent comme le plus facile à avoir. Mais au rythme où elle progresse, elle ne devrait pas tarder à décrocher les autres. Ça fait depuis bien longtemps que je n'ai plus croisé un dresseur, et là, en l'occurrence, une dresseuse, aussi prometteuse.

— Je l'ai déjà vue combattre, une ou deux fois. Ce n'est pas la première fois que je quitte Boulocity, et mon Airmure est très endurant et rapide, en vol. Pour les trajets de deux ou trois cents kilomètres, il est bien plus pratique que tout autre moyen de transport. Elle est douée, assurément, je le confirme, et surtout extrêmement acharnée et motivée. Mais, pour l'instant en tout cas, elle est loin de mettre le panthéon en danger, tu peux me croire. J'ai bien observé sa technique et je pense qu'il lui manque... un petit quelque chose, je ne sais pas si tu vois ce que je veux dire. Peut-être qu'elle l'acquerra un jour, mais j'en doute. Il se peut qu'elle décroche encore quelque badges, mais elle ne devrait pas aller plus loin. Elle n'a pas le... truc.

Pedro eut un petit rire.

— Le don, c'est ce que tu veux dire ? Je ne te savais pas si bon à analyser les capacités d'un dresseur. Au fait, tu t'y connais bien, en combats de Pokémons ?

— Je me défends.

— Il faudrait vraiment qu'on fasse un match, un jour. Tu ne pourras pas sans cesse te défiler. J'ai mis au point une nouvelle stratégie qui te surprendrait, j'en suis sûr.

— Nous verrons, ce n'est pas d'actualité...

Les deux hommes avaient finis leur repas. Un serveur passa, pour débarrasser la table. Pedro se figea soudainement.

— Tu as encore réussi à me faire dévier de mon sujet !

— Quel sujet ?

— Le nouveau...

— Brown ? Encore lui ? Et tu as dévié tout seul, il me semble.

— Passons. Tout ça pour dire que je pense qu'on devrait le surveiller d'un peu plus près.

— Je m'en charge déjà.

— Oui, je sais bien, mais je veux dire... Voir ce qu'on peut obtenir de lui. Je suis sûr qu'il ne verrait pas de mal à ce qu'on lui propose plus de responsabilités. Je sais, je sais, il vient tout juste de s'inscrire. Mais garde tout de même cela à l'esprit.

— Nous verrons, répondit sèchement Connor. Ce n'est pas d'actualité.

Il avait particulièrement insisté sur le « pas ».
_____________________________________

— Luxio, étincelle !

Le Pokémon électrique se rua sur le Rhinolove, toutes griffes sorties, prêt à envoyer une puissante décharge à son adversaire. Hélas, le Rhinolove esquiva sans peine, et le Pokémon électrique, prit dans son élan, s'étala par terre, quelques mètres plus loin. Brown s'empressa de rejoindre son Pokémon, pour le soutenir. Le Rhinolove resta sur place, dans les airs, sans agir. Son dresseur ne lui avait pas donné d'ordre.

— C'est dommage, Brown, fit Pedro, tu avais bien commencé. Mais tu es trop prévisible, et tu veux trop attaquer de front. Essaye d'être plus subtil.

— C'est normal aussi, votre Pokémon est beaucoup plus entraîné que le mien, que j'ai eu il y a peu de temps. Mon Poképower indique que le votre est au niveau 46, et le mien est à peine au niveau 28.

— Il ne fait pas partie de mes Pokémons les plus entraînés. Mais ce que nous faisons est juste un exercice, je te le rappelle, cela n'a rien à voir avec un vrai combat. Essaye de voir au-delà de la simple force brute. Tu as déjà vu des dresseurs professionnels en combat ?

— J'ai assisté en direct à un match entre Goyah et Pierre Rochard, s'exclama Brown. Pas plus tard qu'il y a deux semaines !

— Ça devait être un match organisé dans le nouveau stade de combat, au croisement des quatre routes, à l'Est de Yellow-sur-Mer. C'est cela ?

Brown répondit par l'affirmative.

— Bien, reprit Pedro. Tu dois savoir que, durant les combats, à certains moments, les grands dresseurs on tendance à échanger leurs Pokémons un grand nombre de fois en très peu de temps. Cela représente une phase d'attaque, dans le combat. Les dresseurs essayent tous les deux d'envoyer un Pokémon avantagé face à celui qu'ils ont en face d'eux, afin de porter un coup puissant, dans la faiblesse de l'adversaire, qui peut leur permettre de prendre l'avantage dans le combat. Dans le langage technique, on appelle cela des « échanges offensifs successifs ». Certains matchs peuvent se jouer avec une restriction au niveau des échanges. Ainsi, les dresseurs peuvent n'avoir le droit d'échanger leurs Pokémons que toutes les trente secondes, voir toutes les minutes, ou même, tout simplement, pas du tout, ce qui rend cette technique impossible. Mais dans un match normal, elle est souvent utilisée.
En fait, il y a plusieurs situations. Un des deux dresseurs, quand il en a l'occasion, peut faire un échange rapide, qui débouche sur un nouvel échange de l'adversaire. Les deux dresseurs se retrouvent ainsi souvent pris dans le rythme, et tentent des échanges de plus en plus rapides, jusqu'à ce qu'un des Pokémons ne tienne pas le coup, ou qu'une erreur soit faite par un des deux dresseurs. Cela peut aussi être provoqué volontairement par un dresseur qui fera des échanges successifs entre deux ou trois Pokémons, face au même Pokémon adverse, afin que celui-ci ne puisse pas couvrir les deux ou trois menaces. Le Pokémon ainsi attaqué se retrouve souvent débordé, et cela peut conduire à une réponse du dresseur, qui fera lui aussi des échanges successifs. Mais le Pokémon attaqué peut aussi anticiper un échange, et ruiner la stratégie de l'autre dresseur avec une attaque appropriée.
C'est bon, tout est clair jusque là ?

— Heu... À peu près.