Chapitre sixième : L'ombre se dessine
Almia, à un temps révolu
— Non, n'y va pas ! Nous avons des ordres et nous ne devons pas faire exploser notre couverture. Si jamais on nous repérait, la mission serait un échec et pourrait engendrer bien plus de conséquences néfastes que prévues.
Ces dernières paroles se perdirent dans un vent battant. L'orage grondait, la pluie tombait à verse, les violentes bourrasques emportaient toute sorte de débris à chacun de leurs passages. Si d'aucuns avaient vu pareille tempête à Almia, ils avaient déjà dû passer à trépas.
— Si, je dois y aller, dit une voix ferme, nous ne pouvons pas le laisser s'échapper cette fois-ci. Il a fait trop de ravage, il me l'a prise, elle, et je ne lui pardonnerai jamais, dussé-je y laisser ma vie.
— Ecoute, si tu y étais allé dans d'autres circonstances, je t'aurai accompagné. Mais les directives étaient claires : n'intervenez pas tant que les Pokémon Rangers n'ont pas fait leur travail. Il ne faut pas que nous tombions face à des sbires du Sombre-Trio et qu'il puisse s'échapper.
Un éclair illumina alors le ciel d'Almia, laissant deviner à la lumière de ce dernier la présence de deux personnes terrées dans un buisson aux abords de la route principale reliant le centre-ville à la Tour Loyau.
Les PKMN Rangers étaient à la poursuite d'un certain Anoir Raynor. Il avait fait main basse sur une puissance phénoménale et menaçait l'équilibre des contrées d'Almia. Les ténèbres éternelles n'étant pas au menu des plans politiques des prochains candidats, on l'avait désigné comme Ennemi Public n°1. Les autorités d'Almia étaient sur le point de mettre un terme à ces activités, et envoyèrent leurs meilleurs PKMN Rangers à sa poursuite, à même dans son repaire, la Tour Loyau.
Raynor, la Tour Loyau, ses sbires, son arme, n'étaient néanmoins que des pions sur un échiquier géant, déplacés telles des marionnettes. Derrière cette menace apparente se cachait un adversaire bien plus redoutable. Connue seulement des forces de polices secrètes, et encore de peu de ses agents, elle s'était fait appelée « L'Ombre ». Elle se tapissait dans le noir, attendant de frapper. Elle apportait le malheur partout où elle passait, ne laissant aucun témoin. La terreur qu'elle inspirait avait mis à bas plusieurs villes, tombées maintenant sous son joug. L'apparente menace que Raynor laissait planer n'était qu'un écran de fumée visant à cacher une opération bien plus redoutable, une opération que « l'Organisation », dirigée par cette mystérieuse entité, avait depuis longtemps planifiée.
Quelques temps auparavant, un informateur infiltré parmi ses rangs avait dévoilé un plan qu'elle projetait d'exécuter dans la région d'Almia, pouvant sonner le glas de cette contrée. La Police Internationale avait alors décidé de prendre l'affaire en main et, afin de mettre une fin aux agissements criminels de « L'Organisation », avait décidé de dépêcher deux de ses meilleurs agents. Les agents de l'équipe ## furent choisis pour mener à bien cette mission capitale. A l'instar de l'équipe J², l'équipe ## était légendaire. Mais si la première était en pleine ascension, cette dernière était déjà à son apogée. L'efficacité du binôme ne laissait pas la PI indifférente, et c'est à maintes reprises qu'elle la sollicita; à titre d'anecdote, la ville de Rivamar n'existerait plus si l'équipe ## n'avait pas détourné les plans d'un puissant, mais fou, personnage qui projetait de la rayer de la carte.
— Je ne peux pas le laisser filer, interrompit l'autre voix, nous devons l'arrêter. Alors, que tu m'accompagnes ou non, j'irai.
Sur ces mots, une ombre se leva, laissant l'autre sans réaction, et, à la faveur de l'obscurité, se dirigea fermement vers la Tour Loyau.
Dans les rues d'Unionpolis
— Attendez les mecs ! je viens avec vous, s'écria une voix.
JT et Jérémie firent volte-face et aperçurent Mélanie courant vers eux, les cheveux virevoltant au gré du vent, sa poitrine rebondissant à chaque de ses pas. Ce fut pour leurs yeux une belle vision, et je n'en doute pas que vous eussiez également aimé en être de la partie. Arrivée à leur hauteur, elle reprit son souffle et leur expliqua sa présence.
— M. ne m'a pas donné de tâche précise, mais je me disais qu'il vous faudrait peut-être quelqu'un de confiance, et accessoirement une opératrice, qui soit dans le même fuseau horaire que vous. Et puis, les bureaux monotones du QG, j'en ai un peu marre, finit-elle en riant.
Les deux garçons affichèrent un sourire radieux, lui souhaitant la bienvenue pour sa première mission en-dehors de Sinnoh. Ils se dirigèrent tous les trois vers l'aéroport d'Unionpolis, le plus grand de la région. Si le voyage entre Kanto et Sinnoh n'excédait pas quelques heures à dos de Pokémon Vol, le trajet Kalos - Sinnoh n'était pas possible pour les pauvres bêtes. Ainsi, PISE avait décidé de leur affréter un jet privé de la compagnie L@tios Airlines, qu'on disait aussi rapide qu'un Abra usant de Téléport. Ayant gaiement embarqué dans cette bête de plus trente mètres de longueur pouvant accueillir vingt passagers, la tour de contrôle donna le feu vert au pilote. Entamant la procédure habituelle de décollage, l'appareil s'aligna dans l'axe de la piste et fit vrombir ses moteurs dans un vacarme assourdissant. Et dans un ciel dégagé, il prit la direction de la contrée continentale.
Par monts et par vaux, l'avion continua inlassablement son voyage. Ses passagers ne se lassaient pas d'admirer par les hublots le paysage qui défilait à perte de vue. Quelques heures après son départ, il se posa sur le tarmac de l'aérodrome d'Illumis et l'équipe J² put respirer l'air libre, un air nouveau, mais un air dans lequel planait une menace. Ayant quitté PISE dans l'après-midi, il était à peu près la même heure ici, en tenant compte du décalage horaire, et personne ne fut surpris lorsque Jérémie annonça joyeusement :
— Bon, ben quand est-ce qu'on mange ?
Dans le bureau de M.
M. était maintenant seul dans son bureau. Son regard traversait la pièce, s'arrêtant sur chacun de ses objets. Bientôt, tous ces objets ne seraient plus que dans un carton, prêt à embarquer pour les Îles Orange. Mais avant, il fallait que sa dernière œuvre qu'il accomplissait en tant que directeur soit achevée. Il fallait que l'Equipe J² réussisse, que Philippe réussisse... Son regard s'attarda sur les statuettes des Dieux Pokémon : Arceus, Dialga et Palkia. A côté de ces dernières se trouvaient deux petites figurines, celles de Darkrai et de Cresselia. A la vue de ces statues, M. replongea dans un tourbillon de souvenirs, en cette nuit qui avait tout changé, où son monde avait basculé. Tout partait de là.
Pendant ce temps, quelque part à Unionpolis
— Mais qu'est-ce qui m'a pris de rapporter ce fichu cristal à Illumis moi-même ? Et pourquoi est-ce que j'ai pas attendu les J pour aller avec ? Mais qu'est-ce que je suis pas malin ...
Philippe devait aussi aller à Illumis pour accomplir sa mission. Partant plus tôt que JT et ses amis, il avait dans sa hâte descendu les escaliers si rapidement qu'il s'était cassé la figure (après avoir cassé la porte, rappelez-vous en!). La secrétaire l'avait alors ramassé en bas des escaliers et l'avait conduit à l'infirmerie. La secrétaire n'avait jamais vu quelqu'un d'aussi maladroit, et lorsqu'elle l'avait vu tomber les quatre fers en l'air, elle n'avait pas pu s'empêcher d'éclater d'un rire cristallin, son ami Tiplouf faisant de même. Mais son âme charitable avait pris le dessus, et elle avait aidé le pauvre Philippe et, reperdant ses moyens, n'avait pu sortir qu'un « Merci » dans un concert de balbutiements incompréhensibles.
Avant qu'elle ne s'en aille, il avait été à même de lui demander son numéro ! comme l'aurait fait un « Scout Joey » après vous avoir défié en duel (et après avoir perdu accessoirement). Elle lui avait simplement glissé un message, mais de son contenu nous n'en saurons rien; Philippe n'a pas voulu me le dire.
Sortant comme un Canarticho boiteux, il tenta tant bien que mal de rattraper son retard et il aurait peut-être pu le faire s'il n'avait pas suivi son sens de l'orientation, qui, disons-le, est totalement inexistant, ou du moins, est tout aussi délicat que l'oreille musicale d'un Brouhabam (j'espère que vous ne devrez jamais en entendre un qui fait un Brouhaha). Pensant qu'il se dirigeait vers l'aéroport de la ville, il ne remarqua pas qu'il avait confondu l'Ouest et l'Est, si bien qu'il allait plutôt en direction de Rivamar. S'étant aperçu de sa bêtise qu'aux frontières de la mégalopole, il avait (sans pour autant baisser les bras) rebroussé chemin. Il n'arriva finalement à destination (que l'on s'entende bien : il est pas encore parti de Sinnoh hein !) que deux heures après son départ du QG de PISE, soit bien après que l'équipe J² fut partie.
Arrivé dans le hall de l'aéroport, le pauvre Philippe remarqua que rien n'avait été prévu pour lui. PISE avait pensé que la PI avait préparé quelque chose pour lui, et la PI avait pensé que c'était PISE qui l'avait fait. Résultat des choses, il se retrouvait sans titre ou moyen de transport. S'asseyant sur un banc pour réfléchir comment s'en sortir (oui car Philippe réfléchit, parfois), il avait un air un peu piteux. S'il n'était pas très malin, il mettait un point d'honneur à remplir sa mission, et peut-être était-ce le destin, ou son air abattu qui l'amena à se faire remarquer par elle. « Elle » n'était rien d'autre qu'une femme d'affaire connue dans les milieux des relations entre Kalos et Sinnoh. Elle s'appelait Alizée, fine et belle brune d'un mètre soixante-neuf, et était vêtue d'un élégant complet gris, sans plus. Elle vérifiait le tableau indiquant les départs imminents et remarqua alors la mine triste qu'affichait le jeune homme.
— Eh bien, on est triste, on a grise mine, on se fait un sang d'encre ? (NdlA : oui ce jeu de mots est très drôle, alors riez maintenant).
Philippe sortit brutalement de ses pensées (son esprit était focalisé sur le repas cette fois-ci) et se tourna vers l'inconnue. Comme d'habitude lorsqu'il voit une jolie fille, il perdit ses moyens. Avec son inimitable balbutiement, il marmonna :
— Ah euh, non... enfin oui, enfin pas triste.. enfin voilà.
— Dites-moi tout ! je suis de bonne humeur, peut-être pourrais-je vous aider, dit Alizée.
— Tout ! s'exclama alors Philippe, et se reprenant de sa mauvaise blague, il continua. Voyez-vous, je dois à tout prix me rendre à Illumis, mais je n'ai pas de billet, et je n'ai rien sur moi pour en acheter un... Je ne sais pas quoi faire, vu qu'en plus mon colis est d'une importance capitale ! il cont–
Et il s'arrêta net, se rappelant qu'il ne devait rien dire, et surtout pas à une inconnue surgie de nulle part. Mais il semblait que la femme d'affaires ne vit rien et, tout sourire, elle lui annonça alors qu'elle allait lui payer son billet si celui lui plaisait de faire le voyage en sa compagnie. Bien qu'elle fût en couple (ce que remarqua Philippe en voyant la bague de fiançailles à son doigt), elle traversait une passe difficile avec sa moitié, et la présence de quelqu'un à ses côtés pendant le voyage ne lui disconvenait pas. Qui plus est, il avait l'air plutôt gentil, quoiqu'un peu encore enfant par certains aspects.
— Eh bien, cela tombe à pic ! ça m'frait du bien d'y aller avec vous, Madame ? demanda Philippe.
— Alizée, Alizée Mistral. Je travaille dans les affaires commerciales entre Kalos et cette région.
— Ah, répondit simplement Philippe.
A vrai dire, il était plus intéressé par les reliefs d'Alizée que par son travail de bureau. Il poussa un soupir de soulagement car il savait que maintenant sa mission n'était pas encore perdue, sauvée par une personne arrivée telle une soudaine... bourrasque. (NdlR : nous sommes au regret de vous annoncer que nous avons dû mettre fin aux jours de l'auteur pour cette blague d'une qualité tellement merdique qu'elle ne vaut que du vent) (NdlR : bon ok, on a compris, on sait où sont les cordes et les tabourets).