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Apocalyptica de Drayker



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Informations

» Auteur : Drayker - Voir le profil
» Créé le 29/04/2014 à 02:12
» Dernière mise à jour le 04/11/2017 à 18:43

» Mots-clés :   Drame   Présence de poké-humains   Région inventée   Science fiction   Suspense

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Chapitre 09 : Berceau en ruines
« Dis-moi, Lina, est-ce que l'ancien monde te manque ? » demanda Lyrian de but en blanc.

Tous deux étaient assis à l'arrière du fourgon, parmi les sacs de vivres et de matériel. L'engin n'étant pas prévu pour transporter plus de quatre personnes, ils avaient dû renoncer à un siège. La conduite de Thrak, brusque, les ballottait parfois un peu trop, mais ils s'accrochaient. Tous deux étaient restés silencieux depuis le départ. A vrai dire, Lyrian était légèrement nerveux à l'idée de devoir affronter l'endroit où tout avait commencé.

« Non, pas vraiment, répondit la jeune fille, assise en tailleur sur le plancher. Enfin, y'avait certains trucs que je regrette, mais dans l'ensemble, non...
- Pourquoi ?
- C'est un interrogatoire, monsieur l'agent ?
- Non... J'ai juste remarqué que la plupart des gens de la colonie parlaient du Changement comme d'une apocalypse. Toi, tu en parles comme d'une seconde chance.
- ... Putain, t'es fort, quand tu t'y mets. » lâcha Lina, mi-surprise, mi-agacée par la perspicacité du garçon.

La jeune fille resta silencieuse quelques instants, jouant distraitement avec son revolver. Lyrian ne la brusqua pas. Lors de ces derniers jours passés à contempler le plafond de sa grotte, il avait beaucoup réfléchi au comportement des gens. Il fallait croire que réfléchir, c'était son fort. Il avait médité sur de nombreux sujets, tâchant de se mettre à la place des autres, d'essayer de les comprendre malgré son inexpérience sociale et sa méconnaissance de l'ancien monde. Il avait étudié le comportement des humains en général, leur attitude à l'égard des hybrides, mais aussi vis-à-vis du Changement.
Au fil de leurs fréquentations, Lyrian avait commencé à réaliser que derrière sa carapace de sarcasmes, Lina cachait quelque chose. Une douleur sourde, relent d'une tristesse passée. C'était le cas de beaucoup de personnes, au camp. Ils avaient tous souffert : perte d'un parent, d'un proche, de tous leurs repères...
Mais chez Lina, cette souffrance n'était pas liée au Changement, et Lyrian l'avait vite compris. Non, elle provenait de quelque chose d'antérieur, de la vie de la jeune fille avant la catastrophe.

« Pourquoi est-ce que ça t'intéresse ?
- Je ne sais pas... Je veux juste mieux comprendre. Tu es toute seule, au camp, non ? Tu n'as pas de parents, de famille.
- ... Toi, t'es en train de stresser. T'es pas obligé de parler, tu sais. Ça va bien se passer. »

Lyrian eut un sourire contrit. Son mal-être se voyait-il tant que ça ?

« Alors tu ne répondras pas ?
- ... Rah, t'es têtu, toi, mais d'une force... Bon. Oui, tu as raison, le Changement ne me dérange pas tant que ça. Oui, tu as raison, je n'ai plus de famille. Depuis longtemps.
- Pourquoi est-ce que tu ne regrettes pas l'ancien monde ?
- Parce que la vie que j'y menais était pire que celle-ci.
- Vraiment... ? Qu'est-ce que ta vie de maintenant a de mieux que l'ancienne ?
- La liberté. » répondit évasivement la jeune fille.

L'adolescent s'apprêtait à poser une autre question, lorsque soudain, le vrombissement régulier du moteur s'arrêta, signe que le fourgon s'était arrêté. Lina se leva brusquement et rangea son revolver dans son jean.

« On est partis. »

~*~
Les tentes furent montées juste devant l'entrepôt, à la base du pic ocre que Lyrian connaissait si bien. La salle, creusée dans la roche, avait été quasiment vidée par les multiples allers-retours effectués par les gens de la colonie. Des caisses de matériel éventrées et des voitures vidées de leur essence se trouvaient encore là, prenant petit à petit la poussière. De nombreuses fissures lézardaient les murs de béton et l'éclairage était hors service, si bien que le fond de l'entrepôt était plongé dans une obscurité dérangeante. Quelques câbles pendaient ça et là, mais dans l'ensemble, la partie supérieure du complexe, celle où l'adolescent s'était réveillé, semblait avoir plus souffert du Changement.

Lyrian avisa l'ascenseur dont les autres avaient déjà parlé. A vrai dire, il s'agissait plus d'un monte-charge, une énorme cage d'acier probablement destinée au transport de l'outillage entreposé ici. Malheureusement, le Changement l'avait rendue inutilisable pour une raison inconnue. L'adolescent et Lina eurent beau essayer de presser le bouton, la plate-forme restait obstinément coincée au sol.

Le temps que le groupe dresse le campement, il était midi. On mangea rapidement, sans grande conversation. Tous les compagnons étaient tendus à l'idée de ce qu'ils allaient devoir appréhender dans ce complexe détruit. Pas un mot ne troubla leur repas. Kate tenta bien de détendre l'atmosphère, mais sa bonne humeur ne trouva aucun écho, et elle se tut bientôt à son tour.

D'eux tous, seul Adam paraissait parfaitement serein. Silencieux pendant toute la durée du trajet, à en croire Élise, l'hybride dégageait un calme impressionnant, compte tenu des souvenirs qu'il devait avoir de cet endroit.

Lorsque tous eurent fini, Thrak prit la parole et se mit à leur expliquer la situation.

A leur connaissance, il n'y avait que deux accès au complexe : l'entrée située au sommet du pic, et le monte-charge de l'entrepôt. Il était évidemment hors de question d'escalader la montagne, et aucun d'entre eux n'étant dotés d'ailes, il leur faudrait nécessairement passer par la cage d'ascenseur, coûte que coûte.

Kate, Élise et Adam expliquèrent comment ils s'étaient extirpés du complexe après leur réveil : le monte-charge, encore en état de marche à l'époque, les avait transportés jusqu'à l'entrepôt, où ils n'avaient eu aucun mal à trouver la commande d'ouverture de la porte, ainsi qu'un véhicule pour affronter le désert.
Malheureusement, le peu de courant qui circulait encore dans les systèmes du laboratoire à l'époque de leur évasion avait depuis longtemps disparu, et l'ascenseur était bel et bien coincé à terre. Thrak émit l'hypothèse de générateurs auxiliaires d'énergie, qui, en service après le Changement, seraient à présent éteints. Peut-être y avait-il moyen de les réactiver, auquel cas l'ascenseur se remettrait peut-être en marche, mais en attendant, ils étaient bloqués avant même d'avoir pu commencer à explorer le complexe.

Ce fut Lina qui trouva la solution. Alors que le groupe commençait à tourner en rond à force de réfléchir à une alternative, la jeune fille était partie inspecter le monte-charge. A l'origine, elle était simplement partie dissiper sa frustration en fumant une cigarette, lorsqu'elle avait remarqué une trappe dans le plafond de la cage d'acier. L'habitacle de l'ascenseur étant haut de trois mètres, elle ne parvint pas à l'atteindre, mais fit part de sa découverte aux autres, qui s'empressèrent d'examiner la trouvaille.

« Il doit y avoir une échelle de secours, ou quelque chose du genre, non ? On pourrait passer par là, suggéra Élise.
- Tu as vu la taille de cette trappe ? Il faut être anorexique pour passer, grommela Thrak. Jamais je n'arriverai à grimper là-dedans.
- Fais-moi la courte échelle, Thrak. » intima Lina en jetant son mégot de cigarette par terre.

Le colosse d'ébène fit encore mieux : il souleva la jeune fille à bras tendu, comme si elle était aussi légère qu'une plume, et l'amena juste au-dessous de la trappe.

« Woah woah woah ! J'avais dit la courte échelle, pas le manège volant ! protesta Lina en plaquant ses mains contre le plafond.
- Arrête de râler et ouvre donc cette trappe ! sourit Kate.
- Ça vient, ça vient ! »

Lina batailla quelques instants avec le verrou de l'issue, puis parvint à ouvrir le panneau d'acier, qui se décrocha et tomba droit sur le sol, manquant de toucher Thrak, qui lâcha un grommellement rauque.

« Oups. Désolée. Les joints étaient pétés. Bon, je grimpe ! »

La jeune fille se hissa péniblement à travers l'ouverture avec l'aide de son porteur, disparaissant un instant à la vue du groupe. Quelques secondes plus tard, ils entendirent sa voix :

« Z'aviez raison, doc' ! Il y a une échelle de service, sur le côté ! Je sais pas jusqu'où ça monte, mais à mon avis, on doit pouvoir aller assez haut !
- Attends nous avant de partir toute seule !
- Ouais, ouais... Mais dépêchez-vous ! »

Thrak se tourna vers eux et désigna la trappe d'un signe de tête.

« Bon. Je vais vous aider à grimper.
- On ne va pas te laisser tout seul en bas, objecta Élise. Personne ne se sépare du groupe.
- De toute manière, je ne passerai jamais par là. On est bien obligés de se séparer.
- Alors je reste avec toi. Kate, Lyrian et Adam, vous n'avez qu'à rejoindre Lina. Mieux vaut faire des groupes de deux au minimum. On ne sait jamais ce qui pourrait se passer, reprit l'infirmière.
- La sagesse incarnée, approuva Kate.
- Bon, bon. On fait comme ça. Lyrian d'abord. Allez, mon garçon, approche. Lina, aide-le à grimper ! »

L'adolescent s'exécuta. Thrak plaça ses mains en guise de marchepied, et le garçon n'eut qu'à y prendre appui avant que le colosse ne le soulève jusqu'au plafond. Lina en profita pour saisir le poignet de Lyrian et l'aida à se hisser à travers la trappe.

Quelques secondes plus tard, Adam les rejoignit avec souplesse au-dessus de l'ascenseur. L'hybride et Lyrian aidèrent enfin Kate à monter, et tous examinèrent l'immense conduit qui s'élançait au-dessus d'eux.
La cage d'ascenseur était si grande que Lyrian ne parvenait pas à en voir le bout ; loin au-dessus d'eux, l'obscurité enveloppaient tout, masquant le plafond à leurs yeux. Quelques diodes clignotaient faiblement ça et là, mais dans l'ensemble, le conduit était plongé dans les ténèbres. A leur droite, éclairée par la faible lumière qui passait par la trappe, se trouvait une échelle, qui courait le long du mur jusqu'à disparaître dans l'obscurité.
Lina sortit une lampe torche de sa poche et dirigea le faisceau lumineux vers l'échelle, qu'elle se mit à suivre jusqu'à ce que la lumière ne porte plus assez loin. Même là, il était impossible de voir où cela menait.

« La grimpette va être marrante, lâcha Kate, résumant en quelques mots ce que tous pensaient.
- Bon, vous quatre ! Essayez de monter jusqu'au premier niveau via l'échelle. Une fois que vous y êtes, voyez s'il n'y a pas un moyen de rétablir le courant. Si vous parvenez à remettre ce monte-charge en marche, c'est parfait, déclara Thrak.
- Et sinon ? demanda Lyrian.
- Sinon, vous continuez la mission sans nous. Trouvez des informations sur les activités de X-Corp. Au moindre problème, vous redescendez. Pas d'imprudence. Je veux des rapports toutes les heures. Autrement dit, si dans une heure, l'un de vous n'a pas crié dans le conduit pour nous dire que vous êtes bien en haut, on conclura qu'il vous est arrivé malheur.
- Les voix portent, dans le noir. S'il y a quelque chose d'autre que nous dans ce laboratoire, c'est le meilleur moyen de l'avertir de notre présence, contesta Adam, dont la fourrure noire dissimulait le visage dans l'obscurité.
- Tu as une meilleure idée ?
- On n'a pas de talkie-walkie ? suggéra Kate.
- Toutes les technologies de communication sont HS depuis le Changement, je te rappelle. Ça vaut pour les talkie comme pour les téléphones.
- Ah, merde...
- J'enverrai un signal que vous reconnaîtrez, lâcha Adam.
- Quel genre de signal ? interrogea Lina.
- Une lumière. »

Lina haussa les épaules, visiblement dubitative.

« Bon, on fait comme ça. Au pire, si ça ne marche pas, criez et puis c'est tout. Bonne chance. » conclut Thrak.

~*~
Les bras de Lyrian commençaient à le tirailler. Il ignorait combien de temps s'était écoulé depuis le début de leur ascension, mais il ne voyait plus l'ascenseur depuis longtemps.

Lina et Kate grimpaient en tête, tandis qu'Adam fermait la marche.

« Interdiction de mater, je te préviens, avait averti Kate au début de l'ascension.
- Ça veut dire quoi ? » avait interrogé Lyrian sans comprendre, ce qui avait suscité les rires de Lina.

Chaque barreau était plus dur à escalader que le précédent. Les ténèbres s'amassaient autour d'eux, les enveloppant si bien que Lyrian ne parvenait même plus à discerner Kate, qui progressait au-dessus de lui. Le moindre regard en bas lui donnait le vertige. L'obscurité était telle que le garçon se demandait s'ils ne risquaient pas de rater l'ouverture du premier palier lorsqu'ils la croiseraient.

Soudain, Lina, probablement épuisée, rata un barreau et lâcha prise. La jeune fille commença à tomber en criant, et son désespoir se répercuta sur les murs.

« LINA ! » s'exclama Kate.

Lyrian tenta de l'attraper et saisit la veste de la jeune fille, mais le vêtement se déroba et l'adolescente continua sa chute. Elle ne dut son salut qu'à l'intervention preste d'Adam, qui lui attrapa le poignet d'une main ferme et la ramena immédiatement vers l'échelle.

« Je te tiens, jeune fille.
- M...merci... haleta Lina, qui se cramponnait aux barreaux en tremblant.
- Ça va aller ? s'inquiéta Kate.
- C... C'est bon. J'ai juste flippé sec... Putain, Adam, tu m'as sauvé la vie... J'ai failli mourir...
- Ne regardez pas en bas, et ça ira. » conseilla Adam au groupe.

Lina refusa d'avancer pendant une bonne minute, tétanisée par la peur. Lyrian lui-même sentait son cœur battre la chamade. Le danger que représentait cette expédition venait juste de prendre forme sous leurs yeux.
Lorsque la jeune fille fut calmée, ils reprirent leur ascension, cette fois plus prudemment. Kate, désormais en première position, progressait d'un barreau à l'autre avec un sang-froid redoublé, tandis que Lyrian jetait fréquemment des regards en arrière pour s'assurer que les deux autres allaient bien.

Enfin, au bout de ce qui lui avait paru une éternité, Kate s'exclama :

« Y'a de la lumière, juste là ! Je crois que c'est le premier niveau ! »

Péniblement, la jeune femme se hissa sur un rebord qui bordait les murs et longea la paroi jusqu'à l'ouverture qu'elle avait remarquée. En effet, une légère lumière clignotait, brillant faiblement à travers un interstice entre deux portes d'ascenseur. Lyrian la rejoignit bientôt et tous deux écartèrent les battants coulissantes dans un ultime effort, avant de s'effondrer sur le sol du palier, haletants. Adam suivit bientôt, un œil vigilant fixé sur Lina, qui tremblait toujours.

Lyrian eut la présence d'esprit d'allumer la lampe torche dans la veste de Lina et d'éclairer les environs. Le groupe se trouvait dans ce qui semblait être un couloir en ruines. Là aussi, des fissures zébraient les parois, et quelques morceaux de bétons s'étaient détachés et jonchaient le sol - cependant, ce niveau du complexe semblait lui aussi avoir mieux résisté que celui où Lyrian se rappelait s'être réveillé.
Deux voies s'offraient à eux : le chemin de gauche, et celui de droite.

« La vache, on a grimpé pendant une demie-heure, déclara Kate en jetant un œil à son montre. Je sais pas vous, mais moi, je prends une pause.
- Oui, s'il vous plaît... » murmura Lina, toujours légèrement crispée.

Lyrian lui rendit sa veste avec ce qui se voulait un sourire chaleureux, et l'adolescente le remercia d'un signe de tête bref, avant de fouiller dans ses poches et d'en sortir une cigarette, qu'elle alluma prestement. Après quelques bouffées, elle parut rassérénée et sembla se détendre un peu.

Adam se leva alors et s'approcha de l'ouverture.

« Je crois qu'ils ont entendu ton cri de toute à l'heure, mais mieux vaut les prévenir, lâcha-t-il.
- C'est quoi, alors, ton signal ? » interrogea Kate.

L'hybride passa une main dans l'interstice et tendit sa paume vers le bas. Lyrian ne vit pas très bien ce qu'il fit, mais une lumière argentée, pareille à l'éclat lunaire, brilla vaguement, avant d'entamer une lente descente dans le conduit. Soufflés, les trois autres ne firent cependant aucun commentaire. Après tout, les étranges aptitudes des cobayes commençaient à être monnaie courante.

Alors que les compagnons se remettaient à peine de leur ascension, un hurlement se fit entendre. Un rugissement rauque, bestial, qui évoqua chez Lyrian des souvenirs lointains. Il avait déjà entendu ce bruit, mais cela n'empêcha pas son sang de se glacer dans ses veines. Autour de lui, ses compagnons s'étaient figés, l'oreille tendue, guettant un autre cri.

« On n'est pas seuls. » lâcha Adam.