Volonté
Je ne sais pas ce qui s'est passé. peut-être que je me suis à nouveau endormie, ou peut-être que j'ai simplement fermé les yeux, mais quand je les ai rouverts, j'étais seule.
Je suis au milieu des feuilles mortes, les feuilles de l'arbre. Celui-ci semble mort. Autour, plus rien que de l'herbe jaunie. Et j'ai ce pressentiment, inexplicable, que bientôt ce ne sera plus seulement le désert, mais le vide.
Dans ma main, il y a une feuille chiffonée. D'un côté, les mots que j'ai écrits, et de l'autre, le dessin d'un Rattatac qui montre les dents.
"Tout ce que j'ai pu faire, c'est t'empêcher de disparaître, toi. Car alors, j'aurais disparu aussi, et tout aurait été perdu."
Je n'ai plus rien. Plus rien à perdre, sans doute. Je ne retrouve pas mon stylo. Je froisse à nouveau la feuille dans ma main. Je n'ai aucune idée de comment m'y prendre, par où commencer, mais il faut pourtant que j'agisse.
J'appelle. Son nom, la première chose qu'il m'a dite. Le nom d'un mythe auquel je n'ai jamais voulu croire.
- Mew !
Enfin.
Je sens sa présence, que j'ai toujours voulu nier. Son esprit, quelque part dans le mien, son immense pouvoir. Je ne sais pas ce qu'il faut faire. J'essaie de le repousser, hors de moi, loin. Je ne comprends pas moi-même comment je m'y prends. Peu importe.
- Mew ! je répète.
...
- VA-T'EN !
Je le vois. Une vague forme rose aussi floue que le reste... pourquoi tout est flou ? Mais au moins, j'ai réussi. Et il libère son énergie, son pouvoir, il... Je ne comprends pas très bien ce qui se passe exactement. Cela me dépasse. Je crois qu'il donne son énergie au monde. Pour le faire revivre.
- Mew !
Je ne sais pas s'il m'entend. il est si lointain... Je ne sais même pas si j'ai parlé. Pourtant, il faut que je l'appelle...
- Aide-moi ! Sauve-moi... aussi !
Car je crois que... ce que j'ai fait... Je suis moi aussi en train de disparaître...
"Je ne te laisserai pas mourir. Car tu mérites de vivre plus encore qu'un autre. Tu as fait preuve de courage, de volonté. Merci beaucoup."
- Dis... pourquoi...
"Pourquoi toi ? Je ne sais pas. Pourquoi toi, pourquoi moi, pourquoi maintenant... Même moi, je ne suis pas le maître de cette histoire."
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On m'appelle d'en bas. Il faut que j'aille manger. On dirait un jour comme un autre, comme avant. Dehors, le jardin est vert. Je me lève à regret. Il est donc si tard ? J'enfile les premiers vêtements venus. je prendrai ma douche plus tard. Je passe devant mon bureau. J'y retrouve des papiers chiffonés. Une feuille à carreaux, couverte de graffiti d'un côté, et de mots de l'autre. Une page d'agenda. Un Post-it jaune. Une minuscule page arrachée, en boule.
Mes Pokéball sont alignées à leur place. L'une d'entre elles est vide, c'est celle de Goélise. Soudain, on frappe au carreau de la fenêtre. L'oiseau de mer est là. Je lui ouvre, il a une feuille de papier dans ses pattes. Je la prends et je lis le message.
Je crois que je n'ai pas compris tout ce qui s'est passé. J'espère en tout cas que tu t'en es sortie. Je suppose que si c'est le cas, tu as envie de te changer les idées. Dis, ça te dirait de me rejoindre ? Je suis à Oliville.
Je souris. Je lui répondrai tout à l'heure.
En allant chercher la Pokéball vide de Goélise, je constate autre chose : il y a une Ball en trop. J'ai cinq Pokémon, pas six, pourtant il y a bien six Pokéballs. Lorsque je tends la main pour prendre la sixième, j'entends à nouveau la voix de Mew.
"C'est moi. Tout cela m'a demandé un énorme effort, et une formidable quantité d'énergie. A présent, je ne dois plus être qu'un Pokémon psychique ordinaire, je crois. J'ai pris la liberté d'occuper une des Pokéball vides qui traînaient... je t'ai déjà beaucoup demandé, mais accepterais-tu de recueillir le pauvre Pokémon sans défense que je suis ?
- Oui, bien sûr, dis-je avec un sourire.
"Autre chose : tu préférerais peut-être... ne plus entendre de voix ?"
- Si c'est possible..., dis-je en riant avant de quitter ma chambre.