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Apocalyptica de Drayker



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Informations

» Auteur : Drayker - Voir le profil
» Créé le 23/02/2014 à 17:19
» Dernière mise à jour le 15/10/2017 à 18:06

» Mots-clés :   Drame   Présence de poké-humains   Région inventée   Science fiction   Suspense

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[Témoignage 2/3] Colosse d'ébène dans un désert brûlant
Je ne suis pas aussi doué pour raconter les histoires qu'Andrew, mon garçon. Mais j'imagine que tu dois avoir beaucoup de questions sur ce que tu es, et je crois que je peux y répondre.

Après le Changement, je me suis réveillé dans une sorte de tube de verre, dans une cellule blanche, dans un laboratoire en ruines. Comme toi, j'étais incapable de me souvenir de ce que je faisais ici.

Au début, j'étais seul, mais à force d'errer dans le complexe, j'ai rencontré de plus en plus de gens comme moi, déboussolés. Au final, nous étions une dizaine, hommes et femmes d'âges variés. Tous habillés dans une sorte de combinaison grise. Certains avaient l'air... malades. Deux ou trois étaient blessés, probablement par des morceaux de verre ou de roche. D'autres étaient complètement muets, perdus, sans repères. J'étais l'un des rares capables de parler. Mais comme toi, je n'avais aucune idée de pourquoi j'étais là.

On a marché longtemps avant de trouver la sortie. Personne ne parlait. Le but, c'était juste de survivre, de comprendre. De voir le monde. Il faut dire qu'on était un peu à côté de nos pompes. J'avais du mal à réfléchir, comme si j'étais encore à moitié endormi. Tout ce que je voulais, c'était sortir. Et c'était pareil pour les autres.

Et on a fini par se retrouver dans un désert. Un immense désert. Que du sable, à perte de vue. Et un soleil de plomb. Je me rappelle qu'une femme s'est mise à crier, comme si la lumière lui faisait mal. Elle s'est enfuie dans le laboratoire. On n'a même pas cherché à la rattraper.

Personne ne savait quoi faire. On restait là, debout, perdus au milieu de rien. J'ai été le premier à réagir. J'ai dit que j'allais marcher, m'éloigner du soleil. Qu'ils n'avaient qu'à me suivre s'ils en avaient envie. Six m'ont suivi. Deux sont restés. Ils ne voulaient pas affronter le soleil, je crois.

Alors on a commencé à marcher. A vrai dire, je ne sais même pas combien de temps ça a duré. Peut-être des heures entières. Des jours. Certains retrouvaient la parole, mais on ne parlait que pour se lamenter. Je me rappelle d'une gamine, un tout petit brin de fille, qui demandait si on allait bientôt arriver. Je lui ai répondu que je n'en savais rien.

On mourrait de soif. Le soleil nous brûlait, le sable nous brûlait, et il n'y avait toujours rien à l'horizon, à part le désert. On a fini par tomber sur une sorte de rocher qui nous a offert un peu d'ombre. On s'est arrêtés là. La petite fille pleurait. Un homme était tombé dans le sable, des heures avant, et ne s'était pas relevé. Je venais juste de m'en rendre compte.

Je pensais qu'on allait mourir là, à l'abri du soleil. Je ne savais même pas pourquoi on essayait de survivre. Réflexe, sûrement. Je me suis relevé et j'ai voulu reprendre la marche. Cette fois, personne n'a voulu me suivre. Bizarrement, tous étaient exténués, brûlés par le soleil, alors que moi, j'avais encore de l'énergie. Alors je suis parti seul, en promettant de rapporter de l'aide si j'en trouvais.

Le rocher a vite disparu derrière moi, et je continuais. J'avais la gorge en feu, mais je le supportais. Il le fallait.
J'ai marché. Longtemps. Très longtemps. Sans savoir comment j'arrivais encore à tenir. A vrai dire, je ne m'en rappelle même plus. Mon esprit a évacué ces souvenirs.

A un moment, j'ai aperçu une silhouette au loin. Quelqu'un qui titubait dans le sable. Je me suis approché. C'était une jeune fille. Lina.

Elle m'a tout raconté. Le Changement. Les morts. La survie. C'est en parlant avec elle que j'ai réalisé que la catastrophe avait eu lieu des jours auparavant.

Lina était mal en point, bien pire que moi. Elle était brûlée par le soleil, et morte de soif. Je lui ai dit qu'il me fallait de l'aide pour les autres, restés près du rocher. Elle m'a répondu qu'il y avait une ville pas loin. Salmyre. Qu'il y avait probablement des survivants là-bas. Je l'ai suivie.

Lina fatiguait à vue d'œil. Au début, on parlait. Puis on s'est tus. Puis elle est tombée dans le sable. Sans se relever.

Je l'ai ramassée, et je l'ai portée. Son cœur battait encore. Pour combien de temps, je n'en savais rien. Mais il était hors de question que j'abandonne.

Le reste, Andrew l'a déjà raconté. Il nous a trouvés alors que j'étais à moitié mort, il nous a ramenés dans leur repère, nous a soignés. J'ai parlé du laboratoire. Des morts. Des ruines. De la marche. Du désert. J'ai parlé des autres. Du rocher. De la soif.
Et lui m'a raconté ce qui se passait à Salmyre. Le Changement. Le silence radio. Les survivants, les raids, les traques. Leurs chances de s'en sortir en vie qui diminuaient chaque jour.

Andrew et Amara voulaient partir. Tenter leur chance dans le désert. Rallier un maximum de survivants et fuir le groupe prêt à écraser les autres rescapés du Changement.

Un plan a rapidement été mis au point. Andrew et un autre homme du groupe, Mark, feraient une ultime fois le tour de la ville pour essayer de recruter un maximum de survivants, tout en se faisant discrets.
Pendant ce temps, Amara et son Tortank feraient des réserves d'eau. Autant que possible. Les autres prépareraient les affaires et défendraient le camp. Une fois Andrew et Mark revenus, nous nous enfuirions dans le désert en montant dans le fourgon qu'Andrew et les autres avaient récupéré.

En deux jours, on était prêts. Lina était à nouveau en état de marcher, et j'avais récupéré mes forces. Fréquenter à nouveau d'autres personnes me faisait du bien. Je redécouvrais la civilisation. Enfin ce qu'il en restait.

Un matin, nous avons décidé de passer à l'action. Andrew et Mark sont partis. Nous, on a attendu leur retour. Tout le monde s'agitait. J'essayais de rester le plus calme possible. J'avais peur que ça tourne mal.

Et ça a mal tourné. En milieu d'après-midi, des coups de feu on retenti. Des rugissements de Pokémon, aussi. Andrew est arrivé, ensanglanté. Six ou sept personnes l'avaient suivi. Mais l'autre groupe, celui des traqueurs, leur était tombé dessus. Mark était mort. Il n'y avait pas de temps à perdre.

On a pris nos affaires, et on a voulu prendre le fourgon. On a eu le temps de faire cinquante mètres avant de crever. Une balle avait touché un pneu. On est sortis en vitesse, et on s'est mis à courir. Andrew a pris la tête. Il nous guidait à travers les ruelles de Salmyre, tandis que les autres nous poursuivaient. J'apercevais des hommes armés à nos trousses. Ils n'hésitaient pas à nous tirer dessus.

Une balle a touché une femme à ma droite. Pleine cuisse. Elle s'est effondrée par terre en criant. J'ai voulu m'arrêter et la traîner à l'abri. Ils nous ont canardés. Sans retenue. La pauvre a été criblée de balles.

En me relevant, j'ai vu le regard horrifié de Lina. J'avais été touché. Partout. Ma combinaison grise était trouée.

Sauf que je n'étais pas blessé. Pas une goutte de sang. Pas de douleur.

Je n'ai pas cherché à comprendre. J'ai continué à courir. Lina m'avait attendu, mais les autres étaient loin devant. On zigzaguait au milieu des immeubles en ruines en priant pour ne pas nous faire toucher. J'essayais toujours de me placer entre Lina et nos poursuivants. A un moment, un Arbok a déboulé et a attrapé la cheville d'un de ceux qui avaient accepté de suivre Andrew. Le pauvre type a eu les os brisés en une seule constriction. Mort sur le coup.

On rattrapait petit à petit Andrew et les autres. Un homme du groupe ennemi a surgi d'une ruelle pour nous barrer le chemin. Je lui ai rompu les cervicales avant qu'il ne puisse tirer. Lina hurlait.

C'était la folie. Je ne me rappelle plus très bien de ce qu'il s'est passé ensuite. J'avais tué un homme. Des mes mains nues. Sans effort.

Je me souviens qu'on a fini par arriver en périphérie de la ville. Andrew et les autres couraient déjà dans le désert. Le soleil se couchait, et les coups de feu étaient plus rares. Je crois que lorsqu'il ont compris qu'on s'enfuyait hors de Salmyre, les traqueurs ont abandonnés. Peut-être qu'ils pensaient qu'on n'avait aucune chance. Et ils avaient sûrement raison.

Les autres avaient dû arriver à la même conclusion, parce qu'on les a vu s'arrêter. On les a rejoints.
Ils étaient tous hors d'haleine. Amara était blanche comme un linge. Tout le monde avait l'air traumatisé. Certains pleuraient, d'autres restaient là, à regarder le sable, sans bouger, comme s'ils étaient vides de toute émotion. Moi, j'étais silencieux. Personne n'avait fait attention à mes vêtements troués. Personne sauf Andrew. Mais il n'a rien dit.

Sur la douzaine de personnes à être parties, nous n'étions plus que sept.

Je me rappelle que ce soir-là, pour la première fois, j'ai eu peur de ce qu'était devenus les gens. De ce qu'était devenue l'humanité. De ce que j'avais eu à faire pour survivre. Et ça n'allait pas s'arranger.


~*~Thrak s'interrompit et se tourna vers Lyrian. Ce dernier était resté muet pendant tout le récit des deux hommes. Petit à petit, il commençait à comprendre. La confusion qui avait régné dans l'esprit de ces gens se répétait jusque dans leur récit.
Ils ne détenaient chacun qu'un minuscule fragment du malheur qui avait frappé l'humanité. Mais c'était suffisant pour que l'adolescent parvienne à se mettre à leur place.
A imaginer les extrémités auxquelles ils durent recourir.
A se représenter les ruines de Salmyre, arène sauvage à la gloire de la bestialité de l'homme.
A comprendre la folie du monde.

Et malgré tout, le garçon sentait que Thrak et Andrew n'avaient fait qu'effleurer la surface. Les dons hors normes du colosse d'ébène étaient une réponse aux interrogations de Lyrian sur sa propre nature, une réponse qui se faisait désirer.

Aussi l'adolescent mit fin à ses réflexions et attendit la suite.