Chapitre 29 : L'ombre d'Uriel
Mon ami est tel de l'eau cristalline, la plus pure qui soit. Il s'infiltre dans le cœur des gens, qui ont envie de croire à son sourire, à ses paroles, à sa bonté. Ils ne se rendent pas compte qu'ils ne sont que des pions pour lui.
*****
À la tombée de la nuit, les défenseurs de Naglima eurent une surprise. Le siège cessa d'un coup d'un seul. Les soldats de Cinhol cessèrent de les mitrailler de flèches ou d'obus, et abandonnèrent leurs échelles pour se replier. Alors, après l'instant de stupeur, de nombreux cris de joie et de triomphe retentirent.
- Ils fuient ! Barneas s'en va !
- On a gagné ! Naglima a tenu !
- Vive le roi Adam !
Deornas vint retrouver Isgon, Padreis, Adam et Astarias sur les remparts.
- Mais que se passe-t-il ?!
- Vois par toi-même, dit Isgon. Ils fuient la queue entre les jambes !
- C'est bizarre, souffla Adam. Nous n'avons éliminé même pas la moitié de leur force, alors que nous commencions à faiblir...
- Cet enculeur de chevaux de Barneas a dû comprendre que jamais il ne réussirait à prendre Naglima, foutre d'Arceus ! Rugit le duc avec orgueil. C'est étonnant de sa part, mais on dirait bien qu'il sait réfléchir un peu !
Mais Adam n'accepta pas la version du duc. Deornas non plus, apparemment. Était-ce un stratagème pour les prendre par surprise plus tard ? Dans l'ignorance, ils restèrent debout toute la nuit, à poursuivre la garde et renforcer les défenses au cas où. Rien durant la nuit, ni au matin, si ce n'était une obscurité anormale qui s'était emparée de la cité, comme si elle était plongée au cœur d'un orage. À midi, ils devaient encore utiliser les torches pour voir devant eux, et une tension s'affirma dans l'air, quelque chose qui les fit tous frissonner. Les hommes commencèrent à murmurer entre eux, inquiets par ce sortilège apparent. C'est alors qu'Anis vint les rejoindre.
- Il se passe quelque chose, murmura-t-elle. Quelque chose de sombre, de mauvais, de glacial. Je suis une experte en Pokemon Spectre et donc en fantômes, et je sais de quoi je parle.
Des éclairs commencèrent à tomber. L'un d'eux éclaira un moment la plaine devant eux, pour que tout le monde puisse voir ce qui se présentait à eux. On aurait dit des ombres mouvantes. Des êtres de brumes, au longs bras effilés, sans visages. Une armée de spectres approchait. Ils faisaient penser aux mêmes apparitions qu'Adam avait affronté lors de sa première rencontre avec Ryates. Le Patriarche était sûrement responsable de ce sortilège. La panique commença. Si les valeureux soldats de Naglima ne craignaient pas une armée d'humains, c'est autre chose avec des fantômes. Le désordre gagna les murailles, en dépit des efforts d'Isgon et des autres pour ramener le calme. L'armée des ombres commença à s'engouffrer dans la cité. Ils n'eurent pas besoin d'escalader les murailles ; ils passèrent au travers, tout comme les flèches leur passaient au travers. Quand il fut évident que rien ne pouvait tuer ces créatures, Isgon ordonna la fuite. La cité était perdue. Tous devaient fuir, trouver refuge dans la ville Rimerlot la plus proche. Adam, bien qu'effrayé, ne l'acceptait pas.
- Meminyar peut combattre ces choses, affirma-t-il en tendant l'épée royale. Je l'ai déjà fait !
- Vous comptez affronter à vous seul cette armée ?! Cracha Isgon. Il faut fuir, mon gars ! C'est vous que veut Ryates !
- Non. Ce sont les épées... Où est Sifulis ?
- C'est moi qui l'ai, dit Deornas en la montrant.
- Dépêchez-vous de fuir avec les autres, lui ordonna Adam. Ryates ne doit pas mettre la main sur elle. Tant qu'il nous reste une épée, il nous reste de l'espoir.
- Comment ça, qu'une épée ? Demanda Astarias. Que comptez-vous...
Mais Adam avait déjà filé. À travers les éclairs, il avait vu la silhouette sombre de Ryates pénétrer dans la citadelle, alors que ses spectres avaient fait sauter le mur. Partout autour de lui, les hommes fuyaient ou se faisaient tuer par les spectres. Il suffisait à ces monstres de les toucher pour que leur peau se mette à fumer, puis à fondre. C'était un spectacle épouvantable, d'apocalypse. Pourtant, Adam s'enfonça un peu plus dans l'horreur, détruisant les spectres avec Meminyar qui brillait d'un éclat doré rassurant. Il voulait au moins se débarrasser de Ryates. Deornas pourrait continuer la lutte avec Sifulis, mais Adam voulait au moins venger ses parents et débarrasser le monde de cet être infâme. Et, dans la cour centrale de Naglima, Adam refit face à son oncle. Celui-ci semblait l'attendre.
- Ah, tu es là. Et avec Meminyar en prime. Bien. Très bien. Tu m'éviteras de devoir te courir après.
Adam le foudroya du regard avec toute la haine qu'il était possible de montrer. Ryates eut un rictus.
- Ce regard... Oui, c'est bien lui ! Celui que le Seigneur Uriel hait tant ! Il est avec moi, en ce moment même, le sais-tu ? Il ne cesse de s'agiter en réclamant ta mort. Tu es un être répugnant, Adam Haldar. Tu n'aurais jamais dû venir au monde. Ton existence même est une insulte ! Je vais réparer cette faute ici-même. Alors le Seigneur Uriel retrouvera enfin la paix.
Ryates leva Peine, qu'il pointa vers Adam. Alors, un rayon noir en sorti. Comme s'il agissait sous les commandes de quelqu'un d'autre, Adam leva Meminyar, et une sorte de bouclier doré l'enveloppa, déviant le rayon noir qui alla détruire une maison à coté.
- Castel est bien là, à ce que je vois, commenta Ryates. Toujours à se trouver là où il ne devrait pas. Mais il ne te sauvera pas.
Ryates prépara un autre rayon noir, au même moment où des dizaines de spectres se lancèrent sur Adam. Le jeune homme sut, sans savoir comment, qu'il ne pourrait pas se défendre du rayon et des spectres en même temps. C'est alors que ceux qui l'avaient suivi arrivèrent. Astarias et son Metali, Shinobourge, Anis et ses Pokemon Spectre, ainsi que Padreis. Le Tutankafer d'Anis repoussa la horde de spectre avec une attaque Ball-Ombre qui les dispersa proprement. Bien sûr. Le spectre craignait le spectre...
- Et voici toute une flopée de traîtres, réagit Ryates. Astarias, bien sûr... Je savais que tôt ou tard, tu trahirais Nirina à nouveau.
- Je ne l'ai jamais trahi, répliqua le chevalier. Et je ne te laisserai pas plus longtemps la contaminer avec tes sorcelleries du démon !
Ryates fit comme s'il ne l'avait pas entendu.
- Sire Shinobourge... Vous aussi, vous étiez là la dernière fois, alors que vous n'étiez qu'un petit Cloverte à peine sorti de l'œuf. Vous avez défendu ce garçon alors qu'il n'était qu'un bébé. Drôle comme le destin nous a tous à nouveau réuni...
Il passa à Padreis.
- Ah, ce cher Padreis... La reine se languit de toi, de même que ton fils. Tu vas les faire attendre encore longtemps pour ce bâtard ?
Le fils du duc ne répondit pas, mais resserra sa prise sur sa hache.
- Et enfin, nous avons cette chère vieille Anis, continua Ryates. Je t'avais reconnu la dernière fois, au château, mais je doute que toi, tu en ais fait autant à mon sujet.
Anis fronça les sourcils, et regarda Ryates plus attentivement. Puis ses yeux s'écarquillèrent.
- Pro-professeur Wufot ? C'est... bien vous ?
- Cela fait un moment que je n'ai plus entendu ce nom, dit Ryates avec une certaine nostalgie. Je l'ai abandonné depuis longtemps. Mais je suis ravi que tu te rappelles de ton vieux professeur d'Histoire et de civilisation antique. C'est aussi un coup du destin que tu participes à tout ça. Quand je t'ai vu avec ce garçon, j'ai su que tu ne manquerais pas d'élucider le secret des trois épées et de dénicher l'emplacement de Sifulis. Tu étais ma meilleure élève, après tout. Mais pour plus de sécurité, je t'ai un peu aidé en remettant Meminyar à Padreis en sachant très bien qu'il l'apporterait à Naglima.
- Pourquoi faites-vous cela ? Demanda Anis avec désespoir. Que vous est-il arrivé ?!
- J'ai vu la vérité, c'est tout. La vérité sur Cinhol. Sur Uriel. Et sur ce prétendu Sauveur du Millénaire, Castel Haldar. Pour nous autres historiens, la recherche de la vérité est le point central de notre vie, n'est-ce pas Anis ?
La professeur de l'Elite 4 secoua la tête, comme si la folie de son ancien mentor lui causait une grande souffrance.
- Est-ce une recherche de vérité que de provoquer la mort et la souffrance de milliers de personnes ?
- Il n'a jamais été dit que les historiens devaient se contenter d'observer, répliqua Ryates. Nous pouvons prendre part à l'Histoire, et façonner le destin. Toi-même, tu le fais en ce moment même en venant en aide à ce garçon. Tu as choisi de le soutenir. Moi, j'ai choisi de soutenir le Seigneur Uriel. Il va enfin accomplir ce qu'il aurait du faire il y a cinq cent ans : la destruction définitive de Castel Haldar et de son œuvre !
Ryates souleva son épée, mais pas pour tirer un rayon noir cette fois. Au lieu d'un rayon, ce fut une espèce de fumée qui sorti de Peine. Une ombre d'un noir bien plus intense que l'armée des spectres de Ryates, qui prenait forme peu à peu. Adam entendait cette ombre lui murmurer des choses. Des paroles indiscernables mais menaçantes, des paroles de vengeance, de colère, de mort, qui firent plier les genoux à Adam et lui fit mettre ses mains sur ses oreilles pour ne plus les entendre. Mais les marmonnements de la voix obscure continuèrent à parvenir à son cerveau, écorchant petit à petit sa volonté.
L'ombre noire avait totalement pris forme à présent. C'était une silhouette humaine, brunâtre, qui semblait aspirer la lumière pour la rejeter en ténèbres. Il était entièrement noir, si ce n'était deux yeux rougeoyants au niveau de la tête, qui plus encore que la voix faisait sombrer Adam dans le plus profond des désespoirs. Il n'avait plus qu'une envie : se terrer dans un coin et se couper de tout pour ne plus avoir à supporter ce regard de braise, quitte à s'arracher les yeux ou même mourir. Et il en était de même pour ses compagnons. Adam comprit qu'il était face au fantôme de l'ennemi suprême, Uriel, le Rejeté de la Lumière. Sa silhouette était la même que celle qu'il avait vue en rêve quand il s'était trouvé dans le corps de Castel. D'ailleurs, en parlant de Castel... Le Fondateur choisi justement se moment là pour se manifester.
- Laisse-moi prendre le contrôle, je te prie, dit-il dans sa tête.
Avant d'avoir compris ce que Castel voulait dire, Adam se sentit comme expulsé de son propre corps. Sa conscience ne contrôlait plus rien, et celle de quelqu'un d'autre avait pris le dessus. Quand Adam parla, ce fut Castel qui prononça ses paroles, et Adam n'était plus qu'un observateur dans son propre corps.
- Cela faisait longtemps, mon ami, dit-il à l'ombre d'Uriel. La vision de ce que tu es devenu me fend le cœur.
Si le fantôme d'Uriel parut comprendre qu'il avait devant lui son ancien ennemi Castel, Ryates lui fut surpris par ce changement de ton de la part d'Adam. Et aussi par son expression. Le garçon avait il y a quelque secondes une expression terrorisé sur ses traits, et là, il avait devant lui un jeune homme serein qui dégageait naturellement une aura de pureté et de confiance. Une aura qui devint visible, tandis que le corps d'Adam projeta une lumière dorée qui écarta d'eux tous les spectres à la ronde et sembla protéger les autres de la sombre pression d'Uriel. Ryates compris enfin.
- Castel... Alors tu daignes te montrer enfin ! Lâche que tu es, à être resté caché dans ce corps depuis si longtemps, sous une autre identité !
Castel se tourna vers lui. Un air de royale indifférence peignit les traits d'Adam.
- Je n'ai rien à te dire, à toi qui t'es fourvoyé dans les bras d'Uriel par cupidité. Il te trahira tout comme il a trahi tant de gens.
Ryates voulut répondre, mais la forme désincarnée de son maître attira Peine jusqu'à lui, et bien qu'il soit sans consistance physique, un fantôme entièrement noire, il put manier l'épée. Ses murmures indistincts se firent plus graves. Castel sourit par le biais de son hôte.
- Un autre combat à l'épée, mon ami ? Alors que tu n'es qu'une ombre et moi un souvenir dans le corps de ce garçon ? Pourquoi pas...
Castel fit jaillir un océan de lumière dorée de Meminyar, tandis que la noirceur autour d'Uriel grandit. Puis quand les deux épées se rencontrèrent, ce fut un mélange de lumière et de ténèbres qui balaya tous les spectres de Ryates à la ronde. D'Adam et d'Uriel, on ne voyait que des lueurs d'or et de noir qui s'entrechoquaient à une vitesse époustouflante. Tous ne purent qu'observer, ébahi, le duel entre les deux fondateurs de Cinhol. Ryates fut le premier à se reprendre, et se tourna vers les autres.
- Je vais laisser Castel au Seigneur Uriel. Mais quant à vous, j'aurai le plaisir de m'en charger moi-même.
- Essaie donc, sorcier, répliqua Astarias. Tu n'as plus ton épée, ni tes spectres, et nous nous avons des Pokemon !
- Grand bien vous fasse. Car il se trouve que moi aussi.
À la surprise générale, Ryates tira une Pokeball de sa tunique noire. Astarias blêmit quand il comprit quel genre de Pokemon se trouvait à l'intérieur.
- Tu ne pensais tout de même pas que j'étais venu seul si, mon bon Astarias ?
Puis Ryates lança sa Pokeball. Ce qui en sorti était de toute évidence un Pokemon Spectre, à en juger sa forme fantomatique et le fait qu'il lévitait à deux mètres du sol. Son corps noir se terminait en un éclair, et de la foudre sortait de son crâne pour former un visage, de même que des mains électriques sortaient de son corps. Enfin, il flottait derrière lui une espèce de petit nuage gris. Astarias savait qui il était, pour l'avoir souvent vu avec ses deux semblables donner des conseils à Nirina et Ryates. Mais il ne s'était jamais douté que Ryates les possédait via des Pokeball.
- Pour ceux d'entre vous qui ne connaîtrait pas mon ami présent, je vais vous le présenter, sourit Ryates. Il se nomme Revener, et est l'un des trois Pokemon spectres qui se trouvaient dans la météorite à partir de laquelle les trois épées et les anneaux furent forgés. Ils sont également ceux qui passèrent un marché avec Uriel, son âme en échange de Peine.
- Oui, ils sont mentionnés dans le journal de Castel, répondit Anis. Ce sont eux, les vrais responsables de tout ça !
Revener ricana. Un ricanement grésillant, semblable à de l'électricité qui s'échappait d'une prise endommagée.
- Nous n'avons rien fait que réaliser le souhait d'Uriel, répondit-il. Oui, réaliser son souhait...
- Vous l'avez manipulé, soudoyé, corrompu ! S'agaça Anis.
- Oui, corrompre, susurra Revener. C'est notre but. Corrompre les âmes. C'est pourquoi nous existons. C'est pourquoi notre créateur nous a donné vie.
- Votre maître ? S'étonna Padreis. Il existe encore quelqu'un au dessus ?!
- Insignifiants humains. Vous ne savez rien de la réalité de cet univers ! Vos vies sont sans intérêts. Je vais vous rendre service en y mettant fin ici-même.
Revener utilisa une attaque Tonnerre sur le groupe des défenseurs. Une attaque très rapide et très lumineuse, signe qu'elle devait être d'une puissance redoutable. Anis se tint prête.
- Golemastoc !
Le Pokemon golem, qui était aussi de type sol, s'interposa pour stopper l'attaque électrique, qui ne lui fit rien du tout. Mais immédiatement après, Revener poursuivit avec une attaque Ball-Ombre cette fois, qui étala Golemastoc pour le compte. Au même moment où Anis le rappelait, Astarias lança son Metali sur Revener.
- Attaque Queue de Fer !
Le Pokemon sauta pour attaquer Revener de sa queue en lame de rasoir. Mais le Pokemon Spectre esquiva, seulement pour se retrouver face au Tutankafer et au Lugulabre d'Anis, qui tout deux attaquèrent avec une attaque Ball-Ombre combinée. Revener n'aurait pu esquiver normalement. Mais son corps tout entier s'électrifia, et il fit un mouvement rapide en arrière qui toucha Metali avant de revenir juste derrière les deux Pokemon spectres d'Anis qu'il mit K.O avec deux Ball-Ombre lancées à chaque mains.
- Comment a-t-il pu faire ça ? S'étonna Astarias.
- L'attaque Change Eclair, expliqua Anis. Je l'avais envisagée, prévue, subodorée, mais jamais à une telle vitesse. Ce Pokemon est stupéfiant ! Je serai ravie, enchantée, joyeuse de l'avoir dans ma collection.
- Le seul humain que mes frères et moi acceptons de servir est Uriel, lui répondit Revener. Et donc Ryates, qui est sa voix. Nous trois sommes l'élite des Pokemon spectres. Nous sommes le Trio des Ombres ! Les avortons que tu contrôles ne font pas le poids.
- Nous verrons. Tu m'as laissé le temps d'étudier tes caractéristiques. Maintenant, est-ce que tu tiendras face à trois à la fois ?
Anis fit appel à ses trois derniers : Ectoplasma, Momartik et Grodrive. Les trois qu'elle utilisait spécialement dans le cas de combat triple, dont elle avait fait sa spécialité. Le moment était venu de tester sa stratégie sur un unique Pokemon. Pendant ce temps, comme n'ayant pas de Pokemon, Padreis s'était jeté sur Ryates, sa hache brandie.
- Meurs, démon ! Hurla-t-il.
Sans doute s'attendait-il à ce que Ryates, privé de son épée et du soutient d'Uriel, ne soit sans défense. Il fut vite désenchanté. Le Patriarche stoppa la course de Padreis avec la seule force de son esprit, et le fils du duc se retrouva enchaîné par ce qui semblait être des ombres de chaînes.
- Qui penses-tu que je sois pour t'en prendre à moi ainsi ?! Grimaça Ryates. Après deux décennies passées avec le Trio des Ombres et le Seigneur Uriel, mon esprit s'est élevé bien au-delà des frontières de l'humain ! Peine et le Seigneur Uriel ne font qu'accroître ma puissance, mais elle est bien réelle, même sans eux !
Ryates crispa ses doigts, et les chaînes d'ombres se contractèrent autour de Padreis pour l'attirer jusqu'à lui. Le fils d'Isgon tenta de se libérer, mais ce fut peine perdu.
- Remercie-moi, je te ramène à Sa Majesté et à ton fils Alroy, ricana Ryates. Si tu te tiens bien, Nirina t'accordera peut-être la dernière volonté de le voir une dernière fois avant de t'exécuter. Mais ne t'en fais pas. Le prince n'est pas utile à mon plan. Je l'enverrai te retrouver dans peu de temps.
Padreis lui cracha à la figure un juron qui aurait fait rougir son père. C'est alors qu'un éclat argenté vint vers eux. Ryates et Padreis reconnurent Deornas qui brandissait Sifulis, animé d'un éclat d'argent. Padreis soupira mentalement. Pourquoi n'avait-il pas fuit avec les autres ?! Pourquoi apportait-il lui-même Sifulis à Uriel ? Mais alors, le fils du duc vit un éclat de peur dans les yeux de Ryates, et il comprit. Meminyar et Sifulis étaient toutes les deux présentes. Et Peine était là. Si Anis disait vrai, alors c'était l'occasion de détruire l'épée noire et Uriel une bonne fois pour toute. Mais Deornas chargea Ryates. Padreis profita du fait que le Patriarche fut déconcentré par le nouvel arrivant pour lui charger dessus, bien que toujours enchaîné. Ils chutèrent tous les deux, et Padreis cria à Deornas :
- L'épée, Deornas ! Donne-là à Adam ! Laisse-moi !
Le prince comprit. Il se précipita au milieu de la cour où l'ombre d'Uriel combattait toujours Castel dans le corps d'Adam. Le Rejeté de la Lumière eut une pause, durant laquelle il sembla regarder autour de lui, comme effrayé par quelque chose. La peur se traduisit dans ses yeux rouges quand il vit son ancienne épée passer devant lui pour atterrir dans l'autre main d'Adam, qui avait à présent les deux épées, la dorée et l'argentée. La lumière qui émanait de lui décupla, et il chargea l'ombre noire. Uriel était terrifié à présent. Avec un gémissement tangible, son ombre repénétra dans Peine, et avant que Castel n'arrive, l'épée noire se retrouva propulsée dans les airs à une vitesse folle. Peu après, ce fut au tour de Revener de suivre le même trajet que l'épée, comme malgré lui, surtout qu'il était en train de gagner haut la main contre les Pokemon d'Anis. Castel soupira, et laissa retomber ses bras.
- Tu as bien agis, Deornas, dit-il au prince. Mais Uriel a préféré la prudence à l'affrontement.
- Que s'est-il passé ?
- Uriel a fui. Il contrôle Peine, et peut lui faire parcourir de grandes distances en peu de temps comme il l'a fait. Quant à Revener, il est lié à Uriel et à l'épée. Il ne peut se trouver à une certaine distance d'eux. Il était obligé de les suivre, même à contrecœur.
- C'est bon maintenant, fit Adam en pensée. Rends-moi mon corps !
La conscience de Castel s'éclipsa, et Adam redevint maître de son propre corps. C'était une expérience... troublante. Il n'avait pas vraiment aimé.
- Ne refais jamais ça, souffla Adam.
- Si je ne l'avais pas fait, vous seriez tous morts, lui signala Castel par pensée.
Comme Adam avait parlé à voix haute, Deornas crut qu'il s'adressait à lui.
- Que je ne refasse jamais quoi, sire ?
- Pas vous. Je parlais à Castel. Il m'a chipé mon corps sans ma permission !
Deornas parut enfin comprendre.
- Vous voulez dire... que c'était le Seigneur Castel qui affrontait cet ombre ?
- Vous me croyez vraiment capable de faire tout ce qu'il a fait ? Demanda Adam avec mauvaise humeur.
Puis il se tourna vers Ryates, qui tenait toujours Padreis enchaîné.
- Relâchez-le, Ryates. Et rendez-vous. Vous n'avez plus rien. Ni armée, ni épée, ni spectres, ni Pokemon, ni même Uriel.
- L'arrogance de Castel te monte déjà à la tête, mon garçon ? Ricana le Patriarche. Pourquoi devrai-je me rendre à quelqu'un comme toi ?
Adam fit mine de réfléchir.
- Eh bien, en premier lieu, pour votre vie. Je vous promets de l'épargner le temps qu'un procès équitable ait lieu. Vous y aurez à répondre de nombreuses choses bien sûr, mon oncle.
- Une abomination comme toi ne peut être mon neveu, grimaça Ryates. Mon neveu est mort !
Ryates traça alors un signe obscur dans les airs, et il disparu aussitôt, comme par magie, en amenant Padreis avec lui. Deornas jura bruyamment, maudissant Ryates. Adam n'imaginait que trop bien ce que le Patriarche et la reine pourraient faire au pauvre Padreis. Mais il s'interrogeait aussi sur les dernières paroles de Ryates. Son neveu est mort ? Que voulait-il dire ?