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Cinhol, le Royaume Perdu de Malak



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» Auteur : Malak - Voir le profil
» Créé le 31/01/2014 à 16:08
» Dernière mise à jour le 27/07/2018 à 22:57

» Mots-clés :   Aventure   Fantastique   Médiéval   Présence de Pokémon inventés   Région inventée

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Chapitre 28 : Le siège de Naglima
Quand nous avons fondé Cinhol, nous désirions simplement vivre en paix, en harmonie avec les Pokemon. Mais depuis que mon ami a perdu la raison, notre royaume est devenu un lieu de ténèbres et de folie. Je savais que très bientôt, j'allais devoir prendre une décision.



*****



Malgré les protestations d'Isgon, Adam s'enferma dans la salle du trône avec Astarias. Ils avaient croisé Deornas qui arrivait au pas de course au passage, et le prince s'était arrêté devant son père, médusé, et dans l'attente de quelque chose. Astarias s'était contenté de passer devant lui sans lui parler, mais il avait posé au passage sa main gantée sur l'épaule de son fils. Un geste de reconnaissance et de pardon qui avait illuminé le visage de Deornas. Maintenant qu'il était seul avec le Haut Protecteur - Shinobourge ne comptait pas vraiment - Adam était un peu intimidé. Que pouvait-il bien dire à cet homme, cet oncle qui avait tenté de le tuer y'a pas si longtemps et qu'il redécouvrait aujourd'hui, démasqué.

- Vous... Vous dites êtes venu de votre plein gré ? Commença Adam avec hésitation. Nirina n'est donc pas au courant de votre présence ici ?

- En fait, Votre Altesse, expliqua posément Astarias, je suis précisément où elle voulait que j'aille. Mais j'y suis un peu trop tôt. Elle souhaitait me voir diriger l'assaut de son armée qui en ce moment même s'approche de Naglima avec l'intention de la raser totalement.

Une armée ? Qui arrivait bientôt ? Adam quitta son trône pour mettre immédiatement Isgon et Deornas au courant quand un détail lui vint à l'esprit.

- Attendez... Pourquoi m'en informer, dans ce cas ?

- Car je vais vous aider à vous défendre, répondit Astarias.

Adam fronça les sourcils.

- J'ai du mal à comprendre... Vous souhaitez trahir Nirina ? Vous avez pourtant annoncé une minute plus tôt qu'elle était la seule vraie reine.

- Et je le pense, en effet. Cependant, elle n'est plus en état de gouverner. Vous devez le savoir, Ryates se sert d'elle pour des projets innommables. J'ai toujours servi ma reine en espérant la voir se dissocier de cet homme du diable, mais depuis quelque temps, je ne la reconnais même plus. Ryates la consume lentement de l'intérieur avec son épée maudite, et quand elle ne lui servira plus à rien, il la tuera sans doute. Je ne peux laisser cela se produire. J'ai promis à Rushon... à votre père... que je défendrai sa fille à jamais. Et j'ai compris que pour la sauver, je devais me ranger à vos cotés.

Astarias surprit alors Adam en tombant à genoux devant lui.

- J'implore gracieusement Votre Altesse. Nirina n'est pas votre ennemie, malgré tout ce qu'elle aura pu faire. Je vous demande respectueusement de l'épargner et de l'amnistier de tous ses crimes, une fois que vous serez sur le trône de Cinhol. En échange de cela, je vous jurerai allégeance ici-même, et sur mon honneur, je ferai tout pour vous placer sur le trône.

- Vous aideriez à détrôner la femme que vous avez juré servir ? S'étonna Adam.

- Sa vie a plus d'importance à mes yeux que sa couronne. Je me dois de la protéger de tout le monde... y compris d'elle-même. Ai-je votre parole, prince Adam, que vous ne ferez rien à Sa Majesté Nirina ni à son fils Alroy, et que même vous les protégerez de ceux qui voudraient leur têtes ?

Adam n'hésita pas longtemps.

- Je n'ai rien contre Nirina, affirma-t-il. Et nous savons aussi qu'elle se fait manipuler par Ryates et quelqu'un... d'encore plus inquiétant que lui. Je n'avais pas l'intention de lui faire du mal si jamais on gagnait. C'est ma sœur, après tout...

- Le jurez-vous ? Insista Astarias.

Adam compris que cet homme très attaché à l'honneur attendait de lui un serment en bonne et due forme. Il prit donc Meminyar qu'il pointa sur le sol et dit :

- Moi, Adam Haldar, fils de Rushon Haldar, je jure sur mon nom, mon honneur et sur l'épée de mes ancêtres qu'il ne sera fait aucun mal à Nirina et à son fils Alroy tant que je serai roi.

Astarias s'approcha alors de lui, et se mit à genoux en posant lui aussi la main sur la garde de Meminyar.

- Et moi, Astarias Haldar, fils de Festil Haldar, je jure sur mon nom, mon honneur et sur l'épée de mes ancêtres que je vous reconnais comme nouveau suzerain, et que je vous servirai, dans la vie comme dans la mort, tant que vous honorerez votre serment.

Adam sut qu'Astarias s'en tiendrait à sa promesse quoi qu'il arrive. Plus que lui qui avait un peu improvisé pour son serment, Astarias avait prononcé le sien avec une force qui dépassait toutes les puissances de cet univers. Et Adam savait aussi que s'il s'avisait de rompre son serment et de s'en prendre à Nirina, rien en ce monde et dans les autres ne pourrait le protéger longtemps de la colère d'Astarias. Génial. Adam avait un nouveau sujet, et pas le moindre. Un ancien prince du royaume, et un dresseur Pokemon. Mais maintenant, ils devaient se préparer à défendre la cité de l'armée de Nirina. Il s'apprêtait à sortir quand il pensa à une dernière chose.

- Vous avez dit que vous étiez au courant pour ma naissance ?

- En effet, Majesté.

- Vous savez donc qui était ma mère ? Dites le moi, je vous en prie.

Astarias lui parla alors de sa mère, Ariella, qui se trouvait être la jeune sœur de Ryates. Et comme Adam l'avait soupçonné, il lui confirma bien que c'était Ryates qui avait assassiné ses deux parents. Super... le voici maintenant avec un nouvel oncle sur les bras, et un bien moins sympathique.

- Lui par contre, j'aurai le droit d'en faire ce que j'en veux, n'est-ce pas ? Demanda Adam avec un sourire sinistre.

Astarias lui rendit son sourire. Il ne devait pas être habitué à sourire beaucoup.

- Majesté, si vous ne le faites pas, ce sera moi qui lui trancherait la gorge, je peux vous l'affirmer.

- On tirera ça à pile ou face le moment venu, dit Adam tout en sachant qu'il ne serait jamais capable de tuer un homme de sang-froid. Venez maintenant. Il faut prévenir Isgon.

Le duc accepta sans trop de question l'arrivée d'Astarias dans leur camp après que le Haut Protecteur ait fait à nouveau serment d'allégeance à Adam devant tout le monde. Isgon devait savoir qu'Astarias ne revenait jamais sur ses promesses. Alors il le sera contre lui comme un frère. Padreis, lui, fut très heureux et soulagé qu'Adam ait juré de ne pas toucher à un cheveu de Nirina et de son fils. Mais ils n'avaient pas le temps de parler. Selon Astarias, l'armée de Nirina arriverait ici dans un jour, tout au plus.

- Qui dirige l'armée, père ? demanda Deornas. Le Patriarche ?

- Ryates sera présent, mais uniquement pour s'emparer des deux épées. C'est le duc Barneas qui dirigera l'assaut.

Isgon prononça un juron si coloré qu'il en fit rougir plus d'un.

- Ce fils de chien décérébré ? Cet enculeur de chevaux puant ? Il veut s'en prendre à MA ville ?! Qu'il vienne donc, par les sept Enfers, par les couilles d'Arceus, par le cul de mes ancêtres ! Je lui arracherai les boyaux et m'en ferai un collier !

- Tu ne devrais pas sous-estimer Barneas, Isgon, lui reprocha Astarias. C'est un fou, il est vrai, mais un fou dangereux. Il a déjà prouvé qu'il était un très grand tacticien. De plus, les forces en présence sont conséquentes.

- Aucune armée n'a jamais franchi les murailles de Naglima, protesta Isgon. Cette ville est parfaitement impénétrable. Tu dois le savoir non ? Si vous avez gagnez la guerre contre nous autrefois, c'est uniquement parce que je me suis rendu à ton père après notre duel à l'épée. Mais votre armée n'a jamais mis les pieds à Naglima.

- C'était vrai à l'époque. Mais c'est sans compter la magie de Ryates. Arceus seul sait ce qu'il pourrait faire. Et puis, Sa Majesté Nirina a de nombreuses connaissances sur l'Ancien Monde et leur technologie très avancée par rapport à la nôtre. Ryates l'a aidé à en obtenir pour son armée.

- Quoi donc ? Demanda Adam. Des pistolets ? Des grenades ?

- Des objets qui se nomment des mortiers, précisa Astarias. Nirina en possède une bonne centaine.

- C'est quoi ? Demanda Deornas.

- Des espèces de mini-catapulte, qui tirent bien plus vite et qui font bien plus de dégâts, expliqua Anis. Mais ça, on peut s'en protéger, s'en préserver, s'en défendre. J'ai une équipe de Pokemon Spectre avec moi.

- Et j'ai toujours le Florizarre de dame Leaf, ajouta Deornas. Mais elle nous aurait bien été utile avec tous ces autres Pokemon...

- On devra faire sans, répliqua Anis. Avec Florizarre, on peut le poster sur le plus haut de nos remparts pour qu'il bombarde l'ennemi de Tranch-herbe, Bomb-beurk ou Vampigraine. Shinobourge et Metali, eux, seront plus pour les duels directs, ils devront rester dans la cité. Quant à mes Pokemon Spectre, voilà ce qu'on pourra faire.

Adam fut plus que ravi de laisser le soin à Anis de réfléchir à la stratégie avec les Pokemon. Lui n'y connaissait pas grand-chose, et elle était membre du Conseil des 4 d'Unys après tout. Isgon et ses généraux coordonnèrent leur défense avec ce que leur dit Anis. Bien qu'ayant tâché de s'informer sur la stratégie et les tactiques de la guerre, Adam fut vite un peu perdu et dut demander à Isgon ce qu'il ferait, lui. Ce fut Deornas qui répondit :

- Votre seule tâche sera d'être vu, Votre Majesté. Soyez avec les hommes sur le rempart, armé de Meminyar ; ça ne fera que les motiver. Vous n'aurez qu'à repousser l'arrivée des ennemis sur les échelles.

- Je vais rester avec lui, dit Astarias. Je le protègerai, quoi qu'il arrive.

- Très bien, faisons comme ça, résuma Isgon. Allez, fichtre et foutre ! Préparons-nous à un siège du tonnerre !

Les défenses furent mises en place jusqu'à la levée de la nuit. La bataille serait pour ce soir. Anis le regretta, car elle aurait préféré un soleil plein et vivace pour que le Florizarre de Leaf puisse utiliser sa puissante attaque Lance-soleil. Adam avait revêtit son armure et se dandinait à l'intérieur, marchant avec difficulté sous le poids de tout l'acier qu'il portait. Ah, qu'il avait fier allure, le prétendant au trône ! Pourtant, pas un seul défenseur de Naglima ne se moqua de lui. Tous l'acclamèrent tandis qu'il passait à côté d'eux, Astarias d'un côté et Shinobourge de l'autre. Tous semblaient prêts à mourir pour lui. Quelque chose de vraiment bizarre pour Adam qui n'avait connu toute sa vie que l'indifférence des autres. Puis ils attendirent. Petit à petit, le son de milliers de pas à l'unisson vint jusqu'à leurs oreilles, se rapprochant de plus en plus. Comme un signal, des centaines de torches s'illuminèrent sur les remparts, tandis qu'archers et soldats prenaient position. Les trompettes et les cors braillèrent, amenant d'autres soldats dans la cour centrale. Puis tous entendirent la voix du duc Isgon qui résonna à travers la cité entière.

- Peuple de Rimerlot et braves gens de Cinhol qui ont choisi de combattre Nirina ! L'épreuve commence ce soir ! Nous nous battrons sous le regard de Castel le Fondateur. Notre cause est la sienne. Il nous a donné un roi et son épée ! Il nous regarde ! Montrons-lui comment nous mettrons à bas Nirina et sa tyrannie, Ryates et ses diableries, et Uriel le Maudit, le responsable de tous nos maux. Cette cité n'est jamais tombée. Elle ne le fera pas aujourd'hui !

En réponse, il reçut les cris enthousiastes de ses hommes. Un bon discours, de l'avis d'Adam, d'autant plus impressionnant qu'il n'avait pas prononcé un seul juron en plusieurs phrases. Tandis que l'armée de Nirina avançait, Adam se demanda une nouvelle fois ce qu'il pouvait bien ficher là, en armure, tenant une épée, et s'apprêtant à combattre une armée venue du moyen-âge aux cotés de gens qui le prenaient pour leur roi. Ah, s'ils savaient, tous ces hommes qui le vénéraient... S'ils savaient qu'il n'y a pas si longtemps encore, il nettoyait les vitres et les sols d'une Académie...

Les silhouettes qui avançaient vers eux aussi lentement que des géants entravés et se dessinaient peu à peu dans la pénombre lunaire étaient celles de dix grandes tours de siège, aussi hautes que les puissantes murailles de Naglima. Sous elles, des milliers d'hommes aux couleurs de Cinhol, avec boucliers, épées, et des mortiers. Mais ils avaient aussi des appareils plus traditionnels, comme des catapultes ou des béliers. Ils étaient deux à les mener au-devant, sur des chevaux. Adam reconnu l'un d'eux comme étant Ryates, à son crâne chauve et à sa robe noire.

Le second était un véritable géant avec une barbe coiffée en deux tresses. Il ne portait pas d'armure, était presque torse nu si ce n'était une espèce de peau de bête qui le recouvrait. Et, accessoirement, il avait des mains, des pieds et autres parties du corps humains découpées et accrochées à sa ceinture. Ça devait être ce fameux Duc Barneas, le chien enragé de Nirina, ou encore l'enculeur de chevaux, comme l'appelait si gentiment Isgon. Certains défenseurs se mirent à tirer un peu au hasard dans l'obscurité, sans doute effrayés par la vision de ces deux hommes à la si terrible réputation.

- Gardez vos flèches, imbéciles ! Leur gronda Astarias. Attendez. Ils seront sur vous bien assez tôt...

Les armées de Nirina, en réponse aux torches qui s'étaient illuminées sur les murailles de Naglima, firent tonner leurs tambours à travers l'obscurité en un roulement dominateur qui se mua rapidement en un battement à deux temps évoquant les pas d'un titan. Les assiégés firent alors résonner leurs trompettes de toutes les tours, bien que ce ne fût qu'un faible son ténu face au fracas des tambours de guerre. Mais ça témoignait de l'envie farouche de vivre, de résister et de se battre des gens de Naglima.

Les armées de la reine s'avancèrent sur les plaines à la suite de leurs engins de siège, envahissant et noircissant les prés de Naglima. L'aube vint doucement, tandis que le siège se mettait en place. Les grandes tours de siège, qui étaient restées immobiles comme des sentinelles assoupies durant plusieurs heures, se mirent soudain en mouvement. Tant mieux, songea Adam. Même s'il redoutait le combat, il en avait assez de rester debout sans rien faire.

Les soldats qui poussaient furent enfin à portée de flèche, et le massacre commença. Beaucoup d'hommes de Nirina tombèrent, mais ils furent aussitôt remplacés. Les tours poursuivirent leur progression vers les murailles sans en être plus affectées. Les archers de Nirina étaient maintenant assez proches pour tirer à leur tour, et le bruit des mortiers retentit lui aussi. En plus des tours, les soldats de Nirina amenèrent des échelles qu'ils tentèrent de lever pour escalader les murailles. Déjà, les premiers combats débutaient, et les premiers sangs coulaient. Adam se permit un instant pour contempler la lame d'or de Meminyar. Il lui parla tout en s'adressant à son illustre ancêtre.

- C'est toi qui m'as choisi pour tout ça, Castel. T'as intérêt à ne pas m'abandonner.

Puis le prince Adam Haldar s'élança dans la bataille, en transperçant son premier ennemi, un jeune soldat qui fut le premier à franchir les murailles. Astarias insistait pour garder Adam toujours derrière lui, tandis que lui se lançait à corps perdu dans la mêlée, faisant même chuter plusieurs échelles. Avec eux, Shinobourge et Metali s'en donnaient à cœur joie. Pas un seul soldat de Cinhol ne put rester plus de trois secondes sur les remparts. Pas en vie en tout cas. Quant aux tours de sièges, ce furent les Pokemon spectres d'Anis qui s'en chargèrent. Elles furent toutes détruites, sauf une, qui parvint à s'accrocher sur la muraille ouest et à déverser une centaine d'homme à la fois. Là, le duc Isgon et son fils Padreis firent un beau duo à la hache. Adam s'étonna de voir Padreis se battre si bien. Il l'avait plus imaginé comme un noble intellectuel.

Le siège dura toute la journée. La marée des armées de la reine vint frapper les collines qu'étaient les murs de Naglima. Vague après vague, les soldats de Cinhol s'agglutinaient sur les échelles pour être impitoyablement repoussés par les défenseurs sur les murailles. Ici et là, les forces de Nirina perçaient momentanément une brèche dans le mur, mais elles étaient toujours repoussées. Naglima tenait, encore et encore, tandis que la liste des morts s'allongeait du côté de Cinhol bien plus rapidement que du côté de Naglima. Mais chez eux aussi, il y avait des pertes, et l'armée de Nirina semblait infinie. Ce Barneas comptait les avoir à l'usure. Ce serait à qui craquerait le premier.

Adam s'accordait un moment de repos avec les hommes de son secteur tandis que d'autre les remplaçaient. On leur distribua des gourdes d'eau, et plusieurs médecins furent mis à contribution pour soigner les blesser... ou réconforter les mourants. Adam n'était pas blessé, seulement las. À quoi ça servait tout ça ? Il se le demandait. Certains des soldats qu'il avait tués devaient avoir son âge. De jeunes gens qui ne faisaient somme toute qu'obéir aux ordres. Ils ne méritaient pas de finir comme ça. Mais ils n'étaient que des pions entre les mains de Ryates. Adam sut alors que pour parvenir à leur véritable cible, à savoir Ryates et l'épée Peine, ils devraient se frayer un chemin entre des milliers de cadavres de soldats de Cinhol. Tout cela le dégoutait. Ylis, qui travaillait avec les soigneurs, vint le retrouver un moment, et lui essuya tendrement son visage plein de sueur et de sang avec un chiffon imbibé d'eau fraiche.

- Vous vous êtes battu bravement, à ce qu'on dit, Majesté.

- On dit des sottises, alors, répliqua Adam. Je n'ai dû repousser que dix ou onze hommes en deux heures. Mon oncle faisait tout le boulot pour moi.

- Qu'importe, un roi qui va à la bataille est un roi qui mérite le respect.

- Votre peuple se bat pour moi. Ça la ficherait mal si je courrai me cacher derrière mon trône tandis qu'ils meurent ici. Pourtant, ce n'est pas l'envie qui m'en manque.

- Un bon roi fait toujours passer ses sujets avant ses envies.

En parlant d'envie, Adam en avait une autre, là tout de suite. Il voulait serrer Ylis dans ses bras, l'embrasser, sans se soucier de tout ce monde qui il y avait autour de lui. Mais quand il commença à se rapprocher, Ylis lui mit un doigt sur ses lèvres, comme la dernière fois.

- Pas encore, Adam, murmura Ylis avec amusement. Si mon père nous voit, il nous jettera tous les deux à travers les murailles.

- Je risque de mourir à chaque seconde, protesta Adam. Un baiser me donnerait du courage pour continuer.

- Il ne t'en manque pas, mon beau prince.

Adam se sentit revigoré par ses paroles. Il insista quand même pour la serrer dans ses bras. Ylis se dégagea bien vite, prétextant avoir plein de blessés à s'occuper. Quand Adam se retourna, il vit Padreis en train de l'observer bizarrement. À son regard mi-amusé mi-sévère, il devait avoir vu toute la scène. Adam lui servit un sourire penaud et gêné.

- Vous avez de la chance, vous savez, dit Padreis. Ylis semble bien vous aimer.

- Et je l'aime moi aussi, ajouta Adam.

- Tous les hommes, qu'ils soient jeunes ou vieux, aiment ma sœur, ricana Padreis. Mais je ne l'ai jamais vu comme ça avec Deornas.

Adam s'enfonça les paroles du fils du duc dans son cœur. Pas comme ça avec Deornas... Elle l'avait appelé « mon bon prince »... Elle l'aimait, oui...

- Quand vous l'aurez épousé, nous serons doublement beau-frère, alors, sourit Padreis. Enfin, bien que techniquement, je n'ai jamais épousé Nirina.

Padreis se tut, pris le temps de boire une gorgée de sa gourde avant de la tendre à quelqu'un d'autre, puis lui demanda :

- Vous pensez qu'il y a une chance pour elle, Votre Majesté ? Vous pensez qu'elle pourra redevenir comme avant ?

Adam devait bien avouer son ignorance, car il ne savait même pas comment était Nirina avant.

- Je ne sais pas. J'aime à penser qu'elle n'est pas foncièrement mauvaise, et qu'un dialogue sera possible entre nous. Quoi qu'il en soit, j'ai promis de ne pas lui faire du mal et de la protéger des autres, elle et votre fils. J'aimerai bien rencontrer mon neveu. C'est tout bizarre pour moi, qui n'ai jamais eu un seul parent.

Padreis lui serra le bras comme à un frère.

- C'est que vous n'étiez pas dans le bon monde, mon roi. Nos pères étaient très amis, vraiment très proches. J'espère que nous le serons aussi.

Adam l'espérait aussi, sans savoir qu'il se fourvoyait totalement, et que cette amitié naissante allait prendre fin de la manière la plus tragique...


***


Le duc Barneas s'impatientait. Naglima tenait depuis trop longtemps, et les hommes allaient venir à manquer, déjà que leur moral n'était pas au plus haut. Bien sûr, le duc savait maintenir la discipline chez ses hommes. Les moyens ne manquaient pas pour lui. Des moyens qu'aucun soldat n'aurait aimé expérimenter. Mais au bout d'un moment, la peur de leur commandant cèderait face au désespoir d'une défaite assurée. Satané Isgon ! Il devait bien rire de lui, derrière ses murailles. De rage, Barneas se tourna vers le Patriarche Ryates, qui continuait d'observer la bataille sans rien faire.

- Sa Majesté m'a dit que vous étiez venu pour nous assister, grinça le duc. Où est donc votre magie, sorcier ?

- Patience, mon cher duc, soupira Ryates. Naglima tombera. Mais je veux que leur nombre soit en parti réduit quand j'interviendrai.

- J'ai déjà perdu trop d'hommes ! Sa Majesté a lancé dans cette campagne près de la moitié de ses forces ! Le royaume est vulnérable...

- Vulnérable contre quoi, duc ? Tous nos ennemis sont à l'intérieur de ces murs. Une fois Isgon, Deornas et leur bâtard tombés, ce ne sont pas quelques paysans Rimerlot qui vont nous inquiéter.

- Je veux du sang ! La reine m'a promis que je pourrai raser la ville entière et ses habitants !

Ryates soupira à nouveau. Barneas pouvait être utile, mais il avait l'air là d'un enfant qui ne pouvait plus attendre pour son nouveau jouet.

- J'interviendrai ce soir, promit Ryates. Continuez l'assaut jusqu'à la tombée de la nuit, puis retirez toute vos forces. Alors seulement, les ombres prendront formes, et plongeront Naglima dans le chaos.

Barneas le dévisagea d'un air sceptique.

- Quel genre de sort allez-vous utiliser ?

- Il ne s'agit pas d'un sort. Il s'agit seulement de la volonté de mon maître.

Ryates tira de sous son manteau noir l'épée Peine, qu'il avait emprunté à Nirina. Son éclat noir et son aura maléfique affola le cheval de Barneas, qui regardait l'épée avec crainte.

- Le Seigneur Uriel s'impatiente, lui aussi, murmura Ryates pour lui-même. Il les sent. Les deux autres épées. Il les appelle...