Cristal galactique [OS] de Xabab

OneShot – Cristal galactique


Il pouvait le sentir tout près de lui, il pouvait le toucher... Ce cristal, cette puissance qu'il avait recherchée en vain durant toute sa vie était enfin devant lui et il ne lui restait plus qu'à faire un pas pour la dérober. S'il osait s'en emparer, s'il osait franchir cette mince frontière entre idéal et réalité, alors Edward Ulf pourrait devenir l'homme le plus important de la planète pour les siècles à venir.

Tandis que le silence du sanctuaire les envahissait, l'homme d'une quarantaine d'années se tourna vers le pokemon qui l'avait accompagné jusque dans les profondeurs de ce monde ; son Cacnea qu'il désirait voir un jour siéger sur le trône de l'humanité avec lui.
Ce dernier le regarda et hocha la tête, l'incitant à avancer et à prendre cette force pour laquelle ils avaient sacrifié tout ce qu'ils possédaient. Edward avait perdu à se livrer à ce jeu démoniaque, vendant son âme avant de tenter de se laver dans le sang de ceux qui auraient pu se mettre en travers de son chemin.

« Maria n'accepterait pas... »
Un murmure, un songe... Rien qu'une parole qui s'évapora dans l'air mais qui marqua l'esprit de l'homme. Et s'il venait d'exprimer une vérité comme il ne l'avait plus fait depuis longtemps ? Si en effet elle n'acceptait pas ?

« Tu ne peux plus fuir, regarde en arrière et compte toutes les personnes que tu as laissé pour mortes dans ton sillage. Compte combien de tes amis ont cru en toi avant de se perdre dans les abimes de la folie. »

Ce discours reprenait entre lui et celui qui le hantait depuis plusieurs nuit. Depuis qu'il avait défait le légendaire Dialga et qu'il le maintenait fermement dans une balle, Edward entendait cet autre lui qui n'était sans doute rien de plus que l'expression de ses remords.
Mais ses remords pouvaient aussi exprimer la vérité et il ne parvenait à les rejeter totalement malgré l'insistance de son pokemon qui le poussait dans le dos, désireux de voir enfin le monde s'agenouiller devant eux.
Néanmoins une seule question persistait : pourquoi maintenant ?

La folie consumait l'esprit d'Edward depuis des années. Il avait entendu parler de ce pouvoir par son meilleur ami, un jeune homme formidable avec lequel il avait passé son enfance. Ils fréquentaient le même lycée et suivaient les mêmes cours, vivaient des mêmes passions dont la principale restait un attrait certain pour les légendes d'antan.
Edward et Xavier passaient des après-midis dans les bibliothèques à feuilleter de vieilles revues pour illuminés ou rendaient visite à de vieux antiquaires qui en savaient longs sur les histoires qu'ils aimaient.

Mais la plus belle fut celle que Xavier ramena un jour avec lui dans l'une de ses valises suite à un voyage dans la région de Sinnoh.
Il avait acheté là-bas une clé qui, d'après son vendeur, donnait l'accès à une immortalité et à un pouvoir sur les pokemons mais aussi sur le cours du temps et le fonctionnement de ce monde. Les recherches ne tardèrent pas à aboutir sur le cristal galactique, artefact peu connu des gens et qui était le fruit de cette légende. Si quelque chose donnait accès au pouvoir alors c'était ce dernier.

Edward hésita encore et fixa celui qu'il avait recherché durant toute sa vie afin de se convaincre du bon vouloir de son geste. Il n'y avait pas à dire : il était absolument sublime.
D'un bleu miroitant, le cristal resplendissait dans l'obscurité du sanctuaire et illuminait le petit piédestal de pierre sur lequel il était posé. Sa clarté se reflétait dans les yeux de l'homme qui le désirait plus que tout au monde et rendait justice à sa soif de pouvoir. Quand les yeux d'Edward se posaient dessus alors ce dernier savait qu'il devait s'en saisir ; il perdait foi en s'en détournant quelques secondes après afin de chercher l'avis de son pokemon.

« Maria ne le voudrait pas ; elle n'a jamais accepté cette aventure et ne l'accepte toujours pas d'où elle est. »

Et si la voix avait raison ? Et si Maria ne voulait véritablement pas qu'il le prenne et s'empare du monde ? Il avait pourtant les trois clés dans sa main et plus rien ne l'empêchait de s'en saisir ; il pouvait le faire.
« Elle s'en moque, répondit-il tout bas en tentant de se convaincre lui-même. Et je dois oublier qui elle était si je veux un jour régner. Ce que j'ai fait n'a plus la moindre importance à ce jour. »

Mais il n'était pas convaincu. Maria et Xavier n'accepteraient pas ce qu'il faisait en ce moment et cela les avait conduits à leur perte.
Il se souvenait de cet affrontement et de la folie qu'il avait lue dans les yeux de Xavier, de la haine qu'il avait ressentie à son égard et de ce qu'ils avaient endurés tous les deux. Il pouvait voir encore aujourd'hui son sang sur ses mains, coulant de la lame qu'il lui avait planté dans le corps et de la bouche de sa victime.

Un frémissement parcourut tout son corps et il se sentit défaillir. Pourquoi cela devait arriver maintenant alors qu'il était si proche, alors qu'il avait tout sacrifiait et qu'il tenait dans les mains les deux êtres pouvant le mener vers l'immortalité, la gloire et le pouvoir ?
Edward laissa tomber la clé de sa main, celle que Xavier lui avait donné des années avant que tout ne bascule et qui venait de lui ouvrir la voie vers le sanctuaire. Il n'en avait plus besoin à présent ; il avait les deux autres éléments pouvant lui permettre de contrôler ce cristal.

Objet tombé du ciel le cristal avait été longtemps convoité. Xavier et lui avaient fait des recherches à ce sujet et il en était ressortit que l'artefact serait un don des dieux envoyés du ciel ; un présent d'une autre galaxie qui lui aurait donné son nom. Pendant des siècles l'humanité se serait servi de ce présent, chacun des rois héritant de l'objet des mains de son père afin de guider ses sujets vers un monde meilleur, apportant cohésion entre tous les êtres et notamment humains et pokemons.
Puis ils étaient devenus fous.

« Xavier... »
Ce nom fut prononcé dans un murmure au sein de ce sanctuaire gelé dans lequel reposait l'héritage des premiers rois de ce monde. En pensant à la folie dans laquelle avaient chuté ces derniers, Edward ne pouvait s'empêcher de repenser à Maria et à son meilleur ami. Eux aussi avaient perdu toute humanité à chercher ce qui pouvait leur donner plus que ce qu'ils désiraient.

C'était d'ailleurs Maria qui leur avait raconté toutes ces histoires.
La jeune femme était une archéologue de talent que Xavier avait rencontré à Sinnoh durant ses investigations portant sur le cristal galactique. Éblouit par son savoir et la personne qu'elle était, ce dernier n'avait pas hésité une seconde à lui exposer leurs plans avant de la présenter à son meilleur ami. Ce fut là une erreur grossière qui les perdit tous les trois mais qui permit aussi de former un formidable trio.

Maria fut la première en un an qui ne se moqua pas de leurs recherches et qui ne démentit pas l'existence de ce cristal. Elle comprenait leurs sentiments, l'impression qu'un artefact fut assez puissant pour gouverner le monde. Elle voyait ces royaumes ancestraux sombrer dans la folie, la haine avant de disparaitre à jamais. Edward vit en lui parlant pour la toute première fois qu'elle était imprégnée de ces légendes et s'en nourrissait. La légende devenait une passion et, comme pour ses deux futurs amis, elle se changea en une obsession si profonde qu'elle devait finir par lui ronger les sens et la guider vers sa fin.
La discussion qu'ils eurent avec elle tous les deux pour la première fois dura exactement deux jours. Ils restèrent enfermés et observèrent longuement de vieux archives et quelques cartes usées par le temps dont plus personne ne se souciait mais qui devenaient à leurs yeux de vrais trésors.

Maria leur compta tout d'abord l'histoire des anciens rois dont ils avaient vaguement entendu parler, avant d'enchaîner sur leur chute.
Elle mentionna pour la toute première fois le nom de Gregor en plein cœur de la nuit alors que la lune venait filtrer d'un mince rayon de lumière sur l'effrayant portrait du personnage qu'ils avaient déniché chez un vieil homme trois jours auparavant. Une barbe drue, des yeux déments mais un sourire enivrant qui aurait sans doute pu convaincre Arceus de ne jamais créer le monde ; voilà la façon dont on pouvait décrire Gregor.

« La famille royal des Fertor ne devait plus durer, leur expliqua Maria en repoussant sa mince chevelure blonde à l'arrière de sa tête tout en pointant de son doigt fin l'arbre généalogique de la lignée des rois. Ceux-ci veillaient depuis trop longtemps sur le cristal et la cupidité des hommes ne pouvaient pas rester endormie trop longtemps. Le monde progressait mais chutait en même temps dans une folie sans nom. Certains commençaient à sentir le pouvoir ainsi qu'une autre façon de l'utiliser. L'équilibre du monde n'était plus une priorité. »

Edward se souvenait de sa voix et de son regard passionné au moment de tout leur raconter. Il pouvait encore voir la tasse de café vide posée devant ses yeux, l'une des multiples qu'il avait bu afin de ne pas s'endormir, ou encore le décor de cette petite chambre d'hôtel qu'ils avaient tenu à réserver.
L'histoire de Gregor et de la chute des Fertor restait elle aussi dans sa mémoire.

« Gregor était un riche marchant qui venait souvent au palais, continuait Maria en tournant les pages des vieux ouvrages. Il était bon ami du dernier des Fertor et avait aussi des vues sur sa fille qu'il ne pouvait avoir. On sait tous que toutes les histoires commencent par une histoire d'amour et celle-ci n'est pas une exception. Clara Fertor était une créature sublime et tout le royaume la convoitait en secret sans pour autant nourrir d'espoirs à son égard ; c'était différent pour Gregor. »
Xavier et Edward écoutaient avec passion le récit de leur amie et approuvait chacune de ses paroles.

« L'homme qu'il était avait commencé à découvrir le pouvoir du cristal que le roi gardait en lieu sûr mais il ne le voulu pas pour lui, se moquant bien de son pouvoir.
– Mais Clara ne désirait pas le prendre pour époux et son point de vue changea radicalement, lança Xavier sûr de lui avant d'être approuvé par la jeune femme qui hocha la tête.
– Elle refusa le mariage qu'il lui proposa malgré tout l'or qu'il lui tendit et malgré l'accord de son père qui voyait en Gregor quelqu'un d'apte à diriger le royaume. Certes ce n'était qu'un simple marchant mais la ruse et l'amitié dont il faisait preuve envers le roi lui accordait toutes ses bonnes grâces. Quand ce dernier se rangea du côté de sa fille Gregor devint fou de rage et déroba le cristal. »

Maria n'expliqua pas comment il y parvint et Edward imagina que ce n'était pas important pour le déroulement du récit. Elle leur montra ensuite à l'aide des documents posés sur la table la façon dont Gregor avait levé une armée contre son roi avec l'aide du cristal et la façon dont le château était tombé sous les coups de ses soldats.
Joseph Fertor périt des mains de celui qu'il avait considéré comme son ami, les yeux rivés sur le cristal qu'il portait autour de son coup et qui conduisait l'humanité vers sa perte. Mais bien heureusement il ne fut pas le seul à avoir cette vision.

« Dans un coin de la pièce Clara observa la scène, poursuivit Maria. Elle vit mourir son père alors qu'elle suppliait Gregor de l'épargner, lui promettant de l'épouser en retour. Mais celui-ci, rongé par la folie, n'accepta que le mariage et ne fit pas preuve de pitié en déversant un flot de sang au pied du trône. Cela fait il s'avança vers la princesse qui pleurait toutes les larmes de son corps. »

Edward se souvenait parfaitement de la fin de cette histoire et c'était en cela qu'il hésitait à se saisir de l'artefact qui se trouvait devant ses yeux. La folie de Gregor était la même qu'il avait un jour ressentie et dont ses deux amis n'avaient pas été épargnés. Quand il avait assassiné Xavier ce n'était que pour se protéger lui-même de la mort à laquelle il le condamnait. Il ne pouvait en être autrement et il le savait parfaitement.
Mais devait-il pour autant recommencer et risquer de livrer l'humanité à de tels périls ? Dans son dos Cacnea le poussa de nouveau et Edward le rappela dans sa balle, il n'avait pas besoin de plus de pression à son égard.

« Clara accepta de se rendre et de se marier avec Gregor, subissant le sort auquel elle ne pouvait échapper et se pliant à la volonté du nouveau roi. En quelques heures ce dernier soumit le reste du peuple au pouvoir du cristal galactique qu'il brandit du balcon du palais royal, la couronne des Fertor sur la tête. Aucun n'osa lui résister mais l'humanité était perdue ; la cupidité avait infiltré le cœur des hommes et aucun retour en arrière ne fut plus possible. »

L'analyse des cartes et des portraits des grands personnages de l'histoire leur prit toute la nuit et il faisait déjà jour lorsque Maria entama le récit du mariage de Gregor et Clara dans la cour du palais royal. On disait que c'était l'événement le plus merveilleux de notre espèce, leur avait elle dit toute fière.
Et il le fut jusqu'à la nuit de noce des deux amants.

Les plus grands chefs du monde étaient venus pour assister à cette union qu'ils fuyaient pourtant comme la peste, envieux de se rapprocher de Gregor et de parvenir à tenter la prise de pouvoir à laquelle il était parvenu, d'autres voulant seulement s'attirer ses bonnes grâces.
Le palais avait été décoré des mois à l'avance et le buffet préparé avec soin par les meilleurs cuisiniers du monde. Rien n'était laissé au hasard selon la volonté de Gregor. L'œuvre de sa vie était en train de s'accomplir et il remerciait le cristal de lui permettre de telles prouesses.

Faussement les gens applaudir le nouveau couple, faussement ils les saluèrent et tentèrent de les féliciter. Tout n'était qu'un jeu d'acteur prédéfini, une salve de marionnettes frétillantes aux genoux d'un roi illégitime qui tentait de se faire remarquer. Le jeu du coq était une obsession et la cour du palais se réduisait à une scène de théâtre sur laquelle tous les coups furent permis.

En revanche ce n'était pas faussement que les gens admirèrent la beauté de la jeune Clara, vierge royale et digne héritière des Fertor qui tentait de conserver la lignée de son père de la façon la plus juste du monde. Fière pendant le mariage, elle ne flancha pas une seule fois au point de donner l'impression qu'elle acceptait et qu'elle se montrait forte face aux évènements. Mais cette droiture, ce calme et cette candeur ne servait qu'à donner confiance durant les quelques heures précédant un acte purement réfléchi.

Lors de la nuit de noce qui se passa au palais, Clara donna son corps au nouveau roi et elle le laissa jouer avec elle de la façon la plus immonde. Elle se força à lui avouer un amour qu'elle ne ressentait aucunement et à regarder un être nu qui lui donnait envie de fuir. Mais elle ne le fit pas et resta forte jusqu'à l'heure de son sommeil.
Pendant tout ce temps Gregor garda le cristal galactique qu'il ne quitta pas pour dormir. Et au moment de tomber dans les limbes d'un sommeil profond, la femme qu'il avait accueilli dans ses draps se leva et se dirigea vers une commode dans laquelle une arme était gardée.

« Gregor fut percé de multiples coups, sept d'après ce qu'en disent les histoires mais certaines versions ne sont pas d'accord. Le fait est qu'il mourut durant sa nuit de noce et des mains de la femme qu'il avait abusée. Au matin personne ne retrouva Clara et le cristal du roi ; elle s'en était emparé et avait fui la cité. »

Et elle était venu ici, pensa Edward alors même qu'il se trouvait au sein du sanctuaire que Clara Fertor avait érigé des milliers d'années avant sa naissance à l'aide de celui qu'elle était partit voir en fuyant son propre peuple, celui qui avait créé le cristal : Arceus.
La princesse monta sur le Mont Couronné au sommet duquel elle espéra le trouver et où elle fit sa connaissance. Le dieu avait vu la folie de ces hommes et s'était réfugié loin de leurs regards, dégoûté de ses créations qu'il détestait désormais plus que tout.

Arceus avait créé ce monde pièce par pièce et avait mis l'homme au centre afin de maintenir l'équilibre. En le créant il l'avait jugé comme la plus parfaite des créations mais Clara Fertor était désormais le premier humain qu'il voyait depuis cent ans.
Dégoûté de leur cupidité et de leurs guerres incessantes, Arceus avait fui dans un lieu qu'il avait bâti à la force de son esprit et qu'il avait nommé le Panthéon, un sanctuaire intouchable dans lequel il se mettait à l'abri du monde et du remord qu'il avait d'avoir donné naissance à tant de douleurs.

Clara insista pour le rencontrer et il accepta. Elle lui demanda de bannir le cristal à tout jamais de ce monde mais il s'y refusa, lui expliquant qu'il avait placé trop de son pouvoir en lui et que le détruire pouvait causer à ce monde des dégâts sans précédent que même la haine des hommes ne pouvait faire.
Mais les supplications de Clara parvinrent à le mener vers une concession et Arceus se trancha deux bras pour lui venir en aide. Il déposa les deux membres ensanglantés sur le sol et murmura quelques mots qui les firent bouger, grandir et...

« Et ainsi naquirent Dialga et Palkia, respectivement gardiens du temps et de l'espace, disait Maria au matin, mais aussi clés du sanctuaire qu'il allait ériger afin de maintenir enfermé le cristal qui avait causé trop de tort à ce monde et possédait le pouvoir de le détruire. Les deux serviteurs du dieu acceptèrent cette noble tâche et ils se séparèrent dans diverses dimensions afin de ne jamais être retrouvés. Si nous voulons accéder au cristal alors nous devons retrouver la trace de ces dieux. »

Edward et Xavier avaient frissonnés de concert, l'homme se souvenait encore parfaitement de ce sentiment qui l'avait traversé. Une pointe d'excitation mêlé à de la curiosité, un désir de partir sur le champ en quête des légendaires ainsi qu'un parfum d'aventure qui prenait peu à peu possession de leurs corps... Tous les trois ressentaient la même chose et ils venaient de trouver un sens commun à leurs vies.
Ce fut à ce moment de la discussion que fut établi le groupe qu'ils formèrent ensuite pendant quinze ans jusqu'à la mort de Xavier. Ils étaient pleins d'espoirs, jeunes et insouciants. Aucun ne pouvait se douter du danger vers lequel ils fonçaient.

Face à l'objet de sa quête Edward comprenait maintenant l'étendu et la gravité de leurs actes. Ils s'étaient précipité dans un gouffre duquel on ne pouvait sortir indemne, subissant une chute qui laisserait à jamais des marques dans leurs esprits fragiles de jeunes hommes en quête de vérités.
Néanmoins ils se préparèrent et écoutèrent avant de se lancer dans les plans la fin de l'histoire des Fertor que Maria connaissait sur le bout des doigts.

Gregor avait un frère dont le nom fut avalé par l'histoire et qui fut renversé deux ans après le début de son règne par une peuplade voisine au chef avide de pouvoir et de sang : Leonard. Mais l'histoire de Leonard n'intéressait pas Maria qui préférait se concentrer sur l'embuscade dont fut victime Clara Fertor alors qu'elle gardait le sanctuaire dans lequel était enfermé le cristal.
Elle fut emmenée au palais et livrée aux pieds du nouveau roi.

Leonard n'avait aucun sentiment pour Clara et ce fut en cela qu'il se démarqua de Gregor. Il se moquait de la voir vivre ou mourir mais savait aussi que le sanctuaire au pied duquel ses soldats l'avaient trouvé contenait un objet dont il ne pouvait faire abstraction : le cristal galactique.
Il la fouilla et trouva sur elle une clé dont il pensa se servir afin d'ouvrir l'accès vers le cristal galactique. Dès le lendemain Leonard fit le déplacement vers les montagnes où se trouvait ce dernier mais ne parvint pas à y accéder. Il lui manquait deux éléments dont il ne savait rien : Dialga et Palkia.

« Clara fut torturée pendant des semaines par les bourreaux de Leonard qui lui firent les pires sévices. L'ancienne princesse et dernière héritière des Fertor fut violée à plusieurs reprises et frappées de nombreux coups. Ils la marquèrent au fer rouge mais elle ne parla pas ; personne n'entendit parler de Dialga et Palkia avant qu'elle ne meure de ses blessures, la seule trace des deux légendaires étant un carnet de note qu'un homme retrouva il y a mille ans au sommet de la montagne de Sinnoh, caché au fond d'un temple dédié à Arceus. On dit que le dieu voulait que les humains connaissent cette histoire. »

Mais les humains l'avaient oublié et Maria était l'une des dernières à ne plus prendre ceci pour une légende. Cette vieille histoire n'était plus qu'un conte mais elle représentait maintenant toute la vie des trois jeunes qui se tenaient dans cette chambre d'hôtel durant cette discussion ; elle représentait toute la vie de celui qui se tenait face à l'objet central de ce que les anciens voyaient comme une légende pour endormir les enfants.
Edward pouvait tendre la main et se saisir de ce fruit de folie, de cet artefact qui conférait à son porteur un pouvoir sur tous les autres.

« Mais Xavier est mort pour cet objet... »
Il hésita.
« Il est mort à cause de cet objet. »

C'était une évidence. Toutes ces années passées à chercher un pouvoir qu'ils ne pouvaient contrôler les avait rendus fous et l'insouciance de leur jeunesse avait rapidement laissé place à un désir de tout contrôler sur cette terre. Ils ne désiraient plus confirmer de vieilles légendes ; ils voulaient le pouvoir et désiraient se le partager.
Mais la chasse de Dialga dura pendant neuf ans et la fatigue se fit sentir. Gravir des montagnes les épuisait et les désaccords au sein du groupe ne faisaient que se multiplier au fil du temps.

Ils voulaient Dialga en premier car il était d'après eux le plus simple des deux à découvrir. Le gardien du temps ne pouvait agir sans modifier son entourage. Le petit groupe ne mit pas très longtemps avant de devenir expert dans le repérage des failles temporelles que le dieu laissait dans son sillage.
Ils suivirent sa trace durant des années et leurs liens se renforcèrent au point que les deux jeunes hommes tombèrent amoureux d'une même personne : Maria.

Edward se souvint avec nostalgie de ce temps durant lequel ils étaient capables de se partager une femme. Maria passait une nuit avec Edward et la suivante avec Xavier sans qu'ils ne soient dérangés par cette éternelle inconstance. Elle les aimait tous les deux et ne pouvait se résigner à choisir ; elle ne le voulait pas et ils ne le désiraient pas non plus.
L'amour se renforça et rien ne pouvait les séparer, pas même le temps qui s'écoulait depuis le début de la quête ou la précarité dont ils étaient les objets.

Les trois jeunes gens dormaient chez les habitants des villages dans lesquels ils s'arrêtaient. Ils avaient abandonnés leurs études et leurs métiers afin de se livrer corps et âmes à cette quête de l'idéal. Les ponts avec leurs parents et leurs amis se brisèrent au passage sans qu'ils n'y portent la moindre attention. Ils étaient heureux et vivaient d'amour et d'aventure.

Mais la folie s'empara du groupe et avec elle toute la haine que pouvait contenir le cœur d'un homme. Xavier accepta de moins en moins l'amour qu'il partageait avec Maria et Edward, ne voulant plus de cette relation et désirant écarter son meilleur ami de sa voie. Il voulait cette femme pour lui et attendit simplement le bon moment pour agir.
De son côté Edward n'en savait rien et il se contentait de poursuivre sa quête envers Dialga sans savoir que trouver le légendaire signifiait la mort de l'un des membres du groupe.

Ils repèrent durant un été une faille plus importante que les autres près de la mer où ils se trouvaient justement. L'occasion était parfaite et ils ne la laissèrent pas passer. Tous leurs pièges étaient prêts et ils n'avaient plus qu'à se lancer sans crainte de le manquer.
Avec toute la préméditation dont ils avaient fait preuve la capture de Dialga fut d'une simplicité sans nom. Des années de recherches avaient abouties à une technologie adéquate pour la capture de ce genre de pokemon, des stratagèmes établis par Xavier et pour lesquels ils s'étaient saignés financièrement au point de manquer de mourir de faim à plusieurs reprises.

Le légendaire apparut dans un éclat de lumière, traversant le temps pour s'arrêter comme prévu juste sous leurs yeux. Et dès son apparition Edward déploya une volée de flèches paralysantes qui se plantèrent dans la peau du légendaire, certaines ne faisant néanmoins que ricocher sur sa cuirasse d'acier. La trajectoire avait été calculée à la perfection et le dragon s'écroula à terre sans demander son reste, hurlant tout de même au point de faire voler autour de lui tout le sable de la plage.
Mais Xavier avait tout préparé et dès les flèches plantées dans le corps de la bête, il se hâta de le recouvrir d'un filet électrifié qui acheva de le clouer sur le sol. Maria sortit de sa poche l'une des balles achetées pour l'occasion, un modèle cher mais sûr dans lequel était passé la majeure partie de leurs économies.
Dialga fut capturé en un éclair. Ce fut le début de leur réussite et de leur destruction.

Dialga devait les mener à son frère et au sanctuaire où ils s'étaient déjà rendu quatre ans avant afin de repérer les lieux. Et en effet il le fit par la suite, guidant Maria et Edward vers Palkia qui devint à son tour victime du groupe.
Mais Xavier n'était déjà plus de ce monde et son corps flottait sans doute quelque part sur l'océan.

La nuit de la capture de Dialga, Xavier avoua tout ce qu'il avait sur le cœur à son meilleur ami et Edward vit pour la première fois les dommages de cette quête au travers des âges, les dégâts du cristal galactique qui entraînait les gens vers la mort et la haine. Ce fut ce sentiment qui le poussa à détester celui qu'il avait considéré comme un frère, ce sentiment qui le fit prendre une arme et, au moment de planter sa lame dans le visage d'Edward, c'était encore ce sentiment qui guidait sa main.
Mais une force supérieur s'était éveillée dans le cœur de son ami, un pouvoir qu'il sentait venir de l'extérieur et qu'il associait aujourd'hui au cristal qui se trouvait devant ses yeux. Celui-ci voulait que ce soit lui.

Le poignard se détourna de sa trajectoire comme par enchantement. Edward, saisit par cette force supérieure, le planta dans le corps de son opposant, s'emparant des mains de ce dernier pour enfoncer l'acier dans sa chair et mettre fin à ses jours. Il lut dans les yeux de Xavier le désespoir d'un homme qui venait de tout perdre et qui quittait ce monde en paix. Il voyait son ami perdre son sang par torrents et la haine qui avait occulté le cœur de ce dernier s'infiltrait alors dans celui de son assassin.
La folie venait de passer dans l'esprit d'un autre ; le sien.

Jetant avec l'aide de Maria le corps de Xavier à la mer ils devinrent des assassins. Personne ne se soucierait d'un homme sans famille mais ils pouvaient néanmoins être recherchés pour un tel acte. Les journaux parlèrent d'un cadavre retrouvé une semaine après dans une crique, celui d'un jeune homme sans nom que personne ne réclama jamais.
Edward et Maria étaient saufs. Il ne manquait plus que Palkia.

La capture de la seconde clé se révéla encore plus simple. Se servant de son frère désormais sous leurs ordres ils attirèrent le légendaire dans un piège plus précis que le premier. Un combat se livra entre les deux légendaire mais Palkia, atteint par les flèches paralysantes, ne supporta pas les attaques de son semblable. Au fond d'un vallon il s'écrasa sans connaissance et les deux aventuriers s'en emparèrent.
La porte du temple était ouverte et il ne leur restait plus qu'à s'y rendre. Le bonheur était presque à son paroxysme.

Les deux jeunes gens tombèrent fous amoureux l'un de l'autre, oubliant Xavier et se consacrant à la recherche du second légendaire, guidé par l'esprit de son frère. Ils le capturèrent un hiver et s'enlacèrent des jours durant par la suite. Enivré par la joie de l'achèvement de tout un périple ils firent l'amour durant des semaines, s'arrêtant à chaque instant afin de se procurer un peu de plaisir, vivant au jour le jour sur le chemin du sanctuaire.

« Mais elle est morte maintenant... »
Le regard d'Edward quitta le cristal et se baissa vers le sol. Clara n'avait jamais parlé de la dernière clé dans ses notes, la princesse du royaume perdu n'avait mentionné que trois clés et ils étaient certains de pouvoir s'emparer du pouvoir sans donner plus de leur être.
Mais la dernière clé fut la pire de toute et Edward tomba définitivement dans la folie en s'en emparant.

Il ne regarda pas en arrière et se contenta de baisser les yeux au sol en murmurant un simple pardon qui se perdit dans le noir. Malgré l'obscurité, l'homme pouvait imaginer le sang de Maria coulant à ses pieds, prix d'un passage vers le cristal qu'il n'avait pas hésité à payer. Il était devenu un monstre qu'une soif de pouvoir ne pouvait pas apaiser, une bête qui livrait « le fruit de son cœur » à une quête pour l'immortalité.
Et Maria en avait fait de même. Elle avait aussi tenté de le tuer pour s'emparer du cristal, ne se privant pas de la possibilité de briser leur amour pour cet artefact.

La folie les avait menés au meurtre et le meurtre au cristal. Une ère de haine pouvait de nouveau prendre forme des mains d'Edward, être faible attiré par un pouvoir plus fort que son créateur qui l'avait enfermé en ce lieu.
Mais pour cela il avait détruit tout ce qu'il possédait. Il avait abandonné sa vie et sa famille au profit d'une quête bercée par l'espérance de sa jeunesse, il avait tué son meilleur ami sur une plage et l'avait vu dévoré par la haine de l'autre, il avait vécu un amour sans précédent qui en un instant s'était brisé...

Le sang coulait sur ses mains ; celui de Maria... Mais lui s'en moquait et il ne voyait que le cristal ; brillant.
Son regard alla de l'obscurité à la lumière et il persista à hésiter. Pourquoi ne pas le faire alors qu'il était convaincu que le pouvoir qu'il pouvait posséder valait tout le rester ? Il le voulait mais n'avançait pas. Quelque chose semblait le retenir au creux des ténèbres, un éclat de lumière au fond de son cœur qui persistait à chasser toute la haine qu'il contenait. Il brillait et tentait de lui rappeler Maria et Xavier, deux êtres pour lesquels il aurait tout donné sans rien attendre en retour. Il chassait l'envie de meurtre et les désirs de conquête, il se battait contre tout et face à une armée de sentiments négatifs.
Mais les ténèbres persistaient de croître et la lueur du cristal attisait l'obscurité de son cœur.

Il ne compta pas les heures qu'il passa face à cet objet qui représentait toute sa vie. L'homme comprit simplement quoi faire en relevant les yeux vers lui, il savait comment devait continuer cette histoire.