Livre Second - Pérégrinations à Méanville [1/2]
Nanméouïe regarda les deux hommes approcher.
« Bonjour Nanméouïe, l'apostropha l'un d'eux, nous apportons deux Pokémon que nous avons trouvé dans la forêt. Comme Méanville est sur notre chemin, nous avons opté pour vous les amener au plus vite. Ils n'ont pas l'air sauvage. Pouvez-vous vous en occuper, l'infirmière Joëlle et toi ? »
- Méouïe, méouïe ! acquiesça l'intéressée. Elle alla chercher l'infirmière. Quelques secondes plus tard, celle-ci venait avec sa trousse médicinale.
- Vous pouvez me confier les Pokémon, ils seront entre de bonnes mains ! assura-t-elle aux deux hommes.
- Merci bien, infirmière Joëlle, et bonne journée à vous !
Les deux hommes déposèrent les Pokémon sur le comptoir et s'en allèrent tranquillement.
*
* *
« Cœur... parfait. Tension... impeccable. Nanméouïe, donne-moi le capacitomètre, veux-tu ? Merci. Alors, le Riolu... rien à signaler. La Pichu, maintenant... oh ? Ça alors ! Ce Pokémon n'a pas une once de pouvoir, selon la machine ! Je l'ai pourtant fait réviser hier, cet appareil... Il doit y avoir eu un court-circuit pendant que je scannais la Pichu, ça arrive parfois avec les Pokémon électriques. Mais tout-de-même... »
La voix se tait. J'entends un bruit de matériel qu'on range, de lumière qui s'éteint, de pas qui s'éloignent. Et je sombre dans l'inconscience.
* *
Biiip...
Biiip...
Biiip...
J'ouvris les yeux.
« Ah, Lily, tu es réveillée ! s'enthousiasma Blu.
- Chut, moins fort, réussi-je à articuler avec peine, j'ai la tête comme une citrouille, j'ai l'impression qu'elle va exploser.
- Ah, d'accord, chuchota Blu.
J'essayai de me redresser, mais c'était encore pire. Je me résignai donc à rester allongée.
- Qu'est-ce qu'on fait là ? demandai-je à mon ami.
- Je n'en sais absolument rien, répondit-il sur le même ton. Mais si ce que je crois est exact, nous sommes dans un centre Pokémon.
Un centre Pokémon... Ce nom m'évoquait des souvenirs profondément enfouis dans les tréfonds de ma mémoire.
- Et comment on s'en va d'ici ? m'enquis-je.
- Tu ne vas pas tarder à le savoir, fit-il en fixant un point derrière moi.
Une porte s'ouvrit à ma gauche, laissant entrer une femme et une Nanméouïe. Comment s'appelait cette femme, déjà ?... Ah oui, Joëlle. Infirmière Joëlle. Décidément, je faisais des progrès.
- Nanméouïe, va voir comment se portent nos pensionnaires, intima la femme à son Pokémon.
- Méouïe, méouïe !
La Nanméouïe s'approcha de nous et nous salua :
- Bonjour ! Vous êtes au Centre Pokémon de Méanville. Comment allez-vous ?
Bien entendu, l'infirmière Joëlle ne comprenait absolument rien de ce que nous disions.
- Moi, ça va, l'informa Blu, c'est plutôt Lily qui...
- Je vais très bien, le coupai-je.
Nanméouïe leva un sourcil interrogateur, puis se ravisa.
- Très bien, finit-elle par dire, si vous avez besoin de moi, n'hésitez pas, je suis à votre disposition !
Elle commença à s'éloigner.
- Eh, attend ! l'hélai-je. Quand est-ce qu'on pourra partir d'ici ?
Elle haussa les épaules :
- Quand ma maîtresse le jugera nécessaire.
Et elle partit avec l'infirmière.
* *
« Il faut absolument qu'on s'en aille d'ici, déclarai-je d'un air décidé.
Ma tête allait beaucoup mieux, et je me sentais en pleine forme.
- Tu vois une issue ? se moqua gentiment Blu.
Je croisai les bras, l'air renfrogné. Il avait raison.
- L'infirmière a fermé la porte à clef, on ne peut pas sortir, reprit mon ami.
C'est alors que je me souvins d'une vieille astuce d'humain
- Blu, la salle est fermée hermétiquement, n'est-ce pas ? demandai-je au Riolu, pleine d'espoir.
- C'est exact, répondit celui-ci, ne voyant pas où je voulais en venir.
- Attends un instant.
Je mouillai mon index de salive et le pointai.
- Bingo ! m'exclamai-je. Il y a une échappatoire juste au-dessus de nous !
Blu leva les yeux et vit que j'avais dit vrai. Une toute petite bouche d'aération ornait le plafond.
- Comment l'as-tu su ? s'étonna mon ami, perplexe.
- La bouche d'aération laisse passer un souffle d'air. Mon doigt mouillé y a été sensible, lui expliquai-je. Allez, partons d'ici.
Blu acquiesça, descendit de sa couchette, monta sur la mienne et me fit la courte échelle.
- Zut, trop haut, pestai-je.
- Attends, je m'en occupe.
Mon ami me déposa à terre, prit un peu d'élan et sauta.
- Poing Acier !
Je vis avec stupeur son poing se recouvrir de métal et percuter violemment le grillage de la bouche d'aération. Je me protégeai la tête avec les mains pour ne pas recevoir d'éclats de fer dans les yeux. Quand j'enlevai mes bras, Blu était accroché à l'ouverture par ses pattes avant. Il se hissa avec difficulté dans la sortie et me tendit la main.
- Allez, saute ! m'enjoignit-il.
Je déglutis péniblement au vu de la hauteur à sauter. Si je ratais mon mon coup, je me ferais très mal.
Soudain, une puissante détermination m'envahit.
« Il faut sauter. » insista une voix dans ma tête.
L'instinct ?!
Je tournai mon regard vers Blu. Mon ami commençait à s'impatienter.
- Hé, que faites-vous ? Arrêtez !
Je m'orientai dans la direction du cri.
« Oh, non non non non non ! Ça ne va pas du tout ! »
Nanméouïe et l'infirmière Joëlle se précipitaient vers l'entrée de la salle pour essayer de nous rattraper avant que nous ne nous échappions. Là, je perdis le contrôle de moi-même et mon corps prit de l'élan et sauta. Je me rattrapai de justesse à la main de Blu qui réussit à me tirer vers lui et nous nous retrouvâmes aussi sec dans le conduit. Nous nous enfuîmes très vite à quatre pattes car le conduit était bas et étroit. Au même moment, l'infirmière Joëlle ouvrait la porte. Nous étions déjà loin quand elle se mit à parler :
« Et dire que nous aurions pu la guérir… »
*
* *
Nous progressions depuis très longtemps dans le conduit sans en avoir encore trouvé la sortie. Plusieurs chemins s'offraient régulièrement à nous : nous prenions toujours celui du milieu. De temps en temps, une petite brise fraîche venait nous rafraîchir ; d'autres fois, un souffle chaud nous aspirait en avant, et nous n'avions d'autre choix que de nous accrocher tant bien que mal aux petits interstices que nous laissaient les plaques de métal qui recouvraient sol, murs et plafond.
« Je ne sais pas si c'était une bonne idée, articula Blu alors que nous étions dans le cas cité précédemment.
Il avait plus de mal à s'agripper que moi, étant donné que ses doigts étaient plus gros que les miens.
- Il est trop tard, de toute manière, lui répliquai-je plus sèchement que je ne l'aurais voulu.
Je repris plus doucement :
- Quand le vent aura cessé, nous pourrons peut-être avoir une meilleure idée de notre position ; nous taperons contre les parois, et…
- Que dis-tu ? s'exclama Blu. Je ne t'entends pas !
En effet, le vent avait redoublé de violence, et nous avions de plus en plus de mal à rester accrochés et à nous entendre. Mes doigts me faisaient mal, si le vent continuait, j'allais lâcher prise et me faire aspirer !
- Aaaah !
Ma main droite venait de me trahir. Je ne tenais plus que des cinq doigts de ma main gauche. Quatre doigts…
Trois…
Deux…
Un…
- Nooon !
Je lâchai prise et me sentis cogner contre quelque chose qui recula à mon contact et se fit aspirer avec moi.
J'avais cogné contre Blu !
- Aïe ! Aïe ! Aïe aïe aïe !
Blu et moi nous cognions contre les parois, ricochions sans cesse et nous faisions maintes meurtrissures, toujours en étant aspirés.
Soudain, je crus rêver : malgré le vent, je parvenais à entendre… des rires ! Au loin, des gens criaient, comme si…
- Wouaaaïïïe !
Je ne parvenais plus à penser correctement. J'avais si mal…
« Schouf ! »
Brusquement, nous sortîmes du conduit et le vent s'arrêta. Je regardai vers le bas.
« Oh non… »
Nous étions suspendus dans le vide ! Nous restâmes ainsi quelques dixièmes de seconde, puis nous tombâmes.
« Adieu, monde cruel... » eus-je juste le temps de penser.
Pendant un instant, il ne se passa rien. Et puis soudain, je sentis un choc sur ma tête, et j'entendis un bruit de moteur qui démarre. Quelque chose bougea sous moi et prit de la vitesse. Cette chose montait, descendait, montait, descendait…
- Ha ha ha ! Woouuuhou !
- Beuh…
Je ne me sentais vraiment pas bien, j'avais envie de vomir. Je restai là où j'étais, attendant que le supplice s'arrête. J'étais à moitié inconsciente. Ou pas… Comment savoir ?