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I feel fine when it hurts you... [O.S.] de MerrySai



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Informations

» Auteur : MerrySai - Voir le profil
» Créé le 06/11/2013 à 01:40
» Dernière mise à jour le 06/11/2013 à 01:40

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Chapitre unique.
Je le vois. Il souffre. Ce qui est normal. Je doute que quiconque puisse ne pas souffrir en ayant une barre de métal à travers le corps. Cette barre est un juste retour des choses. Son agonie, j'en suis l'heureux spectateur. J'ai bien envié de l'achever. Mais où serait le plaisir, si j'abrégeais ses souffrances ? Il mérite la douleur. Ô, cette douleur, qu'elle m'a manqué ! J'en serais mort de chagrin s'il n'avait pas voulu me parler. Idiot. En plus, il veut me parler, mais il ne me comprend pas. Il me fait rire, à prendre la barre entre ses mains sans trouver le courage de l'enlever. C'est mieux qu'il ne l'enlève pas. Il risquerait de se vider de son sang. Je le lui dis :

-Enlève-la, tu pourras te vider du liquide vital plus rapidement, ça abrégera tes souffrances.

Il ne comprit pas. Il me regarda. Ses yeux reflétaient tout le désespoir du monde. Que c'est mignon. À son tour, il me baragouina quelque chose. Probablement qu'il avait besoin d'aide. Il me l'avait déjà dit. Mais il ne sait pas d'où je l'observe. Il ne me voit pas. Moi, je le vois. Je le vois essayer de ramper sur le béton, je le vois se tordre sous la souffrance. Et je me plais à imaginer le métal frotter ses chairs sanguinolentes. Imaginer ses nerfs envoyer mille signaux de douleur à son cerveau. Imaginer l'envie de mourir qui doit le parcourir à ce moment précis.
Certains auraient frissonné de dégoût devant ce spectacle et mes élucubrations, moi, j'en frissonne de plaisir. Et rien ne peut interrompre ce plaisir. Le hangar dans lequel je suis enfermé avec ma victime est perdu au milieu de nulle part. Et il est désaffecté. Un cri. Le sien. Il a essayé de se relever. Et il est tombé, faisant vibrer la barre en lui. Je souris encore.

Il m'a emprisonné. Il m'a forcé à me battre pour lui, pour sa survie. Qu'en avais-je à faire ? J'étais libre, avant. Je n'avais pas à me poser. Je pouvais voler. Toujours. Et ma liberté ne tient qu'à une vie. La sienne.
Mais rien, ô non, rien ne vaut le spectacle d'un corps secoué par la douleur. Il baigne dans son propre sang. C'est beau, un corps écarlate. Il n'imaginait probablement pas finir comme cela, pas mourir sous l'œil de son protecteur. Je suis ton bourreau, comme tu as été mon geôlier. Chacun son tour. C'est court, une vie. C'est triste aussi. Même si pour moi, ça n'a aucune importance.

-Tu ne représente rien pour moi, tu le sais, ça ?

Il ne répondit pas. Il avait même arrêté de gémir. Pourtant, il n'était pas mort. Pas encore. Il se remit à hurler. Mais ce n'était plus de la douleur. Plus seulement. Il avait peur, aussi. Je remarquai qu'un Rapasdepic , Pokémon à tendances charognards, c'était approché.
Ah. Et alors ? Eh bien, à y réfléchir, même si le voir se faire becqueter et dévorer petit à petit par un oiseau peut être tout simplement hilarant, j'ai peur qu'il ne meure trop vite. Un Dracosouffle suffit à chasser le volatile. Il me cherche des yeux. Je ne suis plus qu'une ombre pour lui. La fin est proche. Je m'approche de lui. Même s'il ne me comprend pas, je tiens à lui expliquer. M'entendre lui parler finira de le rendre fou. Je m'élançais donc dans mon monologue.

-Tu ne me comprends pas. Tu es un imbécile. Pourtant, tu n'es même pas humain ! Tu sais, avant toi, j'étais libre ! Libre… Comme l'air. Oui. L'air. Et toi, tu m'as enfermé. Tu m'as privé de cette liberté. Tu m'as retenu au sol. Imagine un oiseau dans une cage, un Milobélus dans un minuscule aquarium, un enfant puni au coin. Imagine. Imagine un Légendaire dans une Pokéball. Tu sais ce que j'ai ressenti ? Non. Car tu n'es ni un oiseau dans une cage, ni un Milobélus dans un minuscule aquarium, ni enfant puni au coin, et encore moins un Légendaire dans une Pokéball. Tu n'es rien. Et c'est vrai. Sans moi, tu n'es rien. Et pourtant, tu es le seul qui m'empêche d'être libre. Un peu paradoxal, non ? Tu ne trouves pas ?

Il avait même cessé d'essayer de me comprendre. Ses yeux rouges fermés, la respiration sifflante, il n'avait plus le même air fier que le jour où il m'avait pris ma liberté. Il n'avait plus ce visage heureux. Il n'avait plus un regard curieux sur ce qui l'entourait. Il n'avait plus rien. Normal, il ne m'avait plus, presque plus, moi. Je serais libre sous peu. À son dernier soupir, je m'envolerais. Mais, pour l'instant, il me tient encore dans son étau. Son étau de douleur qui me fait tant de bien. Je suis conscient que je ne devrais pas me sentir si bien quand il souffre. Et pourtant…

-S'il savait ! Si notre bon Arceus savait seulement ce que tu souffres, et ce que moi je ris ! Mais cet idiot dort, évidemment. Ô ! Blasphème ! J'ai traité Arceus d'idiot ! C'est lequel de tes amis qui aurait dit ça ? Ah, mais oui ! Aucun ! Tu n'as même pas su te faire des amis, tu n'avais que moi, tu n'as que moi… C'est fou, c'est celui qui dépend de l'autre qui le prive de sa liberté. Je retombe sur notre cher paradoxe de tout à l'heure. À croire qu'il est omniprésent. Le salaud. S'il n'était pas là, ce paradoxe, s'il n'existait pas. Tu sais quoi ? Tu ne serais pas en train de geindre avec une barre de fer plantée dans le ventre ! Et je n'aurais pas gâché des années et des années de gamineries avec toi !

Il ne bougeait plus. Ah, quel dommage de le voir dans cet état. Il était si beau, avant. Mais ce physique ne pouvait pas égaler la beauté d'une vie libre, sans contraintes, sans responsabilité, sans… Sans lui. Il meure. Son dernier soupir est presque arrivé. Il faut que je termine mes explications. Mon monologue.

-Enfin, c'en est fini pour toi, je suis presque libre. Dès ton dernier soupir, j'en profiterais pour m'envoler. Où ? Je ne sais pas trop encore… Les nuages, surement. J'aimais y faire des siestes avant que tu ne m'appelle ici, sur terre, avant que tu ne m'enferme. Je suis tellement heureux de voir que tu meures, là. Pour la première fois depuis longtemps, je suis heureux. Merci, douleur. Merci, peine. Merci, tout simplement.


Il y eut un dernier long soupir de soulagement dans le hangar. Carchacrok rend son dernier souffle. Voilà, c'en est réellement finit. Carchacrok est enfin libéré de l'enveloppe charnelle qui le retenait sur terre. Ah, le corps, la pire des prisons. Il en témoignera. Enfin, si jamais il réintègre un nouveau corps, un jour. Ce qui serait une horrible punition injustifiée.
Depuis qu'il est sur Terre, habitant dans un coin reculé de Sinnoh, Carchacrok tente de mettre fin à ses jours. Incompris, on l'en a empêché, où qu'il aille. Il a enfin réussi à s'isoler. Il savait que la barre qu'il s'était lui-même planté dans le thorax le tuerait dans d'immenses souffrances. Souffrances qu'il souhaitait endurer. Il souhaitait que ce corps, ce geôlier, cette prison souffre autant qu'il avait souffert de son emprisonnement. Chaque parole prononcée, il n'avait pas eu conscience qu'il ne la disait que pour lui-même. L'incompréhension, le mal-être, l'avaient rendus fou. Ou peut-être pas, au fond. Il n'était qu'un ange que la douleur du monde frappait trop fort.
Certains diront qu'il souffrait de dédoublement de personnalité et autres maladies mentales, mais au fond de lui, il savait ce qu'il faisait. Il savait qui il était. Peut-être même plus que ceux qui se croient heureux, et « sains d'esprit ».
Envoles-toi, Carchacrok, seuls les anges se blessent parce qu'ils se doivent de rentrer chez eux, dans les nuages. Envoles-toi, n'oublie jamais ce jour où ton esprit s'est senti bien parce que ton corps souffrait. Envoles-toi, sauves-toi, tu es libre, aujourd'hui. Envoles-toi, je te rejoindrais sur ton nuage.