... là où les routes se croisent. [2/7]
Une heure plus tard, le métro arriva à destination de Doublonville.
Les deux amis étaient littéralement noyés sous la foule : qu'importent où ils regardaient, ils ne voyaient qu'une mer vivante. Le contraste entre la paisible de ville de Rosalia se fit vivement sentir.
« Hum ! souffla fièrement Yuki. Cet obstacle est largement inférieur à ce quoi je m'attendais. Si toutes mes prévisions sont ainsi vues à la baisse, mon chemin n'en sera que plus rapide. »
Célio souriait naïvement, il voyait bien que son ami était très intimidé par ce surplus de population. Mais qu'importe, il avait retrouvé sa bonne vielle attitude. Célio avait un peu peur que Yuki resterait déprimé même après son arrivée, mais il semblerait que ses craintes ne soient pas justifiées.
Heureusement, les deux enfants avaient avec eux un plan de la ville, ainsi qu'un tracé très précis de leur itinéraire. L'Institut était proche du métro, enfin, proche dans le sens « Doublonvillois » : c'est-à-dire à environ trente minutes de marche, et bien plus pour les petites jambes des garçonnets. Le trajet fut particulièrement éprouvant, ne serais-ce qu'à cause des centaines de passants, qui faisaient tous au moins deux fois les tailles des deux compères, qui leur empêchaient de voir plus loin que le bout de leur nez.
La rue piétonne de Doublonville était constamment noyée sous le flot constant de sa population. Et l'aire réservée au cycliste n'était guère mieux lotis. L'immense capitale avait pour principe de privilégier les moyens de déplacement écologique : le métro et les vélos... et bien sûr les jambes pour les « petits » trajets. C'est principalement pour cette raison que les voitures y étaient rare, à vrai dire, les seuls qui utilisaient ce moyen de transport étaient ceux qui désiraient quitter la ville plutôt que pour s'y déplacer, et de même, les routes étaient très peu développées : même si on le voulait, on ne pourrait jamais explorer toute la ville en automobile.
C'était la politique de Doublonville : éviter la pollution le plus possible. Le ciel de la capitale faisait partie des trésors nationaux de Johto. Ou plutôt, son ciel étoilé. Il était donc tout naturel d'éviter que les astres nocturnes soient obstrués par une quelconque pollution. C'était le combat perpétuel d'Irisée, la championne de la ville. Bien entendu, dans une ville aussi gigantesque que Doublonville, instruire un comportement éco-responsable à tout ses habitants était très fastidieux, mais Irisée savait se faire respecter et le résultat de ses plusieurs années de travail acharné avaient portées leurs fruits : le ciel étoilé de Doublon-Ville continuait de sublimer tant les touristes que les autochtones.
Durant tout le trajet, Yuki et Célio étaient restés silencieux. Ils étaient bien trop occupés à ne pas se tromper de chemin pour discuter. A chacun de leur pas, l'excitation prenait place à l'inquiétude. L'Institut était une étape obligatoire pour tous les enfants du monde. Chaque région en possédait une, à noter que tout les instituts avaient le même uniforme à une petite différence près. C'était dans ces écoles très spécialisées que les enfants recevaient la précieuse « Certification d'utilisation des Pokédoll ». Un diplôme qui ouvrait de nombreuse porte : dans ce monde si l'on ne possèdait pas ce certificat, de nombreux métier, dont celui de dresseur, était inaccessible. Conscient de ce fait, les autorités interrégionales avaient décidé que les jeunes enfants devront recevoir une éducation gratuite, spécifique et obligatoire quand à l'utilisation des Pokédoll. Pour les personnes plus âgés n'ayant pu se soumettre à cet enseignement, des cours accélérées, payants, d'un an étaient mis en place. La raison principale était d'éviter de mélanger les adultes avec les enfants, de manière à garder une cohésion de groupe plus importante et sans complexe. En effet, dès que l'on rentrait dans l'Institut, son destin se voyait directement lié à celui de trois autres élèves. Le groupe ainsi formé était prié de bien vouloir s'entendre durant leur première année : c'était en quelque sorte aussi une épreuve à surmonter.
La création de ses groupes n'était, heureusement pour Célio, pas uniquement due au hasard : l'on pouvait demander lors de l'inscription d'être avec une personne en particulier. Les personnes seules seront ainsi rajouter aux membres manquants des autres groupes ou alors les petits groupes fusionneront, lors de la création des groupes finaux.
Après quelques dizaines de minutes de marche, les deux amis se retrouvèrent au pied d'un majestueux portail d'un style très inspiré du baroque.
« Pffiouu... soupira Yuki complètement éreinté, je ne sais pas comment... mais on a ... réussit...
Trop épuisé pour en rajouter plus, Yuki s'écroula sur le sol.
–Allez Yuki, courage ! le souleva Célio. Encore quelques pas l'on sera à l'intérieur ! »
Bien que mal à l'aise, Yuki rassembla toutes les forces qui lui restaient et se mit à suivre son ami.
Contrairement à son habitude, Célio se concentra sur sa destination plutôt que d'observer les alentours : ce n'était pas le moment de s'égarer et de plus Yuki pouvait à peine tenir sur ses jambes. L'Institut était d'une taille assez déconcertante, cependant les indications pour les nouveaux élèves étaient très précises, ce qui permis à Célio de rejoindre très vite le gymnase où se regroupait tout les enfants de treize ans de Johto.
« Là... on y est réellement... »
Sa limite atteinte, Yuki tomba K-O instantanément. Célio le regarda avec un sourire maladroit, mais qu'importe, maintenant il avait tout le droit du monde de se reposer. Toutes les futures premières années de l'Institut se trouvait dans ce gymnase. Bien qu'ils avaient tous le même âge, on sentait chez certain une détermination qui les faisait passer pour plus âgé qu'ils ne l'étaient réellement.
Bien évidement, Célio ne reconnu personne : tout ses enfants appartenaient indubitablement à des villes dont le petit garçon n'y avait jamais mis les pieds. Bien qu'il le su depuis le début, Célio se sentit un peu triste. Cependant, le garçonnet avait l'espoir de se faire plein de nouveau ami. Et plein de nouveau ami Pokédoll aussi, d'ailleurs il était de plus en plus impatient de recevoir le sien.
Célio resta tranquillement au coté de son ami encore plongé dans un profond sommeil. Il avait bien envie d'aller saluer quelques élèves qui seraient de potentiels futurs amis, mais il se devait de ne pas laisser Yuki seul : il ne devait plus jamais l'être. Finalement, la fatigue s'empara petit à petit de son corps et Célio eut les paupières de plus en plus lourdes. De toute façon il restait encore quelques heures avant le début de la cérémonie alors...
Succombant au plaisir d'une bonne sieste, les deux compagnons roupillèrent paisiblement contre le mur du gymnase malgré le brouhaha constant des élèves déjà présents. Or, après une quarantaine de minutes, un incident calma immédiatement tous les enfants.
« Pfeuh ! Alors c'est ça la nouvelle promotion de l'Institut ? »
Un nouvel arrivant, lui aussi vêtu de l'uniforme, venant d'envoyer violement l'un des autres enfants au sol. Bien qu'il ait lui aussi treize ans, la brute faisait deux fois la taille de la plupart de ses semblables. L'enfant qui venant d'être mis au tapis n'avait rien vu venir et commença à sangloter.
« Tu n'avais qu'à pas être dans mon chemin, l'morveux ! ... Hé ! Mais c'est qu'il pleure ce lâche en plus ! Alors c'est ça, tu ne comptes même pas te défendre et tu préfères appeler ta maman ? Gahahaha ! »
La pauvre victime s'enfuit en pleurant, devant les rire incontrôlés de la brute.
« Gahahaha ! Personne n'ose s'opposer à moi alors ? Z'êtes qu'une bande de lâche »
Ce rire malsain vint immédiatement piquer l'instinct chevaleresque de Yuki, qui se précipita en un éclair devant la brute juste après s'être instinctivement réveillé.
« Oh ? souri le délinquant. Quelqu'un veut m'affronter finalement ?
–Je ne sais pas qui tu es, commença Yuki, mais si tu continues à persécuter les opprimés, tu devras répondre de tes actes devant ma foudroyante justice !
–GAHAHAHA ! Mais comment est-ce qu'il délire ce mec ! Tu me plais bien comme bouffon toi, c'quoi ton nom ? Allez j'uis sympa et j'te le dis le mien : j'm'appelle Karl, enchanté. Gahahaha !
–Tu peux encore rire pour l'instant, voyou. Néanmoins, l'étoile de la vengeance ne te fera preuve d'aucune pitié. Et c'est moi, Yuki, qui fait te l'infliger !
–GAHAHAHA ! On verra ça !
Sans s'arrêter de rire, Karl projeta son énorme masse corporelle sur Yuki. Surpris par la puissance de l'impact, ce dernier se fit projeter cinq mètre en arrière.
–Espèce de...
–Gahahaha ! C'est bien se savoir parler, mais après faut avec quelque chose dans les bras !
–Ne me sous-estime pas mon ardeur !
Ignorant la douleur, Yuki tenta désespérément d'attaquer son agresseur. Et contrairement à ce que pourrait laisser penser son poids, Karl était suffisamment agile pour esquiver tout les assauts.
–T'es amusant à bouger dans tout les sens toi, gahahaha !
–Ne vend pas ma peau avec de l'avoir tuée !
–Bon c'est pas que je m'ennuis mais ... Gahahaha !
Subitement, Karl donna un énorme coup de poing à Yuki, le projetant sans merci contre un mur.
Pendant ce temps, l'agitation commença à perturber sérieusement le sommeil de Célio qui se réveilla lentement.
–Mmmh... non ... encore dodo...
Encore à moitié assoupie, Célio se frotta vigoureusement les yeux avant d'apercevoir une scène qui le remplit de terreur : son ami était au sol, et un mastodonte menaçant était bien décidé à lui faire du mal. Sans réfléchir une seconde, le jeune garçon fonça vers Karl et s'agrippa à sa jambe en lui suppliant :
–Arrêtez ! Ne... ne lui faîtes pas de mal !
–Qu... ? lâcha Karl surpris. Gahahaha ! Je crois qu'un moucheron vient de se coller à moi !
–Par pitié, arrêtez...
Karl se débarrassa aisément de Célio d'un petit coup de pied dans l'estomac.
–Si tu tiens, vraiment à te faire massacrer par moi, reviens après que je me sois débarrassé de l'autre morveux, gahahaha !
Complètement impuissant et dangereusement affaiblis, Célio ne pouvait qu'observer la brute se diriger lentement vers son ami d'enfance. Dans un dernier souffle d'espérance, Célio se mis à crier :
–AIIIDEEEZ-LEEEE !
Alors que Karl comptait surplomber l'ultime demande de Célio de son horrible rire, la brute ne pu que sortir un petit son étouffé.
–....qu...
–Héhé, c'était un cri très passionné. Nous ne pouvons plus ignorer cet imbécile désormais.
Une étrange et puissante voix venant de résonner. Célio pris quelques secondes avant de se rendre compte qu'à la place de l'agresseur, se trouvait deux enfants étincelants.
–Rien de cassé ? demandèrent les deux sauveurs à Yuki qui peinait à se relever.
–Ça... ça va...
–Z'êtes qui vous ? pesta Karl rouge de colère en massant son ventre encore douloureux.
–Hum ? Il est encore debout le guignol ? Hé, c'est qu'il en redemande en plus.
–Euh... intervint Célio. Mer... merci...
–De rien ! Hé, nous ne pouvons tout simplement pas rester sans-cœur à ton appel ! Nous sommes Lann et Lynn, heureux de faire ta connaissance.
Célio restait sans voix devant la beauté de ses deux individus qui lui paraissait tel des anges. Devant lui, se trouver un garçon, Lann, et une fille, Lynne, tous deux dotés d'une chevelure d'or fin. Malgré la différence de sexe, Lann et Lynn se ressemblaient comme deux gouttes d'eau, ne serais-ce que Lynn possédait une chevelure un peu plus longue que celle de son frère. « Sûrement des jumeaux », conclut Célio. Au début le garçonnet trouvait leur voix étrange, et pour cause : les jumeaux s'exprimaient toujours en chœur, dans un parfait ensemble. De même toute leur existence semblait liée, on aurait dit deux reflets dans un miroir.
–Gahahaha ! s'esclaffa Karl. Ne croyez pas m'avoir vaincu !
D'un geste de main, la brute appela une dizaine d'élèves qui s'amassèrent derrière lui.
–Gahahaha ! J'vous présente mon équipe : le Karlnage !
–"Kalrage" ? répétèrent les jumeaux perplexes.
–Karlnage ! Avec un « N » ! Alors, vous pensez vraiment pouvoir tous nous battre ? Gahahaha !
–Vous devriez avoir honte d'attaquer en nombre !
Une voix féminine venait de retentir de nulle part.
–Qui parle ?! grinça Karl en sondant le gymnase du regard.
–Je suis juste là ! Arrêtez de m'ignorer !
Une fille se tenait devant Karl en le pointant un doigt accusateur. Ou plutôt, une fille dans l'uniforme des garçons.
–T'es... un mec ?
–Je suis une fille ! Ça se voit non ?! Enfin bref quoiqu'il en soit, je ne peux pas vous laissez faire ce que vous voulez. Taïauuuut !!
La demoiselle se jeta dans la mêlée, ou plutôt, essaya. Après avoir avancée de quelques mètres, elle dérapa mystérieusement et se vautra la tête la première.
–Itatataïe... gémit-elle. Hum, c'est tout pour moi. Je suis dans l'obligation de me retirer.
Sur ce, la fillette se releva en titubant et s'éloigna du centre de l'action.
–...
–...
–...
Que ce soit Célio, Karl ou les jumeaux, tout le monde restait penaud et interloqué devant l'apparition éclair de la jeune fille. Une autre demoiselle, qui semblait être amie avec la précédente fillette, apparue à son tour et baissa légèrement la tête :
–Oubliez là, il ne c'est rien passé. Vous pouvez reprendre vos occupations.
De même que pour son amie, cette demoiselle disparut tout aussi vite qu'elle n'était arrivée.
–BREF ! reprit Karl en tentant d'oublier ce qu'il venait de voir. Préparez-vous à prendre la gamelle de votre vie ! Gahahaha !
–Cela suffit.
–Quoi ? Encore personnage secondaire qui intervient ?! grogna la brute.
–Vos piailleries commencent sérieusement à m'irriter. Je vous prierais de bien vouloir polluer un autre endroit de votre ricanement atroce.
–GAHAHAHA ! Mais c'est qu'elle s'y croit vraiment la gamine ! Allez-y tout le monde, massacrez là !
–On va n'en faire qu'une bouchée, chef !
– ... humpf.
La petite aristocrate qui venait d'intervenir ne bougea pas d'un pouce. Avec le même rictus malsain, toutes les petites frappes préparèrent vivement leur assaut sur la demoiselle sans défense. Ou du moi c'est ce qu'ils croyaient, car le temps d'un claquement de doigt, une centaine de garde-du-corps immergèrent de nulle part. La particularité de ce commando : ils étaient tous âgé de treize ans et portaient une cagoule bleu-ciel sur lequel un gros « S » rose y était incrusté. Le leader du groupe, le seul membre du groupe sans cagoule, une sorte de majordome pris la parole.
–Nous sommes le fan club des Dévoués à son Altesse Stella-Hime ! Les DASH ! Quiconque essayera de porter atteinte à son corps devra répondre de notre courroux !
–Alors, continua la princesse, si vous voulez je compte à votre place, vu que vous ne savez sûrement pas le faire, votre "Karlage" est constitué d'une dizaine de petites frappes et ma modeste personne possède une centaines de roturiers dévoués. Le rapport de force semble me semble évident, ou cela est-il trop compliqué à comprendre pour votre misérable cervelle ?
–Argh... grogna Karl devant ces renforts inattendus. On... on a perdu ! G...G...GAAAAAH !
La brute poussa un dernier hurlement d'agonie avant de s'enfuir expressément hors du gymnase avec sa bande.
–Euh... fit timidement Célio une fois le danger écarté. Merci !
– ... humpf, souffla Stella avant de partir suivi de son fan-club.
–Hé, elle n'est pas commode la petite dame ! ironisèrent les jumeaux. Bon, ben... finalement c'est elle qui a fait tout le boulot, on n'a pas été très utile, héhé !
–Si ! s'écria soudainement Célio. Si vous n'avez pas été là, le méchant aurait fait du mal à Yuki !
–« Le méchant » ? sourirent Lann et Lynn, tu as une drôle de façon de t'exprimer toi !
–Si, il était très méchant ce garçon, et vous, vous nous avez aidez donc vous êtes des gentils personnes!
–Hé, t'es mignon toi, on t'aime bien ! ... ... ... mais laisse nous te donner un conseil, n'étiquette pas les gens trop vite...
–Hein ?
– Héhéhé, non rien, oublie. Allez, à la prochaine !
D'un signe de main, les jumeaux s'éloignèrent du jeune garçon avant de se fondre dans la foule. Célio avait eu un peu de mal à comprendre la fin de la discussion, est-ce qu'ils essayaient de dire que le méchant était un gentil ? Décidemment, Célio avait toujours eu du mal à comprendre les choses compliquées. A l'inverse, il pouvait lire à travers Yuki comme dans un livre ouvert. Le garçon savait pourquoi son ami était resté silencieux durant toute la scène : Yuki détestait qu'on le voie dans des situations embarrassantes. Avec un grand sourire, Célio s'approcha de lui.
–J'aurais pu me débrouiller seul ! Cette racaille, même accompagné de ses sous-fifres, n'avait aucune chance contre moi !
Célio rigola : il savait dès le début que son ami allait lui sortir ce genre de réplique.
–Pourquoi tu ries là ? Hé, ne m'ignore pas !
Finalement tout c'était bien terminé, bien que rien n'ait commencé en fait. Il y avait plein de gens très étranges dans cet institut : une brute épaisse, deux jumeaux espiègles, une princesse un peu prétentieuse et ce garçon-manqué quelque peu... inutile ? La vie à l'Institut de Johto venait à peine de débuter et l'avenir s'annonçait déjà très mouvementé.