Chapitre 183 : Siena en action
Karus pénétra dans la centrale, où l'attendaient tous ses hommes et une bonne majorité de ceux de Giovanni. Le gamin n'était pas venu lui-même, mais lui avait envoyé trois de ses Agents Spéciaux pour l'assister. Comme si Karus en avait besoin ! Mais bon, c'était aussi bien qu'ils soient là, pour rapporter à Giovanni toute l'étendue de son succès. Vilius, l'Agent 003 et fils de Giovanni à la coupe si explosive, s'avança vers lui.
- L'équipe scientifique vous fait savoir que la dérivation que vous avez demandé est terminée et fonctionnelle.
- Bien. C'est à moi de jouer alors...
- Puis-je vous demander à quoi va servir tout ce bordel, au juste ?
- Tu entends quelque chose au Flux, gamin ?
- Non, pas vraiment, mais l'ingénierie, ça me connait. Le système que vous nous avez demandé de créer, il est capable de générer une puissance nucléaire qui pourrait anéantir une bonne partie du monde.
- Non, en fait, répliqua Karus, s'il a été bien conçu, c'est le monde entier qui devrait être détruit. Mais ce n'est pas le but. J'ai besoin d'une telle puissance pour propager l'étendu de mon sort à travers tout le globe. Viens avec moi, et amène tes potes. Je vais vous montrer.
Karus monta jusqu'à la salle de contrôle, et Vilius fit signe à 004 et 005 de les suivre. La salle centrale avait été aménagée de sorte que tous les condensateurs arrivent jusqu'à elle. Les fils étaient placés en un système complexe, et tous étaient reliés au centre par un cercle métallique transparent. Tout autour de la salle, il y avait des vitres où l'on pouvait voir tout l'agencement du système, et les centaines de Pokemon Foudre qui continuaient à remplir les réacteurs.
- C'est ici que je me tiendrai, fit Karus en désignant le cercle. Toute l'énergie parviendra jusqu'à moi, avant de se propager dans les condensateurs principaux que vous voyez en haut. Moi, je transformerai l'énergie en une onde de Flux qui modifiera l'ADN de tous les humains qu'elle touchera, faisant apparaître en eux le gène des Mélénis. Quand tous les compteurs seront au maximum, il y aura une explosion de Flux qui se propagera à travers le monde entier. Elle ne détruira rien. Non, elle transformera.
L'Agent 004 Bonouarg, qui avait toujours à la ceinture ce flingue d'un mètre de long, fronça les sourcils.
- Mais si vous ne parvenez pas à transformer toute cette énergie nucléaire en votre Flux bizarre, ce sera ça qui se propagera. Et il en suffirait d'une quantité infime pour faire exploser la centrale, et provoquer une catastrophe planétaire.
- C'est vrai, admit Karus. La moindre erreur, le moindre instant d'inattention nous serait fatal. Une chance pour vous : je ne commets jamais d'erreur.
Vilius eut une moue méprisante. Sans doute le gamin ne devait pas apprécier plus que son père l'idée du nouveau monde de Karus et la disparition de la Team Rocket. Sans doute se voyait-il déjà le nouveau Boss ? Pauvres humains, toujours à espérer vainement monter plus haut...
- Y'aura-t-il des changements dès que nous deviendrons Mélénis ? Demanda Estelle. Ou nous contenterons-nous d'avoir des supers pouvoirs ?
- Votre espérance de vie s'allongera énormément, indiqua Karus. Les capacités de votre cerveau aussi. Vous aurez en outre la capacité de comprendre le langage Pokemon, avec un peu d'entraînement. En contrepartie, les femmes ne pourront plus avoir qu'un seul enfant. Après le premier né, elles seront stériles.
- Et comment ça se fait ça ? S'étonna Vilius.
- C'est ainsi depuis environ quatre mille ans, depuis la Règle du Secret. Pour éviter les persécutions des humains, nous avons décidé de nous cacher, et réduire notre natalité était nécessaire. Les anciens Mélénis ont donc jeté un sort complexe de Flux pour ne plus permettre qu'une seule naissance par femme Mélénis. Malheureusement, ce sort fut définitif, ce qui n'était pas prévu...
Bonouarg sembla calculer quelque chose.
- Si deux Mélénis ne peuvent plus avoir qu'un seul enfant... Il est inévitable que la race s'éteigne un jour, non ?
- Oui, admit Karus. Mais ce ne sera pas avant des millénaires, étant donné la durée de vie des Mélénis. Après ça, en effet, ce monde n'appartiendra plus qu'aux Pokemon.
- Et ça vous fait plaisir ? Demanda Vilius. L'extinction de l'humanité sous toute ses formes ?
- Mieux vaut vivre quelque temps dans un monde parfait qu'éternellement dans un monde impur, répliqua Karus. Et d'ici là, qui sait ce que nous aurons découvert grâce au Flux ? Nous pourrons peut-être réussir à lever ce sort. Ou découvrir le secret de la vie éternelle ? Seul Arceus le sait.
- Justement. C'est Arceus qui a crée le monde tel qu'il est. Il a créé les humains distinct des Mélénis. Vous voulez réformer sa création en jouant au Tout Puissant. Pas sûr que ça lui plaise...
Karus ricana.
- Arceus a cessé de se mêler des affaires mortelles depuis des lustres. Il a d'autre Miaouss à fouetter dans son univers infini, et même au-delà. En clair, il se fiche de nous. Il nous a créé par ennui sans doute, ou pour le seul plaisir d'utiliser ses pouvoirs divins. Nous sommes seuls maîtres de notre destin. Maintenant, assez discuté. Je vais commencer.
Il se plaça au centre de la pièce, et attira via le Flux les fils électriques jusqu'à lui. Aussitôt, les réacteurs se mirent en marche, et l'énergie commença à se déverser dans son corps.
- Sortez, ordonna Karus. Je veux être seul quand je remodèlerai ce monde. Protégez cette salle. Je sens que quelqu'un va tenter de nous nuire...
***
Siena posa ses jumelles infrarouges.
- Je compte une dizaine de gardes devant la porte, au moins cinq tireurs embusqués sur le toit, et quelques Pokemon Psy pour capter tous les intrus aux alentours.
- Sans compter tout ce beau monde qui doit se trouver à l'intérieur, ajouta Lusso avec un gémissement.
- Oui, fit Siena. Il parait que le Boss a envoyé 003, 004 et 005.
- Nous sommes cuits, conclut Lusso.
Ils se trouvaient sur la petite montagne en face de la centrale. Même les environs avaient été gardés, mais grâce au nouveau pouvoir de Siena, elle avait été en mesure de prédire à chaque fois d'où allait sortir les sbires et quel serait leur trajet. Là encore, elle voyait les pas des gardes de la centrale avant même qu'ils ne les fassent. Elle se sentait comme invincible, quelque soit le nombres d'hommes de Karus à l'intérieur ou la présence d'Agents Spéciaux.
- Vous n'avez pas besoin de vous occuper de qui il y a à l'intérieur, fit Siena à ses trois compagnons. Contentez vous de provoquer un beau bordel au dehors.
- Vous comptez vous infiltrer seule dedans ? S'étonna Silas. Cela me parait d'une témérité un peu trop exagérée...
- Il a raison, certifia Lusso. C'est encore plus taré que tes idées habituelles, ce qui n'est pas peu dire !
- C'est vrai, c'est déraisonnable, colonel, ajouta Ian. Je veux moi aussi m'amuser. Pas question de rester dehors à me taper du menu-fretin tandis que vous vous amuserez avec les gros lascars à l'intérieur !
Lusso, qui s'était tourné vers lui, ravi de son soutient, se décomposa à l'écoute de la fin de sa phrase.
- Des tarés...
Siena réfléchit, et pris sa décision.
- Silas m'accompagnera. J'ai besoin de vous deux dehors pour attirer l'attention. Quand tout aura vraiment chauffé, vous pourrez rentrer si vous voulez...
- Voilà un plaisir dont je pourrai me passer, marmonna Lusso.
- Très bien, fit Ian. Mais ne prenez pas tout pour vous. Laissez-moi quelques gars.
Siena sourit.
- Je ne compte pas les étaler tous jusqu'à atteindre Karus, sans quoi je n'aurai plus de force pour l'affronter. Oh, et Ian... Vous pouvez faire ce que vous voulez des gars de Karus, mais tâchez de ne pas trop tuer de Rockets.
- Je ne promet rien, mais je vais essayer.
Il empoigna ses deux lames jumelles et descendit la montagne, en compagnie d'un Lusso plus que réticent.
- Pourquoi m'avoir pris avec vous ? Demanda Silas. Ian vous aurez été bien plus utile question combat à l'intérieur. Je suis un espion, un infiltrateur, un manipulateur, pas un guerrier.
- Je crois que vous êtes un peu plus que tout cela, Silas. Il est temps de me montrer ce que vous savez faire réellement.
Son second lui décocha un regard à la fois curieux et amusé.
- Je ne vois pas de quoi vous voulez parler, colonel Crust.
- C'est vous-même qui avez dit que j'avais un talent naturel pour juger les gens, lui rappela Siena. Votre posture, votre assurance... Tout cela m'indique vous êtes quelqu'un qui n'a pas tellement à s'inquiéter pour lui.
Siena mentait un peu. En fait, c'était plutôt Horrorscor qui lui avait fait part de ses soupçons, en affirmant que ce Silas Brenwark avait quelque chose de bizarre. Et Horrorscor, pour avoir côtoyé durant longtemps des gars comme les Agents de la Corruption ou encore les Armes Humaines de Zelan, devait s'y connaître en paranormal. Brenwark leva les bras, l'air d'un enfant pris sur le fait.
- Ciel, m'aurait-on percé à jour ? Je peux vous montrer, colonel, mais vous ne devez pas en parler. J'ai une réputation de gars mystérieux à tenir.
- C'est promis.
- Et en échange, vous me direz comment ça ce fait que vous semblez prédire tous les mouvements de tout le monde désormais. Vous avez su deviner le parcours de chaque garde que l'on a croisé. Je doute que ce soit une coïncidence.
- C'est de bonne guerre. Oui, c'est vrai, avoua Siena. Désormais, je vois toujours le futur avant qu'il ne se produise. Seulement de deux secondes, mais je pourrai voir plus loin avec le temps. En revanche, je ne peux pas vous dire comment j'ai acquis cette capacité.
- Eh bien alors, je ne vous dirai pas comment j'ai acquis la mienne, sourit Silas.
- Vous êtes dur en affaire. Mais ainsi soit-il.
Silas sourit, puis ferma les yeux comme pour se concentrer. Alors, un second Silas se matérialisa juste à coté de lui, debout et souriant. Le vrai rouvrit les yeux.
- Voilà, dit-il. Un second moi.
Intriguée, Siena examina le double. Il avait l'air fichtrement réel, mais quand Siena essaya de le toucher, sa main le traverser comme un hologramme.
- C'est une illusion d'optique ?
- C'est un peu plus élaboré que ça.
Siena sursauta, car c'était le double qui venait de parler, alors que Silas n'avait pas ouvert la bouche.
- Je l'appelle mon clone d'ombre. Il peut se déplacer indépendamment de moi, tout comme il peut parler, et tout ce qu'il voit ou ce qu'il entend m'est transmit. Un pouvoir qui m'a été fort utile dans ma carrière d'espion dans l'Unité du Silence.
- Et qui nous sera fort utile maintenant, je n'en doute pas.
Siena était curieuse sur le fait de savoir comment ce pouvoir fonctionnait et était possible, mais un marché était un marché.
- Avec un tel pouvoir, vous auriez facilement pu devenir un des Agents Spéciaux, lui dit-elle.
- Les pouvoirs ne suffisent pas pour intégrer l'élite de Giovanni, répondit Silas. Il faut aussi quelque chose que l'on nomme couramment du piston. Mais vous, vous avez les deux apparemment. Vous êtes bien partie.
- Après ce qu'on va s'apprêter à faire, je doute que le Boss m'ait aussi à la bonne qu'avant. Vous êtes prêt ? Je vois que Ian et Lusso sont en position.
En effet, les deux étaient totalement descendus de la montagne et se tenaient derrière un rocher juste en face de la centrale. Le double de Silas descendit à son tour.
- Je vais l'envoyer pour faire diversion, expliqua Silas, pour que Ian et Lusso commencent leur attaque. Pendant ce temps, on fait un joli trou dans le mur de derrière et on entre.
- Faudrait éviter de placer notre explosif sur le mur renfermant l'un des réacteurs nucléaires...
- Ne vous inquiétez pas, j'ai étudié les plans de ce complexe.
***
Vilius entendit des cris venant de dehors, ainsi que des coups de feu et des explosions. Il prit son comlink et avisa un de ses lieutenants qui gardait l'entrée.
- Au rapport. Qu'est-ce qui se passe ?
- On nous attaque monsieur !
- Ça ne m'avait pas échappé, vu le bruit. Fichus Dignitaires... Ils ont donc eu vent de notre position ? Pourtant, on avait rien laissé fuiter !
- Ce n'est pas l'armée du gouvernement, monsieur ! C'est... eh bien, j'ai reconnu le capitaine Lusso Tender !
Vilius fronça les sourcils.
- Tender ? Ce crétin ?! Il est tout seul ?
- Non. Il y a un gars balèze avec deux sabres, et puis... un type sur lequel nos balles n'ont aucun effet, qui reste là sans bouger ! Je crois qu'il s'agit de Silas Brenwark, de l'Unité du Silence ! Ils ont aussi des Pokemon ! Une espèce de truc poilu qui se tient sur deux pattes, et qui... ARRRRGHHHHH !
La communication fut coupée, mais Vilius eut le temps d'entendre un grognement et un bruit lugubre de mastication. L'Agent réfléchi. Ce gars à deux lames, ça devait être une des nouvelle recrues dont lui avait parlé Silas... Et Vilius n'était pas sans ignorer le pouvoir étrange de l'Ombre. Si eux trois étaient là, Crust n'était pas loin.
- Qu'est-ce qu'elle veut faire, cette folle ? Marmonna Vilius.
- On fait quoi ? Demanda sa sœur Estelle.
- Nous avons nos ordres du Généralissime. Ce qui se passe dehors est sans doute une diversion. Si je la connais bien, Siena ne devrait pas tarder à se montrer. Bonouarg et moi on reste ici pour l'attendre. Toi, va donc t'occuper de Tender et de l'autre.
Estelle ne protesta pas, ce qui étonna Vilius. Sa sœur n'obéissait qu'à leur père, et de plus elle se méfiait de Vilius comme de la peste. Peut-être voulait-elle vraiment du nouveau monde de Karus : tout le monde qu'il est Mélénis tout le monde qu'il est gentil. Ça ne l'aurait pas étonné. Cette pauvre Estelle avait toujours eu un fond un peu trop pacifiste, ce qui était quelque peu en contradiction avec la nature de son pouvoir... Vilius frissonna rien que d'y penser. Il reprit ses esprits et se tourna vers 004.
- Séparons-nous. Je reste ici et je garde la salle de contrôle. Tel que je connais la gamine Crust, elle voudra affronter seule le Généralissime. Vous, essayez donc de trouver Silas Brenwark, qui doit être avec elle en ce moment.
- Brenwark ? Je croyais qu'il était dehors avec Tender.
- C'est que vous ne connaissez pas ses étonnantes capacités, sourit Vilius. Ce qu'il y a dehors n'est sûrement qu'une vulgaire copie immatérielle pour attirer l'attention. Non, Brenwark est ici avec Crust.
- Bon. Dois-je le tuer ?
Il leva son super pistolet, qui émit quelques bips curieux et d'étranges lumières. Vilius eut un sourire ironique. Bonouarg ne devait sa place d'Agent qu'à un grand service qu'il avait rendu au vieux. Il n'avait donc aucun talent spécial, et s'était fait construire en conséquent une arme originale pour s'attirer le respect et la crainte. Une arme sans doute puissante, mais horriblement ridicule. On aurait dit un flingue en plastique d'un film de science fiction à petit budget. Enfin, Vilius ne critiquait pas. Lui aussi ne devait sa réputation qu'à des accessoires. Plus précisément, aux bracelets de Sombracier qu'il portait et qui faisaient toute sa force, sa vitesse et son intelligence. En fait, parmi tous les Agents Spéciaux, seuls Judicar, Estelle et 007 étaient dotés de véritables pouvoirs non provoqués par quelques subterfuges.
- Faite de lui ce que vous voulez, répondit Vilius. Il s'est révélé être un outil défaillant. Je l'ai mis avec Crust pour qu'il soit mes oreilles et ma voix auprès d'elle. Je vois maintenant qu'elle est parvenue à avoir sa loyauté d'une façon ou d'une autre. Dangereuse, cette gamine. Je l'ai toujours su...
***
Siena et Silas avaient pénétré la centrale, en se débarrassant facilement des hommes de Karus. Ils avaient beau être surentrainés, Siena voyait à l'avance l'impact de leurs balles, ainsi que la direction de leurs coups. Quant à Silas, il se révéla malgré ses dires d'une grande efficacité quand il s'agissait de se battre. Siena n'avait même pas eu à faire appel à ses Pokemon. En suivant le chemin vers la salle de contrôle, ils tombèrent nez à nez avec Eliott Duston, le second de Karus, celui qui avait acquit le Flux pour la démonstration du Généralisme. Il toisa Siena d'un air à la fois indifférent et méprisant.
- Vous avez beau avoir le même nom que le Seigneur Karus, je ne peux vous laisser menacer ses projets.
- Alors arrêtez-moi, fit Siena sans cesser d'avancer.
Duston tendit la main et lança sur elle une boule de Flux. Elle se volatilisa avant d'avoir atteint Siena. Surpris, Duston bougea les doigts, sans doute avec l'intention d'utiliser le Second Niveau sur elle. Là encore, il ne se passa rien.
- Mais que...
Siena lui montra la petite pierre verte qu'elle portait à la ceinture.
- C'est fou comme les Mélénis sont perdus dès que leur Flux ne marche plus...
Duston rugit, puis fonça sur Siena, son poing levé. Vu sa vitesse, il avait utilisé le Premier Niveau pour accroître sa condition physique. Mais ce n'était pas encore assez rapide pour Siena, qui l'avait vu arriver avant même qu'il ne commence son geste. Elle s'écarte d'un pas, l'évitant facilement, puis lui planta un poignard entre les deux yeux au passage. Le Mélénis mourut avant d'avoir compris ce qui lui arrivait.
- Vous êtes effrayante, colonel, siffla Silas. C'est que vous...
Silas s'arrêta, le visage en alerte, puis s'écarta d'un bond. Un tir de rayon laser toucha l'endroit où il se trouvait une demi-seconde plus tôt. Siena n'était pas intervenue. Elle avait bien vu dans le futur que Silas allait s'écarter à temps. Le tir provenait d'un peu plus haut, à coté d'un réacteur. Il y avait là un homme en costume impeccable, tenant un pistolet d'une longueur et d'une forme inhabituelle.
- Agent 004, dit Siena. Veuillez ne pas nous ralentir. Nous n'avons rien contre vous en particulier.
- Que voilà une belle arrogance, répondit l'Agent. Vous pensez que parce que vous êtes la nouveauté en vogue de la hiérarchie, vous pouvez vous adresser ainsi à un Agent, et même aller à l'encontre des décisions du Boss ?
- Je suis fidèle à la Team Rocket avant d'être fidèle au Boss, répliqua Siena. En vendant son âme à Karus, il est allé à l'encontre de tous les principes de la team. Je vais arrêter le Généralissime. Il pourra me juger et me condamner après.
- C'est vous qui nous condamnez, colonel ! Sans Karus et son plan, on se fera exterminer par le canon des Dignitaires !
Siena soupira.
- Quel manque de foi consternant... Vous doutez des capacités de notre propre organisation, monsieur ?
- Laissez tombez colonel, fit Silas. Continuez. Vu le bruit des réacteurs, Karus a déjà commencé son projet. Je m'occupe de lui.
Siena hocha la tête et continua, tout en évitant dérisoirement un autre tir de Bonouarg. Elle grimpa à une échelle pour arriver dans la salle en contrebas de la salle de contrôle. Elle pouvait la voir de là, car il y avait une vitre en verre qui la séparait d'elle. Des lumières anormales s'échappaient de cette salle. Siena devait se dépêcher. Sauf que quelqu'un l'attendait déjà dans cette pièce.
- Yo colonel, fit l'Agent 003. Je ne pensais pas vous voir ici. Une envie pressante d'aller faire un gros bisou à son papy ?
Siena plissa les yeux et posa la main sur son fouet électrique. L'image du futur de Vilius était comme brouillée, indistincte.
- Qu'est-ce qui ce passe ? Demanda-t-elle à Horrorscor.
- Cet homme porte du Sombracier, expliqua le Pokemon. C'est un métal qui transcende le temps et l'espace. Lire son futur sera compliqué. Prends garde...
Siena était embêtée. Son pouvoir de prédiction était son seul avantage. Sans lui, elle ne serait pas capable d'affronter un des Agents Spéciaux.
- Vous pourriez me laisser passer gentiment, monsieur ? Demanda Siena.
- Ça dépend, répondit 003. Pourquoi le ferai-je, alors que les ordres de mon père ont été clairs ?
- Vous lui avez bien désobéi pourtant quand Zelan a commencé à prendre le pouvoir, lui rappela Siena. Karus ne vaut pas mieux que lui. Zelan voulait d'un monde sans Pokemon, Karus un monde sans humain. De plus, vous ne pourrez jamais espérer devenir Boss dans le monde qu'il a prévu.
- Sans doute pas, admit Vilius. Ceci dit, je pourrai toujours espérer être vivant, et le rester pendant un bon moment.
- Vous n'êtes pas du genre à vouloir vous la couler douce avec des pouvoirs surhumains, si je puis me permettre.
- Non ? Alors dites-moi de quel genre je suis ?
- Celui de se battre. Celui de lutter pour soi. Celui de toujours chercher à s'élever et à progresser. Le même genre que le mien.
Vilius parut surpris, puis éclata finalement de rire.
- C'est pas faux. Dans un monde où la paix règne et où tout le monde serait égal, je me ferai grave chier. Mais vous avez beau avoir des idéaux en béton, je ne pense pas que vous soyez assez forte pour arrêter Karus.
Siena haussa les épaules.
- Peut-être que oui. Peut-être que non. Dans les deux cas, vous ne courrez aucun risque. Si Karus me tue, il continuera son plan et vous aurez la vie sauve dans son monde Mélénis. Si c'est moi qui le tue, je m'occuperai ensuite des Dignitaires et de leur canon, et vous pourrez un jour espérer devenir Boss de la Team Rocket. C'est tout bénef pour vous.
Vilius fut amusé.
- Que j'aime votre pragmatisme. Allez-y donc alors. Je vais rester ici et regarder ça de près. Montrez-moi que je ne me suis pas trompé sur vous en vous recommandant auprès du vieux.
- Avec plaisir monsieur.
Siena tira son fouet et s'accrocha à une rambarde d'ascenseur. Elle tira sur les commandes, et tandis que l'ascenseur montait, elle fut propulsée à travers la vitre, dans la salle centrale, et retomba devant les yeux enfin ébahis de son grand-père.