Chapitre 182 : Le Premier Apôtre
Quand Oswald Brenwark frappa contre le sol, des faisceaux de lumière éblouissants jaillirent de la terre aux alentours, frappant et aveuglant les Pokemon sous le contrôle de Fantastux. Solaris avait l'esprit trop perturbé pour se demander d'où pouvait bien lui provenir cette capacité surhumaine, mais en tous cas, elle fit son petit effet. Ce fut une véritable débandade du coté des Pokemon. Tous ceux qui furent touchés par ces éclats de lumière sortis du sol en restèrent décontenancés, presque perdus, comme s'ils se demandaient soudainement ce qu'ils faisaient là. Le leader des Gardiens de l'Innocence était en train de briser l'emprise que Fantastux avait sur son armée, d'une façon ou d'une autre. C'était un spectacle fabuleux et terrifiant. Quand apparemment tous les Pokemon furent libérés du contrôle de Fantastux, tous se tournèrent vers lui, leurs yeux brillants de colère. L'Agent de la Corruption n'en menait pas large.
- Kish... Ben quoi ? Fantastux ne vous voulait pas de mal. Fantastux voulait juste faire de vous tout ses amis...
- Crétin, marmonna Jivalumi.
Elle fonça sur Brenwark, ses griffes au devant. Le chef des Apôtre ne bougea pas. Au dernier moment, Vaslot Worm s'interposa entre eux deux, protégeant son chef avec sa fine canne certif d'un diamant au bout. Alors, avec un bruit sourd, Jivalumi fut repoussée plusieurs mètres plus loin.
- Soyez maudits, Gardiens de l'Innocence ! Cracha-t-elle.
- Il y a eu assez de morts pour aujourd'hui, clama Brenwark. Notre combat dure depuis des siècles. Inutile d'en faire trop en un seul jour. Mais si vous insistez, nous répondrons présents.
Le poing de Brenwark brilla de cette même lueur lumineuse qu'il avait fait jaillir de la terre. Les deux Agents de la Corruption hésitèrent. Ils semblaient réellement craindre le chef des Gardiens de l'Innocence. Finalement, ce fut Fantastux qui fila en premier.
- Vous obtenez un répit. Mais ne vous faite pas d'illusions. La corruption est immuable et éternelle. Nous reviendrons, et ce Pilier de l'Innocence chutera, comme votre ordre d'adorateurs d'Erubin ! Kish kish kish !
Fantastux disparut dans les airs, tandis que Jivalumi, avec un dernier regard assassin à Brenwark, s'enfonça dans le sol. Solaris se demanda pourquoi Brenwark les laissait filer, s'il était si fort que ça. Mais au final, elle s'en fichait un peu. Plus rien n'avait d'importance pour elle, tandis qu'elle tenait dans ses bras le corps sans vie de Tomas. Cette vision lui rappela la mort de son frère Lunarion, qu'elle avait porté de la même façon. Était-elle condamnée à assister à la mort du peu de gens auxquels elle tenait ? Était-ce une punition pour ses actions passées ?
- C'est la guerre, lui dit Dracoraure. Les gens meurent à la guerre. Tu en verras sans doute encore plein d'autre. Ne prend pas tout pour toi.
La franchise brutale de son amie la ramena les pieds sur terre. Oui, les gens mourraient. Elle-même, combien en avait-elle tué ? Combien de personnes avaient éprouvé ce qu'elle ressentait aujourd'hui, à cause d'elle ? Elle ne pourrait jamais effacer tout ses crimes. Mais elle pouvait continuer à se battre pour protéger les autres. C'est ce en quoi croyait Tomas. Et Lunarion aussi. Que lui avait-il dit, avant de périr ?
Vis pour nous deux.
Solaris était toujours là quand Wasdens vint à sa rencontre. Tout autour d'eux, les gens et les Pokemon se démenaient pour soigner les blessés, recouvrir les morts, éteindre les incendies. Solaris se dit qu'elle aurait dû les aider, mais en l'état actuel des choses, elle doutait de pouvoir se lever.
- Je suis désolé pour votre ami, commença Wasdens. C'était un garçon courageux. Un Gardien valeureux et sincère.
Solaris soupira de lassitude, se passant les mains sur son visage, pour essuyer sang et larmes.
- Dites, monsieur Wasdens... Pourquoi les Agents de la Corruption font tout ça ?
- Tout ça ?
Solaris engloba de ses bras la ville à moitié détruite.
- Je vous l'ai dit, leur but est d'apporter destruction et malheur.
- Mais pourquoi ?
- Pour que la corruption se propage, et que leur maître Horrorscor devienne de plus en plus fort, répondit l'Apôtre, perplexe devant ces questions.
- Mais qu'ont-ils à y gagner ? Pourquoi servent-ils Horrorscor ? Si encore il s'agissait de conquérir le monde pour eux, je comprendrai. J'étais pareil il n'y a pas si longtemps. Mais détruire pour le compte de quelqu'un d'autre, qui plus est un Pokemon à moitié mort...
Wasdens s'assis prêt d'elle. Solaris remarqua que lui aussi avait de multiples blessures.
- Je ne prétends pas cerner la personnalité de nos ennemis. Je ne les connais d'ailleurs pas assez pour ça. Ils doivent avoir leurs propres raisons. Liées à la folie, au désespoir, à la vengeance, à la cupidité, ou que sais-je encore... Toutes ces émotions qui sont la force d'Horrorscor et ce contre quoi nous luttons. Horrorscor est un maître manipulateur. Il arrive à faire naître ce genre d'émotions chez les gens, et sait parfaitement comment les contrôler. Bien qu'il n'ait plus de corps propre, son influence n'a cessé de grandir ce dernier siècle. Même sans qu'il ne nous possède, comme Zelan Lanfeal ou le Marquis des Ombres, il peut interagir à un certain niveau avec tous les êtres vivants. La théorie de monsieur Brenwark est que tous les malheurs du monde sont l'œuvre du Pokemon de la Corruption. Il est le mal incarné, et tout le mal découle de lui.
Solaris se demanda si sa propre folie à elle, suivi par son désir de génocide mondial, avait été l'œuvre d'Horrorscor. Piètre excuse, si ça avait été le cas.
- Vous savez ce que je pense ? Demanda Solaris. Je pense qu'Horrorscor est un fait un Pokemon très malheureux. Il a été crée pour corrompre. C'est sa fonction, sa nature. Il ne peut y échapper, et vit constamment dans l'ombre et le rejet. Au final, il en est arrivé à haïr les autres, qui vivent dans la lumière et l'amour. Je me rappelle, Mercutio avait raconté à la Tri-Alliance le contenu de la légende concernant Horrorscor et Erubin. Horrorscor était amoureux de son ennemie jurée.
- C'est ce qu'on raconte oui, confirma Wasdens. Erubin était un Pokemon si pur, que même le plus ignoble des êtres ne pouvait que l'aimer. Et parce qu'Erubin était Erubin, elle ne pouvait refuser son amour à quiconque, même à Horrorscor.
Solaris hocha la tête.
- Je crois qu'à ce moment, il avait trouvé un semblant de paix. Mais sa vraie nature revint au galop. Il voulait l'amour d'Erubin pour lui tout seul, alors qu'elle le donnait à tous les Pokemon. Horrorscor fut jaloux, et son amour pour elle se transforma peu en peu en haine.
Solaris baissa la tête, et caressa le visage pâle et paisible de Tomas.
- Je crois que je lui ressemble un peu. J'ai été conçue selon les souhaits de personnes mauvaises, pour apporter la souffrance et la destruction. Je sais ce qu'on ressent quand on a l'impression qu'on nous a volé notre vie. Et, comme Horrorscor, j'ai connu l'amour, avant qu'il ne me soit arraché, puis j'ai sombré peu à peu dans le désespoir et la folie, tandis que le Seigneur Vriffus m'amenait dans les ténèbres sans que je m'en rende compte. Je crois que personne ne nait mauvais, pas même Horrorscor. Il y a toujours quelqu'un au dessus de nous pour faire de nous des monstres.
Wasdens acquiesça, pensif.
- Oui, c'est sans doute vrai. Horrorscor a été crée par Asmoth, le dieu maléfique des Mélénis.
- Et qui a crée Asmoth ? Qui a décidé qu'il devrait représenter le mal ?
- Je l'ignore, confessa Wasdens. Arceus, sans doute. C'est lui qui a crée les premiers Mélénis. Le Créateur est le symbole de l'équilibre entre les ténèbres et la lumière. Il se devait sans doute de créer un avatar pour chacune d'entre-elle. Mais je crains que dans l'affaire qui nous occupe, nous en prendre à Arceus ne servirait pas à grand-chose. Sans lui, rien n'existerait. Ni lumière ni ténèbres, ni innocence ni corruption. Seulement le néant.
Solaris se mit à songer que le néant aurait peut-être été la solution pour se débarrasser de toute cette souffrance. Plus de conflit, plus de mort...
- Et plus de vie, ajouta Dracoraure. Ressaisi-toi ! Tu vas abandonner à la moindre petite contrariété ?! C'est ton frère qui t'a fait don de cette nouvelle vie. Ne la gâche pas.
Un coup bas de la part du Pokemon, mais qui faisait mouche à chaque fois. Solaris se leva. Pour quoi ? Elle ne le savait pas trop. Mais rester prostré à genoux plus longtemps aurait été une insulte à Lunarion.
***
On enterra Tomas au quartier général des Gardiens de l'Innocence, à savoir la villa de monsieur Brenwark. Ça avait été un souhait de ses parents, qui, bien qu'éplorés, avaient tenu à ce que leur fils repose en ce lieu qu'il avait tant voulu intégrer. Solaris les rencontra un moment. Sans doute la prirent-ils pour sa petite amie, mais Solaris ne contredit pas. Elle ne savait pas trop comment compatir à leur douleur, mais leur promit néanmoins de faire tout ce qui était en son pouvoir pour venger sa mort en éliminant l'Agent de la Corruption Jivalumi. Ensuite, Solaris fut conviée pour la première fois à un conseil des six Apôtres, pour résumé avec monsieur Wasdens tout ce qui s'était passé. Et monsieur Wasdens posa inévitablement des questions sur ces fameux Piliers de l'Innocence. Et Brenwark parut quelque peu embarrassé.
- Vous savez que ce n'est pas mon genre de râler sur de tels sujets, s'excusa par avance Wasdens, mais il me semble qu'en tant qu'Apôtres, nous sommes tous égaux, à part vous qui nous dirigez, monsieur Brenwark. Hors, j'aimerai savoir pourquoi certain Apôtres étaient au courant et d'autre non ?
La comtesse Divalina et Izizi, qui eux aussi étaient tenus dans l'ignorance, hochèrent la tête pour exprimer leur soutien à leur collègue.
- Ce secret en était un pour justement protéger les Piliers, fit Brenwark. Mais vu que les Agents sont au courant à présent, il ne sert plus à rien. Depuis qu'ils existent, seul le premier des Apôtres est censé être au courant, ce secret étant révélé à chaque nouvel Premier Apôtre par Dame Cosmunia Mais lors de la dernière guerre contre les Agents, qui fut très violente, mon prédécesseur en fit part au conseil au complet, et donc à Vaslot qui en faisait déjà parti à l'époque. Le secret fut rompu uniquement pour que nous puissions les protéger efficacement.
- Pourquoi donc, si les Agents l'ignorait à l'époque ?
- Car le Marquis des Ombres, fut, vous le savez tous, l'un des nôtre, jadis.
Ça, c'était une surprise pour Solaris, que personne n'avait songé à faire partir. Elle se fit discrète pour en entendre davantage.
- Funerol était un Apôtre, pas le chef, et donc ne devrait pas être au courant pour les Piliers, mais notre chef de l'époque jugea plus prudent de prendre les devants, au cas où Funerol l'aurait appris quand même.
- Alors... Si les Agents sont maintenant au courant, résuma Izizi, ça pourrait signifier que le Marquis des Ombres qui les dirige... est bien Funerol, et qu'il est bien vivant ?
Brenwark se renfrogna.
- Ce n'est pas à exclure, mais je reste persuadé que Funerol est bien mort. Notre chef s'en était chargé avant de disparaître à son tour.
- Quoi qu'il en soit, il apparait peu probable que les Agents aient tenté un coup de ce genre s'ils n'avaient pas de Marquis pour les diriger, avança Vaslot Worm. Que ce soit Funerol ou non, notre ennemi existe bel et bien.
- Mais s'il ne s'agit pas de Funerol, avança Cosmunia, il se peut que ce Marquis des Ombres ne dispose pas en lui du morceau d'âme d'Horrorscor propre aux anciens Marquis. Si Funerol est bien mort avant d'avoir pu le transmettre à son héritier, le morceau d'âme a été détruit avec lui.
- Nous ne pouvons être sûr de rien, dit Brenwark. En tous cas, il nous faut désormais protéger les Piliers de l'Innocence, qui je n'en doute pas seront les cibles prioritaires des Agents de la Corruption. Si tous venaient à tomber, les plus dangereux partisans d'Horrorscor seraient de retour. De plus, il faut nous inquiéter d'un probable espion dans nos rangs, qui aurait parlé aux Agents des Piliers de l'Innocence.
Wasdens cligna des yeux.
- Mais vous avez dit que l'existence des Piliers n'était connues que par trois d'entre nous. Vaslot, Cosmunia... et vous.
- Les Agents de la Corruption n'ont pas leur pareil pour se jouer de nous, rétorqua Brenwark. Même en laissant de coté les Piliers, nous soupçonnons l'existence de ce traître depuis un moment déjà.
- En fait, précisa Vaslot Worn, depuis environ un an. Date à laquelle notre bonne amie Solaris nous a rejoint, est-il besoin de le préciser ?
Il souriait aimablement en l'observant, laissant le sous-entendu faire son chemin. Solaris le toisa sans ciller.
- J'ai fait vœu devant Cosmunia et son Talent Spécial Vérité, monsieur Worm, comme tout le monde ici. Si vous suggérez que sa capacité soit inefficace, c'est alors tous les Gardiens qu'il vous faudra soupçonner.
- Oh, je ne doute pas du Talent de Dame Cosmunia, répondit Worm. Il fonctionne à merveille... sur les êtres humains normaux. Mais vous, vous êtes à demi-Pokemon, si j'ai bien compris. Ou vous abritez un Pokemon dans votre tête. Qui peut dire alors si le Talent Vérité de Cosmunia fonctionne aussi bien sur vous ?
Solaris ne sut que répondre. Et alors que Wasdens s'apprêtait à répliquer, furieux, Brenwark leva la main pour calmer le jeu.
- Ces suppositions sans fondement ne nous mèneront nulle part, Vaslot. Solaris a risqué sa vie pour protéger Mauville, et a affronté Jivalumi dans un furieux combat. Si vous n'avez aucune preuve à montrer, il est inutile de l'insulter plus longtemps.
- Loin de moi une telle pensée. Mille excuses si je vous ai offensé, Dame Solaris.
Solaris hocha la tête, tout en espérant secrètement que l'espion, ce soit lui. Il avait vraiment une tronche de faux-cul, ce type. Solaris l'imaginait sans problème comme agent double.
- Il faut que je réfléchisse à nos prochaines actions, conclut Brenwark, et à la façon d'enquêter pour repérer cet espion. Vous pouvez disposer.
Tandis que les autres Apôtres se levaient, Solaris quitta la pièce avec Wasdens. Dès qu'il fut sorti, il lâcha sa bile contre Worm.
- Ce salopard... Il ne perd jamais une occasion ! J'ai du mal à croire qu'un secret aussi précieux que l'emplacement des Piliers lui soit connu !
- C'est bon, monsieur Wasdens. J'ai l'habitude.
En réalité, elle ne comprenait pas pourquoi Worm semblait la mépriser à ce point. Peut-être parce qu'elle était la protégée de son rival de toujours. Wasdens s'arrêta de marcher et soupira.
- Cette histoire d'espion... C'est très grave. Notre ordre repose sur le secret et la discrétion. Sans ça, nous ne sommes rien. Si les Agents connaissent l'identité de tous les Gardiens, rien ne les empêcherait de s'en prendre à eux.
- J'ignorais que le Marquis des Ombres avait été un Apôtre, fit Solaris. Comment est-ce possible ?
- Funerol s'est fait posséder par Horrorscor par accident, expliqua Wasdens. Ou plutôt, à dessein. Le Marquis avant lui était mourant, et il a fait enlever Funerol pour que l'âme d'Horrorscor puisse pénétrer en lui. Et au final, il l'a corrompu, comme il le fait toujours... Horrorscor avait bien choisi sa cible. De ce que j'ai entendu dire, Funerol était un homme bon, mais faible mentalement. Il craignait la mort. Horrorscor n'a pas eu du mal à retourner cette peur contre lui.
- Vous pensez que l'actuel Marquis des Ombres est Funerol ? Qu'il est vivant ?
- Je n'en sais rien. Monsieur Brenwark affirme qu'il est mort, et vu que je n'étais pas là à l'époque, qui serai-je pour douter de sa parole ?
Il y avait autre chose que Solaris voulait savoir.
- Ce que monsieur Brenwark a fait, lors de la bataille, c'était quoi ?
- La Bénédiction de Lumière. C'est un pouvoir propre à chaque Premier Apôtre. Quand un Apôtre devient le chef du conseil, il récite une prière devant la statue d'Erubin dans la grande cour, et ce pouvoir lui est remis. J'ignore comment ça fonctionne vraiment. C'est un système qui a été conçu par Erubin en personne au tout début de notre ordre. En tous cas, cette lumière a pour fonction de combattre la corruption. C'est l'arme la plus efficace contre les Agents, et la raison pour laquelle ils craignent monsieur Brenwark plus que tout. Il parait que la Bénédiction de Lumière de son prédécesseur était d'une puissance démesurée.
- Celui qui a vaincu le Marquis des Ombres ?
- Oui. De l'avis de tous, il fut le plus grand chef que les Gardiens de l'Innocence n'ont jamais eu.
Comme ils se trouvaient dans l'antichambre où étaient posés les tableaux de tous les anciens premiers Apôtres, Wasdens lui en désignant un, bien exposé. Il représentait un homme aux cheveux violets, à l'allure puissante et au regard acéré.
- Dan Sybel. Ce n'est que grâce à lui que les Gardiens purent gagner la guerre il y a dix ans. Il était Pokemon Ranger de profession, ce qui lui conférait un avantage question entraînement physique et empathie avec les Pokemon. C'était un homme d'action, mais aussi un grand érudit. Il éplucha quantité d'ouvrages et de vieux parchemin pour tenter de retrouver la trace de la légendaire Pierre des Larmes, qui nous permettrait de nous débarrasser d'Horrorscor une bonne fois pour toute. Il affronta le Marquis des Ombres en personne, qu'il vainquit malgré les pouvoirs qu'il détenait grâce à Horrorscor. Un grand homme, sans nul doute. J'aurai aimé le connaître. Monsieur Brenwark et lui étaient de grands amis. Et eux deux étaient amis avec Funerol avant qu'il ne devienne Marquis. Ce fut une histoire tragique pour lui...
Solaris regarda intensément le portrait. Dan Sybel... Oui, de toute évidence, cet homme possédait une prestance et un charisme indéniable. Ça se ressentait même sur un simple portrait. Et ses yeux... Des yeux reflétant une force et une noblesse indéniables. Un regard et un aspect général du visage qui, pour une raison inconnue, semblaient familiers à Solaris. Où les avait-elle donc vus ?
***
Eryl Sybel se réveilla en sursaut, s'empêtrant dans ses couvertures, ruisselante de sueur, se demandant où elle était. Quand elle eut retrouvé sa respiration, elle se rendit compte qu'elle se trouvait simplement dans sa chambre, dans le laboratoire du professeur Chen, qui l'hébergeait presque trois ans. Elle se rallongea. Encore ce fichu cauchemar ! Elle faisait le même depuis des années, sans qu'elle n'ait pu trouver à quoi il se rapportait. Elle se voyait, petite fille, avec son père à ses cotés. Son père disparu, de qui elle ne gardait que de très fugaces souvenirs... Elle se trouvait dans une salle obscure, éclairé par deux torches sinistres. Il y avait aussi un garçon aux cheveux noirs, le visage plein de sang, qui riait aux éclats. Et puis, caché partiellement dans les ombres, cette silhouette noire, portant un masque blanc...
Eryl n'aurait pu dire si c'était une invention quelconque de son cerveau, où un souvenir d'enfance, bien qu'elle était certaine de ne pas connaître ce type masqué ni ce garçon. Elle enfonça la tête dans son oreiller. Elle aurait préféré rêver de Mercutio, des moments qu'ils auraient pu passer ensemble s'il n'y avait pas eu cette fichue guerre. Elle parvint à se rendormir très vite. Quelque chose en elle l'apaisait, lui disant que tout irait bien. Eryl avait l'impression que cette chose avait toujours été en elle, la réconfortant quand elle était triste ou inquiète. Sans doute une résurgence du souvenir de sa mère. En tous cas, ça la réchauffait et ça la rassurait. Elle s'endormit, sans voir une partie de son corps, proche de son cœur, briller faiblement comme pour chasser les mauvais rêves... ou les mauvais souvenirs.