Chapitre 177 : La fille de toute les envies
Quand Esclel et Zuth revinrent auprès de Nuvos, ce dernier sentit une affreuse odeur d'un Flux empestant l'échec autour d'eux. Bon, ce n'était pas comme s'il avait espéré quoi que ce soit d'eux, c'est vrai. Il les avait envoyés auprès de Karus juste pour jouer les espions.
- Où est Joshu ? Demanda Nuvos tout en se doutant de la réponse.
- En cendres, répondit sombrement Zuth.
- Il a un peu perdu son sang-froid face à Karus, avoua Esclel.
- Bon. Tant pis.
Nuvos n'allait certainement pas pleurer cet imbécile, mais un Mélénis, même médiocre comme lui, restait quand même utile.
- Nous n'avons rien pu faire, reprit Esclel d'une voix suppliante. Si nous étions intervenus, nous...
- C'est bon, j'ai dit. Je dois sans doute m'estimer heureux que Karus vous ai laissé partir. Mais sans Joshu, qui était le plus puissant d'entre vous dans le Flux, j'ai encore moins de chance d'acquérir la puissance nécessaire pour activer Phénoména.
Nuvos se prit le menton, réfléchissant intensément.
- Si je ne peux pas me servir de Karus... un de ses petits-enfants me servirait tout autant, voir plus. Selon les Agents de la Corruption, leur Flux est énormément puissant...
Esclel semblait avoir des réserves.
- Mais... chéri...
- Cesse de m'appeler ainsi, femme ! Gronda l'Infini. Je suis ton maître, pas ton chéri. Tu crois que partager mon lit fais de toi mon égale ?!
La Mélénis recula sous la colère de Nuvos, et Zuth se permit un sourire moqueur.
- P...pardon, maître Nuvos, reprit Esclel. Mais ces enfants... Ils ne voudront jamais vous aider. Ils recherchent aussi la Loinvoyant pour leur Team, et avec ce que les deux Mélénis du Refuge auront pu leur dire...
- Je n'ai pas besoin de leur consentement, coupa Nuvos. Smiley a dû les enfermer dans ses prisons d'ombre. S'il n'a pas encore tué les deux, j'en prendrai un, et le forcerai à m'obéir.
- Smiley n'est toujours pas rentré avec la fille ? S'étonna Zuth.
- Non, et ça ne me plait pas, avoua Nuvos. Vous deux, retournez là-bas, voyez ce qui lui prend autant de temps, et aidez-le.
Esclel s'inclina, pressée de servir son maître. Zuth resta un peu plus longtemps pour dire :
- Maître, Karus prépare quelque chose. J'ignore quoi, mais ça semble être quelque chose de gros, selon ses dires. Il ne s'est aucunement inquiété que vous puissiez réussir le Phénoména. Et il a dit... qu'il voulait dominer un monde de Mélénis.
Nuvos haussa les sourcils.
- Intéressant. Je connais bien son mépris des humains. Peut-être envisage-t-il de tous les détruire ? Ça serait embêtant pour moi. Je ne compte pas être le maître d'un monde seulement peuplé de Pokemon et de quelques Mélénis.
- Détruire tous les humains ? Répéta Zuth, perplexe. Cela semble... un peu extrême. Karus n'a-t-il pas fait parti de la Team Rocket durant une grande partie de sa vie ? Il était entouré d'humains, il avait probablement des amis parmi eux... Quelle serait sa motivation à tous les exterminer ?
- Je n'en sais rien, et je m'en moque. La véritable question est : qui de nous deux réalisera son projet en premier ? Si je fais fonctionner le Phénoména, même Karus devra se plier à moi. Il me faut cette fille Loinvoyant, Zuth, et un Mélénis puissant pour m'aider à contrôler le sort. Au plus vite. J'ai confiance en toi, mon ami. Joshu était un idiot, et Esclel ne vaut pas mieux, mais toi, tu es intelligent. Sers-moi bien, et tu gouverneras ce monde à mes côtés.
Zuth s'inclina et pris congé. Nuvos se retourna vers l'immense mosaïque d'écriture de Graphiria qui recouvrait tout le sol, en des dessins complexe. Au centre, un cercle d'où toute l'écriture partait. C'était dans ce cercle que devrait être écrit le mot ultime, le véritable nom d'Arceus. Et puis lui, Nuvos, irait au centre de ce cercle, et le Phénoména s'activera. Il aura alors besoin d'une grande quantité de Flux pour maîtriser la puissance de se sort. Mais une fois cela fait, tout ce qui est en ce monde, et tout ce qui est imaginable... tout serait à lui, et à lui seul.
***
En arrivant dans la rue où se trouvait sa maison, à Erkyné, Trefens n'avait plus aucun doute sur l'identité de ceux qui étaient venus. Cette dévastation, ces impacts dans les murs et sur la route, comme si le ciment avait fondu : c'était l'œuvre du Flux, sans nul doute. Trefens avait combattu assez longtemps les deux Mélénis rockets dans cette guerre pour le savoir. Ainsi, la Team Rocket était derrière tout ça. Elle avait trouvé la famille de Trefens, et avait enlevé sa fille, sans doute pour le faire chanter. Pour parachever la mise en scène avec une petite touche d'ironie, Giovanni avait confié la mission à la seule unité du monde qui était listée comme cible prioritaire dans les données de la Shaters, et qui courrait toujours.
Le coté professionnel de Trefens n'arrivait pas à en vouloir à la Team Rocket. Après tout, c'était la guerre, et chacun attaquait l'autre comme il le pouvait. De plus, bien que Trefens se soit fait une obligation de ne jamais accepter de contrat sur des enfants, ses autres collègues n'étaient pas si regardants, donc la Shaters n'était pas vraiment bien placée pour prendre offense de l'action de la Team Rocket. Mais son coté de père, lui, ne pardonnerai jamais. Si la X-Squad, et en particulier les Crust, avaient fait le moindre mal à Kyria, il les démembrerait tous, lentement, très lentement, et renverrai leurs morceaux à Giovanni, avec un mot signifiant que ce serait bientôt son tour.
La police était déjà sur les lieux. Sans doute pour les dégâts dans le quartier et non pour l'enlèvement. Gélonée, même en pareille situation, n'aurait pas attiré l'attention sur Kyria. De plus, qu'est-ce que la police pourrait faire ? Trefens passa la barrière de sécurité et se dirigea vers sa maison. Un officier de police prétendit lui barrer le chemin.
- Désolé monsieur, mais le quartier est bouclé pour enquête.
Il jeta un coup d'œil curieux et méfiant au katana que tenait Trefens.
- C'est quoi ce...
- Une épée. Ça coupe. Vous voulez voir ?
En un geste aussi rapide que précis, Trefens tendit le bout de la lame juste entre les yeux du flic. Puis, de son autre main, il lui montra sa plaque de la Shaters. Apparement, l'homme en avait entendu parler, car il blêmit, s'écarta précipitamment et lui présenta ses plus humbles excuses. Quand Trefens entra, Gélonée, sa femme, se précipita en larmes contre lui.
- Je suis désolé chéri... Je n'ai... Je n'ai pas pu la protéger...
En dépit de la situation, Trefens ne pouvait que profiter de l'étreinte de sa femme. Il la voyait décidément trop rarement. Mais c'était justement pour ne pas les mettre en danger, elle et Kyria. Apparement, ça n'avait rien donné.
- Non, c'est moi qui suis fautif... murmura Trefens. J'aurai dû vous mettre en sécurité dès que la guerre a commencé. J'aurai dû...
Oui, il aurait dû. Il avait été stupide. La Team Rocket avait autant de moyen d'espionnage et d'information que le gouvernement, voir plus. Malgré toutes ses précautions, il n'était guère surprenant que Giovanni eut déniché sa famille.
- Je crois que... que c'est la Team Rocket qui est derrière tout ça, ajouta Gélonée en se séparant de lui.
- Naturellement, maugréa Trefens. Les Shadow Hunters sont à l'heure actuelle les ennemis numéros un de la Team. Giovanni ne va pas laisser passer une occasion de me faire du mal à travers Kyria. Mais ne t'en fais pas. Il ne va pas la tuer. Ça ne lui apporterait rien. Il va la garder en otage pour faire pression sur moi.
- Non, il ne va pas la tuer, acquiesça Gélonée. Mais je crois qu'il se fiche de la Shaters. Il doit même ignorer que tu es son père...
- Que veux-tu dire ?
Gélonée retomba en sanglot.
- Je suis désolé Trefens... Je t'ai menti toute ses années. Tu seras furieux contre moi... Mais je t'en supplie, ne le sois pas contre Kyria, ce n'est pas sa faute...
- Mais enfin, de quoi tu parles ?
Sa femme le regarda droit dans les yeux.
- Kyria n'est pas de toi. J'étais déjà enceinte avant de te rencontrer.
Du fait de sa constitution, de sa force, de sa vitesse, Trefens avait rarement eu l'occasion de prendre des coups dans sa vie. Mais celui-là, il ne put l'esquiver. Et ce fut un rude coup. Il se souvint, il y a un peu plus de douze ans... Il venait de commencer dans la Shaters. Il était très jeune alors, à peine vingt ans. Il avait rencontré Gélonée, une jolie jeune femme de son âge, qui fuyait la Team Rocket. Elle l'avait supplié de l'aider, et Trefens l'avait fait. Après tout, tuer des Rockets était une grande part de son job. Puis, pour le remercier, Gélonée l'avait en quelque sorte... séduite. Jeune et naïf, Trefens était tout simplement tombé amoureux, et Kyria était venue très vite. Trop vite. De plus, elle était née prématurée... ou du moins c'était ce que Gélonée avait dit.
- Qui est le père ? Demanda Trefens, en craignant deviner la réponse.
- Giovanni, répondit faiblement Gélonée. Il m'a violé... J'ai fui, et il me recherchait quand tu m'as trouvé. Je me suis servi de toi, Trefens... Je t'ai dit que je t'aimais, mais c'était faux. C'était pour que tu me protèges de lui, et pour cacher la vérité à Kyria.
Un instinct aussi violent que fou voulu faire prendre son katana à Trefens et découper Gélonée en deux pour son mensonge. Un autre instinct encore plus terrible voulait qu'il parte lui-même à la recherche de Kyria pour lui faire subir le même sort. La fille qu'il avait aimé, dont il s'était occupé aussi bien qu'il avait pu... était l'engeance de son pire ennemi. Mais comme l'avait dit Gélonée, Kyria n'y était pour rien. Elle n'avait pas choisi son géniteur, et comme lui, avait vécu dans l'ignorance. Et puis... Trefens restait son père. Giovanni l'avait peut-être engendrée, mais c'était Trefens qui l'avait tenue après sa sortie du ventre de sa mère, Trefens qui avait suivi ses premiers pas, Trefens qui la faisait parfois s'endormir le soir en lui racontant des histoires. Tout cela, ce n'était pas une illusion ou un mensonge, c'était réel. Tout à coup, sa colère s'évapora, et l'image de Kyria lui souriant dans sa tête le rendit fébrile. Il devait la sauver.
Gélonée n'en avait pas fini avec les révélations. Elle lui dit qu'elle était la descendante d'une grande famille de Loinvoyant, des humains qui naissaient parfois avec une espèce de sixième sens qui permettait d'entrevoir l'avenir ou de lire les pensées. Gélonée n'avait pas hérité de ces dons, mais c'était dans l'espoir d'avoir un enfant avec ces pouvoirs que Giovanni s'était approché d'elle. Et Kyria avait bel et bien hérité des dons des Loinvoyant, malgré toutes les prières de Gélonée. Si Kyria avait disparu, c'était parce que Giovanni voulait reprendre sa fille, et se servir de ses dons, elle en était certaine. Trefens écouta jusqu'à la fin, puis hocha la tête.
- J'ai compris. C'est moins pire que ça pourrait l'être. Giovanni doit en effet ignorer que je suis le père de... que je suis ton mari. Il ne s'attend donc pas à affronter un Shadow Hunter. De plus, si des Rockets étaient venus, ce n'était sûrement pas par la voie des airs, cette zone étant sous contrôle du gouvernement. Donc ils sont sûrement repartis à pied, et je peux les rattraper.
Trefens tira son katana et s'apprêta à sortir, quand Gélonée lui demanda :
- Tu me détestes, n'est-ce pas ?
Trefens s'arrêta au seuil de la porte.
- Je devrais peut-être. Mais je n'y arrive pas. Tant pis si c'était une comédie pour toi. Moi, je t'aimais vraiment. Je t'aime encore. Je vais te ramener ta fille. Notre fille.
Il bondit dehors avec sa vitesse surnaturelle. Gélonée s'effondra dans son salon, songeant qu'elle avait mis le temps à s'en rendre compte, mais qu'elle aussi, elle aimait son mari.
***
La X-Squad, accompagnée de Miry et Seamurd, courrait depuis maintenant près de deux heures, essayant de rattraper Mercutio, Emmy et la jeune Kyria. Pour les utilisateurs du Flux, c'était facile à tenir, mais pour les autres, c'était plus dur. Et depuis qu'il avait utilisé son Septième Niveau, Seamurd faisait parti des « autres ».
- Comment les humains peuvent faire pour vivre sans Flux ? Geignit-il tandis qu'il luttait contre un point de coté. Ça me dépasse...
- Tu ne peux que t'en prendre à toi, riposta Miry. Si tu n'avais pas utilisé ton Septième Niveau aussi bêtement... Tu peux carrément rentrer au Refuge. Tu ne nous serviras à rien sans le Flux !
- C'est bon, ce n'est pas la première fois que je l'utilise, protesta le garçon. Je n'aurai pas à attendre longtemps avant de retrouver le Flux. Dans quelques heures, je pourrai déjà activer le Premier Niveau.
Galatea sentait dans le Flux qu'ils se rapprochaient de son frère. Mais elle sentait aussi l'étrange présence de ce Mister Smiley non loin.
- Ce type... Le gars au masque de smiley, c'est un Mélénis aussi ? Demanda-t-elle à Miry.
- Je ne le connais pas, avoua-t-elle. Nous savons que Nuvos a trois Mélénis renégats avec lui : Joshu, Esclel et Zuth. Ils ne sont pas bien puissants, mais maîtrisent assez la Graphiria pour être dangereux. Mais ce Smiley... j'ignore qui il est. Et ce qu'il est...
- Un fieffé gredin, assurément, déclara Djosan.
- Il fait du fantômage, pour sûr ! Ajouta Goldenger.
Tuno semblait se souvenir de quelque chose.
- Dans sa prison d'ombre, il nous a dit qu'il était un Agent de la Corruption, il me semble. Ça vous dit quelque chose ?
Les deux Mélénis du Refuge secouèrent la tête, mais Galatea fronça les sourcils.
- Ce n'était pas ce qu'était Zelan ? Il me semble que les Pokemon du Zodiaque ont dit que les serviteurs d'Horrorscor s'appelaient comme ça.
- Horrorscor ? Répéta Miry, stupéfaite. Le Pokemon de la Corruption ? L'un des trois de la Trinité des Ténèbres qu'a créé le dieu Mélénis Asmoth ? Il n'est pas censé être mort ?
- Plus ou moins. Mais il est un peu trop embêtant pour un mort. Maître Irvffus ne vous a pas parlé de Zelan ou de la Tour de Babel ?
- Le Seigneur Irvffus ne parle pas beaucoup de ce qui se passe dans le monde des humains, dit Seamurd, un peu maussade.
- Enfin, l'identité ou l'allégeance de ce Mister Smiley importe peu pour le moment, dit Miry. Une chose est certaine : il travaille actuellement pour Esva Nuvos. S'il arrive à lui livrer la Loinvoyant...
- Catastrophe interplanétaire, on sait, conclut Galatea.
Et ils accélérèrent le pas.
***
Mercutio n'aurait pas songé, au premier abord, qu'en intégrant la X-Squad du colonel Tuno, il aurait à affronter des canard en caoutchouc, souris à remonter et cochon en peluche géants, commandés par un gars invisible qui portait un masque smiley et qui semblait quelque peu... abruti. Mais la vie était une éternelle source de surprises et de nouvelles expériences, après tout. Le bien nommé Monsieur Goret n'avait de cesse d'essayer de les aplatir sous ses énormes bras ou pieds. Mimi la Souris faisait office de char d'assaut et fonçait continuellement sur eux avec son museau quelque peu exagéré, sans doute pour les faire passer sous ses roues ou les envoyer sur la Lune. Quant à Sire Duck, il sautait très haut pour ensuite retomber sur eux, ou du moins essayait-il.
Leurs gestes étaient facile à prévoir, et ils étaient assez lents, le problème c'était que Mercutio, tout en se battant, devait protéger les deux filles, qui étaient elles totalement démunies, le pistolet d'Emmy n'ayant aucun effet sur eux. Les balles les traversaient comme s'ils étaient des illusions, ce qui n'était pas le cas des attaques spéciales, telles le Flux ou les attaques de Mortali. Enfin, ça semblait faire effet, mais comme leurs visages de jouets ne changeaient guère, Mercutio avait du mal à dire s'ils souffraient ou non. D'ailleurs, une peluche et des jouets peuvent-ils souffrir ? Intéressante question... Derrière ses sbires ridicules, Mister Smiley se fendait copieusement la poire.
- Uh uh uh ! Comme c'est rigolo ! Attention copain Mélénis, Mimi la Souris arrive à ta droite... TAAAA-DAAAA ! Eh non, j'ai menti, c'était à ta gauche ! Comment qu'j't'ai trop casssssssééééé !
Mercutio commençait en à avoir assez de ce clown. Qu'on cherche à le tuer, il n'avait plus trop de problème avec ça, ça lui arrivait toujours. Mais là, cet idiot masqué cherchait moins à le tuer qu'à se foutre de sa gueule. S'il était difficile de se débarrasser de ses bestioles, elles disparaîtraient sûrement une fois le maître chanteur éliminé. Aussi, en évitant une charge de Mimi la Souris en sautant, Mercutio prépara une attaque de Flux à l'adresse de Mister Smiley. L'attaque de Troisième Niveau, en forme d'étoile lumineuse, que Mercutio dirigeait mentalement, fendit l'air à grande vitesse. D'un mouvement grotesque, Smiley se jeta au sol pour l'éviter, et se remis sur ses pieds en une roulade digne d'un enfant de six ans. C'était du moins ce qui apparut aux yeux de Mercutio en voyant les mouvements de son masque, qu'il laissa tomber au sol au passage.
- Ehhhhh ! Mon visage ! J'ai perdu mon visage !
Mercutio profita du fait que ce débile était en train de chercher son masque qui se trouvait juste sous son pied pour attaquer au corps à corps, son épée sortie. Il ne voyait pas Smiley avec ses yeux, du fait de son invisibilité, mais parvenait à discerner les contours de son corps grâce au Flux. Sa présence, elle, restait bizarre. Elle avait quelque chose de... brumeux. Comme si Smiley était là, mais à la fois, n'était pas là. Juste au moment où Smiley se penchait pour ramasser son masque, soulagé, Mercutio lui trancha le corps en deux. C'était du moins ce qu'il aurait du faire, mais l'épée passa au travers, comme si Smiley n'était que vent.
- Ohhhhh ! Tu voulais me couper en deux ? Pas gentil, pas gentil du tout ! J'aurai eu des problèmes si mes jambes avaient été séparées du reste de mon corps, tu sais ?
Mercutio jura. Smiley devait être comme ses bestioles, insensible aux attaques physiques. Pourtant, s'il avait évité l'attaque du Flux, il n'en était pas de même pour les attaques spéciales, ce qui le distinguait de Crenden, l'Arme Humaine de Zelan qui se trouvait déphasé de la dimension réelle. Un vrai chieur à combattre, ce Crenden. Mercutio ne voulait pas renouveler l'expérience. Derrière eux, Mortali, Eü et Pegasa tenaient à distance les trois « copains » de Smiley. Mortali avait l'avantage de ne pas être affecté par les attaques de ces trois choses, et Pegasa pouvait voler, tandis que le petit Eü lui était monté dessus. Emmy avait eu la présence d'esprit de prendre Kyria et de s'enfuir avec elle. Smiley le remarqua enfin.
- Attend voir, où est passée la fillette Loinvoyant ?! M'sieur Nuvos va me tuer si je la laisse m'échapper, oh que oui...
Mister Smiley claqua des doigts. Aussitôt, une espèce de porte d'ombre se forma non loin, et Emmy et Kyria en sortirent, déboussolées d'être revenues à leur point de départ.
- T'as fait quoi, au juste ? Osa demander Mercutio.
- Mes pouvoirs sont trop forts ! Je peux m'interconnecter avec la dimension des ombres, soit pour enfermer quelqu'un dedans, soit pour me déplacer instantanément d'un endroit à un autre, ou le faire pour quelqu'un d'autre, comme je l'ai fait avec les filles. De plus, je peux transcender la réalité pour la modeler selon mes désirs. Je peux créer n'importe quoi, comme mes amis Sire Duck, Mimi la Souris et Monsieur Goret. Et enfin, dans mon monde des ombres, je peux aussi matérialiser les souvenirs ou les peurs de ceux qui sont mes prisonniers. Oui oui oui, j'suis trop fort ! Le monde des ombres est ma création, mon univers, à moi, Mister Smiley !
Ce dernier écarta les bras, et plusieurs autres portes d'ombres s'ouvrirent autour de lui, laissant apparaître quantité d'horreurs diverses et variées, toutes semblant sortir d'une chambre d'enfant. Des robots en jouets, des peluches à l'air niais, des dinosaures en plastique, des legos... Toutes vingt fois plus grandes que la normale. Mercutio recula et rejoignit les filles et ses Pokemon. L'armée imaginaire de Smiley les entoura. Ce dernier avait sauté sur la tête du T-Rex en plastique.
- Fini de jouer maintenant, cher public ! Allez, donnez-moi la petite, et j'vous laisserai la vie. J'ai rien contre vous, voyez, et je n'aime pas tuer. Promis juré craché, si j'mens j'vais en enfer !
- Il a raison, intervint Kyria. Vous devriez me laisser. C'est inutile de mourir pour moi...
- Ne raconte pas de bêtise, fit Emmy en l'attirant contre elle.
- Je vais rencontrer ce Nuvos, de toute façon, d'une manière ou d'une autre, je le sais, ajouta Kyria. Il doit en être ainsi...
Mercutio jura à nouveau. Il n'allait quand même pas utiliser le Septième Niveau pour combattre une armée de jouets un peu plus grands que la moyenne et cet illusionniste dégénéré ! Le général Tender l'écorcherait vif si Mercutio ne pouvait plus utiliser à nouveau le Flux pendant un mois ! D'un autre coté, il ne voyait pas comment ils pouvaient s'en sortir, et il était hors de question de livrer Kyria. Il sentit alors une présence dans le Flux qui arrivait vers eux, très vite. Mercutio retint un sourire. Galatea serait bientôt là. Il devait résister d'ici là.
Il puisa dans ses réserves de Flux pour créer un puissant bouclier autour d'Emmy, Kyria et des Pokemon, puis invoqua le Flux à puissance maximale dans ses deux mains. Une double attaque de Sixième Niveau, qu'il projeta en cercle autour de lui. Les bestioles allaient morfler, même si Smiley pourrait en ramener d'autres en une minute. Mais non, même ça, ça lui fut refusé. Plusieurs portes d'ombres se matérialisèrent entre l'attaque de Flux et les jouets de Smiley, aspirant le Flux dans le monde des ombres, laissant les bestioles géantes intactes. Et Mercutio sentit immédiatement en lui le contrecoup pour avoir utiliser une telle attaque. Ses réserves de Flux étaient tristement vides... Toujours sur son T-Rex, Mister Smiley soupira.
- Tant pis. Va pour l'exécution, alors...
L'un des soldats en plastique pointa son arme et tira sur Mercutio une bille géante, qu'il n'aurait certainement pas la force de repousser avec le Flux. Mourir écrasé par la balle fictive d'une figurine de militaire... Voilà qui allait faire rire toute une génération de Rockets. Mais avant d'arriver sur Mercutio, la balle géante fut proprement coupée en deux, et les deux moitiés partirent à droite et à gauche du Mélénis. La présence dans le Flux que Mercutio avait senti venait d'arriver. Mais ce n'était pas Galatea. L'individu avait bien une présence dans le Flux, mais très faible. Il portait un costume noir, des lunettes carrés et une longue cicatrice sur le visage. Il tenait d'une main un énorme katana.
- Toi... Trefens des Shadow Hunters ! S'exclama Mercutio.
Trefens ne lui adressa qu'un coup d'œil, avant de regarder derrière lui, vers Kyria. Aussitôt, son regard glacé de tueur professionnel s'adoucit incroyablement.
- Papa, fit la jeune fille. Je savais que tu viendrais.