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Les Héritiers du Nexirys - Tome I : Black Future de Ayumi-san



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Informations

» Auteur : Ayumi-san - Voir le profil
» Créé le 09/06/2013 à 12:22
» Dernière mise à jour le 05/10/2013 à 12:55

» Mots-clés :   Aventure   Fantastique   Présence d'armes   Présence de poké-humains   Région inventée

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Chapitre IV : Piste rouge
____Diana risqua un coup d'œil à l'extérieur et se faufila hors de sa hutte, silencieuse comme le souffle d'une brise. Sur la place centrale illuminée par le soleil tiède de l'après-midi, certains villageois s'étaient allongés dans l'herbe et la plupart commençait visiblement à piquer du nez. Suite à l'Assemblée qui s'était terminée il y avait de cela presque une heure, chacun était retourné à ses occupations, le cœur lourd après l'annonce de Balfor.
_Désormais, on pouvait voir de rares commerçants patienter à l'ombre de leur huttes, le visage grave et inexpressif. Le village semblait désert de toute vivacité et d'animation, ce qui était plutôt inhabituel.
_Passée l'heure du zénith, les Pokémon du clan s'offraient un long moment de repos ; certains partaient en excursion dans la forêt et d'autres, pour la plus grande partie, rejoignaient une petite clairière, en retrait et séparée de la place centrale par quelques arbres et un véritable mur végétal formé de larges buissons. C'était une zone très appréciée, un endroit abondamment ensoleillé du village et elle était recouverte d'un tapis d'herbe anis et doux. Le vent y soufflait peu, mais juste assez pour amenuiser la chaleur déjà pesante de ce début de printemps.
_En longeant les différentes habitations façonnées par de nouveaux rameaux, Diana repensa à l'idée folle qui lui était venue en tête un peu plus tôt. Sans le savoir, Riolu lui avait soufflé une idée à laquelle la louve des ténèbres n'avait même pas songé.

_« Je suis complètement inconsciente. Mais le fait de le savoir me rassure quand même un peu... »

_D'une foulée lente et discrète, elle se dirigea vers une bicoque vieillie, sa fourrure blanche brillant sous la lumière du jour. La tête en avant et les pattes fléchies, elle glissa comme une ombre sur la façade de l'Herboristerie.

_« Je peux toujours évoluer librement dans le village, certes, mais si on me remarque et qu'on ne me voit pas revenir, je n'imagine même pas ce que je risque... »

_La jeune louve passa devant l'entrée du tunnel de bruyère reliant la place centrale à la clairière ensoleillée. Pas un bruit ne s'échappait de l'étroit conduit tapissé de feuilles vertes.
_Avec un pincement au cœur, Diana ignora son envie soudaine de laisser tomber son plan. Hors de question de faire demi-tour, maintenant. Il y a des moments où il ne faut plus réfléchir et agir.
_Après avoir jeté un coup d'œil derrière elle, ventre à terre, elle longea les épais buissons et s'engagea sur un sentier à peine discernable, coincé entre le mur végétal et la façade de l'Herboristerie. Puis sa silhouette élancée se plaqua au sol terreux pour éviter la fenêtre crasseuse qui perçait le mur du fond de la boutique. _En frôlant les planches mousseuses de la cloison, il lui sembla percevoir les relents des substances médicinales utilisées par la vieille Cériflor en charge du commerce.
_Une forte odeur de menthe et de Baies séchées lui fit froncer la truffe et la fugitive se redressa prudemment.
Ses yeux parcourus d'étincelles d'un rouge très nuancé fixèrent un point devant elle. À quelques mètres, la forêt s'ouvrait, à l'opposé du sentier accidenté d'où elle était venue le matin même, accompagnée de la Meute.
_Diana était séparée de la lisière des arbres par un espace d'environ dix mètres - un coin reculé de la grande place.
_À quelques pas d'elle, allongées en plein soleil, les deux sœurs jumelles Phyllali somnolaient, lovées l'une contre l'autre. Leur photosynthèse libérait un parfum pur et frais autour d'elles.
_Lentement, la louve blanche fléchit les pattes, le regard toujours verrouillé sur l'orée de la forêt.

Un.

_Elle ralentit sa respiration, puis les battements de son cœur.

Deux.

_Ses pupilles se rétractèrent légèrement, la concentration inonda chaque parcelle de son corps.

Trois !

_Tous ses muscles se détendirent d'un coup et ses pattes puissantes propulsèrent son corps vers l'avant. Sa corne sombre déchira l'air sans résistance.
_Sa course souple et rapide comme le vent ne lui fit pas défaut : Diana passa devant les Phyllali sans se faire remarquer, mêlant prodigieusement vitesse et discrétion.
_Imperceptible, elle s'enfonça entre les arbres sombres et la forêt se referma sur elle.


_Incompréhension.
Horreur.
Puis douleur.
_Les regards se baissèrent, humides, celui de Balfor ne faisant pas exception. Certains habitants se mirent à pleurer en silence, d'autre restèrent figés sur place.
Mais tous comprirent au même moment la situation.
_La petite Évoli était morte. Et ils ne pouvaient plus rien faire.
Personne ne la connaissait, personne n'avait eu le temps de vraiment lui parler, mais dans le clan, c'était ainsi : perdre quelqu'un était toujours douloureux, même peu où pas connu.
Un instinct de solidarité en ce bas monde.
_Balfor crispa ses griffes de nuit dans l'herbe effilée de la clairière, incapable de supporter les visages meurtris de ses protégés.
Diana en fit de même, puis expira lentement. À ses côtés, Riolu enfouit son visage dans ses pattes et deux perles cristallines glissèrent sur ses joues d'azur.
_Enfin, après un long moment où le soleil sembla plus froid que de la glace, les villageois entamèrent une mélopée presque inaudible et triste à en fendre le cœur. Des notes aigu glissèrent douloureusement de leur gorge, prirent un virage avant de retomber lentement dans le grave et de s'éteindre en un souffle.
_Une brise polaire balaya la clairière, les corps, les cœurs.
_Enfin, tous se dispersèrent. Chacun regagna ses activités, la mort dans l'âme, en attendant le commencement de la courte cérémonie destinée à accompagner l'esprit de l'Évoli dans le royaume du silence.
_Diana, qui était restée assise, posa un regard tendre vers Riolu avant d'exercer une pression sur sa joue du bout de la truffe.
Cette dernière souleva la tête, son regard émeraude humide de larmes, puis sourit tristement à son amie.

___ Excuse-moi, Diana, je suis un peu trop sensible...
___ Ne t'en veux pas, c'est normal. Elle était vraiment jeune. Et ça, c'est dur.

_Puis la belle louve blanche se leva et ses prunelles rubis parcoururent la clairière : certains villageois s'étaient allongés dans l'herbe alors que Balfor avait préféré se retirer dans la hutte de Polagriffe. Mais ses ordres avaient été clairs : quinze minutes, pas plus, avaient été données pour constituer un groupe de chasseurs destinés à aller explorer la forêt pour en apprendre davantage sur la situation. Le chef devait être de la partie.

___ Je vais aller attendre mon père à la maison, informa Diana. Je ne sais pas combien de temps je vais y rester, alors ne m'attends pas.

_Riolu hocha la tête et la louve des ténèbres se détourna, empruntant la direction indiquée.

___ Tiens, au fait, Diana... commença la Pokémon Émanation en se redressant à son tour, essuyant une dernière fois son visage avec frénésie. Pourquoi tu as dis tout à l'heure que tu ne pouvais pas quitter le village ?
___ J'ai été punie, grinça aussitôt l'interrogée en se retournant.
___ Ah... marmonna son amie, gênée. Mais... de quoi ?
___ De...

_Diana se figea soudainement, la bouche encore ouverte. Dans sa tête lui revint les paroles de Balfor prononcées le matin même, dures et agacées. _Elle crut presque déceler le 'clic' que fit ses méninges en s'activant.
Une idée vint germer dans son esprit, si bonne qu'elle dû presque se retenir de jubiler.

___ ... de chasse, répondit-elle finalement. Jusqu'à ce que je sois responsable comme doit normalement l'être une vraie Absol.

_Riolu serra les dents et lança un regard compatissant à son amie.

___ Je ne vais pas te dire que je suis désolée parce que je sais que ça va t'énerver, lâcha-t-elle avec un léger sourire dans la voix, mais tu vas tout me raconter, d'accord ? Je vais sans doute aller au dojo, rien que pour me changer les idées. C'est tout ce qu'on peut faire, de toute façon. Je t'attendrai devant.
___ Entendu, acheva la louve blanche.

_La créature bleue la salua avec un mouvement évasif de la patte et se détourna, bientôt imitée par Diana, et toutes deux prirent une direction opposée.
_Tandis que Riolu traversait la place, perdue dans ses tristes pensées, son amie pénétra dans sa hutte, un étrange sourire flottant sur ses lèvres.

_« Punie de chasse... uniquement. »


_Dans la pièce plongée dans l'obscurité, le silence avait étendu sa lourde chape dans les moindres recoins. De larges pans de tissus sombres avaient été accrochés laborieusement aux fenêtres mais cela suffisait à ne laisser filtrer que de rares rayons solaires illuminant avec pâleur les milliers de particules en suspension dans l'air. Ce dernier était chargé d'une odeur de poussière ainsi que celle, bien plus présente, de la détresse.
_Allongée sur un grand tapis gris étalé sur le sol terreux et battu, une silhouette remua faiblement et se redressa avec lenteur, chancelante sur ses pattes. Sa fourrure mauve et quelque peu aplatie avait perdu son éclat.
_Ambre tituba jusqu'au comptoir, les pattes ankylosées et tremblantes, une expression de tristesse et de vide figée sur son visage.
_Le corps de la petite Évoli avait été emporté un peu plus tôt par deux chasseurs aux yeux rougis, chose qui s'était remarquée malgré la pénombre environnante. Blafor ne s'était pas montré, en revanche. Avec les bruits qui couraient, la féline lilas avait crut comprendre qu'une expédition se préparait pour le territoire inconnu, soit-disant mise en place pour tenter d'en apprendre plus sur les causes de l'attaque d'Évoli.
_Dans le halo faible de lumière, des grains brillants de poussière flottaient, libres et portés par la moindre perturbation de l'air en une danse tourbillonnante et effrénée. Ambre les suivaient du regard, la conscience absente et l'esprit étranglé de rancœur.

_« Il courent tous à leur perte. Ce territoire, c'est... l'horreur... »

_Dans sa tête défilèrent les images qu'elle avait pu entrapercevoir avant que l'âme d'Évoli ne s'arrache complètement à son corps. Même s'il ne s'agissait que de deux ou trois souvenirs furtifs, la curiosité avait été trop forte. Mais le résultat était le même : elle avait violé ses pensées. Et mentit à Balfor.
_La féline glissa aux pieds du comptoir de bois, ses pattes s'agitant au rythme des sanglots qui secouaient son corps. Elle l'avait vu, elle, cet endroit saturé par la présence de la mort. Les informations volées dans l'esprit d'Évoli n'étaient qu'une mise en garde.

_« Balfor, espèce d'idiot. Je ne t'ai rien dit, ce n'est pas pour rien. Tu vas te risquer, toi mais aussi tes chasseurs, dans ce territoire sans savoir ce qui t'attend. Je t'ai prévenu... Mais alors... pourquoi... »

_À nouveau, des larmes d'amertume glissèrent sur son visage parme et Ambre fut prise de tremblements. Il lui revint douloureusement des parcelles de mémoire volées à Évoli : la clairière et sa présence de mort, l'herbe souillée d'écarlate... Les images se précisèrent. Des corps.
Et parmi eux, lui.
_Après un temps, l'image s'effaça puis un de ses propre souvenir remonta d'un coin de mémoire douloureux. L'effet fut immédiat : la féline se plia en deux comme si elle venait de recevoir un coup de poing au creux du ventre et un gémissement s'échappa de sa gorge : dans sa tête, une petite silhouette souriant joyeusement prit des proportions semblables à celle de l'Évoli avant de s'effacer, non sans lui arracher une dernière plainte.
_Ambre resta allongée dans l'ombre, le visage posé sur ses deux pattes avant, immobile si on omettait l'eau salée qui perlait à ses yeux.

_« Mais pourquoi ceux qui me sont cher sont-ils tous condamnés à disparaître ?... »


Petite-bande son, pour l'ambiance (elle n'est pas de moi, bien-sûr).
_D'un pas furtif, Diana se faufila entre les troncs rugueux des sapins dont le nombre augmentait au fur et à mesure qu'elle s'enfonçait dans la forêt. _L'air était imprégné de cette odeur sauvage si particulière, un mélange de pomme de pin et d'humidité. Au sol, un tapis de feuilles brunies et d'aiguilles s'étalait et contrastait particulièrement bien avec l'émeraude sombre des ramages. Par endroit, les rayons du soleil filtraient à travers cette canopée rêche et dessinaient des formes géométriques lumineuses sur le moindre relief du paysage.
_La louve des ténèbres évita une branche imposante et rongée de l'intérieur qui était tombée au sol et, tout en conservant un rythme soutenu, glissa sans mal de l'autre côté d'un bosquet couvert de mousse. Par ici, la neige avait totalement fondu et la tiédeur agréable de l'après-midi caressait le pelage d'ivoire de la fugitive.
_Cette dernière ferma un instant les yeux, goûtant avec délice à la liberté qui s'offrait à elle. Sa truffe discrète frémissait sous les parfums boisés empreignant les environs et dans les arbres, des piaillements et cris se mélangeaient, créant une atmosphère tranquille et mystérieuse.
_Alors qu'elle longeait un jeune houx décoré de baies rouge sang, Diana s'arrêta soudainement et ses pattes antérieures s'enfoncèrent légèrement dans la litière humide de la forêt. Au loin, un murmure limpide lui parvint, comme un appel lointain.
_La louve blanche resta totalement immobile, les sens aux aguets, incertaine de ce qu'elle semblait percevoir.
Puis après un court instant, elle s'avança finalement entre les arbres, effleurant au passage les touffes anis de l'herbe sauvage.

_« On peut dire que ça tombe plutôt bien. Si je n'avais pas en tête la mission que je me suis imposée, je serais presque tentée de confondre cette excursion avec une promenade de santé. »

_Quand elle trottina jusqu'au bord de l'étroit ruisseau, un sourire se dessina sur son visage. Lentement, elle fléchit les pattes afin de boire tranquillement dans le courant calme de l'eau qui glissa alors dans sa gorge, glacée et pure comme un filet de vie revigorant.
_Puis un léger frisson parcourut alors son dos et Diana se redressa sans lâcher son reflet des yeux, ignorant le liquide translucide qui gouttait à son menton. Dans le miroir ondoyant, ses prunelles de rubis ne la quittaient pas, brillantes et empreintes de cette expression de tristesse renfermée qui lui était familière. Quelque soit la situation, ses yeux gardaient toujours cette étincelle ternie, comme quelqu'un qui en avait déjà assez des épreuves de la vie.
_La jeune louve secoua rapidement la tête et se concentra, non sans curiosité, sur le reste de sa silhouette menue. Son joyau frontal d'une couleur de nuit luisait faiblement sous les rayons du soleil, accompagnant l'éclat fascinant de la lame recourbée en croissant de Lune sur le côté droit de son visage tout aussi sombre. Sur son poitrail, la fourrure d'albâtre distinctive des Absol cascadait, épaisse et douce comme un nuage. Chacun de ses membres était terminé par quatre griffes acérées, si on comptait celles cachées derrière les pattes, comme un ergot.
_Son regard fut soudainement attiré par un mouvement - une onde dans l'eau - qui lui fit redresser lentement la tête. Sur la berge en face, à moins de cinq mètres sur la droite, un petit Pokémon se désaltérait, le ruisseau frais suivant avec harmonie les courbes bleutées de son pelage.
_La réaction de Diana ne se fit pas attendre : d'un saut rapide, elle se retrouva les pattes dans le courant, le regard fixé sur sa nouvelle proie qui sursauta. Un éclat d'angoisse passa dans son regard et elle fit volte-face, vive comme un éclair. Les dents serrées et le cœur accélérant dans sa poitrine, la louve blanche s'élança à sa suite, perturbant au passage la course tranquille de l'eau.
_Elle bondit par dessus un talus, voulu freiner sa chute. Trop tard : ses pattes s'engluèrent instantanément dans le sol spongieux avec un bruit mat. _Devant elle, le Pachirisu, qui avait évité la petite marre boueuse avec ingéniosité, ne prit pas le temps de se retourner, volant littéralement aux dessus du tapis de feuilles.
_Bientôt, son salut se présenta à lui comme une évidence et, d'un saut prodigieux, il s'agrippa au tronc d'un arbre avec souplesse. Il ne lui fallut pas plus de dix secondes pour en atteindre le sommet, faisant preuve d'une agilité et d'une performance remarquable.
_Le Pokémon arboricole s'affaissa contre l'écorce rêche, épuisé et tremblant.

___ Fait chier ! jura Diana qui avait rejoint le pied du tronc, son regard meurtrier fixé sur l'écureuil de foudre.

_Depuis les hauts branchages de l'arbre, le Pachirisu se recroquevilla sur lui même et, après un temps où il fut évident qu'il ne bougerait pas, la chasseuse fut obligée de renoncer à son repas et reprit son chemin, contenant tant bien que mal la colère bouillant au fond d'elle.
_Elle erra ainsi pendant un long moment, si bien que l'amertume qui lui avait étreint le cœur retomba peu à peu. Cependant, son ventre ne semblait pas oublier sa proie perdue et la jeune louve sentait la faim la menacer et commencer à l'assommer.
_Lentement mais sûrement.

___ Je n'ai rien mangé depuis hier... souffla-t-elle tout haut. Je crois qu'il faut que je commence à réfléchir sérieusement à ce problème. N'importe quoi fera l'affaire, pourvu que mon estomac s'apaise...

_Sans prévenir, elle bondit brusquement en avant et fila comme une flèche, s'enfonçant toujours plus profondément dans la forêt. Des poignées entières d'aiguilles de sapin tombées au sol se soulevèrent à son passage. Puis la température sembla chuter légèrement, du fait des larges branches qui masquaient presque totalement la lumière du soleil de printemps.
_Silencieuse comme à son habitude, Diana accéléra encore. Sa course souple et fluide faisait onduler son pelage d'ivoire et ses membres échauffés gardaient un rythme régulier et soutenu.
_Malgré le besoin de manger qui la taraudait, la louve des ténèbres conserva longtemps son allure, jusqu'à ce qu'elle fut sûre de ne plus reconnaître les environs. Là, elle s'arrêta alors, la respiration à peine fuyante et les dents serrées.
_Alors lentement, elle releva la tête en humant profondément l'air.
L'odeur lui parvint avant même qu'elle n'eut le temps de se redresser complètement.


Entêtant.

_En moins d'une seconde, la créature se retrouve au sol, écrasée par une masse dont elle ne parvient pas à se libérer.

Parfum entêtant.

_Le visage enfoncé dans la litière humide, un frisson glacial parcourt le corps de la petite proie. Elle n'a pas le temps de faire un mouvement et sent le souffle brûlant de son chasseur dans son cou.

Parfum entêtant. Irrésistible.

_L'agresseur ne réfléchit pas. Ne réfléchit plus.
D'un mouvement langoureux, ses crocs s'enfoncent dans la chair du Laporeille qui pousse un cri. Le sang chaud afflue et noie un couinement qui s'éteint sur une dernière plainte. Le liquide écarlate s'écoule de la plaie, maculant au passage un visage sombre comme la nuit. Sa couleur vermeille est la même que ces deux yeux dont les pupilles rétractées ne sont plus que deux fentes d'obsidienne.

Délicieux.

_Les dents de Diana s'enfouissent davantage dans le corps du Pokémon Lapin avec un bruit de succion qui la fait frémir de plaisir. Puis sa mâchoire sectionne net les os rougis de la nuque.
Et l'arôme lui explose à la bouche.
_Bientôt, il ne reste presque rien du malheureux Laporeille.


_D'un mouvement appliqué, la jeune louve recouvrit les restes de son repas de feuilles sèches et de terre et, du dos de la patte, essuya sa bouche couverte du liquide écarlate encore chaud.
_Sa fourrure blanche se tâcha de sang et elle entreprit d'en lécher minutieusement les gouttes qui glissaient lentement jusqu'au bout de ses griffes.
_Une fois cela accomplit, Diana fit demi-tour et reprit son chemin, une agréable sensation de chaleur au creux du ventre.
Mais son regard était toujours empreint de cette tristesse inexpliquée.
_Aucun arbre ne lui était familier, le tapis humide sur lequel elle marchait n'était pas le sien. Le territoire inconnu, bien que décrit comme dangereux et sombre, ne semblait tout de même pas effrayer la louve blanche qui avançait toujours lentement, les yeux rivés droit devant elle. Parfois, de petits cris de Pokémon perçaient le silence de l'endroit et le soleil qui paraissait désormais frais jouait sur le sol en formant des motifs pâles.
_Pourtant, sous cet air absent et vide, Diana conservait une prudence remarquable.
Elle sentait l'odeur du sang maculant encore la partie basse de son visage.
_Le bruit de ses pas était étouffé par l'épaisse couche d'aiguilles qui jonchait le sol et autour d'elle, la présence des immenses conifères formait comme un cocon calme et tranquille.
Où un piège, selon les points de vue.

_« Je ne dois pas me laisser m'écarter de mon objectif. C'est pas l'envie qui me manque d'aller plus loin dans mon exploration, mais... »

_L'Absol se stoppa soudainement et releva la tête. Le temps sembla se figer un instant.
Elle remarqua qu'autour d'elle flottait encore l'odeur du liquide vital de son précédent repas.
Automatiquement, elle porta sa patte à son visage et le frotta avec étonnement. Une légère marque pourpre tacha le revers pâle de son membre.
_Dubitative, la louve de nuit se remit alors en marche d'une foulée légère et prudente, inhalant par la même occasion l'air aux embruns de sang.
_Peu à peu, ses pensées divaguèrent de nouveau et elle se retrouva à songer à la jeune Évoli. À cette heure-ci, les villageois devaient être en train de préparer la petite cérémonie pour la défunte, le cœur lourd.

_« Je me demande ce qu'ils vont utiliser comme Hiiro*. Vu son âge si jeune et l'innocence qui dansait dans ses yeux, je ne serait pas surprise qu'ils en trouvent un simple mais beau. »

_Un sourire triste se dessina sur son visage quand son esprit s'envola vers Riolu. Cette dernière, à peine âgée de treize ans, aurait très bien pu connaître le même sort que la renarde.
_Diana sursauta et secoua la tête avec frénésie. Hors de question de penser à de telles choses. Riolu était peut-être jeune, mais son esprit était farouche et intelligent et son corps résistant. Cependant, la louve blanche ne put s'empêcher de songer ce qu'elle ferait si elle venait à perdre son amie.

_« J'aurais du mal à m'en remettre », pensa-t-elle avec un sourire amer.

_Devant elle, la forêt s'étendait toujours, profonde et silencieuse. Aucun bruit ne troublait le silence installé depuis un moment déjà. Le souffle léger du vent avait cessé de caresser les branches des arbres et seules les pattes de Diana s'enfonçant dans le tapis craquant d'aiguilles troublaient le calme de l'endroit. Une étrange atmosphère baignait l'endroit.
_La fourrure de la fugitive était par moment secouée de petits tics qui provoquaient chez elle une désagréable sensation.
Quelque chose...
_Elle se stoppa d'un coup et enfouit ses griffes sombres dans la litière brunie.
_Quelque chose la dérangeait. Pas le silence bien qu'oppressant du bois, ni l'absence remarquable de Pokémon sauvages.
_Ses yeux parcoururent nerveusement les environs, sans pour autant l'informer davantage. Malgré elle, un goût acide envahit sa bouche.
Puis elle comprit.
_Instinctivement, Diana passa sa langue sur ses lèvres, le cœur battant. Le liquide écarlate avait coagulé et de ce fait, sa senteur n'emplissait plus ni son nez, ni la moindre parcelle de sa peau.
Mais alors...
_Ses narines frémirent de dégoût quand, après une inspiration, l'odeur du sang la frappa comme un uppercut. Jusqu'ici, elle avait crut qu'il s'agissait de celui de sa proie maculant toute la partie basse de son visage.
_La louve des ténèbres bondit en avant et s'élança entre les arbres, vive comme l'éclair, les yeux écarquillés d'angoisse. Dans sa tête naquirent mille et une questions folles. Ses pattes fouettèrent furieusement la mousse étalée au sol et le vent siffla à ses oreilles.
_Après un instant, Diana négocia brutalement un virage serré autour d'un énorme tronc mais, emportée par la rapidité de sa course et le manque de terrain, elle glissa sur les feuilles humides et se retrouva sur le flanc.
_Elle leva les yeux.
Sa respiration se coupa net.


___ Où est-il parti ? fit l'Absol d'une voix neutre.
Pas de réponse.
___ Attends, n'y vas pas ! C'est trop dangereux ! On ne connaît pas le territoire au-delà d'ici !
___ Si je ramène cette proie, mon honneur ne reviendra pas, mais au moins pourrai-je nourrir le village.
___ Ils ne t'accepteront jamais, même si tu ramenais toute la viande de la forêt !


_Étalé au sol dans une marre de feuilles rougies, le Haydaim ne bougeait plus. Ses yeux révulsés fixaient un point imaginaire dans les ramages émeraudes du sapin. Le pelage crème du cervidé, devenu terne et barbouillé d'écarlate, était zébré à la base du cou par une plaie béante et poisseuse qui se prolongeait jusqu'au milieu de son poitrail immobile. Le sang commençait à peine à coaguler.
Il n'était plus rien d'autre qu'une masse froide et vide de toute essence vitale.
_Tétanisée, Diana se releva lentement, son regard refusant de lâcher le corps des yeux. L'odeur écœurante lui montait à la tête et, malgré son statut de chasseuse, elle dû se retenir pour ne pas s'effondrer.
_Ses pattes se mirent à trembler contre son gré et elle enfonça ses griffes dans la terre mise à nu par sa chute récente.
Se calmer. Réfléchir.
_Si le corps du Haydaim, traqué par la Meute le matin même, avait été abandonné de la sorte, cela ne pouvait signifier qu'une seule chose.
_Dans l'esprit de la jeune louve, d'horribles images défilèrent, nées de son angoisse et des questions qui martelaient sa conscience. Immédiatement, elle décida de laisser tomber ce pour quoi elle était venue.
Chercher des raisons à la mort d'Évoli attendrait.
Désormais, c'était lui qu'il fallait trouver.
Gabor.


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*Hiiro signifie "écarlate" en japonnais. Dans cette fanfic, cette petite cérémonie dont parle tant Diana consiste à déposer près du corps un objet rouge qui défini, selon sa beauté, les valeurs qu'incarnait le défunt. C'est, vous l'aurez remarqué, quelque chose d'important pour les Pokémon de cette histoire que de rendre hommage à un mort, même peu ou pas connu.