CHAPITRE VI : Le choc des Maîtres [2/6]
Mais cela ne dura pas longtemps, et ils aboutirent rapidement dans un endroit plus dégagé. Là, papillons en tous genres, qu'ils soient Pokémons ou non, batifolaient joyeusement, au dessus des herbes jaunies par le soleil et des fleurs sauvages. Mais, quelque chose, plus que tout, attirait le regard en ce lieu. Une maison, couverte de lierre, tombant en ruine, vieillissait là, isolée. Elle devait être sur deux niveaux, et n'était pas très grande, mais elle avait dû être coquette, à l'époque ou l'on distinguait encore clairement la couleur de ses murs. Mais maintenant, on ne pouvait plus distinguer que quelques restes de peinture écaillée, là ou le lierre n'avait pas encore tout recouvert.
— Je me demande bien qui habitait là, fit Pauline. On est peut-être les premiers à la découvrir.
— Ca m'étonnerait, répondit Grey, il y en quand même des gens qui passent dans le coin, certains on déjà dû la remarquée.
— En tout cas, vivre dans le coin devait être assez agréable, ma foi, reprit-elle, si l'on n'a pas trop peur de la solitude. Ils avaient peut-être leurs propres plantations, à l'époque, mais la maison a l'air d'avoir été abandonnées depuis longtemps, je ne suis pas sûr qu'on en retrouverait des traces.
Et effectivement, Pauline ne distinguait rien de particulier. Si quelque chose il y avait eu, les herbes avaient due depuis longtemps tout recouvrir. Brown quant à lui continuait à fixer la maison. Une série de trous, assez aisément distinguables, au niveau du premier et du seul étage, l'intriguaient. Sans qu'il ne comprenne pourquoi, il senti un léger frisson lui parcourir la nuque.
Brown, Grey et Pauline firent le tour de la propriété, continuant à débattre sur sa possible histoire. Enfin surtout Grey et Pauline, car Brown ne participait que très peu à la discussion. Lentement, la luminosité commença à décliner. Le trio n'y accorda d'abord pas la moindre attention. Sans doute était-ce le soleil qui passait derrière un nuage, rien de plus. Mais, quand il leur sembla d'un seul coup que le soir venait de tomber, alors qu'il devait être aux alentours de 14 heures, en plein été, et que le soleil était haut dans le ciel il y a encore quelques minutes, ils commencèrent à se poser des questions.
En levant la tête, Brown eu l'impression que le soleil, qui était malgré tout toujours bien visible, perdait petit à petit de sa puissance, comme s'il éclairait de moins en moins. Et il faisait toujours plus sombre. Grey et Pauline, à coté de lui, n'étaient pas vraiment plus rassurés que lui. Il senti soudain comme une sorte d'énergie, qu'il n'aurait su expliquée, et qui semblait se dégager de la maison, ou de quelque chose qui en était proche. Une sourde angoisse monta en lui. Quelque chose n'allait pas !
Il faisait maintenant presque aussi sombre qu'en pleine nuit. Il y avait juste assez de luminosité pour que Brown puisse encore voir suffisamment distinctement ce qui l'entourait. Pauline se mit à transpirer et apparemment à pâlir, même si Brown avait du mal à bien la distinguer, et Grey quand à lui produisait maintenant des sons graves et bizarres, entre le bruit de gorge et l'étranglement. Les mains de Brown se refermèrent instinctivement sur les Pokéballs contenant son Lixy et son Etourvol.
Alors, semblant émerger directement de l'ombre, presque invisible dans cette obscurité, il apparu.
Noctunoir.
Ce nom s'était tout de suite imposé dans l'esprit de Brown. Il n'en avait jamais vu jusque là ailleurs qu'à la télévision, mais il était sûr de ne pas se tromper. Pourtant, celui-ci semblait trop… immatériel. Comme s'il n'était pas tout à fait dans ce monde. Brown était SÛR qu'il était impossible de voir à travers un Noctunoir, contrairement à un Fantominus par exemple. Pourtant, il parvenait bel et bien à distinguer ce qui se trouvait derrière celui-ci. Brown pressa ses deux Pokéballs en même temps, et les lança.
Où plutôt il s'apprêtait à les lancer, quand il retint son geste au dernier moment. Il n'avait pas senti la petite montée de chaleur et la déformation des Pokéballs au moment où elles s'apprêtent à s'ouvrir pour libérer le Pokémon qu'elles contiennent. Il appuya une nouvelle fois, puis encore une autre. Il dû bien se rendre à l'évidence : ses Pokéballs refusaient de fonctionner correctement ! Pourtant, c'était impossible. Les Pokéballs étaient ultra-sécurisées. Elles n'avaient pratiquement jamais de problèmes techniques (un producteur de Pokéballs défectueuses pouvait immédiatement dire adieu à sa carrière, voir risquer la prison), et même si cela arrivait, des protections étaient chargées de faire sortir le Pokémon de force. Une Pokéball refusant purement et simplement de s'ouvrir, définitivement, c'était impossible ! Aussi impossible que de voir à travers un Noctunoir… Brown sentait que c'était lui qui était la cause de ce problème, mais aucun Pokémon n'était censé pouvoir faire ça, pas même un Noctunoir. Décidemment, quelque chose ne tournait pas rond.
Pauline s'était évanouie. Brown continuait à s'acharner désespérément sur toutes ses Pokéballs, même s'il savait que ça ne servait à rien. Les mains du Pokémon spectre s'illuminèrent d'une aura violette inquiétante. Le corps de Grey se contracta brusquement, et les sons étranges, semblants venir d'une autre gorge que la sienne, redoublèrent d'intensité. Alors le Pokémon croisa les bras et se dissipa lentement, prenant l'apparence d'une étrange aura rouge, qui flotta lentement jusqu'à Grey. Brown, lui, était tétanisé. Seules ses mains continuaient à matraquer ses Pokéballs, comme un automatisme. Au moment où l'aura toucha Grey, qui ne semblait plus avoir conscience de se qui se passait autour de lui, elle disparu. Le garçon pris une immense inspiration sonore, presque irréelle, et ses yeux pulsèrent d'une lueur rouge.
Brown était sur le point de tourner les talons, incapable de raisonner, ne songeant même pas à ce qui allait advenir de ses amis, quand ce qui était encore il y a un instant Grey prit la parole.
— Reste ici, Brown… Et écoute… Car c'est à toi, et uniquement à toi, que cette histoire s'adresse…
La voix n'avait plus rien à voir avec celle de Grey. Bien trop grave et rauque, il semblait impossible que le jeune garçon aie pu la produire. Brown, sans qu'il ne sache bien pourquoi, oublia ce qu'il avait en tête et resta sur place, malgré tout, fasciné par la lumière rouge des yeux de cette chose à l'apparence de Grey.
— Qui… Qui êtes-vous ? parvint-il à balbutier.
— Le temps est imprévisible, et les voies du futur sont nombreuses… continua la voix, qui ne semblait absolument pas avoir entendue Brown. Mais en certains endroits, toutes les voies se rejoignent en de mêmes carrefours…
Une ère de bouleversements, comme nul n'en a encore jamais connue, va s'abattre sur ce monde… La machine est déjà en marche… Depuis longtemps… Elle a démarrée avant même ta naissance… Elle est partout… Bientôt, elle sera prête, et l'avenir du monde se jouera alors…
Une chose est sûre : tu seras le centre de cette machine… Le mécanisme central… Quoi qu'il arrive, à un moment, tout reposera sur toi… fatalement… ainsi le montrent les voix du temps…
— Qu… Qu'est-ce que tout cela veut dire ?
— À la fois mécanisme et grain de sable… continua la voix, imperturbable. Que choisiras-tu, lorsque l'Opposé sera venu ?...
— Je ne comprends rien ! Expliquez-moi !
— Que choisiras-tu ?...
Brown avait maintenant l'impression de ne plus rien voir d'autre que ces yeux rouges, si obsédants. Lentement, un brouillard commença à envelopper son champ de vision et ses pensées… il senti ses yeux se fermer. Tout était noir, maintenant, autour de lui. Seules ces paroles, une dernières fois, résonnèrent dans son esprit.
— Que choisiras-tu ?...
_________________________________
— Qu'est-ce que ?…
Brown ouvrit les yeux. Il était allongé dans l'herbe, toujours à coté de la maison en ruine, et avait un peu mal au crâne. Le soleil était toujours quasiment à son zénith, et rien ne laissait deviner ce qui s'était passé. Brown regarda son pokématos : 14 heures 15. Cela voulait dire qu'il ne s'était pratiquement pas passé de temps entre le moment où il avait perdu connaissance et celui où il s'était réveillé. Bizarre… À coté de lui, Grey et Pauline ouvrirent les yeux presque en même temps. Ils avaient l'air tout aussi déboussolés que lui.
— Vous avez une idée de ce qui vient de se passer ? demanda Brown.
— Je me rappelle juste m'être sentie soudain faible, puis le noir, répondit Pauline. J'ai dû m'endormir.
Brown regarda Grey avec un peu d'appréhension. Il était rassuré de le voir dans un état visiblement normal, mais restait malgré tout inquiet.
— Je ne me souviens de rien de plus que Pauline, répondit-il. Comme un voile noir qui passe devant mes yeux, puis je me suis réveillé étendu dans l'herbe.
Brown, pourtant, se souvenait très bien de la nuit qui était tombée en plein jour, et du Noctunoir qui semblait avoir pris possession de Grey. Mais il doutait maintenant de plus en plus que tout cela soit vraiment arrivé. Pourtant, cela ne ressemblait pas à un cauchemar, pas comme celui de la nuit dernière. Tout semblait si réel…
— La nuit est tombée d'un seul coup… Je crois qu'il y avait un Noctunoir… J'ai voulu me défendre avec mes Pokémons, mais mes Pokéballs ne se sont pas ouvertes. Et puis le Noctunoir à…
Brown fixa son regard sur Grey, qui n'avait jamais été aussi normal, ne sachant comment dire une chose aussi énorme et doutant de plus en plus de ce qu'il croyait avoir vu. La suite de sa phrase se noya dans un baragouinage incompréhensible. De leur coté, Grey et Pauline le regardaient en fronçant légèrement les sourcils, ne semblant pas très bien comprendre ou il voulait en venir.
— Tu as du rêver, expliqua Pauline. La nuit qui tombe en plein jour, des Pokéballs qui ne s'ouvrent pas, ce n'est pas possible.
— Mais comment tu expliques ce qui vient de se passer ? reprit Brown.
— Je pense qu'on du être victime d'une attaque surprise de Rondoudous, je ne vois que ça. Je ne me rappelle pas en avoir vus, mais il est bien possible qu'il y en ait quelques-uns dans le coin. Il suffit qu'ils se soient sentis menacés… et qu'ils nous aient attaqués de dos…
Ni Brown, ni Grey, ni même Pauline sans doute, n'étaient très convaincus par cette explication, mais ils durent bien admettre que c'étaient la seule qui tenait la route. Pourtant, les paroles que croyait avoir entendues Brown, de la bouche de Grey, continuaient de résonner dans son esprit.
— Allez, en route ! dit Pauline. Sinon, à ce rythme, on ne sera jamais à Yellow-sur-mer avant la fin de l'année !
Brown ne se le fit pas dire deux fois. Il n'était pas mécontent de quitter cet endroit qui, décidément, lui fichait la chair de poule.
____________________________________