CHAPITRE V, partie 2 : Première mission [3/5]
— Tu vois gamin, plaisanta l'homme, qui avait vu l'air ébahi de Brown, c'est comme ça que les dresseurs pas trop mauvais se battent ! Ce jeune homme a fait preuve d'une très bonne stratégie, avec de l'improvisation. Il a misé sur la trop grande confiance de son adversaire, alors que le Cizayox aurait eu facilement l'avantage sur l'Absol. C'était risqué, mais le risque paye. Il ira loin ce dresseur, c'est moi qui vous le dis ! Enfin, je la connais, Cassandre ne se laissera pas impressionner pour si peu. Elle a bien des tours dans son sac. S'il parvient à l'atteindre bien sûr... Il est assez rare que des candidats y arrivent dès la première fois. Après je ne sais pas, ce n'est peut-être pas sa première arène, même s'il est nouveau dans celle-là.
La dresseuse remonta dans la fausse ruche. Une borne en métal apparue, surmontée d'un gros bouton rouge. Le dresseur appuya dessus. Deux structures changèrent d'emplacement. Il réappuya, elles bougèrent encore. Il appuya encore et elles revinrent à leur emplacement d'origine. Il prit un moment pour réfléchir et appuya une quatrième fois. Satisfait, il continua sa progression.
Brown, Grey et Pauline restèrent pour observer la progression du candidat. Tant bien que mal, il réussissait petit à petit à trouver son chemin. Mais il rencontra d'autres dresseurs, et ses combats ne se passèrent pas tous aussi bien que le premier. La première dresseuse s'était fait avoir bêtement, mais les autres furent plus fins, et ils étaient eux aussi capables de stratégies élaborées. Au fond, dans un combat de Pokémon, la puissance brute restait assez secondaire. Le vrai talent, c'était d'entraîner ses Pokémons de manière à les spécialiser dans les techniques ou ils seraient les plus intéressants, et à faire preuve de stratégie et d'un grand sang froid. Il fallait faire face à toutes les éventualités, même les plus inattendues. Les champions n'étaient pas seulement ceux qui avaient les Pokémons les plus forts, mais aussi ceux qui savaient le mieux s'en servir. Et les dresseurs des arènes n'avaient pas étés choisis par hasard non-plus.
Au bout d'une quarantaine de minutes, après trente-deux déplacements et six combats, il ne restait plus au jeune dresseur que sont Empiflor paralysé. Il avait utilisé toutes ses potions. Mais il atteignait enfin la dernière plateforme. Il ne lui restait plus qu'à appuyer sur le gros bouton rouge et l'énorme poutre bariolée se déplacerais pour lui faire un pont, à trente mètres au dessus du sol, entre lui et la plus haute plateforme, où l'attendais la championne. Il pourrait ainsi soigner ses Pokémons et lancer son plus grand combat depuis sa naissance !
Il appuya. Oui, la poutre bougeait, exactement comme il l'avait prévu ! Mais alors qu'elle se stabilisait enfin, il entendit une ruche s'ouvrir au dessus de la tête. Des barrières en verre surgirent d'un seul coup du sol, partout autour de lui ! Un homme, sans doute à peine plus vieux que le candidat, en bondit sans hésitation. Il n'était même pas attaché ! Bien que le candidat soit presque en haut de l'arène, cela représentait quand même une chute d'au moins cinq mètres. Mais des chaussures aux semelles épaisses et souples et une roulade bien maîtrisée amortirent le choc. Il se releva. Son marcel dénudait ses muscles saillant. Il lança une Pokéball.
Le combat fut bref. En quelque secondes, le Yanmega se débarrassa de l'Empiflor à coups de Bourdon. La plante carnivore était à peine parvenue à bouger !
Les barrières se rétractèrent. Dépité, le jeune dresseur accrocha ses mousquetons à la corde elle même accrochée à la plateforme et descendit en rappel jusqu'au plancher, près de trente mètres plus bas. L'ascenseur remonta. Il entra de nouveau dedans et redescendit. Arrivé à l'étage des visiteurs, il marcha tout droit jusqu'à la sortie sans regarder personne, plongé dans de sombres pensées.
— La frustration des premiers échecs, commenta l'homme assis à coté de Brown, Grey et Pauline, qui avait assisté comme eux à la tentative du jeune homme. J'ai moi aussi connu ça. De toute façon, il n'aurait pas fait le poids face à Cassandre, pas encore. Mais en continuant sur cette voie, je suis sûr qu'il pourra faire des merveilles !
Une femme qui devait avoir la quarantaine et qui venait d'arriver se présenta au comptoir d'inscription, montra son diplôme attestant de sa réussite à l'examen pour participer aux combats d'arène, enfila une tenue d'accrobranche et prit elle aussi l'ascenseur.
Les trois amis qui en avaient assez vu saluèrent l'homme et quittèrent l'arène… non sans avoir achetés chacun, avant, un pot de miel. Pas un touriste n'y échappait ! À part les végétaliens ou les allergiques au miel, peut-être…
Ils continuèrent à flâner dans la ville jusqu'au soir. Finalement, ils retournèrent à l'hôtel où ils avaient passés leur première nuit. Ils savourèrent leur diner. Quand ils seraient repartis, ils devraient à nouveau pique-niquer tout les jours. Ils se couchèrent rapidement et s'endormirent.
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Le nouveau tube des musiciens d'Arabelle retentit.
Un bras émergea des couvertures. Il monta, lentement, très lentement, semblant peser au moins une tonne. Petit à petit, il se plaça au dessus du Pokématos qui avait eu l'audace d'émettre ce son à une heure si matinale. Soudain, il chuta, la gravité reprenant ses droits ! Pile sur le Pokématos. Celui-ci, choqué, jugea plus prudent de se taire, avant de subir une deuxième fois le même traitement.
Tout aussi lentement, le bras repoussa les couvertures sous lesquelles il se trouvait il y a encore une minute. À ce bras était rattaché une épaule, un torse, une tête, un autre bras et même des jambes ! Encore plus lentement, semblant mener le plus grande lutte de sa vie, ce corps s'anima.
Brown parvint enfin à se redresser. Totalement aveuglé par le mince filet de lumière matinale qui passait sous les rideaux, il réussi tout de même à lire l'heure sur son Pokématos. 8 heures et 5 minutes. Normal, puisqu'il avait mis son réveil à 8 heures. Pourquoi, alors qu'il se levait presque toute l'année une heure plus tôt, en moins d'un mois, se lever à 8 heures lui paraissait maintenant relever de l'exploit ? !
Brown descendit prendre son petit-déjeuner, laissant Grey dormir encore. Alors qu'il finissait et qu'il s'apprêtait à partir, vérifiant une dernière fois ce qu'il emportait dans son sac, Grey et Pauline vinrent le rejoindre.
— Tu n'espérais quand même pas partir sans nous dire au revoir ! s'amusa Pauline.
— Je ne voulais pas vous réveiller, balbutia Brown.
— Je plaisante voyons ! On se retrouve donc ce soir à la sortie Sud-Ouest de Boulocity puis direction Bourg Crépuscule ?
— Je ne sais pas. Ca représente quand même un voyage de plus de deux cent kilomètres, et même en marchant à un bon rythme, nous mettrons sans doute plus d'une semaine à faire l'aller-retour. Et, finalement, tout bien réfléchi, je ne pense pas avoir grand-chose à faire là-bas. Ca nous fera faire un gros détour pour rien. C'est vrai que j'ai vécu jusqu'à mes huit ans là-bas, mais je ne pense pas que ce soit indispensable.
— Enfin Brown ! intervint Grey. Le but du dresseur n'est-t-il pas justement d'aller partout et de tout explorer ? Ce détour ne peut que nous être bénéfique. Il nous permettra de nous entraîner ainsi que nos Pokémons, et, qui sait, il y a peut-être des Pokémons sauvages intéressants là-bas. Ne me dis quand même pas que tu as simplement la flemme de marcher quelques jours de plus ? Tu es si pressé de terminer ton voyage ?
— Non non ! Ce n'est pas ça ! Enfin si, peut-être un peu… Oui, vous avez raison. Pas de problème, on fera comme on avait prévu. Mais, vous ne restez pas un jour de plus à Boulocity juste pour me faire plaisir au moins ?
— Tu sais, on a de quoi s'occuper, ici, répondit Grey.
— Et puis on peut avoir envie de souffler un peu, nous aussi, rajouta Pauline. De plus, il paraît que la bibliothèque de cette ville est très bien fournie, j'aimerais bien y faire un tour.
— Et moi, j'ai vu une exposition sur les pionniers du dressage de Pokémon, au Nord de la ville. Ca doit-être très intéressant. Il paraît que les premiers dresseurs n'avaient même pas de Pokéballs et que leurs Pokémons les suivaient tout le temps, formant un cortège derrière eux !
— Alors tant mieux. Bon, j'y vais, à ce soir.
Grey et Pauline saluèrent Brown et celui-ci s'en fut en direction du bâtiment de l'E.d.S. Il avait prévu de la marge et arriva avec vingt minutes d'avance. Connor l'attendait devant l'entrée. Il fut content de voir que Brown avait été fidèle au rendez-vous. Ils restèrent debout, silencieux, à attendre les autres. Brown ne savait pas trop quoi dire et Connor ne semblait pas avoir envie de briser le silence. Petit à petit, d'autres personnes vinrent rejoindre le groupe, quatre hommes et deux femmes. Ils portaient des vêtements assez basiques, seule leur ceinture de Pokéballs était mise en valeur. La chemise avait soigneusement été passée sous la ceinture, afin que celle-ci soit plus facilement accessible. L'homme le plus jeune devait bien avoir vingt-cinq ans. Brown se sentait mal à l'aise, étant le seul mineur au milieu de sept adultes, en comptant Connor.
L'homme le plus jeune s'approcha, arborant un sourire amical.
— C'est toi la nouvelle recrue ?
C'était plus une affirmation qu'une question, il continua donc :
— Je m'appelle Michael. Je trouve ça bien que, dès ton âge, des jeunes commencent à s'investir et à faire du bénévolat. Je suis celui qui t'emmènera avec mon Galeking. Comme ça, on pourra faire plus ample connaissance durant le trajet.
— Je m'appelle Brown, répondit simplement le jeune garçon.
— Je suis sûr que tu te plairas dans notre association. Ca fait quatre ans que j'y suis inscrit, et franchement, je ne le regrette pas. La plus belle récompense, c'est de voir les sourires des gens qu'on a aidé. Ca nous donne envie de soulever des montagnes !
Connor prit la parole pour expliquer comment se passerait l' « opération ». En arrivant dans Pinissia, il faudrait qu'ils adoptent une formation bien précise : le chef, en avant ; derrière, une rangée de trois membres, puis une de quatre, dont feraient partie Brown et Michael ; des Pokémons volants formant un cercle tout autour des bénévoles et, enfin, quelques Pokémons imposants entre les deux rangées ou sur les cotés, près des dresseurs. Une ou deux personnes pouvaient aussi prendre un petit Pokémon, de préférence mignon, sur leur épaule. Deux ou trois Pokémons, derrière, ne rentrant dans aucun de ces critères, parachèveraient très bien le cortège.
Sans que le chef ait besoin de le demander, tous les dresseurs, comme un seul homme, accrochèrent leur badge à la gauche de leur poitrine. Brown suivi le mouvement, avec un peu de retard. Il galéra à ouvrir l'épingle et à la piquer comme il faut dans son vêtement. Voyant qu'il peinait, il s'acharna encore plus, ce qui fit qu'il réussit encore moins. Après une bonne minute de lutte, il parvint enfin à accrocher son badge correctement. En relevant les yeux, il vit qu'absolument personne n'avait prêté attention à son combat silencieux contre son badge de l'E.d.S. Brown mit sa difficulté à accomplir une chose aussi banale sur le compte du stress.
Après les derniers réglages, la troupe se mit enfin en route. Brown jeta un regard inquiet à l'énorme Galeking que Michael avait sorti, mais, quand celui-ci lui tendis la main avec un sourire bienveillant, Brown oublia vite son appréhension et rejoignit le jeune homme sur le dos du Pokémon acier. Les trois autres hommes chevauchaient deux Galopas, deux hommes sur l'un et le dernier sur l'autre, tandis qu'une femme d'une trentaine d'années avait optée pour un Elecsprint. La dernière, quand à elle, était perchée sur un Luxray. Le chef, lui, tournoyait autour du groupe, dans les airs, volant sur son Airmure.
Chevaucher un Galeking n'était finalement pas si inconfortable. Son armure d'acier était lisse et offrait de nombreuses prises, et l'imposant Pokémon de plusieurs tonnes semblait à peine sentir les deux dresseurs qui étaient sur son dos.
Quand ils furent sortis de la ville, le bâtiment étant proche d'une des sorties, les Pokémons se mirent à courir. Malgré ce qu'avait dit Connor, le Galeking se déplaçait tout de même à une vitesse tout à fait acceptable, et, surtout, cela semblait ne lui coûter pratiquement aucun effort. Brown n'était pas sûr de pouvoir atteindre cette vitesse au plus fort d'un sprint. Quant à la tenir… Mais il était vrai que comparé aux Galopas qui pouvaient parfois faire des pointes à deux cents quarante kilomètres par heure, un Galeking n'était pas si rapide.
Brown apprécia de pouvoir se déplacer dans la campagne d'Alaubia, sans avoir pour une fois à faire d'efforts. Rapidement, Boulocity rétrécissait, dans son dos. On devinait encore la grande forêt, derrière la ville. Il profita du voyage pour apprécier le paysage. Ils étaient sortis des chemins balisés et chevauchaient dans les herbes hautes. C'est à peine si on apercevait des herbes un peu écrasées ou arrachées, prouvant que d'autres hommes aussi empruntaient parfois ce chemin. De temps en temps, on apercevait le bout de l'oreille cotonneux d'un Laporeille, émergeant des hautes herbes. Ils se dépêchaient de fuir quand ils voyaient arriver le groupe.
À mi-chemin, les dresseurs firent ralentir leurs Pokémons, afin que les moins endurants puissent récupérer. Ils reprirent leur rythme de départ, au bout de quelques minutes.
Finalement, après trois quarts d'heure de chevauchée, ils arrivèrent devant une colline, plantée là, seule, au milieu de la plaine. Les falaises étaient très escarpées, mais une route, taillée directement dans la colline, s'enroulait tout autour, permettant d'accéder sans trop de difficulté au sommet.