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Route 66 [Fic commune] de Resistance



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» Auteur : Resistance - Voir le profil
» Créé le 25/02/2013 à 01:30
» Dernière mise à jour le 25/02/2013 à 01:30

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Ch. 12 Prises de conscience (Khimeira)
Résumons la situation.
Au début de ce pont nous étions quatre, il y avait sept balles dans le Desert Eagle et un caddie rempli de choses tellement succulentes qu'on avait de quoi bien manger (miracle) pendant au moins un mois.
Et il a fallu qu'ils attaquent. Ils ont fait un coup en traître de toute beauté. Et maintenant? Séparés en deux paires, l'une avec tout, l'autre qui n'existe peut-être même plus.
D'un côté, Linda et moi. On m'a casé avec le plus gros bras cassé que l'Illinois ait jamais pu porter (et encore, je suis très gentil), avec pas moins de quinze kilos de bouffe dans le caddie qui (grâce à Linda il faut l'avouer) était encore intact, ainsi que, pour armes, un fusil-harpon et un Desert Eagle contenant quatre balles. Pourquoi quatre balles? Tout simplement parce qu'il m'a fallu trois balles pour descendre ce Laggron de mes deux qui a rendu Ambre inconsciente en lui injectant du AB-6.
De l'autre, Dem et Ambre, qui sont maintenant dans le Mississippi, sans doute morts à l'heure qu'il est.
J'arrive toujours pas à comprendre comment ils ont pu savoir que nous passions par St Louis. Etait-on là au mauvais endroit, au mauvais moment? Est-ce que c'était prévu, un piège qu'on nous a tendus pour nous ralentir? Ou alors un moyen de pression, pour qu'on finisse par se jeter les uns sur les autres?
Quoiqu'il en soit, j'étais désormais seul avec Linda. Ce qui signifiait que je devais me taper tout tout seul.
A moins que... Oui. OUI!
Je sais ce que je vais faire. Et elle va enfin comprendre qu'elle va devoir se battre pour sa survie, et également la nôtre, celle de Dem, celle d'Ambre et la mienne.
_______________________________________
Le bruit des roues du caddie. C'est la seule chose que nous entendions.
Dans cette immensité désertique, là où les hommes ne veulent plus aller, sur cette route insalubre car impratiquée depuis des années déjà, nous étions deux. Tout seuls, avec un caddie rempli de nourriture, cette chose devenue maintenant tellement rare que j'avais entendu parler d'émeutes, notamment à Chicago, pour simplement quelques boîtes de conserve.
Le paysage était assez beau à voir, toutefois: malgré l'omniprésence du désert, donc du sable et de l'absence de vent, et d'une chaleur étouffante (une quarantaine de degrés au compteur), l'idée d'une étendue de sable, presque infinie, qui m'entourait était quelque chose de magnifiquement beau. On était presque face à face avec la nature elle-même tant la sensation de solitude était présente.
Car oui, nous étions seuls. Totalement seuls. Aucun humain n'osait s'aventurer sur cette route de peur de se perdre, alors qu'il suffit de suivre la route pour arriver au camp de résistants. Les Pokémon, eux, n'étaient pas près de nous aider: en temps de guerre, c'était plutôt "marche ou crève", et dans leur cas la deuxième possibilité était très souvent utilisée.
Car oui, désormais les morts se comptaient par millions. Pas plus tard que ce matin, en arrivant à Saint Louis, j'avais pris un journal histoire de me mettre au courant de l'actualité (car oui, depuis notre départ nous n'avions jamais l'occasion de lire les journaux, car vivant dans l'urgence). Le nombre de morts était alarmant: on comptait 1 million de morts aux Etats-Unis et rien qu'aux Etats-Unis, et les chiffres en Europe étaient d'environ 5 millions de morts également.
En quelques mois, depuis l'armistice en novembre 2160, il y a un peu plus d'un an seulement, on comptait quasiment 50 millions de morts. Et ce chiffre ne faisait qu'empirer.
Revenons au sujet.
Cela faisait une heure, deux peut-être que nous étions en train de marcher, Linda tenant le caddie et moi, menant la marche, tenant le fusil-harpon entre les mains et surveillant les alentours, guettant l'arrivée de ce qui serait capable de nous découper en rondelles, voire pire.
Aucun de nous deux n'avait émis un seul mot depuis la reprise de notre voyage. Lorsque j'avais annoncé à Linda que nous repartions sans Ambre et Dem, elle avait suivi sans un mot. Je trouvais presque ça étrange de sa part. D'habitude, elle aurait discuté la décision, gueulé son indignation comme elle sait si bien le faire.
Mais là, rien. Elle n'avait rien dit. Comme si elle ne voulait pas parler. Elle ne voulait pas me répondre.
Elle avait peur, cela se voyait. Peur de moi.
Le silence était donc assez pesant, il faut le dire. La chaleur étouffante, anormale en ce mois de janvier dans cet hémisphère, n'arrangeait en rien les choses. Et le bruit du caddie, roulant à notre vitesse, devenait presque stressant à force. J'en venais à regretter les moments où Dem coupait le silence pour balancer des phrases pour ne rien dire. J'en viendrais presque à supplier Linda pour qu'elle se décide à parler.

-Dis, Tennessee...

Elle lit dans mes pensées, c'est pas possible! Au moment exact où je regrette qu'elle n'ait pas pris la parole depuis deux heures et l'incident sur le pont, elle se met à me questionner!

-Oui?
-Tu sais que tu n'as toujours pas répondu à mes questions?

Je savais qu'elle allait y venir. Les deux questions, l'une sur mon passé, l'autre sur le sens de la vie selon moi. Les deux questions auxquelles je n'avais absolument pas envie de répondre. Mais vraiment aucune envie.
Je me décidai donc, et lui lançai, voulant impérativement en finir avec ces conversations et ne voulant impérativement pas répondre:

-Et alors? J'ai choisi de ne pas y répondre, c'est qu'il y a bien une raison.
-Le problème, c'est que tu es en train de nous oublier, nous. Tu ne révèles même pas ton passé, tu es à deux doigts de nous snober... Qu'est-ce qui t'est arrivé dans ton passé pour que tu refuses à ce point-là de lancer ne serait-ce qu'un mot et continuer dans une conversation tout sauf sérieuse? T'as tué quelqu'un ou quoi?

Trop, c'était trop. Il fallait que je lui raconte mon passé. Mais en même temps, pourquoi raconter son passé à une fille qui n'a sans doute jamais fait de sa vie, à part voler des voitures? Qui ne sait même pas se défendre?
J'étais tiraillé entre l'envie de lui raconter ma vie, histoire qu'elle comprenne, et l'envie de lui montrer à quel point c'était atroce d'avoir dans son équipe quelqu'un qui ne sait pas combattre alors que tu t'es débrouillé des années tout seul sans aucun problème. Puis je trouvai une alternative qui me sembla convenable. J'aurai l'un avec l'autre, mais Linda risque de m'en vouloir pendant quelques jours, quelques semaines au pire. Allez! Qu'importe.

-D'accord, t'as gagné. Mais je ne révèlerai mon passé qu'à une seule condition.

Elle était intéressée. Parfait. J'enlevai alors mon T-Shirt, laissant apparaître le corps filiforme que je ne regardais jamais, que je ne cherchais pas à sublimer.

-C'est quoi? lança-t-elle.
-Je veux que tu me frappes aussi fort que tu peux.

Elle recula d'un pas sur cette phrase. Je m'attendais à cette réaction.

-P... Pourquoi?
-Ne cherche pas à comprendre et frappe-moi!
-Mais... Tennessee...
-Tu me hais, je le vois dans ton regard. Tu veux me tuer pour tout ce que je t'ai fait subir, tout ce qui s'est passé depuis le début de notre aventure. Tu veux sans doute que j'arrête de faire mon psychopathe. Et enfin, tu veux que je réponde à tes questions.

Les bras lui en tombèrent. Parce qu'elle pensait que je ne l'avais pas deviné? C'est étrange, elle aurait dû le savoir pourtant.
Je pris alors une grande inspiration, et lançai:

-Si tu veux tout ça, alors frappe-moi. Aussi fort que tu peux. Alors à ce moment-là, je répondrai à ce que tu veux comme question.

Elle sembla réfléchir. C'est bon, soit elle me frappait et j'avais enfin l'occasion de me faire passer pour évanoui de sorte à ce qu'elle fasse un combat seule, soit elle ne me frappait pas et je ne l'entendais plus jusqu'à la fin du voyage. C'était deux possibilités qui me semblaient extrêmement convenables.

-Promets-moi que tu ne me frapperas pas en retour.

Je ne garantis rien. Tant que Linda ne me frappe pas, je ne dirai rien. Point trait.

-Frappe-moi, on verra ensuite.

Elle prit une grande inspiration, s'avança et s'arrêta net.

-Je ne peux pas.

Elle insistait, cela se sentait. Elle ne voulait pas frapper. Comme si elle se sentait coupable. Je décidai donc de prendre les choses en main.
Je m'approchai lentement d'elle, posai la main sur son épaule. Elle me regarda dans les yeux, l'air de vouloir savoir ce qu'elle va devenir.
Je passai ma main sur son visage pour décaler la frange, histoire de voir ses yeux bleus océan. C'est fou ce qu'elle pouvait être belle, en plus. Dommage qu'elle ne sache pas se défendre, elle aurait fait une véritable guerrière elle aussi, comme Ambre.
Brusquement, mes lèvres se collèrent contre les siennes, et s'en suivit un baiser assez spécial. Elle ne s'y attendait pas, je n'avais pas l'habitude de le faire, cela donnait un résultat plutôt surprenant.
Cela ne dura pas très longtemps, d'ailleurs, puisque Linda eut un mouvement de recul très brusque. Et c'est à ce moment-là qu'elle m'asséna un coup de poing d'une rare intensité au niveau de la poitrine.
Je reculai, en me tenant l'endroit où elle avait frappé. Pour quelqu'un qui ne savait pas se battre, elle avait dû y mettre du coeur parce que ça faisait assez mal.

-T'es complètement malade?? Tu crois que t'allais pouvoir m'embrasser comme ça en plus? CONNARD!

Et un deuxième coup de poing. Sauf que celui-ci je l'arrêtai très facilement et me relevai comme si rien ne s'était passé.
Elle paniqua. Elle savait qu'elle était allée trop loin.

-Tu vois? lançai-je. Tu ne peux pas ne pas frapper.
-Oui, mais... C'est pas pareil! Tu m'as embrassée, merde!
-Pourquoi tu t'es défendue?
-Parce que... Pour ma survie! J'ai cru que t'allais me violer, voire pire!
-Alors pourquoi tu ne fais pas la même chose avec les Pokémon?

J'avais lancé la phrase. La seule phrase à laquelle je voulais qu'elle réponde.

-T'es vraiment pas croyable, lança la jeune fille.

Je plaçai mon regard dans le sien.

-Vous revenez tout le temps à la même question, tout le temps, sans cesse, tous les trois vous me faisiez le même reproche, que je ne savais pas combattre donc que je n'avais aucune espèce d'importance à vos yeux!
-On a fait des efforts pour rester en vie pendant tout ce temps, alors que toi tu n'as pas fait grand-chose.
-C'est toujours les mêmes réflexes, avec vous, hein! Toujours la même chose, j'en ai clairement marre que je sois la fille qui ne fout rien dans le groupe!
-Alors fais des efforts, qu'est-ce que tu veux que je te dise?
-Je ne donnerai pas le premier coup.
-Tu l'as bien fait contre moi, alors pourquoi pas contre eux?

Elle ne dit rien. Je continuai alors:

-Je sais pas si tu te rends compte qu'avant on était 4, mais on était que 3 à réagir. Maintenant que Dem et Ambre ne sont pas là, on se retrouve tous les deux. Et comme par hasard, y'a que moi qui suis capable de réagir en temps d'attaque. Si toi t'en as marre qu'on te répète toujours la même chose, sache qu'on en a marre, du moins j'en ai marre de te voir fuir n'importe quel conflit.

Elle était silencieuse, et au bord des larmes.

-Et tant que tu ne comprendras pas que tu sais combattre toi aussi, je ne répondrai pas à tes questions.

Nouveau silence. Je savais comment Linda se sentait: elle m'en voulait. Parce que je lui forçais la main. Parce que je voulais lui faire faire ce qu'elle ne voulait absolument pas. J'avais progressivement baissé le ton.

-Certes, Ambre et Dem ne sont plus là. Mais au point où nous en sommes, ce n'est plus la peine de te défiler et de croire qu'on va faire les choses à ta place.

Elle me regardait dans les yeux avec un air plein de rage. Je savais qu'elle voulait se lâcher sur moi.

-Prends le caddie, on se casse.
____________________________________
La température extérieure était étouffante à deux heures de l'après-midi. En même temps, il faisait 114 degrés Fahrenheit (NDA: A peu près 46 degrés Celsius) et le peu d'humidité depuis quelques jours nous rendait presque malade.
Le problème était également que la luminosité était trop importante, et la fatigue se faisait ressentir depuis quelques jours. Je n'en pouvais plus, je n'avais pas dormi depuis trois jours car j'étais resté faire le guet à chaque fois et mes jambes étaient pas loin de me lâcher.
Et Linda qui ne réagissait pas, qui ne demandait pas si ça allait bien, qui devait m'en vouloir depuis la réplique de tout à l'heure. Elle ne voulait plus me parler, et c'était tant mieux.
Soudain, alors que cela faisait bien deux heures que le silence s'était installé et que le seul bruit à des kilomètres à la ronde s'avérait être le bruit des roues du caddie sur la goudron de la Route 66, nous entendîmes un cri. Un cri caractéristique.

-Un Pokémon, lança Linda.
-Bravo, je ne te savais pas aussi perspicace...
-Tu peux te la fermer, toi?

Eh, mais c'est qu'elle a enfin appris la répartie! C'est pas trop tôt!
Je m'apprêtai à m'avancer, puis pesai le pour et le contre. Je n'avais presque plus d'énergie, quasiment tout avait été monopolisé pour la bataille sur le pont. Il fallait que je dorme si je ne voulais pas tomber KO lors du combat. Et il fallait que Linda intervienne, qu'elle comprenne que si elle ne réagissait pas rapidement on allait soit perdre toute la bouffe qu'on avait eue à Saint Louis et revenir au point de départ, soit y passer, et perdre toute la bouffe qu'on avait eue à Saint Louis. En gros, si on perdait la nourriture qu'on avait, la caddie rempli plus qu'à ras bord de ce qui nous permettrait de subsister, c'en était fini de nous.

-Tennessee?

J'essayai d'avancer, mais mes jambes ne me répondaient plus. Je ne pouvais plus faire le moindre mouvement.
Je pus pourtant voir ce qui s'approchait de nous. Un Grahyena, qui venait sans doute de sentir l'odeur de la nourriture, et qui allait assez rapidement.
Je n'eus pas le temps de voir plus, puisque mes jambes me lâchèrent d'un seul coup et je me retrouvai, allongé sur le goudron, incapable de faire le moindre mouvement.
Ensuite, ce fut le trou noir.
_______________________________
Je ne savais pas combien de temps j'ai été par terre. En tout cas, ce que je savais c'est que ma tête me faisait atrocement mal, que j'étais tombé à cause de la fatigue, laissant Linda avec le caddie rempli de victuailles et un Grahyena enragé... Oh non. Faites qu'elle n'ait pas fait de conneries.
Je me relevai avec grande difficulté, regardant par la même occasion par terre, là où une petite flaque de sang, désormais séché, se faisait voir. Je touchai ma tête, et sentis une vive douleur. Voilà donc d'où venait mon mal de crâne.
Au moment où je fus complètement relevé, j'essayai de me tenir à quelque chose, et le premier objet qui me tomba sous la main fut le caddie. Je m'accrochai à l'engin transporteur de victuailles, et c'est quand je décidai de regarder dedans que mes yeux s'illuminèrent.
Rien n'avait été volé. Tout était encore à sa place.

-Linda, tu es géniale! lançai-je.

La seule réponse que j'eus fut un sanglot. Celui de Linda, sans aucun doute. Un sanglot assez profond, qui me fit comprendre que Linda ne se sentait vraiment pas bien.

-Linda?

Nouveau sanglot. Je repassai de l'autre côté du caddie, pour la voir contre le caddie, prostrée, la tête dans les mains. Je cherchai du regard le Pokémon qui nous avait attaqué, pour le voir juste devant le caddie, inerte.
Je m'approchai du Pokémon, non sans crainte de me faire attaquer, mais c'est quand je le touchai que je compris.
Le Grahyena était mort. Linda l'avait tué.
C'est vrai qu'en y voyant de plus près, il aurait été surprenant qu'il ne soit pas mort: une flaque de sang assez imposante entourait le Pokémon. Aucune trace au niveau du visage, presque intact. Seule une ouverture de quelques centimètres au niveau du thorax et le fusil-harpon teinté de sang me firent comprendre que Linda l'avait utilisé, et avait largement réussi son coup.
C'était pour ça qu'elle pleurait. Elle avait tué un Pokémon, ce qu'elle avait dit qu'elle ne ferait jamais. Elle avait pour une fois agi contre sa volonté.
Et c'est ce qui nous avait, en quelque sorte, sauvé la vie.

-Ecoute, Linda...
-Ne m'approche pas, lança-t-elle dans un sanglot.

Je fis un pas vers elle. Elle nous avait sauvé la vie, il fallait que je la remercie.

-Arrête!
-Linda, tu dois comprendre!
-Je ne voulais pas!
-Mais tu l'as fait! Et en faisant ça, tu nous a sauvé la vie, à tous les deux. Non seulement tu as réussi à te défendre, mais tu as défendu ce qui pourrait nous aider à tenir pour le reste du voyage...
-JE NE VOULAIS PAS LE TUER!

Elle avait crié cette phrase sur un ton déchirant. Elle regrettait pleinement son geste, mais il fallait qu'elle comprenne qu'elle n'avait pas le choix.
Je me suis assis en face d'elle et ai remonté son menton pour pouvoir voir ses yeux.
Et je me suis aperçu que depuis le départ je ne l'avais jamais vu quand elle pleurait, mais le bleu de ses yeux ressortait magnifiquement. Les larmes créaient un reflet assez particulier, et ses cheveux auburn, couleur terre, créaient le deuxième univers. La mer déchaînée et la terre qui tente de recouvrir. J'étais surpris et admiratif devant la beauté de cette fille lorsqu'elle se mettait à pleurer.

-Ecoute, Linda. L'important est que tu nous ai sauvés la mise. Tu n'as fait que te défendre. Et plus que tout: tu as réussi à surmonter ta peur. Et ça je trouve ça impressionnant. Maintenant, on va pouvoir continuer le voyage. Dis-toi que les autres vont revenir, dis-toi que nous ne finirons pas ce voyage tout seuls.

Elle sécha ses larmes et me lança:

-Merci, Tennessee.

Je la regardai dans les yeux. Elle avait désormais un air déterminé. Elle voulait en finir avec ce voyage.

-Allez, on y va, lançai-je avec un sourire et en lui tenant la main.
________________________________________
Le soir était arrivé un peu trop vite: nous avions dû faire une dizaine de kilomètres, nous faisant parfois des petites blagues. L'ambiance était tout de suite plus ensoleillée, et malgré la chaleur étouffante on s'amusait et on souriait. Soudain, nous nous aperçûmes que le ciel avait rapidement viré à l'orange, de plus en plus foncé. Nous décidâmes alors de trouver un endroit pour dormir.
Après quelques minutes d'investigation, nous trouvâmes rapidement un endroit calme, où on pourrait ranger facilement notre nourriture. On plaça le caddie juste devant ce qui pourrait ressembler à un dolmen, puis on commença à faire un feu en regardant la nuit tomber, et la multitude de petits astres se placer dans le ciel.

-C'est beau, hein? répliqua Linda en fixant les étoiles avec un grand sourire.
-Ouais.

Les deux morceaux de viande, placés sur la pierre, chauffaient lentement, et nous en profitâmes pour discuter un peu.

-Tu sais que tu n'as toujours pas répondu à mes questions, Tennessee?

Ah. On y revenait encore, à ces questions. J'en connaissais les intitulés, et je savais parfaitement quoi répondre. Je préférai commencer par la question la plus évidente.

-Pour moi... La vie est quelque chose de très particulier, et quelque chose de très relié à la mort. Vois-tu, je pourrai définir notre existence, comme celle de n'importe quelle autre, comme un cercle. L'homme va naître, se développer, former d'autres êtres qui eux-mêmes se créeront leur cercle, et puis un jour, lorsque viendra le moment où l'homme aura réalisé tout ce qui a fait son bonheur, la boucle sera bouclée. S'en suivra ensuite un autre cycle, pendant lequel l'homme pourra réaliser une autre vie.
-Tu crois à la vie après la mort?
-J'étais persuadé, lorsque j'étais plus jeune, que mon Lokhlass était mon ange gardien. Je le crois toujours, d'ailleurs. C'est lui qui m'avait sauvé, lorsque j'ai eu un accident qui a failli me coûter la vie.

Linda me regardait d'un air curieux. Elle voulait en savoir plus. Bon, tant que ça n'allait pas trop loin, ça allait.

-J'avais quinze ans. J'étais parti pour les vacances, sans mon père, pour la première fois, faire du surf sur la côte Est. Après trois jours, j'ai eu un accident.
J'étais parti au large après avoir pris une vague pendant trop longtemps, et je me précipitais sur les rochers. Au moment où j'ai cru mourir, j'ai été amené dans l'eau et je l'ai vu. Le Lokhlass qui m'avait sauvé la vie. Il m'a suivi partout durant les trois jours de surf qui ont suivi. Au bout du troisième jour, j'ai fini par le capturer. Je crois que c'était la seule chose qu'il voulait, me protéger, donc le fait qu'il soit tout le temps avec moi m'a fait comprendre que ce Pokémon était très particulier.

Je levai la tête et regardai les étoiles, avec une petite pensée pour mon Pokémon. Lui qui avait pris pour moi, sur la plage. Je fermai les yeux et fis un sourire. Il devait être bien, là-haut. Il devait savoir qu'il me protégeait.
Linda me regardait, quant à elle, avec un air surpris. Elle ne m'avait sans doute jamais vu comme ça. Peut-être était-ce parce que j'avais réussi à lui faire prendre conscience de ses capacités. Peut-être était-ce parce que nous avions - pardon, Linda avait - réussi à garder nos ressources de nourriture intactes. Mais en tout cas, j'étais heureux.

-Fais gaffe, le militaire, je vais te prendre ta part de bidoche si tu continues à regarder le ciel de cette manière sans faire attention.

J'émis un petit rire puis pris ma part de viande d'Aligatueur. Avec un peu de miel, ça faisait exactement l'effet que je m'imaginais: un véritable délice. Surtout lorsqu'on s'est battus pour l'avoir.
Nous continuâmes à rire un peu. Ca faisait longtemps que je n'avais pas ri comme ça. Peut-être était-ce à cause du fait que je pouvais maintenant compter sur Linda.
Mais nous ne cherchâmes pas à en savoir plus, et ma camarade partit dormir pendant que je veillais sur le chariot de nourriture. Je regardai tranquillement la nuit, l'astre lunaire qui réfléchissait ses rayons blancs sur le sol. Rien à l'horizon, mais il fallait que je surveille la nourriture. Il en dépendait de notre survie.
Je m'installai contre le caddie et pris le fusil-harpon à la main. Heureusement que je passais la main à Linda dans quelques heures, parce que ça allait être une longue, très longue nuit.