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Entre infini et au-delà de Cyrlight



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» Auteur : Cyrlight - Voir le profil
» Créé le 05/02/2013 à 08:47
» Dernière mise à jour le 03/09/2020 à 19:58

» Mots-clés :   Action   Drame   Fantastique   Mythologie   Suspense

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Chapitre 23 : Ensemble
« Ensemble, il n'y a plus rien à craindre
Ensemble, oui nous saurons repeindre
Le monde dans tes couleurs
Le monde sans tes douleurs
Et tu redeviendras l'auteur de ta vie »


Ensemble - Subdigitals



— J’avais tellement peur qu’il te soit arrivé quelque chose, souffla Cynthia en l’étreignant si fort qu’elle manqua de lui briser les os. Bon sang, mais où étais-tu passée ? Voilà plus de sept mois que tu as disparu ! La police t’a cherchée dans tout Sinnoh pendant des semaines, nous étions morts d’inquiétude.
— J’avais laissé une lettre à votre intention, avant mon départ. Personne ne vous l’a remise ?
— Si, bien sûr, mais... Kathy, fuir comme tu l’as fait était tellement risqué ! Tu ne connaissais presque rien du monde extérieur, et on ne sait toujours pas ce qui est arrivé à ta famille, ni pourquoi. Tu...
— C’est justement pour ça que je suis partie. J’ai suivi votre conseil. Je sais que vous n’aviez sans doute pas prévu que je m’échapperais si vite du Centre Pokémon, mais je ne pouvais pas rester là-bas les bras croisés, à attendre que le temps passe. Je serais devenue folle, sinon, et puisque vous venez vous-même de souligner que l’enquête n’a pas avancé pendant mon absence, ça me conforte dans l’idée que j’ai eu raison d’agir comme je l’ai fait.
— C’est-à-dire ?

Cynthia avait fini par relâcher Cassy pour s’installer sur une chaise, les jambes élégamment croisées. Carolina, qui avait désormais la preuve que l’adolescente n’était pas une groupie hystérique, déposa en silence une tasse d’infusion devant sa petite-fille, afin de ne pas interrompre leur conversation.

— J’ai quitté clandestinement la région, et le hasard m’a plus ou moins conduite à Kanto, où j’ai intégré l’École des dresseurs de Jadielle, raconta Cassy. J’y suis restée quelques semaines, après quoi j’ai été embauchée comme assistante au laboratoire du professeur Chen, qui cherchait quelqu’un pour s’occuper des pokémon. Afin que personne ne soupçonne quoi que ce soit à mon sujet, je me suis inventé une fausse identité, celle de Cassy Rilène, mais j’ai dû abandonner précipitamment le Bourg-Palette quand mon secret a bien failli être éventé. Je ne suis pas repartie les mains vides, cependant : je pense avoir une piste.
— Laquelle ?
— Avant de m’enfuir, j’ai avoué toute la vérité à Régis Chen, le petit-fils du professeur, et c’est lui qui en est arrivé à cette conclusion. Autrefois, l’agent Jenny m’a demandé si des gens étaient susceptibles d’en vouloir à mes parents, et j’ai soutenu que non. C’était probablement une erreur. Il y a peu, je me suis cassé la cheville, et les radios que j’ai passées au Centre Pokémon ont révélé que je n’avais pas treize ans, comme je le croyais, mais quinze. Cette découverte, couplée au fait qu’Éric et moi avons grandi à l’écart de la civilisation, a incité Régis à supposer que ma famille se cachait dans le but d’échapper à quelque chose, ou plus vraisemblablement à quelqu’un, et ce depuis avant ma naissance.

Cynthia ne releva pas immédiatement. Elle but d’abord une gorgée d’infusion, puis pinça son menton entre son pouce et son index, signe qu’elle se concentrait. Au terme d’une longue réflexion, elle hocha la tête. À ses yeux, la théorie de Régis se tenait.

— J’imagine que si tu es de retour à Sinnoh, c’est pour tenter d’en avoir le cœur net, dit-elle à Cassy. Est-ce que tu as une idée de la façon dont tu vas procéder ?
— Je vais commencer par retourner à la ferme. Si je dois trouver quelque chose, ce sera forcément là-bas, même si j’ignore exactement ce que je cherche.
— Hmm... Entre la police qui continue à se demander où tu es passée et de potentiels ennemis, ça équivaut quasiment à se jeter dans la gueule du grahyéna. À leur place, en tout cas, c’est l’endroit sur lequel je garderais constamment un œil, au cas où tu déciderais de réapparaître.
— Ce n’est pas comme si j’avais le choix. Je vous remercie pour tout ce que vous avez fait pour moi, Cynthia, mais je vous en prie, ne tentez pas de m’arrêter. Régis a déjà essayé, et...
— Qui parle de t’arrêter ? Je songeais plutôt à te servir d’escorte et à monter la garde pendant que tu mènerais ta petite enquête.
— Vous... Vous feriez ça ? bredouilla Cassy.
— Tu préfèrerais que je te conseille d’attendre bien sagement que le coupable se livre de lui-même à l’agent Jenny et passe aux aveux ? Si la police n’a rien trouvé en l’espace de huit mois, ce n’est pas maintenant qu’ils découvriront quelque chose.

Cassy adressa à la Championne un regard empreint de gratitude, auquel celle-ci répondit en étendant la main par-dessus la table pour tapoter affectueusement celle de l’adolescente. Elle acheva ensuite le contenu de sa tasse d’une traite, puis déclara qu’elles feraient mieux de se mettre en route dès à présent, si elles voulaient atteindre la ferme le plus tôt possible.

— Je suis venue avec Galopa, informa Cassy. Il m’attend sur la route 215. Il a évolué très récemment, c’est d’ailleurs à cause de ça que je me suis blessée. Avec lui, je suis sûre que nous pouvons...
— En fait, l’interrompit Cynthia, j’ai beaucoup plus pratique qu’un Galopa, et surtout plus discret.

Après que la jeune femme eut pris congé de sa grand-mère et que Cassy l’eut remerciée pour son hospitalité, elles quittèrent le cottage. Une fois dehors, Cynthia saisit l’une de ses pokéball et la lança devant elle. Une magnifique créature ailée fit son apparition. Plutôt dodue, elle était dotée d’un corps blanc duveteux orné de triangles rouges et bleus.

— Un Togekiss, informa le Maître de Sinnoh. Tu en as déjà vu ?

Cassy secoua la tête en signe de dénégation. Elle n’avait pas non plus souvenance d’en avoir entendu parler. Elle fut saisie d’une légère appréhension au moment de s’installer sur son dos, car elle n’avait jamais chevauché un pokémon vol, mais Cynthia lui assura qu’il était très docile, et nettement plus confortable qu’un Galopa.

L’adolescente en eut la confirmation à la seconde où elle se retrouva à califourchon. Le plumage moelleux du Togekiss formait une sorte de coussin sous son séant, bien loin de la raideur musculeuse du cheval de feu. Cynthia prit place juste devant elle et recommanda à Cassy de s’agripper à sa taille pendant toute la durée du vol.

L’ascension fut vertigineuse, et à maintes reprises, la jeune fille redouta de basculer dans le vide, qu’elle contemplait du coin de l’œil. Elle s’inquiétait cependant pour rien. Il était bien plus facile de tenir en équilibre sur un Togekiss que sur un Galopa, d’autant plus qu’elle se cramponnait de toutes ses forces au manteau de la Championne.

Cynthia n’avait pas non plus menti quant au fait que son pokémon était mieux adapté que celui de Cassy pour entreprendre un tel voyage. Sa vitesse brute était un peu moins élevée, mais puisqu’il évoluait dans les airs, il n’avait pas besoin de suivre des routes, des chemins ou d’effectuer des détours qui demandaient un temps considérable. Il volait droit devant lui, sans jamais rencontrer d’obstacle.

Enfin, presque... La chaîne montagneuse qui séparait Sinnoh en deux se dressait telle une immense barrière en travers de leur route. Plutôt que de contourner son sommet culminant, le Mont Couronné, Togekiss prit de l’altitude afin de le survoler. Cynthia révéla que si elles avaient dû le traverser à pied en passant par le labyrinthe de tunnels qui le parcourait, elles en auraient au moins eu pour une journée.

— Tu devrais regarder en dessous, conseilla-t-elle, et Cassy s’exécuta prudemment. Ce plateau en pierre que tu peux apercevoir, ce sont les Colonnes Lances. Puisque tu es une arcésienne pratiquante, je suppose que ce nom t’est familier, n’est-ce pas ?
— On dit de cet endroit qu’il est le premier auquel Arceus a donné naissance lorsqu’il a créé le monde, et que c’est à partir de là que Dialga et Palkia ont propagé le temps et l’espace autour d’eux. C’est également ici que Giratina a été jugé à la suite de sa mutinerie, et condamné à un exil éternel dans le Monde Inversé.
— Eh bien... Il semblerait que je n’aie rien à t’apprendre, tu connais visiblement la Pokible sur le bout des doigts.

Cassy ne releva pas, mais l’esquisse d’un sourire empreint de fierté se dessina sur son visage, tandis qu’elles poursuivaient leur vol en direction de la ferme. À l’approche de Mérolia, Togekiss réalisa un léger crochet afin de contourner la ville, où un pokémon aussi rare que lui n’aurait pas manqué d’attirer l’attention s’il avait été aperçu dans le ciel.

Il se posa quelques minutes plus tard sur les terres qui constituaient la ferme des Granet. Cassy reçut un violent coup au cœur en contemplant les prés vides et les champs à l’abandon. Les récoltes avaient pourri, faute d’avoir été ramassées à temps, les terrains étaient en friche, les mauvaises herbes proliféraient librement, les Cornèbre évoluaient à leur guise sans personne pour les effrayer...

Cette vision était horrible pour l’adolescente qui avait toujours connu ce paysage soigneusement entretenu, mais elle la préparait à l’épreuve plus terrible encore qui l’attendait à l’intérieur de la maison. Cassy allait devoir pénétrer dans le salon, dont l’image n’avait cessé de hanter ses cauchemars depuis le jour où elle l’avait découvert maculé de sang.

— Est-ce que tu veux que je t’accompagne ? s’enquit Cynthia après avoir libéré son Roserade et son Givrali. Mes pokémon peuvent très bien se charger seuls de surveiller les environs.
— Non, je... Ça va aller.

Le tremblement contenu dans la voix de Cassy sous-entendait le contraire, mais la Championne fit mine de n’avoir rien remarqué. La jeune fille prit une profonde inspiration afin de rassembler son courage, puis se dirigea vers l’entrée de la maison. La porte n’étant pas verrouillée, elle pénétra dans le hall sans la moindre difficulté.

Ce fut plus délicat au moment de pivoter face au battant clos du salon. C’était dans cette pièce que sa vie avait basculé du jour au lendemain, que Cassy avait entraperçu le vrai visage de l’enfer, et voilà qu’elle s’apprêtait à y remettre les pieds. Un frisson la parcourut lorsque sa main se referma sur la poignée.

Il n’était pas encore trop tard pour renoncer, battre en retraite et demander à Cynthia d’examiner les lieux à sa place, mais Cassy savait que cette tâche lui incombait. Si Éric avait laissé le moindre indice derrière lui, elle seule serait capable de le trouver, parce qu’elle connaissait son frère mieux que quiconque.

Le panneau émit un grincement lugubre en pivotant sur ses gonds, qui allait de pair avec l’état sordide de la pièce située juste derrière. Cassy réprima un haut-le-cœur au moment de franchir l’encadrement. Bien qu’elle ait déjà assisté à ce spectacle atroce par le passé, elle ressentit le même effroi lorsqu’il se dévoila à elle pour la deuxième fois.

Le sang qui recouvrait les murs, le tapis et une partie du mobilier avait séché depuis longtemps, passant d’un rouge carmin à un brun terne, mais sa quantité était toujours aussi impressionnante. Quant à son odeur ferrugineuse, elle avait été chassée par celle du renfermé. La poussière manqua d’ailleurs d’arracher un éternuement à Cassy.

Bravement, elle fit un pas vers l’avant, puis un second. Chaque geste qu’elle exécutait requérait un effort considérable, car elle n’avait qu’une seule envie : se laisser paralyser par le dégoût et s’incliner face aux images des corps sanguinolents d’Éric et de ses parents qui menaçaient d’envahir son esprit.

La police avait beau n’avoir jamais découvert le moindre cadavre, comment espérer que les Granet puissent être encore en vie ? Ce salon témoignait d’une telle sauvagerie que Cassy n’imaginait pas que quiconque ait pu en réchapper.

Elle le fouilla malgré tout de fond en comble. Elle inspecta le plancher avec soin, roula le tapis pour vérifier que rien ne se cachait dessous, souleva les coussins mouchetés de sang, palpa le sofa... Tout cela en vain. Elle ne remarqua rien qui serait susceptible d’être considéré comme un indice.

Il fallait croire que même l’intelligence d’Éric ne lui avait été d’aucune utilité face à ce qui s’était déroulé dans cette pièce. Les épaules voûtées, la tête baissée, Cassy regagna le hall. Elle pensait éprouver du soulagement en quittant le salon, mais sa déception était telle qu’elle n’en fut nullement apaisée.

Avant d’avertir Cynthia de ses recherches infructueuses, l’adolescente décida de jeter un œil dans les autres pièces de la maison, à commencer par le bureau de son père. Elle y trouverait peut-être des documents ayant trait à la vie que ses parents avaient cherché à fuir en s’isolant dans cette ferme.

Au moment de pénétrer à l’intérieur, Cassy réalisa qu’elle n’avait encore jamais mis les pieds dans l’antre de son géniteur. Malgré sa bienveillance, il avait toujours interdit à ses enfants de le déranger lorsqu’il faisait ses comptes et s’occupait de la paperasse, deux tâches indispensables, selon ses dires, à la bonne gestion de la ferme. S’agissait-il vraiment de la vérité ou n’était-ce qu’un moyen de protéger ses secrets ?

Cassy actionna l’interrupteur et une ampoule grésillante, de faible intensité, s’alluma au plafond. La pièce, plutôt petite, ne contenait qu’un bureau, une étagère et un meuble de rangement. La jeune fille inspecta les trois, en quête d’elle ne savait quoi, mais ne trouva rien, pas même un certificat qui lui aurait révélé sa véritable date de naissance ou celle d’Éric.

Elle fut un bref instant intriguée par une enveloppe qu’elle découvrit dans un tiroir. Les années avaient abîmé et corné le papier, qui avait été tranché d’un angle à l’autre par la lame acérée d’un couteau. Le sceau, en revanche, était encore intact. En cire jaune, il représentait un « G » majuscule. G... comme Granet. Pouvait-il s’agir du courrier d’un parent éloigné ?

Cassy jeta un regard en dedans, mais la lettre avait disparu, à l’instar de l’adresse, écrite avec une encre qui n’était visiblement pas faite pour résister aux affres du temps. Elle poussa un soupir, dépitée à l’idée de quitter la ferme bredouille. Si elle ne trouvait rien ici, où découvrirait-elle quoi que ce soit ?

Il lui restait encore l’étage à explorer, mais elle avait renoncé à se bercer d’illusions. Une rapide fouille de la chambre de ses parents lui indiqua qu’il n’y avait rien ici non plus, et elle passa devant la sienne sans même lui accorder un coup d'œil. Y pénétrer n’aurait fait qu’ajouter à sa nostalgie.

Quoique résignée, elle poussa tout de même la porte d’Éric. Elle s’apprêtait à balayer la pièce avec un regard blasé quand elle sentit son corps se raidir. Bouche bée, elle porta une main à ses lèvres et resta figée pendant une vingtaine de secondes, avant de se ruer vers la fenêtre qu’elle ouvrit avec violence.

— Cynthia ! s’égosilla-t-elle. Cynthia, venez vite !

Presque aussitôt, des bruits de pas précipités résonnèrent au rez-de-chaussée, puis dans l’escalier. Un instant plus tard, la Championne la rejoignait. À l’instar de Cassy, elle s’immobilisa, les yeux ronds, en apercevant l’état de la chambre d’Éric.

Tout était absolument sens dessus dessous. Les livres avaient été arrachés à la bibliothèque pour être jetés à terre, les instruments que le garçon utilisait pour mener ses expériences s’étaient tordus en heurtant le sol après que sa table de travail eut été renversée, des éclats de verre, vestiges de béchers et de tubes à essai, jonchaient le plancher...

— Nom d’Arceus ! s’exclama Cynthia lorsqu’elle eut recouvré l’usage de la parole, une fois sa surprise dissipée. Que s’est-il passé, ici ?
— Je suppose que ce n’est pas l’œuvre de la police, marmonna Cassy. Cet endroit était encore intact quand je suis venue prendre quelques affaires, le jour où je me suis enfuie.
— Le responsable devait chercher quelque chose, mais quoi ? Qu’est-ce qui pourrait faire l’objet d’une telle convoitise, surtout dans la chambre d’un adolescent ?
— Les recherches d’Éric, peut-être. Je sais que ça semble difficile à croire, étant donné son jeune âge, mais le professeur Chen lui-même aurait pâli d’envie devant son génie, s’il l’avait connu. Mon frère était doté d’un incroyable sens de l’observation, et surtout, il était capable d’inventer tout et n’importe quoi. Quelles que soient les expériences qu’il menait, il finissait toujours par obtenir des résultats.
— Tu penses qu’il aurait pu découvrir quelque chose d’important ? Ou susceptible d’avoir de la valeur ?
— En admettant que ce soit le cas, comment quelqu’un l’aurait-il appris ? Nos parents limitaient nos contacts avec le reste du monde, et en plus de ça, Éric s’est toujours montré particulièrement discret. Même nous, nous savions rarement sur quoi il travaillait. Qui plus est, une ferme est sans doute le dernier endroit où l’on s’attendrait à rencontrer un scientifique.

Cynthia dut concéder à Cassy que sa logique se tenait. Elle parcourut une nouvelle fois la pièce du regard, avant de soupirer :

— En tout cas, quoi que voulait celui qui a fait ça, il l’a certainement trouvé.

Cassy ne réagit pas tout de suite, mais elle finit par secouer la tête en signe de dénégation. Rien n’était moins sûr. Aucun voleur, tueur ou que savait-elle encore ne pouvait être plus intelligent que son frère.

Elle avança de quelques pas et s’accroupit au milieu des tessons de verre, qu’elle repoussa avec la main. Son pouce s’entailla au contact d’un morceau particulièrement tranchant. Elle le porta à sa bouche pour suçoter le sang, tout en comptant les lattes du parquet à partir du mur.

Parvenue à la sixième, Cassy mit un genou à terre, sous l’œil désemparé de Cynthia, et la frappa brutalement avec le poing. La planchette se souleva légèrement pour enclencher un mécanisme secret, qui dévoila une cavité dans la plinthe.

— C’était ici qu’Éric rangeait ses bonbons, autrefois. Il avait fabriqué ce système sous prétexte que je passais mon temps à lui en dérober, mais ça n’a servi à rien, étant donné que j’ai fini par découvrir sa cachette un jour où je l’observais par l’embrasure de la porte.

Cassy s’allongea en chien de fusil sur le sol et enfonça son bras à l’intérieur du trou, si étroit qu’il était difficile d’y remuer autre chose que les doigts. Elle tâtonna le vide et la poussière pendant plusieurs secondes avant que son auriculaire rencontre une liasse de feuilles, enroulées sur elles-mêmes. L’adolescente s’en saisit et les tira à l’air libre, où elle ôta l’élastique qui les maintenait ensemble afin d’étudier leur contenu.

— Je crois que je tiens quelque chose..., déclara-t-elle à mi-voix, par peur de s’emballer.
— Pourquoi ? Qu’est-ce que c’est ?

Cassy se redressa, ses vêtements blanchis par la saleté qu’elle avait balayée par terre, et tendit les documents à Cynthia, qui les consulta d’un air perplexe. Elle lança ensuite un regard interrogateur à la jeune fille.

— Ces notes sont codées, expliqua Cassy. Éric n’aimait pas que quiconque, c’est-à-dire moi, mette le nez dans ses expériences, mais jamais il n’a été jusqu’à crypter son travail. C’est la première fois que je vois ça, et si je n’ai encore aucune idée de la façon dont je vais m’y prendre pour déchiffrer ces pages, je ne m’arrêterai pas avant d’avoir réussi. J’ignore ce qu’elles contiennent, mais j’ai un pressentiment : si je dois découvrir quelque chose ayant trait à disparition de ma famille, ce sera là-dedans.