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Entre infini et au-delà de Cyrlight



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» Auteur : Cyrlight - Voir le profil
» Créé le 04/02/2013 à 08:48
» Dernière mise à jour le 01/09/2020 à 20:41

» Mots-clés :   Action   Drame   Fantastique   Mythologie   Suspense

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Chapitre 22 : I learned from you
« I learned from you that i do not crumble
I learned that strength is something you choose
All of the reasons to keep on believin' »


I learned from you - Miley et Billy Ray Cyrus



Quand Cassy vit enfin la ville de Carmin-sur-Mer se découper à l’horizon, elle poussa un soupir de soulagement. Elle avait bien cru qu’elle ne l’atteindrait jamais. Des jours entiers lui avaient été nécessaires pour parcourir la distance qui séparait la cité du Bourg-Palette.

À cause de sa cheville blessée, elle ne pouvait mener Galopa autrement qu’au pas. Qui plus est, et cela n’arrangeait rien à ses conditions de déplacement, elle était obligée de monter à cru. Sa selle n’étant plus adaptée à la nouvelle morphologie de son pokémon, qui en avait de surcroît cassé la sangle au cours de son évolution, Cassy l’avait laissée au laboratoire.

Ils poursuivirent leur route jusqu’au port, où la jeune fille mit douloureusement pied à terre afin d’acheter une place à bord du prochain ferry en partance pour Sinnoh. Rejoindre Rivamar prendrait un après-midi entier, mais loin de s’impatienter, Cassy songea que le voyage lui permettrait de se reposer un peu, elle qui avait à peine fermé l’œil au cours des dernières nuits.

Elle resta un long moment sur le pont avec Galopa, les yeux rivés sur la surface bleutée de la mer qui s’étendait à perte de vue, sans tenir compte des nuages gris qui s’amoncelaient au-dessus du bateau. Elle ne put cependant continuer à les ignorer lorsqu’une violente averse éclata, les obligeant à trouver refuge à l’intérieur.

Cassy était assise sur un siège relativement inconfortable, occupée à manger une barre de céréales tirée de ses réserves de nourriture qui s’amenuisaient au point qu’il ne lui resterait bientôt plus rien, quand les haut-parleurs fixés au plafond grésillèrent. Elle se raidit aussitôt, encore marquée par le mauvais souvenir de son seul et unique voyage en ferry.

Il n’y avait toutefois pas matière à s’alarmer. Le commandant tenait juste à informer ses passagers qu’en raison de la pluie, ils auraient probablement un léger retard et ne débarqueraient pas à Sinnoh à l’heure initialement prévue. Cassy ne s’en formalisa pas, son unique préoccupation étant d’arriver à destination sans encombre.

Elle avait déjà réfléchi à ce qu’elle ferait sitôt qu’elle serait de retour dans sa région natale. Convaincue par les recommandations de Régis, elle s’efforcerait de retrouver Cynthia. C’était d’ailleurs pour cette raison qu’elle avait opté pour un ferry qui se rendait à Rivamar, et non à Joliberges. Si l’une était plus proche de Mérolia, l’autre se trouvait à proximité de l’Île du Lys, où siégeait l’Élite des Quatre dont la jeune femme était le Maître.

Cassy n’avait aucune idée de ce qui s’était passé à Sinnoh pendant son absence. Des semaines durant, elle avait jeté un coup d’œil discret aux journaux que lisait le professeur Chen, sans jamais y découvrir la moindre mention de l’affaire Granet. La presse régionale ne se souciait visiblement pas d’un crime commis dans les environs d’une petite bourgade perdue, de l’autre côté de la mer.

L’enquête de l’agent Jenny avait peut-être fini par progresser, en son absence. Si tel était le cas, Cassy espérait que Cynthia pourrait la renseigner. C’était en grande partie pour cela qu’elle s’était résolue à la revoir, même s’il y avait également une autre raison. La jeune fille tenait à la remercier une fois de plus de lui avoir sauvé la vie.

Le soleil se couchait lorsque le ferry mouilla dans le port de Rivamar. Avant d’en descendre, Cassy pria un marin de lui indiquer le meilleur moyen de se rendre sur l’Île du Lys. Il la renseigna, non sans préciser :

— Tu sais, ma petite, si tu as l’intention de défier l’Élite, il faut d’abord soumettre une demande officielle auprès de la Ligue de Sinnoh, qui étudiera ton dossier avant de te donner ou non son accord.
— Merci, mais je ne suis pas dresseuse. Je veux simplement rendre visite à une amie qui vit là-bas.

Cassy prit congé de son interlocuteur en le saluant d’un signe de tête. Elle abandonna ensuite le ferry pour se mettre en quête de la navette que l’homme avait évoquée, un petit bateau assurant la liaison entre Rivamar et l’île où se trouvait l’Élite des Quatre. L’adolescente embarqua à bord juste à temps pour bénéficier du dernier trajet de la journée.

Moins d’une demi-heure plus tard, elle se tenait sur un quai presque désert, en compagnie de Galopa. Elle repéra un banc, sur lequel elle grimpa afin de se hisser plus facilement sur le dos de sa monture, puis se remit en chemin. Il allait lui falloir traverser la route Victoire, contre laquelle le marin l’avait mise en garde.

Cassy ne tarda pas à comprendre pourquoi. Cet endroit était un véritable labyrinthe, et elle s’égara à maintes reprises en tentant de rejoindre la Vallée du Lys. Lorsqu’elle sortit enfin de ce dédale de galeries, échevelée, il faisait nuit noire. Seul un croissant de lune diffusait un léger nimbe de lumière argenté, qui épousait les contours d’une ville loin devant eux.

Galopa, plus endurant que sa maîtresse, se chargea de la conduire à destination, tandis qu’elle somnolait à demi, la tête enfouie dans les crins chauds de sa crinière et bercée par le rythme régulier de ses pas. Quand ils furent presque arrivés, le cheval de feu poussa un petit hennissement pour la réveiller.

Cassy se redressa en se frottant les yeux. La Cité du Lys était moins grande qu’elle ne l’imaginait. Elle se composait d’une large avenue principale, éclairée par des réverbères très espacés les uns des autres, et de plusieurs petites artères perpendiculaires. Le calme qui y régnait paraissait presque surnaturel. Il n'y avait pas un miaouss.

À l’exception des dresseurs qui venaient occasionnellement défier l’Élite des Quatre et des touristes qui affluaient massivement pour assister, une fois l’an, à la célèbre Conférence de l’Île du Lys dans la Vallée, rares étaient ceux qui effectuaient le déplacement jusqu’ici. Cette localité était une destination de choix pour les amateurs de combat pokémon, mais hormis cela, elle ne présentait quasiment aucun intérêt.

Galopa traversa la ville endormie. Un immense bâtiment circulaire se dressait au loin, entouré par de hautes murailles. Cassy le reconnut pour l’avoir déjà vu en photo dans un livre : c’était l’Arène, celle dans laquelle l’Élite se produisait de temps à autre. Les lieux étaient plongés dans le noir, si bien qu’elle se demanda si elle y rencontrerait quelqu’un. Elle poursuivit néanmoins sa route, puisqu’il s’agissait du seul endroit où elle était susceptible de chercher Cynthia.

Elle touchait au but quand Galopa ralentit. Il racla le sol poussiéreux avec son antérieur et hennit d’une façon menaçante. Il souffla une petite Flammèche, juste assez puissante pour illuminer momentanément la silhouette qui marchait dans leur direction. Cassy se contracta, sur ses gardes. Elle n’avait pas oublié les craintes de Régis vis-à-vis de tous les dangers qu’elle encourait en voyageant seule avec son pokémon.

— Qui va là ? demanda-t-elle d’une voix qu’elle s’appliqua à rendre intimidante.

Elle n’obtint aucune réponse, mais l’ombre se rapprocha. Cela incita Galopa à cracher une seconde gerbe de flammes, destinée à la dissuader de faire un pas de plus. La capacité étant plus intense que la précédente, Cassy put mieux distinguer les traits de l’individu, qui lui parurent étrangement familiers.

Avec ses longs cheveux mauves ondulés, les lunettes assorties qu’il portait sur son nez et son élégant costume pourpre, elle était certaine de l’avoir déjà vu. La fatigue n’aidant pas, il lui fallut plusieurs secondes pour l’identifier.

Il s’agissait de Lucio Goyo, le membre de l’Élite des Quatre spécialisé dans les pokémon de type spectre, et accessoirement le second de Cynthia. Dès que Cassy l’eut reconnu, elle mit pied à terre pour claudiquer à sa rencontre, son bras passé autour de l’encolure de Galopa afin de s’appuyer sur lui.

Une fois à hauteur du dresseur professionnel, elle inclina respectueusement la tête pour le saluer, avant de lui indiquer qu’elle était à la recherche de Cynthia. Qui mieux que lui pourrait lui dire où la trouver ? Lucio la dévisagea longuement, puis prit la parole :

— Tu l’as manquée de peu, elle a quitté l’île ce matin. Qu’est-ce que tu lui voulais à une heure aussi avancée ?

De la suspicion transparaissait dans sa question, et Cassy ne put l’en blâmer. À sa place, elle se serait sans doute méfiée, elle aussi. Malheureusement, elle ne pouvait entrer dans les détails.

— J’ai effectué le trajet depuis Rivamar à bord de la dernière navette, mais il m’a fallu un temps considérable pour franchir la route Victoire. Je ne pensais pas atteindre la ville si tard. Quant à Cynthia, je... Je voulais simplement lui faire une visite de courtoisie. Elle m’a rendu un immense service, il y a quelques mois, et comme je suis de passage à Sinnoh, j’ai songé que je pourrais en profiter pour lui exprimer une nouvelle fois ma gratitude.
— Je vois. Je t’aurais bien suggéré d’attendre son retour, mais elle est rentrée chez elle, à Célestia, et telle que je la connais, elle peut y rester une semaine aussi bien qu’un mois. Tu veux que je lui transmette un message ?
— Je... Ce ne sera pas utile. Merci beaucoup pour votre amabilité, M. Goyo. J’espère que je ne vous ai pas importuné.
— En aucune façon. Je te souhaite une bonne fin de soirée, jeune demoiselle.

Il lui adressa un sourire en coin qui lui donnait un air assez charmeur et reprit sa route. Cassy attendit que les ténèbres l’aient englouti, puis fit demi-tour pour suivre sensiblement la même direction que lui. Puisqu’elle était bloquée sur cette île jusqu’au retour de la navette, le lendemain matin, elle décida d’en profiter pour se reposer.

Elle chercha un endroit à l’abri des regards, et son choix se porta sur une ruelle étroite qui débouchait sur un cul-de-sac. Personne ne viendrait la déranger ici, à condition qu’elle soit partie avant les premières lueurs de l’aube. Elle s’emmitoufla dans la cape de Sven, se blottit contre le corps chaud de Galopa et ferma les yeux, pour s’endormir presque aussitôt.

Il faisait encore nuit lorsque Cassy se réveilla. Elle avala un maigre petit-déjeuner, puis grimpa sur un muret pour s’installer sur le dos de son pokémon. D’une pression des mollets, elle l’encouragea à prendre la direction de la route Victoire, qu’ils traversèrent avec autant de difficultés qu’à l’allée.

Elle ne fut pas la seule à leur donner du fil à retordre. Si Cassy possédait une carte de Kanto, celle de Sinnoh qu’elle avait autrefois arrachée à l’encyclopédie offerte par l’agent Jenny avait été réduite en bouillie par l’eau de mer, la nuit où Sven l’avait aidée à échapper au naufrage, et elle n’en conservait que de vagues souvenirs.

Elle songea à en acheter une autre, et à se réapprovisionner en nourriture par la même occasion, mais elle renonça vite à ce projet. Il valait mieux éviter les centres-villes et les zones trop fréquentées si elle ne tenait pas à se faire repérer.

Cassy s’égara donc plusieurs fois en tentant de rejoindre Célestia, ce qui rallongea considérablement la durée de son trajet. Au bout de quelques jours, elle commença à ressentir une amélioration au niveau de sa cheville, qui semblait de moins en moins douloureuse. Elle s’en réjouit : d’ici peu, elle serait de nouveau en pleine possession de ses moyens.

Un soupir de soulagement lui échappa lorsqu’elle aperçut enfin le panneau en bois qui marquait l’entrée de la ville de Célestia. « Survivance du passé », proclamait-il. Cassy mit pied à terre et ordonna à Galopa de l’attendre sur la route 215. Bien loin de Rivamar, cité pleine de vie, de touristes et d’activités, cet endroit tenait plus du village tranquille où les étrangers ne passaient pas facilement inaperçus. Sans sa monture, la jeune fille attirerait tout de même moins l’attention.

À première vue, il n’y avait pas de commissariat, comme au Bourg-Palette, mais elle repéra un Centre Pokémon, qu’elle prit grand soin de contourner sans se donner la peine de vérifier si son portrait était toujours affiché par la porte, comme cela avait été le cas à Joliberges.

Cassy marchait lentement, afin de ne pas demander trop d’efforts à son articulation qui se remettait à peine, dans les rues de Célestia, pour la plupart de simples chemins de terre. Elle appréciait cette ambiance rurale qui lui rappelait la petite bourgade de Kanto dans laquelle elle avait passé les derniers mois, mais aussi sa ferme natale.

Elle dut cependant bien vite admettre qu’elle n’avait pas la moindre idée de l’endroit où elle pourrait trouver Cynthia. Rien ne distinguait les habitations les unes des autres, encore moins une pancarte indiquant laquelle était la résidence du Maître de Sinnoh.

Cassy aurait aimé pouvoir se renseigner auprès de la population locale, mais elle craignait trop qu’on la reconnaisse. Elle n’avait même pas songé à couper ses cheveux de nouveau longs au moment de quitter le Bourg-Palette, et à présent, il était trop tard pour y penser, puisqu’elle n’avait ni ciseaux ni objet tranchant.

D’une main, elle souleva ses mèches noires ondulées et les glissa dans le col de sa chemise, puis cala les plus courtes derrière ses oreilles. Elle venait de repérer une dame, affairée à désherber un ravissant potager. Sa robe était maculée de terre, tout comme ses mains qui n’étaient pas gantées.

Sa chevelure grisonnante, coupée au carré, et sa peau ridée permirent à Cassy d’estimer qu’elle devait avoir dans les soixante-dix ans. Avec un peu de chance, sa vue ne serait plus très performante. La jeune fille décida de tenter la sienne. Elle s’approcha prudemment pour s’arrêter à hauteur de la fine ombre qu’un arbre bourgeonnant projetait sur elle.

Si Cassy ignorait ce qu’il en était de ses yeux, l’ouïe de la femme fonctionnait en tout cas à la perfection, car elle se redressa à l’instant même où l’adolescente l’interpela. Elle se tint d’abord les reins, fourbue par sa posture courbée, puis plaça une paume en visière à hauteur de son front. Le soleil, en ce début de printemps, était aussi pâle qu’éblouissant.

— Je peux t'aider, ma petite ? s'enquit-elle aussitôt.
— Oui, s’il vous plaît. J’arrive de l’Île du Lys, où on m’a indiqué que Cynthia se trouvait à Célestia. Auriez-vous l’amabilité de me dire quelle est...
— Non.

Cassy cligna des paupières, interloquée par une réponse aussi franche et directe, à laquelle elle était loin de s'attendre. Soudain extrêmement mal à l’aise, elle osa à peine demander à son interlocutrice les raisons de son refus catégorique.

— Ses imbéciles de collègues feraient bien d’apprendre à se taire ! Quand ma petite-fille vient ici, c’est pour se ressourcer, pas pour être poursuivie par des groupies hystériques en quête d’un autographe. Elle a suffisamment de responsabilités ainsi sans avoir besoin d’être harcelée constamment.
— Vous croyez vraiment que j’aurais fait tout ce chemin pour si peu ? protesta Cassy.
— Tu serais loin d'être la première. Je dirais même que ça se produit sans arrêt. Depuis que Cynthia est devenue Maître, elle a toutes les peines du monde à protéger sa vie privée.

Cassy baissa la tête, dépitée. Elle avait appréhendé beaucoup de choses en se lançant à la recherche de la Championne, mais jamais elle ne se serait attendue à échouer si près du but sous prétexte qu’on la prenait pour une fan un peu trop insistante. Elle réfléchissait à ce qu’elle pourrait dire ou faire afin de convaincre la grand-mère de Cynthia quand une idée lui traversa l’esprit.

— Je ne suis pas venue ici pour lui réclamer un autographe, déclara Cassy, mais pour lui rendre un objet qui lui appartient.

Elle enfonça sa main dans le sac qu’elle portait à l’épaule et en sortit le mouchoir brodé que Cynthia lui avait offert. Tout en faisant mine de se gratter le front, de façon à ce que son avant-bras masque partiellement ses traits, elle s’avança pour le remettre à la vieille dame, qui s’en saisit malgré ses doigts sales.

— Où as-tu eu ça ? demanda-t-elle dans un souffle, pendant que Cassy s’empressait de reculer d’un pas.
— Votre petite-fille me l’a offert il y a quelque temps. J’en ai pris grand soin.
— Cynthia tient énormément à ce mouchoir, plus qu’à la prunelle de ses yeux. Elle n'a pas pu te le donner. Pas sans une bonne raison, en tout cas.
— Il faut croire qu’elle en avait une, éluda Cassy.

La femme tenta de la dévisager, ce qui n’était pas une mince affaire, puisque l’adolescente ne lui facilitait pas la tâche. Ses sourcils se froncèrent, son regard allant du mouchoir à celle qui venait de le lui donner.

— Très bien, s’inclina-t-elle. Je vais te laisser voir Cynthia, mais je te préviens : si jamais tu m’as menti, je peux t’assurer que tu passeras un très mauvais moment.

La septuagénaire glissa le carré de tissu dans sa poche, puis essuya ses mains couvertes de terre par son tablier déjà crasseux. Elle souleva ensuite un lourd panier rempli de légumes divers et se dirigea vers un petit portail, la seule issue qu’offrait la clôture du potager.

— Tiens, porte ça, ordonna-t-elle à Cassy en lui tendant son fardeau, une fois qu’elle l’eut rejointe.

La jeune fille s’en saisit docilement, non sans réprimer une grimace. Elle avait l’habitude des charges lourdes, mais en l’occurrence, ce poids supplémentaire réveillait une légère douleur dans sa cheville. Elle dissimula sa souffrance et emboîta sans un mot le pas de la vieille dame.

Celle-ci la conduisit jusqu’à un charmant petit cottage, doté d’une minuscule pièce de vie. La table, à laquelle elle invita Cassy à prendre place, occupait à elle seule une grande partie de l’espace. L’adolescente, après avoir abandonné le panier sur le plan de travail de l’exigu coin cuisine, tira une chaise et s’y laissa tomber, trop heureuse de pouvoir reposer son articulation.

— Est-ce que tu as déjà entendu parler des ruines de Célestia ? interrogea soudain la femme, tandis qu’elle posait une bouilloire sur le feu.
— Je... Non, jamais.
— C’est là que Cynthia se trouve. Depuis qu’elle est enfant, elle est fascinée par les gravures qui ornent les parois de cet endroit. Elles sont à l’origine de sa vocation d’archéologue.

Cassy hocha poliment la tête, car elle ne savait même pas que le Maître de Sinnoh se passionnait pour l’archéologie. En réalité, elle ignorait presque tout d’elle, hormis le fait qu’elle était plutôt gourmande, ce que Cynthia lui avait elle-même confié le jour de leur rencontre, lorsqu’elles avaient mangé une glace ensemble.

— Elle devrait bientôt rentrer, précisa la vieille dame. Elle s’y rend tous les jours quand elle est à Célestia, mais ne s’y attarde jamais. Il faut dire qu’elle les connaît par cœur.

Cassy acquiesça derechef, et le silence retomba sur la pièce. Il ne fut rompu que lorsque la bouilloire se mit à siffler. La septuagénaire remplit deux tasses d’une infusion odorante et en plaça une sur la table, face à son invitée.

— Merci, madame.
— Tu peux m’appeler Carolina. Et aussi en profiter pour me dire ton nom, ce ne sera pas du luxe.
— Je...

En proie au doute, Cassy ne poursuivit pas. Elle ignorait quel nom il convenait de donner. Elle s’était habituée à son pseudonyme, qui protégeait partiellement sa véritable identité, mais Cynthia ne connaissait que Katharina Granet, et non celle qu’elle était devenue entre-temps.

— Je m’appelle...

Cassy s’interrompit une deuxième fois, pas de son propre chef, cependant, mais parce que la porte d’entrée du cottage s’ouvrit au même moment. Une jeune femme à la silhouette longiligne et aux longs cheveux blonds se tenait dans l’encadrement, entièrement vêtue de noir. En découvrant l’adolescente assise dans la cuisine de sa grand-mère, elle se figea.

— Kathy ? murmura Cynthia avec la même expression que si elle avait vu un fantôme.
— Bonjour, Cynthia. Ravie de vous revoir.

La Championne marqua une hésitation, encore abasourdie, avant de franchir en trois enjambées la distance qui la séparait de Cassy. Celle-ci repoussa sa chaise pour se mettre debout et, sans un mot, Cynthia la serra dans ses bras, son doux parfum de citronnelle les enveloppant toutes les deux.