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En Direction du Firmament de Lady Luxali



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» Auteur : Lady Luxali - Voir le profil
» Créé le 23/01/2013 à 00:54
» Dernière mise à jour le 04/02/2014 à 11:51

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Chapitre 10 : Désillusion
Personnage narrateur : Lance
Je pose un genou à terre bien malgré moi, soufflé par la puissance de l'attaque qui vient de mettre hors d'état mon Pokémon. Mon dernier Pokémon. Un frémissement incontrôlable me traverse de part en part. Une fois de plus, je me suis incliné devant lui.

Il est trop fort.

Le gamin en question rabat légèrement sa casquette jaune et noire en arrière et rappelle son Pokémon auprès de lui, un Mentali à la puissance absolument dévastatrice. Je ne me souviens jamais de son nom. Pourquoi me rappeler du nom d'un minus ? Sauf que le minus en question m'a défoncé. Deux fois. La première avec son Feurisson, au Puits Ramoloss. La seconde, ici, à l'instant, avec son seul Mentali. Il a suffi d'une attaque par Pokémon. Une seule.

Je peste en silence. Si Estelle avait fait ce qu'il fallait, si elle m'avait donné ce Noctali, je n'en serai pas là ! Maintenant, ce garçon a presque accès à notre chef ! Mais si je l'ai convenablement jugé, même lui n'aura aucune chance. C'est perdu. Totalement perdu. Je suis fini. Mon dernier horizon sera la prison. Moi qui étais promis à une gloire certaine, entouré en permanence de jeunes et jolies beautés... J'étais pourtant le meilleur ! Personne ne me surpasse ! Je suis Lance, Commandant de la Team Rocket, bordel ! Pas un Sbire !!

Cela fait bien longtemps que je n'ai plus versé la moindre larme. Depuis que j'ai reçu ce traumatisme violent qui m'a conduit à intégrer la Team Rocket. Pourtant, aujourd'hui, j'ai très envie de pleurer comme un enfant. Avec cette défaite écrasante, c'est mon rêve qui s'écroule.

Mes yeux se ferment et je me souviens.

De longues années, enfant, passées à servir les Sbires et à assister aux séances de torture. Puis d'autres, tout aussi longues, à s'entraîner dur pour mériter le titre de simple Sbire. S'aiguiser tel le tranchant d'un poignard, féroce, impitoyable ! Ma promotion en Commandant, finalement... La consécration. Les regards des femmes, déjà attirés auparavant, qui se multiplient comme des papillons autour d'une lanterne. La richesse, la possibilité de faire faire les tâches ingrates par ses subordonnés. La joie de voir la terreur s'allumer dans leurs yeux après avoir reçu un ordre excessivement doucereux.

J'ai commencé à en profiter. Après tout, si j'avais une bonne position, n'était-ce pas pour m'en servir ? Je changeais de petite amie tous les jours, en trouvant à chaque fois une plus à mon goût. Il m'arrivait aussi d'en avoir plusieurs à la fois. Je faisais capturer mes Pokémon par d'autres, j'étais craint et respecté. La belle vie, en réalité.

Tout ça jusqu'à elle. Estelle...

Elle ne l'a jamais su, mais elle a changé ma vie. Quand je l'ai vue, je me suis dit : "Celle-là, il me la faut à tout prix." Je l'ai achetée avec des promotions, des invitations et un peu de brutalité. Bientôt six mois maintenant qu'elle est mienne et que je ne me résous pas à m'en séparer. Six mois qu'elle est la seule à recevoir mon attention.

J'ai été plus féroce verbalement avec elle qu'avec aucune autre. Je voulais la plier à ma volonté et en faire ma chose, une adoratrice de plus qui aurait donc perdu de son intérêt. J'aurais pu reprendre sans crainte ma vie libertine. Quand les femmes m'appartiennent enfin, elles ne représentent plus aucun intérêt pour moi; c'est le moment de les jeter sans états d'âme. Mais Estelle en a décidé autrement. Elle me résiste. Elle attise ma colère et me donne des envies de meurtre. C'est aussi pour cela que je ne peux pas me séparer d'elle.

Ce n'est pas de l'amour, non. Les morveux expliquent sans cesse qu'il s'agit d'un sentiment pur, incontrôlable, que l'on exprime par la douceur et la tendresse. Certes, j'ai parfois été doux et tendre avec elle, mais seulement pour la mettre à ma botte; je l'ai aussi fait avec les autres. Pour la pureté des intentions et le contrôle, ils peuvent aller se faire voir. Je me contrôle toujours. Et ce n'est pas pour rien que j'ai intégré la Team Rocket : la pureté des intentions, c'est pour les faibles.

Quoique, à la réflexion... C'en est peut-être... J'avais presque du remords à la frapper, ce matin. Presque. Alors que brutaliser est ma manière d'aimer, depuis toujours...

Non, je ne dois pas penser ça, pas devant un sale morveux ! Je secoue violemment la tête avant de me redresser d'un mouvement rapide. Le gamin me fait toujours face, accompagné toujours par son Mentali qui le regarde avec de petites étoiles dans les yeux. De petites étoiles... Estelle... Non, voici que ça me reprend !! Je dois m'arrêter très vite de penser à elle ! Elle n'est plus rien. A l'heure actuelle, elle doit déjà être morte sous la torture. Une gêne de moins. Sauf que, pour la première fois de ma vie, cette idée ne me fait pas plaisir du tout. Plus que de l'ennui. Autre chose. Mais quoi ?

Le morveux s'approche de moi et me défie de son regard assuré de gamin trop fort qui se la pète grave.

-Alors, Commandant Lance, allez-vous me dire où est votre chef ?
-Plutôt mourir
, dis-je en m'appuyant contre le mur et en prenant une posture de beau gosse. Moi, donner une information à un morveux ? Tu rêves, petit !

Il hausse les épaules d'un air contrit.

-Tant pis. J'estime qu'une personnalité comme lui aime se trouver en hauteur, je vais donc faire un tour par les escaliers, ici. Qu'en penses-tu, Sirius ?
-Excellente déduction, Gold
, répond le Mentali d'une voix presque joyeuse –quoi, un Pokémon qui parle ?!-. Il est temps de passer aux choses sérieuses.

Mais pour qui ils me prennent, ces deux-là ?! Non mais ?! Je suis quand même le Commandant Lance, quoi ! Ils n'ont pas le droit de me traiter comme un portemanteau !

Par contre, je suis assez étonné par l'attitude de ce Mentali. Alors que ce Gold monte les escaliers, il le suit avec attention, comme pour repérer chacun des dangers qui le menaceraient. Un Pokémon très attaché à son dresseur, quelle horreur ! Et pourtant, Noctali évolue de la même manière. Ce Noctali que je souhaitais et qui me sera à jamais refusé.

Estelle avait raison. Je ne serais jamais arrivé à faire évoluer son Evoli moi-même. Elle m'a piégé dès le départ. Mais pourquoi ? Etait-ce simplement pour préserver sa stupide boule de poils... Ou pour me faire passer un message ? Hé bien, si elle aime les messages, je vais lui en donner un, moi, de message ! Elle va payer pour tout ce qu'elle m'a fait subir.

-Attendez, dis-je alors qu'ils montent dans les escaliers. J'ai une information à vous donner !
-Je vous écoute
, dit le gamin en s'appuyant à la rambarde.
-Vous savez, le boss... Il a un bras droit. C'est une femme et elle s'appelle Estelle. Elle n'est pas ici, mais dans la forêt avoisinante, parce que si jamais la Tour devait tomber, elle a pour mission de relever la Team Rocket une fois de plus !
-Et pourquoi devrais-je vous croire ?


Je m'étouffe à moitié. Quoi, ce gamin doute de ma sincérité ?... En fait, il n'a pas vraiment tort. C'est une bien belle vengeance que je mijote ici. J'adore la vengeance. C'est un plat délicieux, qu'il soit chaud ou froid. Personnellement, je l'ai toujours préféré tiède. A la fois rapide et calculé. Comme celle qui se prépare et dont je me délecte déjà.

-Parce qu'elle a pris la place qui me revenait de droit. Si vous ne me croyez pas, demandez toujours à un Sbire s'il a déjà entendu parler d'une certaine Estelle. Vous verrez qu'ils peuvent se montrer très loquaces.
-Merci bien
, répond Sirius en déliant ses pattes avant d'un mouvement gracieux. A présent, nous allons affronter vos supérieurs. Et si l'idée de vous enfuir vous prend, rappelez-vous que la Tour Radio n'a pas de fenêtres et que Typhon garde l'unique sortie.

Typhon ! Voilà le nom qu'il avait donné à ce diable de Feurisson... Qui doit avoir évolué, depuis. Quel cauchemar, bordel, quel horrible cauchemar !

Au moins, Estelle va payer, c'est déjà ça.

Je m'assieds au calme dans un coin en attendant le dénouement de cette situation. Mais plus le temps passe, et plus j'ai l'impression d'avoir commis une injustice. J'aime les injustices, d'ordinaire, mais celle-ci me laisse un arrière-goût amer. Estelle m'a tout donné, tout offert. Elle a changé mon existence, d'une certaine manière. Elle m'a accompagné plus longtemps qu'aucune femme avant elle. Peut-être aurait-elle droit à un peu de... considération ? (Quelle horreur que ce mot ! Ah, j'espère bien ne plus jamais le penser !)

Une forme finit par descendre l'escalier. Je n'espère même plus qu'il s'agisse du gamin encerclé par des Sbires. Je sais qu'il est déjà trop tard. Les agents de police montent par l'autre côté du bâtiment. Une policière très élégante me passe les menottes avec un léger air réprobateur, mais je vois bien qu'elle n'est pas insensible à mon charme. Elle s'apprête à m'emmener lorsque je les vois. Oui, ce sont eux, Gold et son Mentali, victorieux après leur dernière bataille. Leur joie me fait un pincement au cœur. Pourquoi ont-ils le droit d'être si heureux, et pas moi ?

Sur une impulsion, j'ai envie de lui crier que j'ai menti. Qu'Estelle est dans son camp, qu'elle est inoffensive. Mais me croira-t-il encore ? Certainement que non.

Je suis totalement résigné désormais. Un fourgon de police n'attend plus que moi, où je serai entouré par des agents Jenny terriblement canon. J'espère bien réussir à leur faire un peu de charme, et je sais que j'y arriverai. J'ai un style absolument irrésistible.

Mais une intuition me fait me retourner alors que je sors de la Tour. Un peu plus loin, dans la direction des Souterrains, une silhouette aux longs cheveux blonds disparaît dans une ruelle, surveillée par une ombre postée au-dessus d'un toit. Une ombre marquée de cercles jaunes luisant dans la pénombre et dont les yeux rouges restent obstinément rivés sur elle. Je ne sais pas pourquoi, mais j'ai envie de croire que...

J'avais peur pour Estelle, mais désormais, je suis libéré de ce sentiment qui me fait honte et que je ne comprends pas. Car, si elle n'a pas trouvé le repos éternel, elle ne sera jamais seule. Son fidèle compagnon la protègera toujours.

Il est temps de formuler une dernière prière qui ne me ressemble pas avant de songer à d'autres plans plus machiavéliques...

Merci de prendre soin d'elle à l'avenir, Ivy le Noctali.