Parfois, la mort est préférable...
Je suis en train de mourir.
Pourquoi est-ce que je vous dis ça? Personne ne sera affecté par cette nouvelle, pas même moi. Peut-être que j'espère vous toucher, espoir illusoire qui raccroche à la vie. Mais pourquoi vouloir vous toucher? Vous devriez être heureux de cette nouvelle. Ne serait-ce que parce que je suis une de ces créatures que tout le monde déteste.
D'ailleurs, je suis d'accord avec vous: mourir est la meilleure chose qui pouvait m'arriver. La mort n'a rien, dans mon cas, du terrible moment d'adieu que tout le monde redoute. La mort est une délivrance m'amenant enfin à l'oubli. Et si la mort est délivrance, la vie, elle, n'est qu'un sombre instrument de torture; inventé par des Dieux cyniques et sadiques.
Qui n'a jamais rêvé que tout s'arrête? Un petit stop, pour souffler avant de reprendre. Dans mon cas, c'est plus qu'un petit stop qu'il me faut, je rêve de l'oubli. Malheureusement, il paraît que la mort apporte les souvenirs. Certains voient des merveilleux moments, et peut-être regrettent-ils que tout soient fini. D'autre au contraire ne voient que des moments tristes. Et peut-être se demandent-ils où sont passés les moments heureux, peut-être aimeraient-ils continuer encore un peu, vivre d'ultimes moments heureux. Ce n'est pas mon cas. Les souvenirs, je les exècre, la vie je la déteste.
Malheur, horreur, peur.
Ces mot passent dans mon esprit sans que je ne les aient conviés. Ce n'est pas étonnant. Ils ont fait la même chose avec ma vie, et ils ne se gêneront jamais pour recommencer. Mais, laissons de côté ces sombres pensées. De quoi parlais-je, tout à l'heure? Ah, oui. Les souvenirs... En voilà un qui arrive... Le plus ancien.
Je suis né un jour de gel, dans une forêt désertée par la lumière. Probablement pas le meilleur moment pour accoucher, ni le meilleur endroit, mais que voulez vous? On avait interdit à ma mère l'accès à la maternité, comme il est d'usage pour ceux de mon espèce. Je les entends comme si j'y étais: "Non, vous n'entrerez pas! Les créatures comme vous ne sont pas les bienvenues. Gardez vos catastrophes pour vous, maudits Absols!"
En fait, avec le temps, j'en suis venu à croire ces rumeurs... Oui, les Absols attirent les cataclysmes.. . Mais surtout sur eux. La pire chose qui puisse arriver à un Absol est encore de naître. Ah! Mon souvenir se rappelle à mon cerveau mourant.
Bref, ma mère, comme vous vous en doutez, n'a pas survécu à cette horrible nuit. Une vie contre une autre, c'est la dure loi de la nature, paraît-il. Elle n'a donné naissance et s'est donnée la mort. Je me demande si je n'aurait pas préféré l'inverse. Ma mère morte, il ne restait que mon père. Le pauvre m'a toujours tenu comme responsable de la mort de ma mère. Mais, contrairement aux "autres", lui m'a quand même aimé... Nous avons eux des souvenirs heureux ensemble... dans la mesure du raisonnable. Je me rappelle encore les fois ou nous avons joués à se battre avec nos cornes. Ou quand nous chassions les Ratentifs dans les belles forêts du nord.
Mais je me rappelle aussi de ces moments qui sont la cause de la malédiction des Absols, lorsque nos cornes nous avertissent de l'arrivée imminentes d'une catastrophe. Alors qu'en général nous sommes plutôt solitaires, et que notre devise pourrait être "Vivons heureux vivons cachés", dans ces moments là nous lâchons notre instinct de survie pour partir vers les villages et les avertir... Peine perdue, mais les Absols sont des bornés, et nous revenons toujours vers ces lieux de malheur. Evidemment, dés qu'ils voient un Absol, c'est le branle-bas de combat. Là encore, je les entends d'ici:
"Ah! Un absol! Il ammène encore ses malédictions sur nous! Il faut le chasser d'ici!"
Et les villageois de nous lancer des pierres sans nous écouter une seule seconde. Et bien sûr quand "ça" arrive, c'est encore de notre faute.
Connaissez-vous cette expression, "bouc-émissaire"? Je ne sais pas vraiment ce qu'est un bouc, mais il est sûr que cette bestiole est proche de l'Absol. Quant à émissaire, j'ai cru comprendre que cela voulait dire messager. "Absol-messager", nouvelle expression en vogue dans le monde Pokémon. Un bouc-émissaire, c'est celui qui est toujours accusé, celui sur qui on se défoule quand on veut se détendre – ou pas – bref, l'Absol correspond parfaitement à cette définition. Mais revenons à nos souvenirs.
Vous vous en doutez aussi, les catastrophes naturelles sont courantes – je veux dire par là qu'il n'y en pas que tout les 10 ans – surtout quand, comme les Absols, on vit dans ces régions froides où les tempêtes de glaces sont légion. Alors, comme vous vous en doutez on avait l'habitude de faire ce sale boulot, et en s'arrangeait en général pour prévenir les habitants discrètement, sans se mettre en danger.
Mais le bonheur est interdit à notre espèce, et il a rapidement éclaté. Le deuxième plus triste jour de ma vie est donc un jour de Juillet, jour qui se distinguaient des autres par le fait que nos cornes avaient détecté un violent cyclone qui devaient frapper la région dans deux jours. C'est fou comme une vie peut changer, en deux petits jours d'été... Quand nous sommes arrivés au village le plus proche, tentant d'avertir les quelques rares pokémons qui savaient que nous venions les aider et pas les détruire, une nouvelle preuve de la malédiction Absol avait frappé.
Comme vous le savez probablement, les attaques Psy sont très peu efficaces contre les types Ténèbres pour des raisons... obscures. Toujours était-il que les Pokémons de la régions n'étaient pas ignorants de cette spécificité, et qu'ils avaient demandés à quelques Psy de quadriller la zone à coup de Psyko, prêt à repérer la moindre anomalie, à peu près de la même manière qu'une Chauvsourir trouve ses proies dans le noir.
Et nous, ignorants de cette nouvelle preuve de la crainte envers les Absols, furent détectés par l'ingénieux stratagème. Evidemment, bien que nous n'étions pas touchés par ces attaques, nous les ressentions quand même, bien que très faiblement. Et mon père comprit tout de suite ce qu'il se passait. Il lâcha tout de suite un puissant Vibroscur, tentant de mettre KO le mercenaire avant qu'il n'alerte le village, mais trop tard. Nous commençâmes à courir, heurtant les arbres dans notre course folle, mais rien à faire.
Le pokémon qui nous avait repéré était un Kadabra, doué de la connaissance de Téléport. Il nous barra la route, nous ralentissant suffisamment pour laisser le temps aux villageois d'arriver. Mais mon père, bien que plein de ressentiment à mon égard, ne voulait pas que je soit prit. Il se jeta sur le Kadabra, prêt à le Mordre, qui, de frayeur, se Téléporta... avec mon père. Je ne sais pas ce qui arriva lui arriva ensuite, mais je ne le revit plus jamais, pas plus que je ne revit l'armée lancée à nos trousses. Il devait les avoir ralentis suffisamment pour me laisser m'enfuir. Sous le coup de la frayeur, je courrais, courrais, courrais... Et ne me rendit compte que plus tard que mon père était sûrement mort en me protégeant.
Je resta apathique pendant un long, très long temps. Et je me jura que plus jamais je ne préviendrais qui que ce soit de la venue d'une catastrophe... Mais le vie, si elle est une torture, est aussi faite de renoncement et de compassion. Peut-être aussi que je voulais en finir. En tout cas, les habitants de ce village auront, je l'espère, un impérissable souvenir de moi. Il faut dire que je me suis arrangé pour être le plus terrible possible... en mémoire, notez l'ironie des Dieux, d'un souvenir que j'avait voulu oublier toute ma vie.
Il courrait. Le vent lui même ne pouvait rivaliser avec lui. Car le vent ne court pas avec la rage au ventre, car le vent court sans raison. Il esquivait les arbres, renversait les pokémons, terrible ennemi invisible détruisant tout sur son passage. Derrière lui, la tempête le suivait. Une gigantesque tornade aspirait les débris d'une vie fugace. Le vent arrachait les arbres, obéissant aux ordres du pokémon rendu fou, ou peut-être lucide, par la douleur. La légende des Absols prenait vie pour la première fois. Soufflez, vents! Détruisez, tornades! Arrachez, cyclones! L'Absol s'arrêta brusquement. Il était au milieu d'un village, ou plutôt "du" village. Puissant, terrible, il défiait les villageois et les Dieux, sa corne noire fièrement dressée, son pelage blanc flamboyant sous les rayons du soleil d'hiver. Derrière lui, le monstre fait de vent attendait les ordres de son maître. Les villageois, pétrifiés, entendirent alors le puissant hurlement qui devait déchaîner la puissance des vents. Mais, trop tard... déjà, une flèche se fichait dans son flanc, déjà, des rochers volaient dans sa direction. Mais, trop tard... Les vents détruisirent le village, ouragan terrifiant né de la colère, de la haine et de la peur, vengeance terrible comme la vie d'un Absol. Mais, trop tard...
Je suis un Absol, et j'attend la mort après la lente agonie...