Pikachu
Pokébip Pokédex Espace Membre
Inscription

B.I.C : Le Point de Non-Retour de Luxya



Retour à la liste des chapitres

Informations

» Auteur : Luxya - Voir le profil
» Créé le 16/01/2013 à 18:57
» Dernière mise à jour le 27/01/2013 à 22:47

Si vous trouvez un contenu choquant cliquez ici :


Largeur      
Ch. 11 On ne peut revenir en arrière
Nathan était liquidé, vide, le souffle coupé. Tout se dédoublait, toutes les personnes attroupées autour de lui semblaient être une foule allant l'écraser. Dos au mur, le corps non réactif, il grimaça en essayant de bouger. Kyle au loin retira son bonnet et accourut près de son coéquipier. Heledelle, qui avait esquivé l'attaque de justesse, mais qui n'avait pas réussi à emporter son dresseur, se cacha derrière le blond. Timéo faisait reculer les anciens élèves à l'aide de Dick, qui présentait son badge d'enquêteur.

- Laissez-le respirer, il est à moitié conscient, bon sang de cuvette !

Il voulait vomir, il voulait dormir, mais tout ce qui sortait, c'était un peu d'eau à mesure qu'il toussait. Cette même sensation qui l'avait empêché de se réveiller il y a quelques jours de cela. Les cris de multipliaient dans ses oreilles, et quand Kyle arriva près de lui, Nathan l'empoigna avec toute la force qui lui restait d'une main.

- Tu sais que je ne suis pas contre de payer des pots cassés quand nécessaire, mais là tu as facilement du ME FÊLER UNE CÔTE OU DEUX !
- Je te rappelle que dans ce genre de moments, tu es censé te barrer au lieu de rester immobile comme un Chrysacier ! répliqua Kyle, énervé aussi.

Entre eux deux, c'était clair. Ça ne les dérangeait pas de subir certaines attaques ou autres expositions dangereuses pour réussir leurs enquêtes. Quand ça se solde par un échec aussi cuisant que celui-ci, devant plus d'une centaine de personnes, ça passe généralement un peu moins bien. Timéo et Kyle le relevèrent doucement, non sans écoper du cri gémissant et étouffé de Nathan. Dick décida d'appeler l'infirmière Joëlle de Mérouville. L'équipe se regroupa vite, embarquèrent dans la camionnette du B.I.C. Les anciens élèves commençaient à les suivre, voulant savoir ce qu'il se passait, demandant si l'homme inconnu était le Trianguleur. Dick fulmina et demanda aux autorités fraîchement arrivées de calmer la populace, et de clore la soirée.


= =

- Deux côtes fêlées. Je préconise seulement beaucoup de repos, pas de gestes ni d'efforts brusques car la douleur pourrait s'intensifier. Je ne vous fais pas de bandages car ça pourrait abîmer encore plus vos côtes, mais des antalgiques devront faire l'affaire.

L'infirmière Joëlle commença à ranger son matériel, puis posa deux boîtes de médicaments sur la table basse en verre. Nathan était allongé sur son canapé, respirant très doucement. Timéo, Dick, Kyle, Camille et Logan étaient tous entassés dans le salon-cuisine, assez surpris du bazar. L'infirmière partit, non sans refuser le numéro de téléphone de Timéo qui prétexta qu'en cas de « bobos », il aimerait la voir. Camille décida de s'occuper des Pokémon de Nathan pour éviter d'étouffer dans la petite pièce. L'air de la nuit lui ferait le plus grand bien. Dick observa les photos posées sur ses étagères, puis s'adressa à Nathan.

- Tu as donc compris que tu dois rester ici Corywn, sois sage pour quelques jours. Tu pourras toujours bosser à distance.

Nathan acquiesça. Même s'il savait que c'était impossible pour lui de rester ici. Il fallait absolument que ce soir, à 19 heures, il aille à Vermilava. Timéo ne put s'empêcher de ranger quelques affaires entassées ça et là, histoire de mettre à l'aise son équipe.

- Qu'est-ce que t'as dit Montalio, alors ? demanda Kyle.

Fallait-il vraiment en parler ? Fallait-il prendre le risque de voir toute son équipe se faire descendre parce qu'il ne respectait pas le contrat ? Montalio est un homme de parole. Nathan aussi. Mais s'il était l'assassin, devait-il prendre le risque de le débusquer seul, alors qu'il l'avait déjà manqué une fois ? Nathan avait du mal à réfléchir, et comme il devait répondre vite, il roula des yeux.

- Il m'a dit qu'il n'était pas l'assassin, et qu'il savait qu'on l'attendrait là.
- Et il s'est déplacé seulement pour dire ça ? s'étonna Logan. S'il ne l'était pas, pourquoi serait-il au courant qu'on l'attendait là ?

Dick dit que c'était peut-être un moyen d'affirmer sa supériorité stratégique et sa fierté que de se montrer à eux. Nathan hocha précipitamment la tête, content que Nantelieu ait trouvé une excuse à sa place. Ça avait du bon que son chef soit un peu tête en l'air. Kyle et Logan, qui baillait à s'en détacher la mâchoire, se contentèrent de cela, dubitatifs. L'enquêteur fut réjoui de se dire que tout ceci n'avait été au final pas fait pour rien. Ils savaient au moins que Keenan Montalio était encore vivant. Et qu'il ne fallait plus faire confiance à son physique, étant donné qu'il n'était plus le même.

- Tu es sûr que tu nous dis tout ? Tu n'as rien découvert d'autre ?

Nathan se tint les côtes en gémissant. Il observa ses trois co-équipiers dans les yeux.

- Non, rien à rajouter. C'est vrai que dans un sens, cette soirée était inutile.

« Mais qu'est-ce que tu fais Nath... » se dit-il. Il était ridicule à mentir comme ça, mais le ton glacial de Montalio, presque menaçant lui avait refroidi les os. Puis il se sentait obligé de mentir, alors que ce n'était pas dans ses habitudes. Il était donc hors de question d'embarquer le B.I.C dans quelque chose qui semblait un peu personnel. Timéo revint et se jeta sur le canapé près de Nathan, fatigué d'avoir rangé. Dick insista sur le fait qu'il devait rester statique pour reconsolider ses côtes, et lui conseilla donc de laisser ses Pokémon dehors pour pouvoir l'aider. À ce moment, Camille rentra par la baie vitrée pour en parler. Arcanin passa la porte avant elle et s'élança vers Nathan.

- Tes Pokémon n'ont pas été dehors depuis un moment on dirait, Arcanin a l'air content de te voir.
- J'ai été très occupé, répondit-il peu convaincant.
- On s'en fiche. Tu dois t'occuper de tes Pokémon et les entraîner. C'est pas dans tes habitudes de les négliger.
- On va pas revenir sur le fait que Nath' est étrange en ce moment... grommela Kyle en faisant les cent pas.

Ce dernier acquiesça en se mordant la lèvre. Quel était l'intérêt pour Arcanin, Kirlia, Phyllali et Heledelle de le voir dans cet état lamentable, sorte de latence de mort-vivant ? Ça semblait communicatif, puisque Timéo avait également l'air fatigué, étalé sur le canapé blanc. Les quatre agents décidèrent d'un commun accord de laisser Nathan avec son meilleur ami, afin qu'ils puissent enfin rentrer chez eux. La nuit était déjà sérieusement entamée, aux alentours des quatre heures du matin. Timéo les conduisit donc vers la sortie, non sans remarquer le regard taquin que jeta Camille à l'agent blessé pour lui remonter le moral, malgré ce qu'elle lui avait dit. Quand il referma la porte, Tim fut triste de réaliser ce que devenait peu à peu Nathan. Un morceau de souffrance cadavérique, une belle gueule à l'âme déchirée. Métamorphosé depuis quelques jours, et le coup de ce soir avait l'air de l'avoir achevé. Au bout de plusieurs minutes, il éteignit la télévision et attendit que l'agent le regarde.

- Ça te fait si mal de revoir des gens que tu n'as pas vus depuis longtemps ?

Nathan continua de le regarder, respirant le plus doucement possible. Cravate relâchée, chemise à moitié sortie du pantalon, les cheveux en bataille, contribuaient à son air endormi.

- C'est ton passé, tu n'as pas à t'évertuer autant pour l'oublier, il fait partie de toi.
- J'en ai pas envie.
- J'en fais partie. Lou aussi.

Nathan ricana en entendant le nom de Lou. Son meilleur ami se renfrogna, soit vexé d'être mis de côté dès que le nom de la fille était prononcé, soit parce qu'il se sentait réellement inintéressant aux yeux de Nathan. C'était difficile de savoir ce qu'il pensait vraiment des gens. C'est difficile aussi de quémander de l'attention quand on est un avocat viril et généreux.

- L' « alien »... répéta Nathan.

Depuis quelques jours, un doute très fort s'était installé en Nathan par rapport à elle. La sensation que lui faire confiance n'était pas possible. C'était inexplicable. C'était un pressentiment. Un instinct, qui l'avait conduit parmi les enquêteurs précieux. C'est sûr qu'une part de jalousie devait certainement brouiller son objectivité, néanmoins, sa surprise était trop grande lorsqu'elle le découvrit l'autre soir dans le public. Timéo affichait une triste mine.

- Tu sais que tu es quelqu'un qui compte énormément pour moi, avoua Nathan, embarassé. T'es mon meilleur ami, j'ai pas l'impression d'avoir à le dire pour que tu le saches.
- Eh bien tu te trompes. Au risque de passer pour une gamine en chaleur, j'avoue que ce que tu viens de dire est assez plaisant à entendre. Ça me rappelle à quel point je suis génial.

Les deux sourirent. Nathan comprenait d'un côté de ce que ressentait Timéo. Toujours à se dévouer pour les autres, tout le monde l'aimait, tout le monde le lui montrait. Sauf lui. Sauf lui qui avait grandit avec depuis une quinzaine d'années.
La discussion ne continua pas plus loin, étant donné l'état important de fatigue des deux hommes, sans compter le procès de Timéo dans l'après-midi. Les quatre Pokémon se répartirent dans l'appartement, et après le départ de l'avocat, ils s'endormirent, laissant Nathan seul avec ses démons. Il décida de les chasser en rallumant la télé. Il tomba sur un court reportage affichant les nouvelles de dernières minutes. L'on parlait du « Trianguleur », de la peur qu'il créait chez les parents. Certaines personnes de Mérouville furent interrogées et témoignèrent à propos de l'histoire qui secouait le périmètre, en disant que la façon de tuer était affreuse, que le B.I.C prenait visiblement son temps. Nathan opina, tout en grommelant que c'était pas leurs propos pourris qui allaient résoudre l'affaire. La journaliste montra les photos des deux victimes, tout en disant que si certaines jeunes femmes se sentaient menacées, qu'elles n'hésitent pas à appeler le Bureau d'Investigations Criminelles. Agacé, il coupa et sombra dans un sommeil agité.


= =


Le réveil fut difficile. Se lever en milieu d'après-midi, quand il fallait partir à Vermilava clandestinement, ça le faisait pas. Deux heures de route suffisaient pour parcourir le chemin en voiture. Il suffisait de passer par Lavandia, de remonter au Nord et de virer sur une route droite et sans obstacles. Hoenn est une région simple mais magnifique. Sa diversité de paysages, son ambiance chaleureuse faisait de cette région un havre majestueux, un endroit où se ressourcer en cas de coup dur. Nathan aimait Hoenn, et pour rien au monde il ne quitterait cette île de Poképolis. Seulement, cette histoire de meurtres dans les villes de son enfance lui faisait mal au cœur. Quand il était plus jeune, il partait en vélo avec Timéo jouer au casino à Lavandia, ils passaient devant la Pension du vieux couple pour admirer les Pokémon avant de rentrer par le Tunnel Merazon. La vie était plus simple avant dira-t-on toujours.
Faire basculer son torse était un calvaire. Les jambes, passe encore, mais cela lui demanda un certain effort que de se retenir de respirer tout en se redressant. Il se repassa la scène de l'Hydrocanon le propulsant contre le mur, et réalisa qu'il n'en avait que de très vagues souvenirs. Seule l'expression emprise de colère de Kyle lui sauta aux yeux, quand il s'était réveillé et qu'il lui avait hurlé dessus. Puis, il rembobina le moment où il découvrit Montalio. Où il comprit toute l'envergure de l'affaire, où il remarqua dans ses yeux la froide menace de ses paroles. « Viens seul, histoire qu'on reparle du bon vieux temps. » Et puis en quoi c'était un « bon vieux temps » ? Nathan détestait cette époque, et rien ni personne ne le ferait changer d'avis.
Une fois sorti de la douche, avoir fait et mis en route le café, il rentra ses Pokémon qui avaient fini de manger dans leurs PokéBall. Il s'occuperait d'eux plus tard, car pour le moment, il n'était obnubilé plus que par ce qui allait se passer. Des répercussions. Sur son travail. Ça allait se savoir qu'il avait caché quelque chose, automatiquement. Est-ce qu'ils allaient comprendre qu'il a fait ça pour eux ? Est-ce que au moins il l'avait vraiment fait pour eux, ou pour une autre raison ? Buvant avidement son café, il attrapa son révolver, sa plaque, ses PokéBall et ses clefs, et sortit de chez lui.


Dans la voiture, il réalisa que l'équipe ne s'était pas suffisamment concentrée sur les symboles gravés. Un I, et un C. Des chiffres romains, des lettres. Peut-être une date, un anagramme, un code. Kyle ne s'était pas versé en hypothèses non plus là-dessus, alors que c'est en général lui le générateur d'idées. Dans tous les cas, il trouvait que l'attitude de Kyle à son égard était bien trop étrange en ce moment. Même celle de Greta, la petite femme de caractère qu'il aime tant. Pas de sourires en coin pour faire comprendre que leurs piques étaient des blagues, pas de regards amusés signifiant qu'au fond, ils avaient envie de devenir amis. C'était parti. Parti en fumée épaisse. Comme la réaction de Kyle à l'égard des avocats à la soirée d'anciens élèves. De la fumée qui masquait sans doute un gros complexe.

Un coup de fil tira Nathan de ses réflexions, et le fit sursauter, non sans l'affubler d'une nouvelle douleur. Il tira rapidement le portable de la poche de sa veste, tout en conduisant, et regarda le correspondant. Serah. Il décrocha après avoir soupiré, à la fois de soulagement que ce ne soit pas son patron, et aussi d'agacement d'être harcelé par la sœur de son meilleur ami.

- Oui Serah, que puis-je faire pour toi ? Un nouveau costume à essayer pour paraître plus séduisant ? demanda-t-il d'un ton niais se voulant naturel.
- Je voulais prendre de tes nouvelles.

Tiens, c'est touchant. Son excitation habituelle de parler à son coup de cœur n'était pas présente à ce jour. Il percevait même de l'inquiétude dissimulée dans sa voix.

- Tu es donc au courant pour mes côtes ?
- Timéo n'allait pas bien du tout hier en rentrant, déclara-t-elle, d'un calme étonnant. Il a fait du bruit en rentrant à la maison, il reniflait. Mon frère est ému à ce point seulement quand il a peur pour quelqu'un.

Nathan avait du mal à tenir le combiné tout en conduisant, fervent adepte du code de la route. Puis pour un agent, ça le faisait bien de discutailler au téléphone.

- Ton frère a du être secoué de me voir ramper comme un militaire en Amazonie.
- Il m'a dit que tu gâchais tout ton potentiel et que ça le déchirait de te voir comme ça. Papa a approuvé.

Norman, le 'papa' de remplacement de Nathan. Si tant est qu'il pouvait le considérer comme un père. Il grimaça.

- On parle de moi dans mon dos, maintenant ? Écoute Serah, je vais bien. Tim a beaucoup de travail et doit s'inquiéter pour un rien. Je ne suis pas un de ses clients, mon avenir ne repose pas entre ses mains.
- ... Bien. Je suis contente d'avoir pu t'entendre, Nath. Je passerai te voir un jour.

Il eut soudain une petite idée, qui pourrait le protéger, une sorte d'alibi.

- Et toi Serah, comment ça va ? Raconte-moi, un peu, j'ai du temps devant moi.

De l'autre côté du combiné, il semblait que ce fut l'extase. La voix mielleuse du séducteur sommeillant en lui s'était réveillée. Peut-être que si Serah parlait suffisamment longtemps, alors que lui désactiverait la fonction 'communication' afin qu'elle n'entende pas le bruit du moteur, il pourrait se créer une excuse pour prouver qu'il était chez lui. Si nécessaire, parce qu'il doutait sincèrement de ne pas trouver Montalio.

- Eh bien, les cours se passent plutôt bien ! Un styliste en vogue m'a repérée, même si je sais que tu ne sais pas ce que le mot 'mode' signifie...

Elle entama un long monologue digne d'elle où elle racontait les prouesses de sa carrière, les progrès de son Octillery. Elle réussit à lui décrocher quelques sourires de temps, amusé par ses sous-entendus maladroits et ses réflexions décalées. Dix minutes s'achevèrent quand il décida de raccrocher.

- Merci d'avoir appelé, passe le bonjour à tes parents, dit-il.
- Nath...

Il leva les yeux au ciel, tourna à gauche pour emprunter la longue route le menant vers Vermilava. Son estomac se resserra un peu. Soit elle entendit sa mimique gestuelle, chose impossible, soit elle devina facilement qu'il voulait que la discussion cesse cordialement.

- ... On se revoit bientôt, salut ! dit-elle rapidement, à contrecœur.

Elle quitta la conversation, le laissant seul avec son volant. Au moins, il pouvait à nouveau se concentrer sur la route. Le soleil se couchait un peu, adoucissant les couleurs du ciel. Il discerna au loin le sable voler au gré du vent, et se rassura d'être dans sa voiture protégé comme il faut. Il remarqua quelques dresseurs qui attendaient comme des poteaux que des gens viennent demander un combat, les lunettes de protection sur le nez, avec des capuches pour ne pas prendre du sable dans les cheveux. Peut-être aurait-il limite préféré être à leur place.


= =


Il arriva un peu avant 19 heures, et se gara loin du panneau d'accueil de la ville. Il prit énormément de temps et de précaution pour descendre de la voiture sans se faire mal, en respirant calmement, malgré l'angoisse qui grandissait en lui. Il ne savait pas ce qui l'attendait. Son réflexe d'agent l'amena à ne sortir que Kirlia. Sortir les autres seraient les exposer à un danger imminent. Kirlia possédait des attaques susceptibles de défendre Nathan en plusieurs sortes d'occasions. Il lui demanda d'utiliser Rune Protect, et d'être aux aguets si jamais il devait utiliser Abri. L'air frais lui hérissa les poils, et il profita de ce moment avec Kirlia seul à seul.

- T'en fais pas, on te trouvera une Pierre Aube bientôt.

Kirlia tourna sur lui-même en souriant.

- Je sais que tu as envie d'évoluer. Après tout, tu es le seul qui n'est toujours pas au stade final. Mais au moins, tu seras plus fort que tout le monde parce que tu te seras bien préparé en Kirlia ! Après, je t'appellerai Gallame.

Il ricana à cette idée, sans doute à cause de la pression. Cet abus de confiance en lui-même pouvait lui coûter la vie. Mais il était déterminé à débusquer le coupable. Il fallait que le Trianguleur, ce meurtrier ignoble cesse. Il marchait lentement, et à mesure qu'il arrivait, il se concentrait beaucoup sur sa respiration pour ne pas souffrir une nouvelle fois. Kirlia restait près de lui, surtout lorsqu'ils aperçurent le panneau « Bienvenue à Vermilava – Sources Chaudes ! » Le soleil avait entamé sa course dans la direction de l'Ouest. Le couloir de la mort se rétrécissait de plus en plus, jusqu'au point culminant.

Keenan Montalio, homme de parole, ne tarda pas à montrer son nez avec néanmoins quelques minutes de retard. Vêtu de noir, l'air de rien, il s'avança jusque vers Nathan, accompagné de son Alakazam. Ses yeux bleus très clairs n'étaient pas rassurants, additionnant le fait qu'il ne souriait pas. Même pas d'un air narquois. Juste, comme un homme profondément abattu.

- Je suis content de voir que tu n'es venu qu'avec Kirlia. Alakazam n'a rien trouvé de suspect.

Ce dernier s'avança vers Nathan, retira son portable et le posa dans la main de Montalio. Puis, il hocha la tête, signifiant qu'il ne portait pas de micro.

- Alors, tu aimes les balades nocturnes ? demanda Nathan.

Le suspect tira un peu sa lèvre sur le côté, mais ça ne ressemblait pas à un sourire. Il remarqua que l'agent se tenait le flanc.

- Tu t'es fait mal ? Je suis désolé, j'aurais du prendre l'attaque à ta place après tout. C'est en partie ma faute.
- Pourquoi tu m'as fait venir ici Montalio, si tu n'es pas responsable ? Est-ce que tu sais quelque chose à propos de tout ça ? Pourquoi avoir repris contact avec tes victimes ?
- Pour m'excuser.

Ça semblait si évident dit de sa bouche. Nathan haussa les sourcils, et ne retint pas un rire narquois.

- T'excuser... d'avoir détruit leur vie ? C'est bien, la rédemption, il faut bien l'accomplir un jour ou l'autre, après tout.

Keenan s'avança plus près de Nathan, et lui pressa le bras. Ce dernier réprima un souffle rauque, et se baissa un petit peu pour endurer ce qui se passait dans son corps. Alakazam et Kirlia se dévisageaient, sans un bruit, attendant une réaction de la part de Montalio.

- Je crois pouvoir t'aider.
- M'aider ? répéta Nathan, penaud.
- Tu as toujours été un homme fidèle, Nathan. Tout le monde ne s'en rend pas compte. Mais, et s'il n'y avait qu'une seule personne avec qui tu ne l'étais pas ?
- Qui ?

Montalio ne répondit pas. Le silence de la nuit tombée, des battements du cœur de Nathan qui s'accéléraient, et de son souffle qu'il tentait de contrôler pour ne pas souffrir étaient à leur paroxysme. Montalio en savait bien plus qu'il ne voulait le dire. Et pourtant, il attendait. Pour titiller Nathan, pour le manipuler. La douleur apparut lorsque Montalio relâcha son bras, et Nathan ne se retint plus. Il hurla.

- QUI ?

Montalio s'écroula. Lentement. Comme un mouchoir de soie tombant de la main de la Mort. Nathan écarquilla les yeux, saisi d'un sentiment de peur extrême. Un filet de sang apparut le long de la bouche de l'ancien tyran alors qu'il parvint à parler.

- ... Toi ?

La vision de l'agent se dédoubla. C'était pas le moment, mais tous ses symptômes étranges revenaient. Il s'agita en palpitant, secoua la tête, puis se jeta sur Montalio qui agonisait. Il posa ses mains tremblantes sur son torse pour sentir le coeur, et réalisa qu'une flaque de sang colorait le sol.

- Non ! NON !

Il décida dans la panique d'arrêter le saignement en mettant sa main dans sa nuque, alors que l'autre baignait littéralement dans la couleur écarlate. Tout alla trop vite pour Nathan, qui gémissait comme un petit en regardant les deux Pokémon choqués et immobiles. Il cria son nom, hurla de rage. Ses côtes semblaient déchiqueter ses poumons, et son souffle ne cessait de prendre de l'ampleur, occasionnant des douleurs atroces. Montalio ouvrit la bouche.

- Keenan ! KEENAN !
- Ne salis pas... mon honneur... Je n'ai tué... personne...

Ses yeux se figèrent vers le ciel noirci, devenant statue avant d'avoir pu dire autre chose, pendant que Nathan prenait son poult. Il mettait du sang partout, ne voyait plus rien. Il prit son téléphone sans réfléchir qui reposait dans la main de Montalio. Elle était durcie, et il retira violemment les doigts crispés sur l'appareil en criant. Sa conscience lui hurlait des mots incompréhensibles, et tout en priant pour que ça réponde, son regard ambre et fou observait les alentours. Des larmes coulèrent sur ses joues chaudes.

- Maman, maman... J'ai fait une bêtise... Tu m'entends maman ? Je sais pas ce qu'il m'arrive, j'ai l'impression de vivre un cauchemar... maman...

Il éclata en sanglots, arracha un cri en se tenant les côtes.

- Nathan, tu es où ? paniqua Maria, à l'autre bout du fil. Tu es blessé ?

Il regarda autour de lui encore une fois, sachant pourtant où il était. Kirlia tremblait en voyant son dresseur en proie à une si grande panique. Nathan réussit à le rentrer dans sa PokéBall malgré la somme d'efforts que cela semblait lui demander.

- Je... il est mort. Y a du sang partout et il a les yeux ouverts... Le mode opératoire n'est pas le même, c'est fait dans la précipitation... Pourquoi il ne m'a pas tué, moi ? J'ai peur, au secours...

Il retint un nouveau sanglot, essuya ses larmes avec sa main dégoulinante. Il était méconnaissable, ce n'était pas lui. La voix de sa mère résonna en écho lointain dans sa tête prise dans le tourbillon de sa folie.

- Trouve quelqu'un Nathan, va-t-en loin de là !

Il fallait obéir. Comme un automate. En bon enfant aimant. Mais se relever fut impossible. Après avoir réentendu la voix de Montalio dans sa tête lui répétant « Toi ? » « Toi ? » « Toi ? », hoqueté comme un bébé qui n'arrivait plus à respirer, il perdit connaissance, gisant à côté d'un mort, baignant dans le sang d'un autre.