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Le Projet Wallace de Domino



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Informations

» Auteur : Domino - Voir le profil
» Créé le 14/01/2013 à 16:01
» Dernière mise à jour le 14/01/2013 à 18:15

» Mots-clés :   Action   Humour   Romance   Slice of life   Unys

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023 - Là où ça coince
« Le bonheur est à l'écart, fait de huis clos, de volets tirés, d'oubli des autres, de murailles infranchissables. »
(Eric-Emmanuel Schmitt)

« Dans cette pièce, nul semble respirer
Ici c'est un abri qui m'a été donné... »

(Mylène Farmer, Ange, Parle-moi)



La masse s'abattait sur le sol goudronné avec intensité. Peu après, l'ouvrier se releva et s'essuya le front.

- Putain de merde !!
- A qui l'dis-tu...

Colin regarda son collègue ouvrier qui l'aidait à la réparation des routes.

- Au moins y'a du travail, mais bon sang quelle merde...
- Tu m'étonnes... souffla Colin. M'enfin, je préfère réparer que détruire...
- C'était pas l'inverse avant ? T'étais pas spécialisé dans les démolitions ?

Colin soupira.

- C'est fini ce temps-là. Ça m'amuse plus trop, je crois... Faut que j'prenne une pause, j'y suis depuis ce matin...
- Ouais. Y'a un café sympa dans l'hôpital à côté.

Colin haussa les sourcils.

- ... t'es sérieux ?!
- C'est moins cher qu'à la supérette et tu peux t'asseoir au moins.

Colin haussa les épaules et s'y dirigea.

C'était un bête hôpital, quoi. Pas de quoi fouetter un chat. Il alla prendre un petit snack et un coca, puis il s'assit sur un banc. Des orphelins trainaient dans l'hosto. Colin les regarda tristement, ils étaient le résultat de cette stupide guerre qui avait eu lieu il y a quelques mois.

« Sérieusement, quoi... »

Un gamin approcha en béquilles. Colin fit une grimace embarrassée. « Un petit handicapé... n'approche pas, n'approche pas, n'approche pas... »

- Euh, m'sieur, c'est votre portefeuille ?

Colin haussa les sourcils et regarda par terre, stupéfait.

- Oups !! Merci petit...
- Walter.
- Walter... euh, où sont tes parents ?

Walter regarda Colin en plissant les yeux.

- Vous... avez conscience que vous êtes dans un hôpital pour enfants ?
- Ouais et pis ?
- ... la plupart des enfants qui sont ici sont orphelins.

Colin grimaça.

- Bordeeeeel c'est tout moi, ça, toujours à dire le truc qu'il faut pas dire !
- Hm...

Colin regarda le gosse qui semblait comme résigné sur son propre sort.

- Si vous voulez tout savoir, en fait j'ai toujours vécu ici.

Colin sembla super attristé.

***

Aude sembla totalement stupéfaite.

- Adopter un enfant ?!!
- Je sais, c'est débile ! Mais le pauvre, si tu l'avais vu, tout malheureux, avec sa béquille !
- ... adopter un enfant handicapé ?!
- Je sais, je sais, mais regarde, on n'a pas d'enfant, on pourrait...

Aude regarda Colin, médusée.

- Tu prends cette décision comme ça ?
- Chaque fois que je vais manger là-bas, il mange avec moi !
- ... Colin Ludges, tu es une éponge affective !
- Je saiiiiiis ! S'il te plait !

Aude soupira.

- Il faudrait déjà que je le voie.

***

Après quatre minutes d'entrevue, Aude signa immédiatement les papiers.

- Et après c'est MOI l'éponge affective ?!!
- Tais-toi, je sais ce que je fais !
- Mais PAS DU TOUT !!
- Mais enfin Colin, tu as vu ses yeux ? Tu as vu sa façon de nous regarder ?!
- T'ES PIRE QUE MOI !!! grogna l'ouvrier.

***

- Euh...

Walter regarda sa nouvelle chambre aménagée en un après-midi.

- ... c'est... gênant...
- On a tout préparé pour toi ! sourit Aude.
- J'ai fait les travaux moi-même ! sourit Colin.
- ... euh bah... merci...

Walter entra dans sa nouvelle chambre.

- Il a même pas pleuré ! s'étonna Aude.
- Il doit être sous le choc ! admit Colin.

***

- COLIN !

L'homme se releva du canapé dans lequel il regardait une série lambda.

- Hm, ma puce ?

Aude arriva, défaite.

- Un souci ? Walter a un problème ?
- ... Je suis enceinte !
- ... Génial !
- Bah oui mais du coup, Walter...
- Walter reste notre fils, je vois pas où est le souci !
- Bah oui mais un autre enfant, si tôt après son arrivée, ça va le perturber...
- Cela ne changera rien, Aude !
- T'es sûr ?
- Mais oui.

***

- Monsieur Ludges, Madame Ludges, vous allez avoir des jumeaux !

Colin et Aude se regardèrent, hébétés devant le médecin tout sourire.

- Oh c'est pas possible ! soupira Aude.
- Seigneur... marmonna Colin.
- C'est... toujours une nouvelle délicate... mais... vous m'avez l'air d'être un couple correct donc ça devrait bien se passer, non ?

Aude et Colin se regardèrent, stupéfaits.

- Déjà trois enfants ? soupira Aude.
- On n'a même pas trente ans !! geignit Colin.
- C'est les derniers, on est d'accord ?! grommela Aude.
- Oui, oui, oui... on fera attention !
- Y'a intérêt !!

Le docteur regarda le couple, surpris.


***

Walter se leva, se posant sur ses coudes. Un peu flappy, il s'assit sur le côté de son lit. Il regarda un moment sa chambre. Il entendit que ses sœurs et un de ses deux parents au moins était levé.

Tutafeh et Vivaldaim se mirent au travail. Le premier sortit les habits propres, le second amena le fauteuil roulant. Walter s'habilla puis se posa dans le siège. Il sortit après que Tutafeh lui ait ouvert la porte.

Une fois à table, il prit le petit déjeuner. Ses sœurs Nadia et Daria vinrent le rejoindre.

- Salut Walter !
- Salut Walter !!
- Coucou les filles.

Le déjeuner se passa normalement. Aude arriva pour préparer le sien.

- Papa est déjà au travail ? s'étonna Walter.
- Oui, il a été appelé tôt ce matin pour un chantier. Tu connais ton père...
- Ne jamais rogner sur quelques heures de black. Ouais.
- Exactement !

Walter souffla. Aude s'étonna.

- Tu sembles soucieux mon chéri...

Walter haussa les épaules.

- Ouais, les choses vont pas très bien entre Naomi et Perrine, elles se sont disputées à cause du fait que Mike sorte avec Naomi qui du coup délaisse un peu Perrine.

Aude haussa les sourcils.

- C'est les feux de l'amour, ma parole !
- Un peu... Ça m'inquiète pour Perrine bien sûr, Naomi est sa meilleure amie, mais Naomi semble un peu paumée aussi...
- Doucement, doucement dis-donc... tu ne devrais pas t'impliquer autant dans les histoires de tes camarades !

Walter s'étonna.

- Bah... Je peux pas faire autrement, ce sont mes amies, je suis obligé de m'en préoccuper... je suis comme ça, je m'inquiète pour les autres...
- C'est très bien, ça, mais j'espère que tu as toi aussi quelqu'un à qui te confier !

Walter acquiesça.

- Plus ou moins, oui... Je sais que je peux me confier à Wallace par exemple.

Aude haussa un sourcil.

- C'est... le jeune homme chez qui tu vas régulièrement dormir ?
- Oui maman...
- Tes vêtements sentent la cigarette quand tu reviens de chez lui !
- ... ouais, ouais c'est possible !
- J'espère que tu ne fumes pas !!
- Maman, tu imagines la réaction de papa si je fumais ? Tu crois que j'ai envie de voir cette réaction ?!

Aude secoua la tête.

- Doux Jésus, non ! souffla Aude.
- Tu vois !

***

Walter est déposé à l'école et roule religieusement au milieu des élèves. « Et c'est reparti pour une nouvelle journée... »

Le jeune homme se traîna jusqu'à l'école avec régularité et résignation, au milieu des autres élèves. « Tout semble tellement facile pour eux... et tout semble tellement difficile pour moi... »

Walter arriva finalement devant sa sacrosainte rampe. Il la regarda. « Encore une fois aujourd'hui je vais t'arpenter. Amen. »

Walter soupira et attendit qu'on vienne le pousser gentiment.

- Salut Walter !

Le jeune homme se tourna vers Fey, accompagnée par James.

- Tiens, salut.
- Ca va ce matin ?
- Comme tous les matins, génial, super, l'école quoi... souffla Walter.
- Tu veux qu'on t'aide ?

James roula des yeux. Walter secoua la tête.

- Ça ira, Perrine ou Wallace vont certainement arriver.
- En fait, on voulait... James voulait te prévenir...

James secoua la tête, embarrassé.

- Il ne va pas te manger ! grommela Fey.
- Nan mais c'est bon, dis-lui, toi !
- Tu me prends pour ta secrétaire ou je rêve ?!
- C'est même pas à lui qu'on doit le dire, de base, c'est à Naomi !
- C'est pareil ! grommela Fey. Bon, Mike sera en retard, il a raté son bus.

Walter haussa les sourcils.

- Ah ?
- D'après James ce serait à cause d'une soirée Playstation avec Steven...
- J'crois qu'il en a rien à battre... souffla James.
- Oui, vu que je ne peux pas jouer à la Playstation, vu que...

Walter agita les mains. James le regarda, médusé.

- ... j'en ai pas ! assura Walter.
- ... ouais, ouais... putain Fey, on peut y aller ?
- Oui, je te débarrasse de ton embarrassante corvée de prévention amicale. A tout à l'heure, Walter...
- Hm, bonne matinée...

Walter les regarda partir. « Je comprends ce que Perrine trouve de gênant chez Mike et Naomi... Ils sont trop « lisses », trop « parfaits » ensemble. James et Fey se disputent, mais au moins quelque chose émane de leur relation, il a son caractère, elle a le sien, les deux ensemble, forcément... »

Walter plissa les yeux. « Pourquoi je pense des trucs pareils ?! »

Walter soupira et attendit, alors que la plupart des autres élèves de l'école s'avançaient nonchalamment vers l'établissement.

- Besoin d'aide ?
- Non merci.
- Je peux t'aider pour monter ?
- Ça ira, merci.
- J'te pousse ?
- Nooooon.

Walter souffla. « Enfin, le contraire serait plus déprimant... »

On poussa alors Walter sans lui demander la permission. Il s'étonna et regarda derrière lui.

- Oh. Salut Naomi.
- Bonjour...

Elle avait un ton quelque peu las. Walter s'en étonna d'un haussement de sourcil.

- Fatiguée ?
- Un peu.
- Fey et James me font te dire que Mike...
- ... a raté son bus et sera en retard, je sais, merci. Et ça va être ma faute...

Walter s'en étonna.

- Ah bon ?
- Dans les faits non, mais visiblement tout est de ma faute en ce moment...

Walter grimaça.

- Mais non...
- Tu me détestes, toi aussi ?

Walter sembla gêné.

- Absolument pas, voyons... Et Perrine ne te déteste pas non plus !
- Hm. Si tu le dis.

Walter soupira, pas très à l'aise. Le duo traversa l'allée centrale et franchit le couloir.

- Tu... vas... où ?
- Bah je te monte. On a bien Apprentissage Technique ?
- Oui en effet mais tu n'es pas obligée de te donner cette peine...
- De toute façon, Perrine ne va pas m'adresser la parole et Wallace va garder une distance embarrassée. Toi je sais que tu es un peu plus mature, donc on peut parler normalement, donc finalement ça n'est pas vraiment une peine...

Walter se félicita intérieurement d'être vu comme mature.

- Naomi, y'a aucun souci, tu es toujours notre amie...
- C'est pas ce qu'avait l'air de penser Perrine... Du coup je me prends la tête... J'ai fait tellement de conneries depuis le début de l'année, je me sens complètement idiote.
- Ne dis pas ça, voyons...
- Ca ne m'étonnerait pas que d'ici quelques temps je revienne en rampant, en m'excusant comme une folle auprès de Perrine parce qu'elle avait raison et que j'avais tort.
- Il y a quelque chose qui t'échappe et tu dois en parler à Perrine, Naomi. Ce n'est pas à toi qu'elle en veut, c'est à Mike.
- Mais alors pourquoi elle n'est pas venue m'en parler ?

Naomi appuya sur le bouton de l'ascenseur.

- ... parce que... hésita Walter.
- Parce que je suis une grosse conne et qu'on ne peut rien me dire à cause de mon caractère de merde.
- Tu es dure quand même...
- Je ne crois pas...

Ils entrèrent dans l'ascenseur.

- Naomi, personne ne pense que tu es inaccessible ou froide, c'est juste que... Perrine devait se dire qu'entre amis il y a des choses qu'on ne se dit pas... pour ne pas se blesser mutuellement.

Naomi pencha la tête.

- Hm. Sûrement.
- Elle ne voulait pas t'embêter ou te perturber, c'est tout. Parce qu'elle tient à toi.
- Ok, là, ça devient un peu bizarre.
- Mais c'est vrai.

L'ascenseur commença à grincer dans son ascension.

- Oula...
- Ce truc vieillit un peu... songea tout haut Naomi.
- Ce que je voulais dire c'est qu'elle ne voulait probablement pas avoir l'air de jouer les filles dépendantes de leur meilleure amie... enfin je p...

L'ascenseur trembla et finalement s'arrêta, lumières comprises. Naomi et Walter affichèrent leur surprise. Naomi soupira.

- Génial !
- Cache ta joie, je sais que je suis un convive infect mais tout de même... marmonna le jeune handicapé.
- C'est la goutte d'eau qui fait déborder le vase ! La journée ne pouvait pas être plus...

Walter tourna son fauteuil vers Naomi et la regarda, quémandant la suite. Naomi soupira et s'assit dans l'ascenseur.

- Sérieusement... Pffff...
- Rassure-moi, tu n'es pas claustrophobe ?

Naomi regarda Walter, blasée. Il haussa les épaules.

- Faudrait pas que tu vomisses, quoi...

***

Mike arriva en courant dans les couloirs. La salle en vue, il constata que les autres élèves étaient toujours dehors.

- Arceus soit loué, putain !

Mike arriva auprès de Steven et James.

- Merde, les gars, foutue panne de réveil ! grogna le jeune homme.
- Ouais, c'est ça, moi aussi j'ai des « pannes de réveil »... marmonna Steven.
- On a prévenu Walter avec Fey... marmonna James.
- Quoi ? J'vous avais dit de prévenir Naomi, pas un de ses potes !
- C'est pareil nan ?

Mike leva les yeux au ciel.

- Putain, nan ! Rien que la grosse, t'as vu la psychopathe !
- Je t'avais pas prévenu aussi ? souffla Steven.
- Ouais, ouais...

Wallace s'étonna.

- Perrine, t'as vu Walter ce matin ?
- Non... Je suppose que c'est Naomi qui l'a réceptionné...

Wallace s'éloigna de la rangée et regarda tout le monde.

- Quelqu'un a vu Walter ?!

Fey leva la main. Wallace la regarda.

- Genre y'a longtemps ?
- Ce matin en arrivant, quoi, avec James, on lui a même parlé...

Wallace haussa les sourcils.

- Et Naomi ? demanda Wallace en regardant Mike.
- J'sais pas moi !

Wallace regarda Mike, éberlué.

- T'es son MEC, comment tu peux ne pas savoir où elle est ?!
« S'écria Wallace Gribble, salope notoire qui n'a jamais eu de mec au-delà d'une nuit » songea Perrine.
- Au cas où ça t'aurait échappé, vieux, j'suis arrivé en retard !!
- Ok, ok, ça va, j'demande, moi, c'tout...
- On était censés se rejoindre devant l'école mais je l'ai pas vue dans l'allée !

Tino s'étonna et sembla réfléchir.

- Si Fey et James ont vu Walter ce matin, si Naomi était censée rejoindre Mike, alors il y a un endroit entre dehors et ici où tous deux se sont retrouvés coincés quelque part !
- Elémentaire, mon cher Sherlock... souffla Tristan.
- Tristan Gabriel Edison ! grogna Benjamin.
- Oh non ! geignit Tristan. Regarde ce que tu m'as fait faire, Tino !
- Ca t'apprendra à aimer la littérature britannique... souffla Tino.
- Orson, papier et crayon ! cria Benjamin.
- Oh non, je ne veux pas réécrire une lettre de délation aux héritiers de Sir Arthur Conan Doyle, pitié Benjamin, ça m'a fait trop mal la première fois !! geignit le jeune homme en pull jacquard.

Santana regarda Benjamin et Orson, affligée.

- Vous êtes absolument navrants...
- Bien d'accord pour une fois ! grommela Rebecca. Tino, où pourraient-ils être coincés, c'est stupide ! Dans un placard ?

La classe entendit des bruits dans l'ascenseur réservé aux handicapés. Le groupe se pressa autour.

- Naaaaan, trop fort !! ricana Steven.
- Merde, Naomi... s'étonna Mike.
- Ah ouais quand même ! s'étonna Wallace.
- Oh j'y étais presque !! Il faut que je prévienne toute l'école, c'est trop drôle !! ricana Rebecca en envoyant un SMS.
- Rappelle-moi à l'avenir de ne jamais rien te dire de personnel... souffla Santana en regardant la petite rousse.
- Non ? Coincés dans l'ascenseur ?! s'étonna Quinn.
- Je suppose qu'il faut prévenir quelqu'un... marmonna Lucy.

Francis restait impassible. Ana lui tapota le dos. Il se retourna vers elle.

- Je crois que c'est à toi de faire la démarche !
- Hein ? Pourquoi ?!
- Bah... Tu es le chef de classe, c'est à toi d'aller demander ! rétorqua Ana.
- Mais enfin, Francis ne parle pas aux ascenseurs...

Ana, Francis, Quinn et Lucy regardèrent Amélia qui sembla étonnée.

- ... Si, il peut ?! Dingue...

La prof arriva à ce moment.

- Bah... qu'est-ce qui se passe ?!
- ... MADAME C'EST UNE TRAGEDIE ! cria Steven.
- Euh... OUAIS ! C'est HORRIBLE ! Naomi est coincée dans l'ascenseur !! souffla Mike.
- Ainsi que notre pauvre ami Walter, vous savez, le petit handicapé là ! supplia Steven.
- On peut pas faire cours dans des conditions pareilles, on est au bord du deuil ! geignit Mike.

Wallace et Perrine se regardèrent, consternés. Rebecca s'essuya les yeux avec un mouchoir.

- Je ne peux pas supporter que deux de mes MEILLEURS AMIS soient dans une situation aussi précaire !!! Ça me bouleverse !

Elle tomba dans les bras d'Amélia qui lui tapota le dos.

- Là, là...

Violette grimaça, embarrassée. Tino regarda Tristan qui hocha la tête.

- Oui c'est typiquement le genre de moment où tu dois te dispenser d'intervenir.
- Dommage, ça me démange... soupira Tino, frustré.

***

- Voici Lily, ta grande-cousine, Walter.

La dame blonde salua le jeune homme qui sourit.

- Bonjour jeune homme, bienvenue chez nous !
- Et son mari Finn.

Finn salua Walter de la main.

- Leurs enfants Noé et Flora.
- Bonjour ! cria Flora, enthousiaste.

Noé s'avança et serra mécaniquement la main de Walter qui manqua de chanceler sur sa béquille.

- Bonjour monsieur. Mon papa m'a interdit de me moquer des handicapés, il dit que c'est mal de se moquer des gens différents.

Walter écarquilla les yeux, stupéfait d'un tel débit à un tel âge. Lily se frappa le visage avec la paume.

- Tu VOIS ce que tu as fait à notre fils ?!
- Je... ne vois rien de contestable dans son discours ! assura Finn.

Colin et Aude se regardèrent, entendus. Nadia et Daria saluèrent leurs hôtes. Lily sautilla, toute gaga.

- OH ELLES MARCHENT ! REGARDE FINN !!!
- Han nan, je t'ai déjà dit, deux, c'est très bien, purée... soupira Finn.
- Pour... changer de sujet, c'est bien ce soir qu'on rencontre le nouveau copain de David ? soupira Colin.

Lily acquiesça, enthousiaste.

- Exact ! Nous le présenter un Nouvel an est une bonne idée, généralement il y a une ambiance propice à la relaxation et à la bonne entente ! admit Lily.
- Elle a planifié ce dîner comme une fichue réunion d'actionnaires... signala Finn.
- MENTEUR !!! grommela Lily.
- Sérieusement, le plan de table tient sur trois pages !
- DEUX ET DEMI !

Walter clopina jusqu'au salon où une autre table était dressée pour les enfants.

***

- Mais qu'est-ce que vous attendez ?! Au lieu de baby-sitter Walter, comme deux idiotes ?!! grommela Lily.

Finn n'osait pas en placer une, Lily ayant le feu en elle. Kate et Bernice se regardèrent.

- Je sais pas trop, adopter c'est un grand pas... admit Kate.
- Ouais pis on a une dynamique de couple tellement huilée, ça pourrait changer pas mal de choses entre nous... marmonna Bernice.
- Si c'est juste pour crac-crac, sachez que les enfants ne sont en AUCUN cas une gêne si vous avez un bon verrou !
- .......... LILY !!! crièrent Finn et Kate.
- Bah quoi ! C'est vrai non ?
- La vache, tu carbures à quoi, la blonde ? ricana Bernice.

Walter, dans une chaise de jardin, ses béquilles à ses côtés, observait Flora s'amuser avec son Skitty dans le jardin. Noé approcha de Walter.

- Bonjour, cousin Walter !
- ... Noé, tu as neuf ans, j'en ai treize. Inutile de me saluer de façon aussi formelle !
- Euh... oui... Euh, j'aurais besoin de tes conseils...
- A quel sujet ?
- Eh bah... Je veux devenir policier. Comme papa. Mais pas dans un bureau, un vrai policier.
- C'est un bel objectif.
- En fait à terme, je rêve de devenir Agent du Gouvernement !
- ... c'est un objectif comme un autre... geignit Walter, ne voulant pas froisser le jeune garçon.
- Oui, je sais ce que tu penses, c'est PRESQUE irréalisable !
- ... presque ?!
- Comment je peux faire pour rester motivé et convaincu ?! Pour garder intacte ma motivation, tu vois, pour donner une forme à cette passion ?

Walter plissa les yeux.

- Euh... tu y arrives très bien tout seul je pense...
- J'ai pensé à utiliser des calepins, mais... c'est fatigant d'écrire, ça prend trop de temps !
- ... tu as essayé des schémas, des graphiques ?!
- C'est trop compliqué, des schémas, je préfèrerais quelque chose de clair, qui bouge...

Walter haussa les épaules.

- Je ne sais pas... des vidéos ?

Noé sembla avoir une révélation.

- Des vidéos de motivations !! Génial !! J'ai un nouveau caprice à faire pendant les prochaines courses !! Merci Walt !!

Walter acquiesça.

- Voilà, c'est comme ça que j'aime être salué !
- Maman, maman, je veux une caméra, et c'est grâce à Walter !
- ... l'enfoiré...

Lily lança un regard mortifère à Walter qui se recroquevilla sur sa chaise.


***

« Walter, pourquoi tu te mets toujours dans ce genre de situations, et pourquoi, bon sang, pourquoi ton père l'ouvrier n'a toujours pas installé de siège éjectable sur ton fauteuil roulant ! »

Walter écoutait patiemment Naomi.

- J'étais... contente au départ d'avoir un petit copain comme Mike. Un beau mec, sympa, bon caractère, j'étais presque certaine qu'il plairait assurément à mes parents, je vous ai prévenu à l'avance parce que Wallace est Wallace et parce que toi et Mike, c'était un peu compliqué vu votre premier combat l'un contre l'autre, j'étais CERTAINE que ça irait avec Perrine, qu'elle ne ferait aucun problème, qu'elle accepterait, qu'elle serait cool avec ça, et finalement... tout fout le camp !
- N'exagère pas...
- Plus je retourne ça dans ma tête, plus je me dis... Au moment où je trouve chaussure à mon pied, j'embête tout le monde ! Je fais quoi, moi, pour être bien avec quelqu'un, j'envoie bouler tout le monde autour et je me retrouve sans-amis pour un mec ?

Walter agita l'index.

- Le souci c'est pas que tu embêtes tout le monde en étant avec un garçon. Le souci c'est que tu as changé de comportement. Ce qui, je conçois, n'est pas ta faute, mais tu t'es éloignée de nous, tu nous parlais beaucoup moins...
- Mais c'est ça, être avec un garçon, nan ? Vous vous en doutiez !
- Nous un peu, Perrine, moins.
- Dans tous les exemples de romance que j'ai vu ou lu, le but d'une relation c'est de chercher un accomplissement !

Walter pencha la tête. Naomi le regarda.

- Non ?
- Si, un peu, mais... tu es en train de dire que ton accomplissement c'est de t'éloigner de nous.

Naomi grimaça.

- N... Non, enfin, c'est pas ce que je voulais...
- Je sais.
- Ce que je voulais dire c'est que le but d'une relation c'est de s'améliorer mutuellement, d'être heureux, de vivre la vie qu'on veut.
- Tu penses t'être améliorée depuis le début de cette relation ?

Naomi grimaça.

- T'essaies de me faire dire quoi, là ?
- Rien. Juste que de ton côté, tu t'es éloignée de nous, tu as de moins en moins parlé à Perrine qui du coup s'est sentie exclue, perdue, a ressenti des choses à ton égard que tu n'as pas comprises.

Naomi plissa les yeux.

- De son côté, Mike... s'est contenté d'être Mike.
- C'est nor... euh...
- Si tu allais me dire que c'est normal parce que Mike est un homme et que toi, tu es une femme, désolé Naomi mais là je vais perdre toute l'estime que j'avais pour toi.

Naomi serra les dents. Elle sortit Chacripan.

- Désolée, j'ai besoin de caresser quelque chose !
- ... donc tu sors un Pokémon ?
- Ca va probablement pas durer des heures, tout ça...
- Je t'embarrasse ?
- Non, non, non... Tu sais bien que j'aime parler avec toi.
- Là encore, tu l'as moins fait depuis quelques temps.

Naomi regarda Walter, gênée.

- Tu deviens lourd ! Je sais que j'ai été moins disponible !!
- Là encore, je sais bien.

Naomi soupira et s'assit contre l'ascenseur, lessivée.

- Je n'essaie pas de te faire culpabiliser, hein...
- Bah c'est raté ! soupira Naomi.

Walter grimaça, se sentant carrément idiot.

***

Les mécanos regardaient l'ascenseur tandis que les élèves – et la prof – observaient.

- Tu vois où est le problème ?!
- Bah... nan.
- Moi non plus. On fait quoi ?
- On va quand même pas appeler la maintenance...

Francis s'étonna.

- Vous êtes pas censés être la maintenance ?!

Le reste de la classe haussa un sourcil, attendant la réponse.

- On est les équipes du proviseur adjoint, jeune homme. Avant c'était seulement le proviseur adjoint qui s'occupait de ce genre de choses, maintenant chaque école est reliée à un poste de maintenance qu'il faut contacter en cas de besoin.
- ... c'est pas un cas de besoin, là ? s'étonna Francis.

L'un des deux mécanos regarda Francis.

- Notre but c'est d'effectuer un diagnostic, la maintenance arrive, elle répare !
- C'est stupide, ils peuvent passer la journée là-dedans ! s'étonna Santana.
- Oui, vous n'avez pas les moyens de réparer la panne ?! s'étonna d'autant plus Fey.
- Ecoutez, mesdemoiselles, si vous vous y connaissez mieux que nous...

Orson approcha de la structure.

- Voyoooons...

La classe observa, étonnée.

- De toute évidence, à en juger par le modèle, le filage, les appareils de tractions...
- Jeune homme, nous savons que c'est un monte-charge... grommela l'un des mécanos.

Orson se retourna, objecteur.

- Un ASCENSEUR de CHARGE, monsieur, NUANCE !! Un ascenseur qui sert à transporter de grandes charges, plusieurs personnes à la fois, dont des handicapés, donc un ascenseur prévu pour supporter un certain poids, le même genre d'ascenseur qu'on utilise par exemple dans les supermarchés ou les gares ! Si vous pensez que c'est un monte-charge, vous vous mettez le doigt dans l'œil !

Benjamin ne put qu'acquiescer et rehaussa ses lunettes.

- Il a RAISON.
- Waaaah ! s'étonna Tristan.
- C'est la PREMIERE FOIS que je l'entends dire ça ! s'étonna Robbie.
- Je dormirais moins sévère envers l'humanité ce soir... admit Tino.
- Je m'intéresse aux ascenseurs depuis que je veux construire un pont levant sur mes maquettes de trains ! On dirait pas mais c'est très difficile !
- On s'en fout... grommela Steven.
- J'ai pas l'habitude de m'exprimer mais ouais, c'est chiant là... souffla James.
- Tout le monde s'en fiche ! souffla Rebecca.

Orson s'en retourna auprès de ses amis qui lui tapotèrent l'épaule.

- Jusqu'au moment où tu as parlé de tes maquettes, c'était un super exposé ! admit Benjamin.
- Merci !
- Mais les trains c'est vraiment trop stupide...
- Tout comme tes stupides cubes en plastoc !!
- Les miens sont homologués !! grommela Benjamin.

La prof soupira.

- En attendant, je fais quoi ?
- Le mieux que vous ayez à faire c'est d'aller en classe et de nous laisser bosser !
- On est beaucoup trop inquiets ! admit Rebecca.
- Aller en cours et savoir qu'ils sont coincés là-dedans, c'est trop de choses à penser pour moi... soupira Amélia.
- Et ma copine est là-dedans !! grommela Mike.

Les ouvriers soupirèrent.

- L'ennui c'est que nous, on n'est là que pour poser un diagnostic et appeler la maintenance !
- On a compris que vous ne serviez à rien, appelez de vrais gens avec de vrais diplômes qui peuvent VRAIMENT faire quelque chose !! soupira Wallace, lassé.

Les ouvriers regardèrent Wallace, éberlués.

- Pardon ?
- J'ai dit que vous ne serviez à rien, la preuve, vous préférez vous embrouiller avec nous plutôt que de bosser !

Les autres élèves acquiescèrent. La prof s'interposa.

- On se calme, on se calme... Les enfants, on va laisser les techniciens faire leur travail...
- Un technicien c'est pas censé savoir réparer un ascenseur ? s'étonna Quinn.
- Bah oui, vous avez une qualification de technicien mais vous ne pouvez pas manipuler des appareils techniques, c'est nul ! admit Andréa.
- Totalement ! admit Tino.
- Ce qui nous ramène à la première question : Vous servez à quoi ? souffla Gina.
- Bah à rien, c'est ce qu'on dit depuis le début ! souligna Holly.

Les deux ouvriers soupirèrent une fois de trop et s'apprêtaient à partir.

- On ne bouge plus...

Les deux ouvriers virent Holland Tenorman arriver face à eux dans le couloir.

- Non mais dites donc... grommela le rouquin.
- Eh merde, le lèche-bottes du proviseur !! grommela un des ouvriers.
- Monsieur, c'est pas nous, c'est les élèves ! souffla l'autre.

Tenorman regarda l'ascenseur toujours bloqué, les élèves et leur professeur, puis il regarda les deux clampins.

- Vous avez effectué votre diagnostic ?
- C'est ce qu'on vous dit, on n'a pas pu !
- Les gosses se foutent de nous !
- Quoi ? N'importe quoi !! grommela Rebecca.
- C'est pas gentil de nous accuser ! geignit Amélia.
- On est juste inquiets pour nos potes ! souffla Mike.
- C'est surtout ce mec qui nous a injuriés !

Les ouvriers désignèrent Wallace. Tenorman haussa un sourcil.

- Wallace Gribble, comme c'est étonnant...
- Coupable. Mais ils foutent rien, véridique ! assura Wallace.
- On n'a même pas pu faire notre diagnostic !
- On sait même pas si on peut réparer nous-même ou s'il faut appeler la maintenance !

Les élèves poussèrent un grand « AAAAAH ! » soulagé.

- Vous pouviez quand même faire quelque chose à une certaine échelle ! s'étonna Lucy.
- C'est rassurant, un peu plus, on pensait que vous aviez été engagés pour faire semblant de travailler ! ricana Fey.
- Vous êtes peut-être même diplômés ! constata Benjamin.
- Si encore vous étiez beaux gosses... soupira Gina.
- Ouais, vive le cliché du mécano bedonnant et mal rasé... geignit Holly.
- Vous voyez, ces sales gosses se foutent de nous !!
- On peut pas bosser dans ces conditions !!

Clive soupira bruyamment. Tout le monde se tourna vers lui.

- Très bien, alors on va tous attendre là qu'ils meurent et qu'ils se décomposent. Une fois tombés en poussière, leurs corps passeront aisément à travers les portes fermées. Encore qu'il me semble dispensable de les sortir de là une fois morts. Mais c'est une possibilité à envisager, et dans ce cas-là, également des responsabilités. Que diront les journaux, sinon : « Un ado handicapé et une jeune fille noire, deux jeunes gens biens sous tous rapport à l'avenir prometteur, décèdent dans un ascenseur, sans que les deux êtres humains, profondément inutiles et stupides, pourtant chargés de les sauver n'aient pu faire quoi que ce soit ». Au final, vous subirez un long procès, puis serez jetés en prison pour meurtre à retardement, et une fois en prison, vous serez lapidés par les autres prisonniers pour avoir laissé mourir deux enfants, un handicapé et un de couleur, de surcroît, dans un ascenseur que vous, pauvres êtres sans qualification la moindre pour quelque travail que ce soit, avez été incapables de réparer.

Les autres élèves, la prof, les deux techniciens et Holland regardèrent Clive, sidérés.

- Funeste avenir, n'est-ce pas ?
- ... Je DEMISSIONE !
- Moi aussi !
- Hors de question, vous faites votre travail. Madame Aubert, si vos élèves ne veulent pas remonter, vous devez bien être capable de donner un cours magistral dans le couloir ?

Sandrine regarda de tous côtés et haussa les épaules.

- Voilà qui est réglé. Vous deux, vous faites votre travail et j'appelle la maintenance qui, une fois ici, aura besoin de vos directives.
- Je refuse de travailler après m'être fait insulter comme ça !

Holland soupira.

- Qui est votre employeur ?
- ... L'Etat !
- Précisément. Vous vous faites insulter par des élèves et vous considérez que c'est une offense telle que vous deviez démissionner ? Alors même que vous êtes fonctionnaires de l'Etat ?

Les deux techniciens se regardèrent en soufflant.

- Vous avez de la chance d'être le toutou du proviseur !
- C'est toujours ça de mieux que vous. Au travail.

***

- Où tu te vois d'ici dix ans ?

Naomi ricana.

- Je... je sais pas trop... mariée, avec un travail, une petite vie sociale, faire ce qui me plait. Et toi ?
- Pareil, je pense. Sauf peut-être pour la partie mariage.
- Oh Walter on a déjà eu cette discussion !
- Je sais pas, tu penses vraiment que le mariage est l'aboutissement ?
- Déjà eu cette discussion !
- Oui c'est vrai... sourit Walter.
- Je pense juste que... même si la vie normale, au fond, peut paraître banale... Banal, c'est assez bien pour moi, alors pourquoi pas.

Walter acquiesça.

- Est-ce que...

Walter releva la tête vers Naomi qui lui parlait en caressant Chacripan.

- Est-ce que tu envisages de longues études ?
- ... aussi longues que nécessaires, du moins, oui.
- Même si... ton... handicap doit s'aggraver ?

Walter tiqua de la bouche, gêné.

- Je... je préfère pas y penser. De toute façon, je suis obligé de ne pas y penser.

Naomi haussa un sourcil.

- Sinon, je ne vis plus. Je passe mon temps à m'inquiéter. Et ça... c'est juste hors de question. Et toi ?
- Moi ?
- Tu envisages de longues études ?

Naomi inspira.

- Je sais parfaitement où je vais, et donc j'irais jusqu'à ce que je doive m'arrêter, ou jusqu'à ce que je puisse m'arrêter.

Walter acquiesça.

- Tu ne doutes de rien, quoi.
- Tant qu'il n'y a rien dont je doive douter, non.

Walter regarda significativement Naomi qui plissa les yeux et soupira.

- Jeeeee voiiiis...
- Désolé, impossible de ne pas faire le lien...
- Tu as de la chance qu'on soit enfermés dans un ascenseur !
- J'ai le sentiment probablement exact que les techniciens qui s'affairent autour de l'engin sont très compétents... Je peux sentir d'ici les ondes cyniques de Wallace en action.
- Wow. Ce sera répété, amplifié et déformé ! assura Naomi.

Elle soupira puis regarda Walter, l'air entendue sur son double-discours.

- Je ne doutais pas de Perrine. Et du coup...
- Ah non. C'est pas ce que je voulais dire.

Naomi haussa un sourcil. Walter prit cet air détestable de psychiatre.

- Tu ne doutes pas de toi. Du coup tu penses que le monde autour de toi fonctionne selon un graphique très simple, sans tenir compte de la variable d'ajustement. Tu es tellement sûre de toi que tu ne fais pas attention à toutes ces petites choses imprévisibles qui arrivent dans une vie. En fait tu es comme un joueur de foot qui court sans faire attention aux autres et qui au moment critique, ne peut plus faire de passes.

Naomi se mordilla les lèvres.

- Tout à l'heure, tu as dit que la journée commençait mal.

Naomi grimaça.

- Oui...
- Pourquoi ?
- Parce que...

Naomi soupira.

- Parce que je pensais que je n'aurais personne à qui parler aujourd'hui. Je pensais que Mike serait absent et je me suis dit : A qui vais-je parler, à James qui a peu de conversation, à Steven qui en a mais qui est impossible à écouter... Et comme avec Perrine on est en froid, Wallace qui aurait hésité à cause de Perrine...

Walter acquiesça.

- Tu sais bien que moi ou Wallace on t'aurait parlé sans souci, si tu ne voulais pas parler à Perrine, on aurait trouvé ça tout à fait normal, mais à moi ou à Wallace, pas de souci...

Naomi se mordit douloureusement les lèvres.

- Je... sais pas si j'aurais osé...
- Ce matin tu es bien venue spontanément me pousser !
- J'ai... J'ai attendu une bonne minute avant de le faire, pardon Walter, mais je me disais que Perrine allait arriver...
- Elle est toujours en retard. Honnêtement j'étais à deux doigts de sortir Elektek.

Naomi soupira, pas fière.

- Je me sens idiote. Vraiment.
- Tu n'as pas.
- Pas la peine d'être rassurant, je sais que j'ai été idiote. J'ai été en tort et j'ai été incapable de le reconnaître, et... J'ai dit à ma meilleure amie qu'elle n'était plus mon amie.
- Dans la chaleur du moment, ça peut se comprendre.
- Walter, tu es sérieux, là ?

Walter haussa les épaules.

- Tu n'avais pas tous les éléments en main, tu t'es contentée de défendre ce que tu pensais juste sur le moment, c'est normal.
- Alors pourquoi je me sens aussi idiote ?
- Parce que maintenant, tu réalises que les choses n'étaient pas ce que tu croyais, parce que tu réalises un peu plus ce qui était autour, moins ce qui était « vous deux ».

Naomi acquiesça. Petit blanc.

- Pourquoi tu as si peu d'espoir ? demanda-t-elle.
- J'ai de l'espoir !
- Pour le futur. Tu n'envisages même pas de trouver quelqu'un, tu n'envisages pas une grande vie, tu feras de longues études parce que tu n'as pas le droit de t'inquiéter... C'est comme si tu te bloquais tout seul...

Walter tapota son fauteuil roulant. Naomi leva les yeux au ciel.

- C'est pas comme si tu étais coulé dans une brique, non plus !
- Ouais, ouais... Mais... Tu sais...

Walter se mordilla les lèvres.

- En tant qu'handicapé, je vis en permanence sur de l'espoir. J'espère que les choses vont s'arranger, j'espère qu'à mesure que ma vie va avancer, mon état ne va pas empirer. J'espère que mon père va cesser de s'inquiéter pour moi. J'espère que ma mère ne se fait pas trop de souci derrière son sourire de façade. J'espère que mes petites sœurs ne me voient pas comme un truc qui fait joli dans la maison mais comme un vrai grand frère sur lequel elles peuvent compter. A force, sérieusement... je...

Walter poussa un grand soupir.

- Je vis sur des espoirs. Donc pour moi l'espoir ça ne vaut rien.
- ... C'est le sophisme le plus mauvais et le plus déprimant que j'ai jamais entendu !

Naomi avait un sourire jaune. Walter réalisa ce qu'il venait de dire et s'agita, embarrassé.

- Euh, excuse-moi, c'éta...
- Tu sais Walter, l'espoir c'est la vie. L'espoir, on en a toujours besoin quand on est un être humain, c'est ce qui nous fait avancer, ce qui nous fait vivre.
- ... oui merci, je connais la citation...
- Oui mais regarde, sans espoir, tu n'aurais pas de perspectives, alors que là, grâce à tes espoirs, tu as des pistes pour t'améliorer, pour que ta vie s'améliore. J'aimerais avoir autant d'espoir. Tout en pensant que, mince, ça vaut quelque chose, parce que si ça, ça ne vaut rien, qu'est-ce qui a de la valeur, au fond ? L'argent ? L'amour ? Les rêves ?

Walter acquiesça.

- J'avais peur que tu te lances dans une morale dégoulinante mais c'est recevable.
- Je pense que l'important c'est d'avoir foi en soi, d'avoir foi en ses possibilités. C'est un espoir 2.0 quoi, un espoir avec supplément noisettes !

Walter sourit. Naomi ricana.

- Je viens de dire n'importe quoi, hein ?
- Non, j'ai compris... Un espoir avec une bonne dose de foi en soi pour les réaliser, ça se tient.
- Ne cherche pas trop à comprendre, je pense que j'ai plus dit ça pour te rassurer qu'autre chose !
- Je me doute, je suis tellement déprimant de toute façon, au point où j'en suis même Steven aurait été compatissant !

Naomi éclata de rire. Walter se mit à rire à sa suite. Après ça, petit blanc à nouveau. Naomi soupira.

- Que tu parles de Steven, ça me rappelle Mike. Il doit être inquiet...

***

Les élèves écoutaient le cours de Sandrine Aubert, dans le couloir.

- Et donc chaque attaque peut être développée de façon très malléable, on peut, dans les faits, faire ce qu'on veut avec un Pokémon. Certains pensent qu'on peut même aller plus loin, c'est le cas des membres de l'ancienne gouvernance de Poképolis qui était constituée de dresseurs aux Pokémon surhumains, ce qui a longtemps animé les débats sur l'hypermilitarisation de Poképolis mais passons !

James regarda Mike qui somnolait.

- Vieux, réveille-toi, j'suis pas ton secrétaire !!
- Hein ? J'dors pas !
- Tu fais quoi, alors, t'es en veille comme ton ordi ?
- ... Ouais voilà j'suis en veille ! T'es vraiment con parfois, James !
- Pardon ?
- ... nan rien, j'ai rien dit ! geignit Mike.
- Ouais, j'préfère.

Mike soupira. Steven le regarda.

- Tu penses à quoi, vieux ?
- J'suis en train de me demander si j'ai bien fermé la porte de chez moi, j'suis parti vachement vite quand même...

Steven haussa les épaules.

- Tu sauras en rentrant ce soir.
- Ouais, j'suppose.

***

- Je... peux te poser une question indiscrète ? demanda Walter.
- Au point où on en est... admit Naomi.
- ... Tu es heureuse avec Mike ?

Naomi haussa les sourcils.

- Ah oui ça c'est très indiscret, ça, surtout venant de toi !
- Je sais, c'est une question Wallace ! sourit Walter.
- Hm !

Naomi hésita un peu avant de répondre.

***

Tino se contentait de tenir un dictaphone pour enregistrer le cours tout en lisant un traité sur le perfectionnement des attaques pour compléter mentalement le cours. Les autres notaient sur papier ou l'ordinateur sur les genoux. Perrine regarda Wallace.

- T'as conscience que ça rend stérile ? demanda laconiquement Perrine avec son bloc-notes.
- T'as conscience que c'est pas grave ? sourit Wallace.
- Vous avez l'air morts d'inquiétude, ça fait peur...

Wallace et Perrine regardèrent Santana, à côté de Perrine qui la séparait de Wallace.

- On ne peut pas faire grand-chose pour les sortir de là... Ca servirait à quoi de s'inquiéter ?
- Ils sont bloqués dans un ascenseur, on ne sait pas ce qui peut se passer. Et si Naomi s'évanouissait ? Walter est handicapé, il n'est pas à exclure qu'il lui arrive des bricoles. Et s'ils manquaient d'air ?

Wallace leva les yeux au ciel.

- T'es d'un optimisme, ça fait peur.
- Moi je serais très préoccupée à votre place.
- Ouais bah on est cool et relax parce que baaaah, on peut rien faire d'autre ! Je suis pas Orson le petit bonhomme Michelin qui est fan des ascenseurs sur Facebook !
- Je dirais insouciant.
- Qu'est-ce que t'en sais, Lady Pong-Pong ?

Santana plissa méchamment les yeux. Perrine haussa les sourcils, surprise.

- Ouah, ça monte vite avec vous deux... marmonna la jeune fille.
- Madame ?

Wallace et Perrine regardèrent Santana, étonnés.

- Quoi, tu vas me dénoncer à la maîtresse comme une gamine ?
- Oui Santana ? demanda Sandrine Aubert, s'interrompant dans son cours.
- Euh... Wallace me demande si j'utilise des nems pour mon hygiène féminine !

Wallace écarquilla les yeux. Perrine se baissa pour cacher son rire alors que les autres élèves firent des mines dégoûtées.

- Eeeew !!! geignit Christina.
- Dégueu !! geignit Mike.
- Mais où il va chercher tout ça ?! s'étonna Fey.
- Quel vicieux !! grommela Quinn.
- Non mais Wallace ! s'étonna Robbie.
- MAIS C'EST PAS MOI C'EST ELLE !!! PERRINE, DIS-LEUR !

Perrine releva la tête et haussa les épaules, crispée car au bord de l'hilarité.

- Wallace, tu vas au coin !
- Au COIN ???
- Oui, allez, à côté de monsieur Tenorman !!
- Pffffffffffff c'est trop injuste ! Tu perds rien pour attendre, Miss Wong-Tong !
- WALLACE ! s'offusqua la prof.

Wallace regarda la prof, dépité.

- Pourquoi c'est toujours sur moi que ça tombe ?
- La vie est ainsi faite... marmonna Perrine.
- Tu es un homme, subis et tais-toi... grommela Santana en retournant dans ses notes.

Wallace grommela et alla se mettre à côté de Holland qui surveillait les mécaniciens guidés par les techniciens. Helen arriva, étonnée.

- Mais qu'est-ce que c'est que ce bazar ?
- Bonjour madame ! Walter et Naomi sont coincés dans l'ascenseur ! sourit Wallace.
- Pourquoi tu n'es pas avec les autres ? demanda Helen.
- Santana me harcelait sexuellement, j'ai invoqué mon droit de retrait.

Helen regarda Wallace, suspicieuse.

- ... et j'ai peut-être balancé une ou deux insultes racistes !
- Wallace !
- Oh ça va arrêtez de vous prendre pour ma mère ! souffla le jeune homme.

Preston le Miradar mordit Wallace au mollet.

- AUGH !!!
- Si j'veux. Monsieur Tenorman !

Le rouquin se tourna vers la fausse rousse.

- Madame Clover vous n'êtes pas censée être en classe ?
- Je n'ai pas cours ce matin, mais je viens quand même pour bosser.
- C'est d'un sérieux très honorable.
- Je peux savoir pourquoi ces gens font semblant de travailler ? demanda Helen.

Les quatre ouvriers regardèrent l'adolescent, la prof et l'administrateur.

- Mais bordel c'est quoi votre problème ?
- Vous vous y connaissez mieux que nous ou quoi ?
- Ah je ne prétends pas, marmonna Helen, cependant depuis tout à l'heure vous tournez autour de l'ascenseur, vous ouvrez la boîte de commande, vous ne touchez à rien...
- On EXAMINE !
- C'est pas ce que vous étiez censés faire tout à l'heure ?! s'étonna Wallace.
- On n'arrive pas à trouver la panne !
- Vous pensez que c'est simple ?!
- C'est votre boulot ! soufflèrent Helen et Wallace en même temps.

Prof et élève se regardèrent, intrigués. Les mécaniciens et les techniciens soupirèrent.

- Ok, vous savez quoi ? On n'est pas formés pour ce genre de cas.

Holland haussa les sourcils.

- Pardon ?
- On est censés pouvoir réparer mais là c'est une panne mécanique, pas une panne technique.
- Mais... vous avez des mécaniciens avec vous !
- En... fait ce sont plus des électriciens, la panne n'est pas électronique à première vue.

Holland serra les dents et regarda Helen et Wallace.

***

- Je viens de recevoir mon premier Pokémon...
- Et ?

Walter regardait Nell, intrigué. Non pas qu'ils étaient spécialement proches mais il ne s'attendait pas à la voir venir lui parler comme ça, lors d'un dîner en famille.

- Eh bah en fait j'en veux beaucoup plus.
- Ah ?
- Oui, déjà avec Carapuce, je me sentais vraiment heureuse, entourée... Maintenant avec Négapi, C'est génial d'avoir des Pokémon, on ne se sent jamais seul !

Walter acquiesça, comprenant sincèrement cette façon de penser.

- Mais en même temps, il faut peut-être que je n'en ai pas trop...

Walter plissa les yeux.

- Tu veux dire que tu veux en capturer beaucoup ?
- J'aimerais avoir une belle équipe assez rapidement en fait... et plus tard peut-être en capturer plein !

Walter acquiesça.

- Devenir une chasseuse agréée par l'Etat, quoi.
- Euh... Oui, si possible, oui, mais pas tout de suite hein !
- Bien sûr que non, tu es encore petite. Je crois qu'une loi est passée qui diminue seulement l'allocation Jeune Dresseur avec l'âge du dresseur et plus avec le nombre de Pokémon du dresseur, après c'est selon ton envie.

Nell acquiesça.

- Maintenant tu ne dois pas oublier que tu as le droit de faire ce que tu veux avec les Pokémon, et avec ta vie, Nell. D'accord ?

Nell acquiesça.

- Merci Walter.
- C'est gratuit !

***

Walter se sentait comme un petit véhicule. Difficile de se faire au fait d'être monté sur roues.

- Merci de l'avoir laissé s'entrainer un peu ici... marmonna Aude.

Malcolm leva la main, pas gêné.

- Vous étiez sur le chemin, autant qu'il essaie de s'y faire avant de repartir.
- Oui et puis de toute façon la maison était aux normes avec la mère de Malcolm, donc il va pouvoir commencer à s'y habituer ! admit Claire.

Colin acquiesça, l'air un peu effondré.

- Tu vas t'y faire, Colin, ça ne change rien ! assura Malcolm.
- Je sais, je sais, mais... Pfff... J'ai envie de dire, quel gâchis...
- Colin ! geignit Aude.
- Si on avait agi plus tôt... si on avait accepté les procédures expérimentales...
- Ca aurait tout aussi bien pu empirer les choses ! signifia Malcolm.
- Je sais, mais bon... J'peux pas m'empêcher de regretter...
- Colin, la culpabilisation, ça n'amène rien.

Malcolm tendit son verre.

- Et je sais de quoi je parle !
- J'y vais papa !

Malcolm, Claire, Aude et Colin se tournèrent vers Nell qui sortait, suivie par Carapuce, Négapi, Chétiflor, Goinfrex, Tarsal et Gruikui. Malcolm soupira.

- J'aimerais savoir QUI lui a donné l'idée de capturer tous ces Pokémon...
- Oh, Malcolm, si elle est bien comme ça... soupira Claire.

Walter se fit tout petit dans son fauteuil.[/i]


***

La porte du bureau d'Aloysius Grant s'ouvrit et laissa entrer Holland suivi par Helen suivie par Wallace.

- C'est pas vrai, c'est pas possible, pourquoi moi ! geignit le proviseur.
- Monsieur...
- Vous, vous êtes censés superviser les travaux sur l'ascenseur !
- Oui mais...
- Vous, vous êtes censée être en classe, non ?
- Je n'ai cours que cet après-midi ! assura Helen.
- Et vous, vous AVEZ cours !
- J'ai été puni par le féminisme et le lobby vietnamo-lesbien !

Le proviseur grimaça une demi-seconde puis agita les bras en mode « Oh et puis merde ».

- C'est pour QUOI ?
- Les types de la maintenance ne servent à rien, ils ne sont pas qualifiés pour réparer un ascenseur ! admit Holland.
- Quoi ? Mais... les techniciens du proviseur adjoint auraient dû appeler des mécaniciens...
- Ils avaient le choix ? s'étonna Helen.
- Oui en théorie ils peuvent appeler n'importe quel type de réparateur, il y a un budget spécifique...

Le proviseur regarda un dossier. Wallace s'étonna.

- On les voit en réunion avec le personnel, forcément...
- Bah oui c'est d'autant plus surprenant... marmonna Holland.
- Nous avons vérifié ces dossiers ensemble, n'est-ce pas ?
- Oui monsieur, bien sûr !

Helen regarda Wallace, les deux semblaient face à un maître et son esclave.

- Eh bien alors... Voilà, budget maintenance...
- Ne faut-il pas voir cela avec le proviseur adjoint ?
- Je le ferais, pour qui me prenez-vous, Holland !
- Oui, oui, bon... Euh... Où est la feuille du budget mécanique ?

Proviseur et assistant se mirent à chercher comme des demeurés. Helen regarda Wallace.

- J'comprends rien... marmonna Wallace.
- L'administration, Wallace, c'est tout un tas de choses tellement guindées et réglées comme du papier à musique que le moindre manquement dérègle toute la machine. L'administration, c'est tordu au point que même les blagues potaches entre collègues devant la machine à café nécessitent des formulaires pour être validées.
- Vous, vous avez travaillé dans l'administration, je me trompe ? demanda Wallace.
- J'ai géré des musées, c'était grosso modo pareil... admit la prof.

Holland sortit un dossier et exulta.

- Bon sang ! Le budget n'a pas été validé !
- PARDON ?
- Je pense à un oubli de feuillet. Regardez. Ménage, Alarmes, Dispositif anti-incendie mais aucune trace de la mécanique.
- Bon sang de bois, mais qu'est-ce que le directeur a foutu ?!
- Le directeur ? s'étonna Wallace.
- Oui, jeune homme, le directeur ! C'est le directeur qui est chargé de présenter les budgets qui doivent être validés !
- M'engueulez pas, c'est votre système qu'est pourri ! grommela Wallace.
- Qu'est-ce que je vous ai dit à propos de votre langage ? grommela le proviseur.
- D'éviter de faire remarquer aux gens quand le système qu'ils servent est fondamentalement merdique ? Ouais, c'est rentré par une oreille, ressorti par l'autre, je suis pas bon pour obéir aux ordres.

Le proviseur leva les yeux au ciel.

- Holland, allez voir ça !
- Bien monsieur !

La petite troupe se dirigea vers le bureau du directeur.

- Je serais jamais dans l'administration, c'est trop débile... soupira Wallace.
- Qu'est-ce qui vous insupporte à ce point dans un système carré où tout est réglé de manière précise ? souffla Holland.
- N'est-ce pas un peu évident, là ? demanda Helen.
- Le moindre oubli et c'est la chienlit, j'veux dire... Y'a aucune logique, c'est juste un enchaînement de procédures sans lien logique, tout se fait d'une certaine manière et du coup au moindre petit grain de sable dans la machine, tout fout le camp !
- C'est pour ça que nous devons être irréprochables.
- Mouais, pour mieux vous défendre en cas de pépin.
- Vous êtes trop jeune pour comprendre... soupira Holland.
- Il est jeune mais il a raison. Tout est affaire d'apparences, tant que vous avez l'air de bien travailler, on peut tout vous pardonner en fait... marmonna Helen.

Holland leva les yeux au ciel, et ils entrèrent dans le bureau du directeur.

- Monsieur Williamson...
- Hmmm ? Que me voulez-vous, Tenorman ?

Holland se contenta de montrer la feuille du budget non-validé. Le directeur grommela.

- Quoi, ça va encore être ma faute ?! Vous êtes culotté, dites-donc !!
- La feuille n'est pas remplie, les budgets même pas numérotés, c'est un peu votre rôle !!
- Pourtant tout a bien été validé, ceci n'est qu'un récépissé !

Holland haussa les sourcils, surpris. Le directeur soupira.

- Le proviseur est vraiment un crétin. Allez lui dire que c'est bon, que c'est juste une erreur de typo.

Holland haussa les sourcils, courroucé.

- Une ERREUR DE TYPO ? Deux jeunes gens sont bloqués dans un ascenseur, on ne sait même pas si on peut appeler de vrais mécaniciens aux frais de l'école et vous nous dites que c'est juste une erreur de typo ?

Le directeur soupira.

- Dheu, parce que vous êtes incapables d'appeler les mécanos vous-mêmes ?! Vous avez besoin d'une autorisation ? De respecter des procédures ? Cela n'est pas mon affaire !

Holland recula, hébété. Helen acquiesça.

- Voilà, c'est ce qu'on disait tout à l'heure. Que de la gueule, personne pour assumer ses responsabilités.
- Je peux savoir qui vous êtes ? demanda le directeur à Helen.

Elle leva les yeux au ciel et le regarda.

- Sûrement une erreur de typo...

La petite assemblée sortit de la salle avant que le directeur n'explose.

***

- Mais ça c'est à moi !
- Même pas vrai c'est à moi !
- Pis arrête de mettre toujours la même chose que moi !!
- Mais nan, toi arrête !

Walter s'arrêta devant la chambre de ses sœurs.

- Dites, les filles...
- Elle veut pas arrêter !
- C'est elle qui veut pas !

Walter regarda Nadia et Daria, éberlué.

- C'est quoi le problème ?
- Elle a les mêmes habits que moi ! grommela Nadia.
- C'est normal on est sœurs !! grogna Daria.

Walter plissa les yeux.

- Mais euh... c'est normal, vous êtes jumelles, je suppose que papa et maman vous habillent pareil parce que... ça fait joli...
- Mais nous on veut plus !
- Ouais, on en a marre ! On n'est pas une seule, on est deux !
- Ouais !

Walter plissa les yeux, perplexe.

***

- Mamaaaan...
- Oui, Walter ?

Aude se tourna vers son fils, surprise.

- Je crois qu'il y a un souci avec les filles.
- Il y a régulièrement un souci avec tes sœurs, Walter...
- Elles en ont marre d'avoir les mêmes vêtements...

Aude haussa les sourcils et regarda son fils, étonnée.

- On parle de tes sœurs ?
- Oui.
- Celles qui veulent tout le temps la même chose quand on fait les magasins ?

Walter hocha la tête.

- Vu comme ça...
- Eh oui, Walter. La plupart du temps, les gens ne savent pas ce qu'ils veulent... Et cette règle est absolue concernant tes petites sœurs !

Walter acquiesça, pensant bien que ça pouvait tout aussi bien être pareil pour lui.


***

- C'est... sympathique.
- Sympathique ?
- Ca fait du bien d'être avec quelqu'un de relax, qui ne me prend pas la tête, qui me traite comme une princesse, qui est patient avec moi, qui me permet de sortir un peu de l'univers habituel...

Walter acquiesça. Naomi souffla.

- Même si parfois j'aimerais un peu de vrai, un peu de sincérité... J'ai parfois trop l'impression qu'il me dit ce que je veux entendre plutôt que... me contredire ou débattre avec moi... Ca me manque un peu, ce genre de choses.

Walter grimaça. Naomi soupira.

- Je crois que niveau conversation, toi et les autres vous le battez à l'aise, en fait. Il est vraiment trop beau-parleur. Au début ça me plaisait, je me sentais valorisée, mais à force... je crois que ça me gonfle !
- Ca peut se comprendre.
- D'un autre côté je me sens idiote parce que j'ai le sentiment de... comment dire, de mordre la main qui me nourrit.

Walter pencha la tête, sérieusement intrigué.

- De cracher dans la soupe !
- ... c'est toujours aussi bizarre et incongru...
- Disons que j'ai le sentiment de défendre une cause perdue en défendant cette relation.

Walter s'étonna franchement. Naomi soupira.

- Plus je pense à l'avenir avec Mike et plus je me dis... Viendra un moment où il voudra coucher avec moi, viendra un moment où on va s'installer ensemble, viendra un moment où on fera des enfants et où on devra emménager...

Walter plissa les yeux.

- ... et chaque fois que j'imagine ça avec Mike, je vois les choses de manière tellement banale !
- C'est juste une amourette de secondaire, tu n'es pas obligée d'aller si loin dans ta réflexion !
- Si, parce que je pense d'abord à l'avenir ! Pour moi le présent est une préparation permanente !

Walter pointa Naomi du doigt.

- C'est ça ton problème ! C'est ça, ton problème immédiat !

Naomi s'étonna.

- Tu es sortie avec Mike parce qu'avec lui, tout serait facile !
- Oui...
- Avec tes parents, dans la vie plus tard, niveau travail, niveau survivance financière etc.
- Voilà...
- Tu as pensé que sur le long terme, Mike était un bon parti.
- Exactement !
- Mais tu n'as pas pensé à ton bien immédiat. Résultat maintenant, tu gamberges parce que tu penses savoir que ça n'ira pas.
- Oui !
- Mais qu'en sais-tu ? Et c'est ça le souci : Si tu fais les choses par anticipation, tu ne les apprécies pas !

Naomi acquiesça, on ne peut plus d'accord.

- La dernière fois que tu as agi dans une impulsion sur le moment, c'était quand ?

Naomi se mordilla les lèvres.

- Quand j'ai défendu Perrine et quand je me suis rapprochée d'elle... il y a bien quatre-cinq ans.

Walter hocha la tête. Naomi enfonça la sienne entre ses genoux.

- Je me sens idiote, et pire, je me sens calculatrice !!
- Eh, non, c'est pas ce que je voulais dire !
- Ah non ?
- Non. Tu es juste trop prévoyante, trop obsédée par ton avenir. Les choses peuvent se passer parfaitement, oui, c'est vrai.

Naomi regarda Walter comme si elle regardait le Messie.

- Mais elles peuvent aussi se passer bien. Sans que tu n'aies cherché à ce que ça se passe parfaitement. Juste bien. Ce n'est pas parfait, mais c'est bien, c'est une vie que tu ne voulais pas comme ça, mais tel quel c'est bon. Ça passe. Et ça peut même être mieux que ce que tu espérais !

Naomi sourit.

- Tu as vraiment les mots pour me rassurer.

Walter haussa les épaules.

- On est amis, les amis c'est fait pour ça.

Naomi hocha la tête, un peu plus souriante que ce matin.

***

Les mécaniciens s'activaient enfin.

- Tout ça pour ça... souffla Wallace.
- Hm, comme tu dis, beaucoup de bruit pour rien... assura Helen.
- J'comprends pas. Comment ça peut fonctionner, un système comme ça ?

Helen regarda son élève.

- J'veux dire... C'est n'importe quoi, tout le monde se renvoie la balle, mais ça reste quand même comme ça parce qu'au fond, ça marche sur un pied mais ça marche quand même. C'est complètement paradoxal, l'administration se fend de tout gérer, d'être un univers carré où tout a sa place et où chaque agent est le garant de grands principes mais au final, quand on s'y confronte, c'est la débandade. C'est comme si j'allais dans une agence pour l'emploi et que je demandais directement un travail, en posant cette seule question : « Je veux un travail ». On ne me donnerait pas un travail, on chercherait à m'évacuer le plus vite possible sur d'autres endroits ou d'autres supports qui me permettraient d'en chercher et d'en trouver éventuellement, mais l'agent administratif qui me recevrait serait incapable de répondre à ma requête qui est pourtant le B.a.-ba. Je comprends pas comment on peut prétendre être quelque chose et finalement être tout le contraire.

Holland inspira.

- Comme vous dites, le système fonctionne, à cloche-pied, peut-être, mais il fonctionne. Tant que tout se tient, que rien ne chute, alors tout reste en place. C'est là tout le talent de la grande administration.

Helen ricana.

- Faut quand même sacrément la secouer, l'administration, pour qu'elle fonctionne.
- C'était un cas exceptionnel.
- Oui mais c'était ridicule. Un simple récépissé manquant et tout fout le camp, n'est-ce pas absolument idiot ?!
- D'un certain point de vue, peut-être.

L'ascenseur se remit à fonctionner.

Till the end of time – Devotchka (BO de Little Miss Sunshine)

- Ah bah quand même !
- Walter et Naomi vont sortir ! cria Wallace.

La classe remballa ses affaires et se dirigeait vers les escaliers.

- A plus, madame Clover !
- Hm ! sourit Helen en saluant Wallace qui montait avec les autres.

Holland observait l'ascenseur, aux côtés d'Helen.

- Et sinon, ça vous dirait une invitation à dîner ? demanda l'assistant du proviseur.

Helen regarda Holland, stupéfaite.

- Et sinon, ça vous dirait ma main dans la figure ?!

Helen partit, courroucée. Holland haussa les épaules.

***

L'ascenseur montait.

- Ah, quand même... marmonna Walter.

Naomi se mordilla les lèvres. Ils arrivèrent en haut et sortirent. Les pas des autres élèves résonnaient dans les escaliers.

- Dis, Walter...
- Hm ?
- ... est-ce que j'ai le droit d'avoir honte de tout le temps faire des bêtises ?

Walter haussa les épaules.

- Tu grandis, tu apprends, tu explores de nouvelles choses, c'est bien. On est au secondaire, la vie change un peu, les relations avec les gens se développent, évoluent, changent... C'est normal. Moi-même, je fais plein de bêtises, par exemple je parle trop.

Naomi sourit.

- Tu... tu n'as pas à avoir peur ou honte, Naomi, tu as le droit d'être ce que tu veux, peu importe, tant que tu te sens heureuse.

Naomi regarda Walter qui hocha la tête. Mike arriva, interrompant ce moment étrange.

- Bah PUTAIN, toi, quand tu restes coincée ! Hahaha !

Naomi sourit. Mike resta face à elle alors que les autres élèves se dirigeaient vers la classe.

- Sérieusement, Naomi, c'était TROP marrant ! Faudra trop qu'on en parle ce midi, c'était trop fort ! On a fait cours dans le couloir, t'aurais été là, ça aurait été trop cool !

Naomi acquiesça.

- Euh... on en rediscutera plus tard, si tu veux, là, je suis un peu fatiguée.

Naomi dépassa Mike. Ce dernier regarda Walter.

- Qu'est-ce qu'elle a ?!
- ... je l'ignore, à vrai dire...

Naomi se dirigea vers Perrine et lui tapota l'épaule. La grosse fille se retourna vers sa copine noire et maigre.

- Je... Je sais pas quoi dire, j'ai été idiote, excuse-moi de ne pas avoir vu plus tôt que tu allais mal.

Wallace observait, étonné, puis il se dirigea vers Walter. Perrine haussa les épaules.

- T'as pas à t'excuser, je t'en ai jamais voulu.
- Excuse-moi de t'avoir dit qu'on n'était plus amies...
- Je t'excuse, pas de souci.
- ... J'te mérite pas comme amie !
- Ne me serre pas dans tes...

Naomi serra Perrine dans ses bras, l'air un peu paumée.

- Naomi, pas de soucis, je comprends la situation.

Naomi se sépara de Perrine qui hocha la tête.

- Je comprends. A tout à l'heure en cours.

Naomi acquiesça. Mike approcha d'elle.

- Euh... tu m'expliques ?

Wallace alla rejoindre Walter.

- Tout va bien ?
- Oh tu sais, j'ai l'habitude des trucs qui fonctionnent pas.

Walter tapota ses jambes, ce qui fit rire Wallace. Naomi se tourna vers le jeune homme handicapé, l'air un peu sonnée.

- Eh, te fais pas un sang d'encre, ça y est, t'en est sortie de cet ascenseur ! Me dis pas que tu veux y retourner ?! Hahaha !

Naomi se mordilla les lèvres, observant Walter, distraite aux paroles de Mike.