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Aide-toi et le ciel t'aidera de Kydra



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Informations

» Auteur : Kydra - Voir le profil
» Créé le 11/01/2013 à 09:14
» Dernière mise à jour le 12/11/2013 à 21:26

» Mots-clés :   Aventure   Présence d'armes

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Chapitre 64 : Charge
La marche paraissait bien plus difficile à Vaillant-Rescapé depuis qu'il portait le poste. Ce poids supplémentaire le faisait transpirer. Il suivait cependant toujours le rythme des humains avec une certaine facilité. Alors que ses compagnons de marche paraissaient accablés après de longues heures de progression dans le couvert de la végétation, l'Insécateur se sentait à peine fatigué. Par contre, les bretelles de son harnachement lui cisaillaient les épaules, lui causant une douleur incessante. Il avait l'impression que ses lames allaient se détacher de son corps... Sans compter qu'il ne pouvait nullement espérer bouger une aile ! Les pauses n'y faisaient rien : dès qu'il retrouvait la tension de son fardeau, son supplice reprenait. Il fallait dire que ce n'était pas un système très adapté à la morphologie de son porteur !

Le groupe ne s'arrêtait jamais plus d'une nuit et encore, plus de quelques heures de sommeil contiguës étaient un luxe. Chacun vivait dans la crainte de se retrouver face à un groupe de Pokémon. A chaque bruissement dans la végétation, les hommes retenaient leur respiration. La nuit, la moindre ombre les effrayait. Dès réception d'un message radio, des interrogations montaient dans les rangs, émettant l'hypothèse d'un signalement ennemi. Il fallait agir pour que les combattants focalisent leur esprit sur autre chose que sur leur peur. Le commandant entreprit donc d'organiser l'attaque du campement de l'armée. L'ambiance changea du tout au tout à partir de ce moment. L'inquiétude se mua en impatience. Non seulement le fait que l'ennemi fût humain rassurait les rebelles, mais de plus, ils espéraient profiter des installations conquises pour s'éloigner de la forêt et des positions des Pokémon. Ces derniers se montraient généralement encore réticents à l'idée de s'approcher des constructions.

Vaillant-Rescapé se réjouissait lui aussi de cette perspective. Il allait combattre des humains, avoir enfin un peu d'action, s'éloigner des Pokémon... Que rêver de mieux ? Lui, ainsi que tous les hommes, reprirent de l'entrain à la marche, en pensant qu'ils se rapprochaient de leur objectif. Malgré toutes les explications de leur hiérarchie pour justifier les longs déplacements, la motivation était bien plus simple à trouver quand ils avaient l'impression de vraiment œuvrer pour la victoire. Bientôt, la grande colonne se sépara en plusieurs petits groupes, qui progressaient de plus en plus prudemment et lentement. La tension remonta dans les derniers jours de déplacement... Cependant, cette fois, il s'agissait de celle du combat à venir. Un combat qu'il est possible de gagner, pas un assaut par surprise de Pokémon quasi-imbattables.

La dernière nuit, les hommes ne tenaient plus. Ils s'étaient couchés, pour passer le temps jusqu'à l'heure du départ, mais personne ne réussit à dormir. Vassili serrait son fusil contre lui, Eclair-de-Liberté roulé en boule à ses côtés. L'Elecsprint léchait abondamment son dresseur, ressentant sa fébrilité. Bientôt, leurs sentiments se mélangèrent. L'humain se clama un peu ; les muscles du Pokémon électrique tremblèrent de temps en temps. Il se sentit bientôt impatient, sans trop bien comprendre pourquoi. Il avait subitement envie de courir, de se jeter en avant pour faire redescendre toute cette pression qui l'assaillait.

Malik secoua sans bruit les hommes qui somnolaient. En quelques minutes, tous étaient debout, avaient mis leur sac sur le dos. De son propre sac, il tira un vêtement imperméable qui lui était fort utile en temps de pluie. Il l'étala sur le sol, puis, à l'aide de petits morceaux de craie de couleur, il entreprit de tracer un croquis. A chaque rectangle qu'il dessinait, il lui donnait un numéro, ou un nom. Il expliquait ensuite ce qui caractérisait ce bâtiment précis. Enfin, quand il eut terminé d'exposer le cadre de l'assaut, il présenta la manœuvre.

...............- Le groupe avec Victor sera en appui ici, montra-t-il en désignant une zone gribouillée en vert. Ils ont eu les horaires des relèves de garde et les itinéraires des rondes. Ils devraient détruire le véhicule, mais nous n'avons qu'une roquette... Dans tous les cas, dès qu'elle sera tirée, ce sera pour nous, qui sommes ici, le signal de l'assaut. N'oubliez pas, ceux qui n'ont que trois chargeurs, de ne commencer à tirer que quand nous arrivons au niveau de ce bâtiment. Ensuite, pour nous, ce sont les treize, quatorze et quinze que nous devons reconnaître, expliqua-t-il en désignant les bâtiments du doigt. Enfin, une fois que ce sera fait, le commandant donnera ses ordres. Vous êtes prêts, c'est bon ?

La mine grave, les sergents acquiescèrent. Malik replia son vêtement en prenant soin de ne rien effacer, puis il fit signe de le suivre. Ils disparurent à la queue leu leu dans la végétation, à la suite de leur chef. Ils devaient se rendre au plus près de la position ennemie, pour avoir le moins de distance à parcourir pour mener l'assaut. Vassili avaient été choisi pour faire partie de l'attaque, dans le but de produire la surprise et l'incompréhension adverses. Les militaires ne s'attendraient en effet jamais à se faire assaillir par leurs semblables et des Pokémon combattant côte à côte. De ce fait, voyant apparaître des armes à feu, ils prendraient certainement leurs dispositions pour les contrer, sans prévoir une tactique englobant le corps à corps utilisé par le deuxième type de guerrier. Les espoirs de victoire, outre les plans fournis par l'informateur, reposaient sur cette désorganisation temporaire que créerait l'apparition de Pokémon.

La tension était à son comble. En face, on distinguait les constructions, se dressant en masses sombres sur un fond presque tout aussi obscur. Du fait du manque de luminosité, les rebelles s'imaginaient sans cesse avoir vu une forme bouger, tout près d'eux, dans le buisson d'à côté. Vassili entendait battre son cœur dans sa poitrine, il sentait déjà l'adrénaline lui picoter le bout des doigts. Eclair-de-Liberté commençait à paniquer, comprenant enfin qu'il allait se battre. On aperçut finalement les mouvements ennemis, dans l'enceinte du poste. Chaque homme serrait son fusil contre lui, prêt à bondir au signal. A leur gauche, sans doute le meilleur tireur anti-char devait être en train de souffler calmement en attendant le départ de la voiture, prévu dans quelques minutes...

Ces minutes s'écoulèrent avec une lenteur effarante. Enfin, les gardes sortirent, encore à moitié endormis, de leur poste. Ils embarquèrent en rigolant et le moteur gronda. La voiture s'éloignait progressivement. L'itinéraire prévu était parfaitement maîtrisé par les rebelles, aussi, quand le carrefour arriva, tout le monde savait que le véhicule tournerait à droite, puis s'arrêterait devant la barrière. La portière s'ouvrit. Au même moment, une flamme illumina la végétation une fraction de seconde. La roquette s'écrasa à quelques mètres de son objectif. L'homme qui avait débarqué pour retirer le cadenas fut projeté à terre, alors que les autres refermaient déjà les portes pour repartir, sans l'attendre.

Malgré sa déception face à l'échec de l'autre section, Malik ne se laissa pas déstabiliser. Il donna l'ordre de l'assaut. Les hommes bondirent hors de leur cachette. Le temps était le principal ennemi de l'action rebelle. La défense s'organisait un peu plus à chaque instant perdu ; la surprise perdait peu à peu de son effet. Aussi, la distance à parcourir avant d'atteindre le poste de garde semblait interminable aux combattants qui couraient à la faible lueur de la lune. D'autant plus à Vassili, qui ne tirait pas : les munitions devaient être économisées... Les combattants avaient depuis longtemps pris cette habitude : ceux qui avaient la capacité de maîtriser leurs émotions, les plus rompus au combat, n'avaient été que très peu dotés et ne dépensaient des cartouches que quand cela devenait utile et nécessaire.

La respiration saccadée de son dresseur effrayait Eclair-de-Liberté autant que son propre sort. Il sentait son meilleur ami en proie à la peur la plus profonde, qui lui étreignait les tripes. Cela ne faisait qu'amplifier sa propre anxiété ; il avait l'impression que ses pattes ne le portaient plus. Il prenait conscience de ce qui allait arriver... D'ici quelques instants, la défense serait en place : Vassili et lui seraient alors tous deux en danger de mort ! L'Elecsprint ne pouvait se résoudre à laisser son humain risquer sa vie sans rien faire. Il avait peur de ne pas être à la hauteur, de ne pas être capable de le protéger.

Les premiers coups de feu de leurs adversaires claquèrent dans la nuit. Les soldats arrivaient en grand nombre, avec l'intention commune de ne laisser personne mettre un pied dans le poste de garde. Deux masses noires fondaient l'une sur l'autre, dans un bruit et un fracas indescriptibles. Bientôt, leurs contours se confondirent, ne laissant plus place qu'à un fouillis d'ombres qui s'entretuaient. Vassili courait, le fusil contre lui, vers la bataille. Autour de lui, il entendait déjà les cris, sentait les balles siffler, voyait leurs impacts dans la terre. A ses côtés, des hommes tombaient, coupés net dans leur élan. Certains de ses camarades hurlaient, se tordant de douleur au sol. On s'arrêtait, on les aidait et Vassili continuait sa course.

Enfin, Eclair-de-Liberté sentit la peur de Vassili disparaître, alors qu'il tirait sa première cartouche. L'action prenait le dessus sur ses sentiments. Il se jeta à corps perdu dans la mêlée, les traits tirés. Aussitôt, l'Elecsprint s'élança lui aussi avec énergie, sur les talons de son humain. Quand un soldat visa son meilleur ami, il lui sauta à la gorge sans hésiter et planta ses crocs dans sa chair. Là, il comprit comment son partenaire avait pu faire s'envoler son inquiétude... Il sentit les muscles de sa victime se contracter, il eut un tremblement à cette idée, mais passée la première seconde de latence, il ne restait au Pokémon électrique plus que la rage du combat. Celle-ci prit le pas sur ses impressions de malaise et dirigea toutes ses actions. Les réflexes dominaient, ne laissant place à nul autre sentiment. Seules la survie (la sienne et surtout celle de Vassili) et la victoire mobilisaient son esprit. C'était tout juste s'il restait lucide... Il ne mordait plus des hommes, mais seulement des cibles ; il se défendait sans même se soucier de ses actions ou du danger. Tout ce qui passait sous ses crocs se trouvait déchiré, chaque forme noire qui le frôlait finissait paralysée.

Vassili avançait par bonds de quelques mètres. Il sprintait, tirant en rafale en direction des positions retranchées ennemis. Puis, il se jetait à terre quand on le prenait trop pour cible, soufflait quelques instants, haletait, puis repartait de plus belle. Il avait la rage de vaincre ; toute inquiétude l'avait quitté pour laisser la place à la détermination. Après de longues minutes de combat acharné pour avancer mètre par mètre, les rebelles atteignirent le premier bâtiment, le petit poste de garde. Ils l'investirent aussitôt, sans grande difficulté puisqu'il était vide... Le groupe de Vassili y fit une halte quelques instants, le temps aux combattants de reprendre leur souffle. Collés contre les murs, les hommes haletaient, les yeux exorbités. La peur réapparaissait sur les visages, grandissant quand les battements du cœur s'apaisaient : ils avaient survécu jusque-là, mais la bataille n'était pas encore terminée ! La fatigue faisait ressortir leurs faiblesses, tout en les privant d'une part supplémentaire de lucidité. Ils se savaient diminués, plus vulnérables.

Heureusement, le lieutenant maîtrisait la situation. Il savait ce qu'il avait à faire. Ne laissant pas le temps à la tension de retomber, il fit répartir les munitions restantes, soigner les petites blessures et prodiguer les premiers soins à ceux qui ne pouvaient plus se battre, ceux qui resteraient dans l'abri. L'inaction ne pesait pas sur les combattants qui reprenaient confiance. Aussi, quand il fallut avancer dans les rues, sous les feux, les hommes, bien pris en main, n'hésitèrent pas à se lancer une nouvelle fois dans la folie de la bataille, au milieu des cris. Eclair-de-Liberté courut en avant, excité comme un Solochi aux pieds de Vassili. Il ne se sentait pas mal, car il n'avait pas conscience de son corps, il ne trouvait pas cette sensation d'invulnérabilité désagréable... Il aimait avoir l'impression de ne plus avoir peur, il se sentait même courageux. Presque téméraire, même, puisqu'il élargissait de plus en plus le périmètre duquel il chassait les ennemis qu'il jugeait trop près de son humain.

Les combats poussèrent dans le camp bâti. Il n'y avait que quelques constructions, mais cela suffisait largement à rendre l'assaut difficile. L'enchevêtrement des rues empêchait de voir à quelques mètres, il fallait sans cesse se méfier de qui allait apparaître tout près de soi, sans jamais commettre l'erreur de tirer sur un allié. Vaillant-Rescapé avait hésité, au dernier moment, avant de faire les premiers pas vers ce poste avancé : il n'avait aucune envie de prêter lame forte aux humains. Cependant, maintenant qu'il y était, il retrouvait enfin l'ivresse de la bataille. Il n'avait pas réalisé à quel point il y prenait goût ; il était contraint d'accepter que l'adrénaline que procurait cette activité lui avait un peu manqué... Rien que pour cette raison, il lui prit presque une envie de remercier le colonel.