Troisième pas : Le Premier meurtre.
«Laisse-moi passer misérable Mentali.
-Tu te doutes bien que je refuse.
-Oui, je me disais aussi que ça n'allait pas être aussi simple.
-Vu ta puissance, tu dois être le Protecteur.
-Encore une fois : oui, et je suis pressé. Dégage le passage que je puisse tuer ta jolie petite dresseuse.
-Miryan, le Protecteur déchu. Combien t'a t-on donné cette fois ? Cent mille Pokédollars ? Un million ?
-Ah ? Ça t'intéresse vraiment ?
-Espèce de corrompu ! Tu as trahi les Pokémon ! Pourquoi tu ne mettrais pas fin à ta misérable existence au lieu de continuer à polluer le monde de ta présence ?
-Hum, c'est une bonne question, petit. Je pense que j'en ai pas envie. La réponse te convient-elle ?
-Miryan, l'immoral. Corrompu jusqu'à la moelle, insensible au plus pur des sentiments, haï de tous.
-Oh arrête, tu vas me faire rougir.
-Hé ça te fait rire, traître ?
-Écoute-moi bien, petite merde violette. Tu as raison, j'ai toutes les qualités que tu viens de citer et j'en suis fier. Or, là, ça commence à bien faire. Si tu me connais si bien que ça, tu devrais savoir que je n'hésiterai pas à tuer un Pokémon.
-J'ai touché la corde sensible, on dirait...il n'y a que la vérité qui fasse autant de mal.
-HAHAHAHA ! Mentali... tu es très fort, tu le sais ça ? Tu as vraiment réussi à m'énerver. Tiens voici ta récompense. Crèves ! »
Ça va faire quoi, deux jours que cette Nidoqueen est venue me voir et m'a demandé de tuer cette Sae ? Ou trois peut-être ? Je ne m'en souviens plus exactement. Pour un Morph, la notion du temps est vraiment abstraite. Pourtant je me rappelle bien de deux choses : ce Mentali et de la petite discussion que nous avons eu ce jour-là.
Son regard méprisant, je l'ai déjà vu tant de fois auparavant. Oui, je suis un traître, un corrompu, haï de tous et tout le tralala. Et ça me plaît d'être vu comme ça. Au moins, j'ai une bonne excuse pour rester au manoir 24h/24.
Cependant, il y a un autre événement qui me hante encore et encore. Dix ans, dix ans que je suis à Unys. Dix ans que je suis devenu Protecteur. Dix ans, 3 652 jours... là où ma vie s'est terminée, là où ma vie a commencé.
***
Ah! Le ciel est bien bleu, aujourd'hui, aucune trace de nuages ! J'adore observer le paysage depuis le toit, c'est tellement reposant et agréable, avec ce petit vent sur mon visage !
J'aimerais bien m'envoler d'un coup, comme ça... j'ai beau être un Morph, mes pouvoirs ne sont pas très grands : je n'ai que 12 ans. Maman me dit que lorsque mon instinct se réveillera, mes capacités grandiront, mais je ne sais pas ce que cela veut dire, exactement, à part que je pourrai me transformer en oiseau et aller où je veux !
-Eh Miryan ! T'as pas fini de glander là-haut ? Descends tout de suite ! Et Mère veut te voir.
-Beuh ! Viens me chercher si tu l'oses !
-Sale petit...
-Hihihi... laisse tomber, Clark, quand il aura faim, il descendra, comme d'habitude... intervient une inquiétante voix spectrale.
-Pfft ! Ok, Miasme. Tu t'en tires bien, microbe ! Allez, à plus !
Toujours avec ses airs supérieur, celui-là ! Il n'est pas normal, je dis. Tiens, d'ailleurs, pourquoi il traîne toujours avec un dégoûtant Ectoplasma ? Avouez que ce n'est pas banal. Brr... quand je pense à ce fantôme, j'en ai la chair de poule... hier encore, il s'est glissé dans mon lit à minuit et a murmuré des « hihihi... » jusqu'à ce que je me réveille... Argh ! Je ne veux plus jamais le revoir !
N'empêche, ce satané spectre a raison : je commence à avoir faim. Par fierté, j'ai bien envie de rester ici, mais mon ventre grogne de plus en plus. Bon, exceptionnellement, je vais abandonner et descendre à la cuisine.
Notre manoir est vachement grand, bon, c'est la Maison-Mère aussi...Papa dit que c'est « le lieu des réunions de famille endiablées ». Par contre, on n'est pas très nombreux et officiellement, c'est le lieu de rencontre des Protecteurs. Donc en tout, il y a : Maman, la Protectrice de Sinnoh, Papa, le Protecteur de Kanto, Grand-Mère, la Protectrice de Johto. Sans oublier mon grand frère, Clark, le Protecteur de Hoenn.
Or, vu qu'un Protecteur est censé surveiller sa région, je suis souvent seul avec Maman, puisque la Maison-Mère se trouve à Sinnoh. A une exception près : Mon frère qui vient régulièrement en « vacances prolongées ».
Mais n'allez pas croire que notre famille n'est composée que de cinq membres ! Non, elle est en vérité extrêmement grande ! De l'autre coté des grandes portes de notre grand manoir se trouve le quartier des Gardiens, où vit le reste de notre lignée. Maman dit que les Gardiens doivent nous servir et rester à nos côtés pour toujours, parce qu'ils sont plus faibles que nous. Je trouve ça triste : puisque nous sommes tous de la même famille, pourquoi nous différencier ? Je n'ai jamais pu jouer avec les enfants Gardiens, et comme il n'y a pas d'autres enfants à la Maison-Mère, je me sens un peu seul.
-... en plus, on a toujours ce problème avec Unys qui reste sans Protecteur... dit une voix familière, songeuse.
-Exactement! S'il vous en faut un impérativement, c'est une occasion rêvée ! Acceptez mon affaire, vous n'avez strictement rien à perdre !
-J'avoue que je suis bien tentée de le faire. Si tout se passe comme prévu, nous serons tous gagnants...
-Tout se passera comme prévu ! Il n'y a strictement aucune raison pour que notre accord se passe mal.
-Vous êtes bien confiant, Kristofer.
Maman est en pleine discussion avec un drôle d'homme dans le salon. Il a l'air assez vieux avec sa barbe grise et son chapeau melon. De plus, il n'est pas un Gardien, il sent l'humain. Qu'est-ce qu'un humain peut bien faire dans notre manoir ?
Maman l'a appelé Kristofer...
-Oh, Miryan ! Remarque Maman, tu es ici depuis longtemps ?
-Non, non, je viens juste d'arriver.
-Il est temps pour moi de repartir , déclare le vieil humain en réajustant son chapeau et en prenant sa canne. Je souhaite une bonne journée à toute la famille Kuroni.
L'homme me regarde un moment, lâche un petit ricanement et s'en va.
-C'était qui, Maman ? Cet humain me fait peur...
-Oh, tu peux déjà différencier un humain d'un Morph ? Félicitations ! Ne t'inquiète pas, c'était personne en particulier.
-Ah, j'y pense ! Clark m'a dit que tu voulais me parler !
-Clark ? C'est étrange, je ne l'ai pas encore vu aujourd'hui... hum je sais pas quoi faire de lui, il ne passe que très peu de temps à Hoenn...
-Moi je serai un très bon Protecteur ! Je le promets !
-Hahaha, je l'espère bien Miryan.
-Héhéhé !
Tout content, je rentre dans la cuisine et fouille le frigo. Je soupire : rien que des légumes et des baies.
C'est une tradition familiale. En tant que Protecteurs, nous avons l'interdiction formelle de manger de la chair de Pokémon. Ça paraît logique vu qu'on doit les protéger, et non les manger. Quoique, j'ai déjà vu Clark en avaler en douce...
-Yo, l'avorton. Déjà en train de te goinfrer ? Me surprend la voix de mon frère.
-Mêle-toi de tes oignons ! Et puis, pourquoi tu m'as dit que Maman m'appelait ? C'est même pas vrai !
-Hum... tu n'as pas rencontré un homme avec elle ?
-Hein ? Quoi ? Euh... oui, oui. Un humain un peu vieux...
-Et ils n'ont rien dit de... spécial ? Insiste t-il.
-Je ne sais pas trop, quand je suis arrivé, l'humain est parti. Et pourquoi tu veux savoir ça, toi ?
-Nan rien... fais gaffe à ton régime mec, je sors un instant.
Il est bizarre, Clark, aujourd'hui. Et je n'ai pas vu Miasme avec lui. Je pensais qu'ils étaient toujours ensemble.
On aurait dit qu'il s'inquiétait de quelque chose. Enfin, je n'ai pas le temps de réfléchir à ce que peut bien penser mon frère. En plus, j'entends Maman m'appeler depuis le salon.
-Oui ? Qu'y a t-il ?
-Viens dans mon bureau, j'ai à te parler.
Aïe ! Je n'ai pas fait de bêtises, j'espère. Quand Maman a ce ton ferme et décidé, ce n'est généralement pas bon signe, pas bon du tout même.
Le bureau de Maman est vraiment imposant, il y a tout plein de portraits géants d'anciens Protecteurs accrochés au mur. On a l'impression qu'ils nous jugent, nous évaluent...
-Miryan, commence t-elle, aujourd'hui est un grand jour. Un jour magnifique, même. Tu vas recevoir ta première mission de Protecteur.
-Wouah ! Mais je pensais que j'étais trop jeune ! Et que mes pouvoirs ne s'étaient pas encore éveillés!
-J'ai changé d'avis. Après tout, tu parviens déjà à maîtriser quelques attaques et surtout le Freeze Time, l'attaque spéciale des Morphs qui fait notre fierté.
-Oui, mais...
-Pas de mais ! L'accord a déjà été conclu. Fais-moi confiance, tu pourras facilement remplir cette mission.
-C'est un peu soudain... je ... je dois faire quoi ?
-A Bonville, se trouve une pension pour Pokémon gérée par une humaine du nom de Anaïs. Nous savons de source sûre que cette humaine a commis des actes de maltraitance très graves envers nos confrères.
-Quoi ? Et je vais devoir affronter une personne aussi horrible ?
-Horrible, c'est le mot. Nous avons des photos des Pokémon de la pension, regarde.
Maman disperse quelques photos sur la table et je laisse échapper un cri : On peut clairement voir des Pokémon attachés, mutilés, tenant à peine debout sur un sol entièrement rouge, rouge de sang. Et sur celle-ci ! Un... un Nanméouie... à qui on a ... arraché les bras... il est encore vivant, il souffre, il agonise... Je peux presque entendre son cri perçant implorant de l'aide... des flots de sang sortent de son pauvre petit corps... et ... et de ses blessures atroces ! Toutes ces marques de fouet...
-Nan ! C'est trop horrible ! Je... je ne peux pas , je ne peux pas ! Impossible... impossible... horrible...
-Réfléchis, Miryan ! Tu es un Protecteur. Tu ne ressens pas au fond de toi l'envie de les venger ?
-Les ... les venger ?
-Oui ! Toutes ses abominations que nos frères ont subi... tu ne veux pas faire payer ceux qui ont fait ça ?
-... Oui, mais pourquoi moi ? Je ne suis qu'un pauvre gamin de 12 ans, je ... je ne peux pas... c'est impossible...
Brutalement, Maman se rapproche de moi et me gifle de toutes ses forces.
-Aïe ! ... pourquoi... Maman...
-MIRYAN ! Crie t-elle, regarde bien ces photos! Regarde-les ! Observe-les ! Tu la vois, n'est-ce pas ? La souffrance, la violence, la haine ! C'est le fer de lance des Protecteurs ! Suis ta colère ! Réponds à l'appel de la vengeance !
-Maman...
-Ceci a déjà été décidé. Ce soir même, à 23 heures, tu devras supprimer Anaïs, la gérante de la Pension de Bonville.
-Sup..supprimer...
-Et n'imagine même pas passer outre cet ordre ! Si tu ne le fais pas, tu ne seras plus le bienvenu ici ! Cette conversation est désormais terminée !
Maman me renvoie de son bureau sans prendre en compte mes protestations. Je ne comprends plus rien. Elle a toujours été si douce avec moi et tout à coup... elle disait aussi que j'étais trop jeune pour participer à des missions... que seulement dans quelque années, je serai un vrai Protecteur... Et là... là... elle me demande de tuer ! Tuer ! Je ... je ne peux pas ! Mais si je ne le fais pas, elle me détestera ! Et ça je ne le veux pas ! Qu'est ce que je dois faire ? Qu'est ce que je dois faire ?
22 heures et 30 minutes. Depuis que Maman m'a convoqué, je suis resté cloîtré dans ma chambre, enroulé dans ma couverture. Je tremble de tout mon être. J'ai le regard vide. Je fixe la lune, c'est bientôt l'heure. Dans quelques minutes, je vais devoir partir accomplir mon destin, seul. Je me suis résigné, je vais le faire.
Je récapitule mon plan, il est très simple : Entrer dans la chambre de l'hôtesse de la pension, arrêter le flux du temps avec le Freeze Time et tuer ma cible. Ce dernier point m'effraie au plus haut point. Je ne veux pas avoir du sang sur les mains ! Utiliser une capacité Pokémon ? Je ne suis pas assez fort, pour ça ! Mais à quoi pense donc Maman ! Je ne suis qu'un gosse de 12 ans... tous les Protecteurs ont-ils débuté leur carrière de cette manière ?
-Miryan, c'est l'heure.
Maman... je me lève lentement de mon lit, j'avance fébrilement vers ma porte, je prends une grande respiration avant d'ouvrir fermement ma porte.
-Tu t'es décidé, mon fils ?
-...Oui.
-Bien, je suis fière de toi. Écoute, je vais utilisé un Téléport sur toi. Il va directement t'amener à Bonville. De là, tu devras repérer la pension, l'infiltrer et tuer la gérante. Compris ?
-Et... pour rentrer ? Je ferai comment ?
-Si tu accomplis ta mission, tu pourras revenir.
-Mais je...
-Au revoir.
Un grand flash irisé me voile les yeux, le monde autour de moi fond jusqu'à disparaître complètement. Où suis-je ? J'ai peur... J'ai beau regarder dans toutes les directions, je ne vois que le néant. Je remarque une petite étoile juste devant moi, intrigué, je l'étudie sur tout ses angles, j'essaie de la toucher, de la sentir... et brusquement, elle se met à grandir, grandir, grandir de plus en plus, recouvrant entièrement l'étrange monde dans lequel je suis arrivé, avant de se fissurer et d'éclater en mille morceaux me révélant ainsi un tout autre paysage : Bonville.
Je reste inerte un moment. C'est donc ça ce qu'on ressent lorsque l'on se téléporte. Une étrange sensation...
Bonville est vraiment aussi campagnard qu'on le dit. Je n'ai jamais vu le monde extérieur. Depuis douze ans, j'ai toujours vécu à la Maison-Mère et je ne suis jamais allé au-delà du quartier des Gardiens.
Je peux voir quelques fermes au loin et des Ecrémeuh dormant dans leur enclos. Les maisons en elles-mêmes sont très rustiques, principalement composées de bois et de paille.
Non, non ! Je ne dois pas me dévier de mon objectif. Sinon, Maman ne me le pardonnera jamais. Je n'ai pas beaucoup de temps. Je trouve un grand bâtiment avec un jardin très spacieux : c'est sûrement la pension en question. J'en suis intimement convaincu, et ce n'est pas le gros « Bienvenue à la Pension de Bonville! » inscrit sur l'infrastructure qui va me dire le contraire.
Je devrais peut-être utiliser le Freeze Time maintenant... Ah non, suis-je bête ! Je dois d'abord localiser ma cible avant de m'en servir. Donc, infiltration... c'est étrange quand même, je peux voir des Pokémon dormir dans le jardin et ils ont l'air parfaitement heureux. Non, non ! C'est sûrement pour inciter d'autres humains à confier leurs Pokémon à cette pension !
Je décide de faire sauter le gond de la porte avec une mini Ball' Ombre : les fenêtres dehors sont trop hautes pour que je puisse passer par là. Et une fois à l'intérieur, c'est la grande surprise.
Toutes les pièces de la pension sont éclairées faiblement d'une douce chaleur et ... n'ont pas de portes. Il y a même très peu de murs quand j'y regarde de plus près. Niveau discrétion, ce n'est pas top, par contre, niveau accessibilité... Je peux voir de petits Pokémon dormir dans des paniers en ronronnant. J'ai un pincement au cœur.
Il y a un escalier menant à la seule pièce avec une porte en bonne et due forme. Je sens de l'odeur humaine émanant de cette chambre. Bien, je vais faire ce que j'ai à faire puis je rentrerai tout de suite.
Chaque pas qui m'approche vers ma cible me semble être de plus en plus lourd. Dois-je vraiment la tuer ? Je n'ai vu aucun Pokémon en danger pour l'instant...
« Nous savons de source sûre que cette humaine a commis des actes de maltraitance très graves envers nos confrères. »
Je me repasse cette phrase en boucle dans ma tête. Il ne faut surtout pas que je me mette à douter.
La porte est ouverte. Elle dort tranquillement dans son lit.
C'est le moment d'utiliser le Freeze Time. Je me concentre sur ma victime, je m'imagine un monde où seuls nous deux existons, un monde vide où le temps n'existe pas. Une obscure aura se dégage de mon corps, elle forme une bulle invisible autour de la pension.
Plus qu'une étape et pas des moindres : l'assassinat. J'ai mal au ventre rien que d'y penser. J'ai beau regarder cette femme, elle n'a pas du tout l'air méchante. Elle est plutôt jeune pour une hôtesse de pension d'ailleurs, la trentaine je dirais.
Toute ma détermination vient de s'envoler. Comment pourrais-je me résoudre à assassiner une personne au visage si innocent ?
-Hum... que...
Je commence à paniquer, elle ne va pas se réveiller tout de même ! C'est le principal défaut du Freeze Time : Il ne gèle pas le temps de la victime. En réalité, le Freeze Time est une sorte de connexion entre un Morph et une proie. Il crée une sorte de dimension parallèle où seuls le Morph et sa victime existent, ça demande une sorte de lien particulier entre le Morph et sa proie. Ce lien peut-être l'amitié ou l'envie forte d'aider ou encore de tuer.
-Hum... il y a quelqu'un... ?
Je reste pétrifié. Mince, mince ! Si elle est consciente, je ne pourrai jamais remplir ma mission et Maman va...
-Qu... Oh ! Un petit garçon ! Tu es perdu mon enfant ?
Elle m'a vu ! Elle m'a vu ! Je... que...
-Tu as dû faire du chemin pour te retrouver dans ma chambre ! Hahaha ! Rie t-elle chaleureusement.
Pourquoi ? Pourquoi me parle t-elle si gentiment ?
-Pourtant j'étais sûre d'avoir fermé la pension, hum... encore une farce des Farfurets ! Ils me rendront folle ces Pokémon, hihihi ! Oh petit ! Ne pleure pas !
« Horrible, c'est le mot. Nous avons des photos des Pokémon de la pension. »
Et... et les photos alors ? Oui c'est ça ! Je dois repenser aux photos ! Le Nanméouie démembré ! Je ne dois pas me laisser avoir par son rire innocent, c'est un monstre que j'ai devant moi !
-Oh pauvre chou... tu ne veux pas parler ? J'imagine que tu dois avoir sommeil à une heure pareille, non ? Si tu veux, je peux te préparer un lit.
« Et n'imagine même pas passer outre cet ordre ! Si tu ne le fais pas, tu ne seras plus le bienvenu ici ! »
Elle... elle est si douce. Sur la commode, il y a un portrait d'elle avec plein de Pokémon souriant aux éclats.
Maman... je sais plus quoi faire...
-Euh, petit ? Tu te sens bien ? Ah! Ton front est brûlant ! Attends-moi là, je vais te faire une tisane !
Je ne peux pas la tuer, je ne peux définitivement pas la tuer. Il... il doit avoir une erreur quelque part ! Ce ne doit pas être la bonne personne... pourtant je peux bien voir son nom sur son portrait. Il s'agit bien d'Anaïs, la gérante de la pension de Bonville.
-Excuse-moi pour l'attente ! Intervient Anaïs portant un plateau chargé d'une tasse. Tiens, bois un peu et ça ira mieux.
Je dois la tuer, sinon je ne pourrai pas rentrer à la maison.
« La souffrance, la violence, la haine ! C'est le fer de lance des Protecteurs ! Suis ta colère ! Réponds à l'appel de la vengeance ! »
Oui c'est ça. Il vaut que je repense à la colère que j'ai ressenti devant les photos ! Il faut que j'y repense...
-Oh... tu ne veux pas boire ? Tu devrais pourtant, c'est pour ta santé, c'est très important.
Je dois la tuer... je ne peux pas la tuer... je veux la tuer... je ne veux pas la tuer... Pourquoi... pourquoi... mon ventre, ma tête... j'ai mal, j'ai si mal...
-Petit ? S'inquiète t-elle.
-AAAH !
-Ouah, petit ça va ?
Ma tête, ma tête... les horribles photos tournent en boucle dans ma tête, les menaces de Maman... les douces paroles de la gérantes, son rire innocent... Je suis désolé... je suis désolé... je suis DESOLE !
Je ne me contrôle plus , j'arrache le plateau que la femme tient dans ses charmantes mains.
-Oh ! Si tu voulais cette tasse tant que ça, il fallait me le dire !
-TAIS-TOI ! QUE PERSONNE NE ME PARLE !
-Petit...
-TAIS-TOI !
Elle m'énerve... pourquoi elle est aussi douce, aussi gentille, aussi charmante...
La situation est pourtant simple ! Je dois la tuer ! La tuer ! Oui ! La tuer ! C'est simple ! Très simple !
Le plateau que je tiens... si je la frappe avec suffisamment de force...
Je brandis fermement mon arme et je l'abats avec violence sur Anaïs qui en tombe inconsciente.
D'une rage incroyable, je martèle son délicat visage. Je me sens si fort, si puissant... Maman ! J'ai rempli ma mission !
Je l'ai tuée !
Je continue mon œuvre macabre. Elle est désormais méconnaissable.
Mais malgré sa peau complètement déchirée et recouverte de bleus, elle garde un sourire doux sur son visage.
Pourquoi ? Pourquoi souris-tu ?! Tu ... tu es morte ! Arrête de sourire !
J'ai beau la frapper, encore et encore, elle affiche une douce expression maternelle.
Non... non... qu... qu'ai-je fait ? Je suis désolé... désolé... désolé... je veux partir... m'enfuir... retourner chez moi...
Je vois un Nosferapti gelé dans le temps à l'extérieur. Instinctivement, je me métamorphose en chauve-souris et je m'enfuis par la fenêtre sans regarder derrière moi.
Le Manoir... à Voilaroc... je le vois enfin... j'ai dû voler pendant trente minutes environ, pourtant j'ai eu l'impression que ça a duré des heures. Ma maison... enfin... Je me dirige automatiquement dans ma chambre et je m'enfouis dans ma couverture. J'ai peur... j'ai peur...
-Miryan !
Que... mon frère... ?
-Miryan, tu es dans ta chambre ? Je rentre !
-C'est inutile. L'arrête une voix féminine.
-Vous ! Sale sorcière ! Je sais tout !
-Malheureusement, c'est trop tard. Il l'a déjà fait.
-Quoi ? Non... impossible...
-Son destin est déjà scellé. Tout s'est déroulé à merveille. Demain, il partira à Unys. Ses pouvoirs se sont éveillés et son rôle dans le contrat est terminé.