Ch. 01 La ville de toutes les joies
« Pour aujourd'hui, nous nous attendons donc à de belles éclaircies sur Hoenn, avec des températures tout de même fraiches dans le Nord vers Cimetronelle. Il fera maximum vingt-cinq degrés à Eternia, et minimum vingt degrés à Mérouville... »
- Ouais, je m'en doutais.
L'homme coupa la télé, ayant su ce qu'il voulait. De toute façon, Mérouville n'a jamais été réputée pour son climat splendide. C'est une ville comme une autre. Hoenn étant une région chaude, il y fait quasi tout le temps beau. Sans plus.
Il se leva de son canapé moelleux, et s'assit à la table de sa cuisine. Sa cuisine et son salon étaient une seule et même pièce, mais avoir un appart' à Mérouville aussi peu cher, c'était une grosse chance pour lui. Il tartina une biscotte de beurre, et la croqua sans scrupules, se fichant d'y laisser des miettes. Il balança un t-shirt traînant en boule sur la petite table, qui tomba sur le sol gris. À vue d'œil, la propreté n'était VRAIMENT pas son souci. Il liquida une tasse de café, puis se rendit à sa salle de bain, là où il s'ébouriffa ses cheveux noirs. Il frotta ensuite ses yeux, et s'observa dans le miroir.
- Quel tête mon pauvre...
Malgré ses dires, Nathan avait toujours eu la réputation d'être un bel homme. Ses yeux ambre contrastaient avec la noirceur de ses cheveux, et son visage triangulaire avait un teint assez clair. Il se tapa le visage de quelques gifles, puis prit dans sa chambre ses quatre PokéBall. Il retourna encore une fois en cuisine où il y prit un grand verre isotherme rempli de café. Nathan attrapa ses clefs puis quitta son chez-soi.
= =
À Mérouville, il y a quatre choses importantes : Une cité scolaire regroupant collège et lycée, le siège de la Devon SARL, une cour d'assises, et le QG du B.I.C alias le Bureau d'Investigations Criminelles. C'est pour cela qu'elle est réputée pour être l'une des villes les plus importantes Hoennienne. Nathan y avait pris ses petites habitudes. Manger au bar en face de la SARL, faire ses courses au supermarché de la troisième avenue, sortir avec ses amis entraîner ses Pokémon à la fontaine ouest...
Nathan se gara devant un grand bâtiment blanc cassé devancé par des grandes colonnes blanches. Des gravures couleur d'or longeait la fresque surplombant une grande porte en bois très foncé. Un grand escalier aussi, qui semblait être pour les accusés comme le plus long supplice de leur vie. La cour d'assises de Mérouville amenait les gens de loin, que ce soit simplement pour assister aux grands et fantasques discours des avocats, ou pour tenter de s'y faire une place. Il grimpa les marches en sautillant, les bras pliés ramenés à sa taille, comme un joggeur du dimanche. Lorsqu'il poussa la grosse porte, il passa devant plusieurs portes à la couleur or, puis entra dans une située un peu plus loin. Le procès semblait largement commencé, mais il s'installa derrière. Il y avait un monde fou ; c'était le procès d'une fille accusée du meurtre de sa sœur. Nathan le savait bien, on le lui avait rabâché pendant des jours.
À la barre, un homme, âgé d'une trentaine d'années. Un avocat en costume bleu était debout et faisait les cent pas devant le témoin.
- Vous pouvez me délivrer votre nom, je vous prie ? demanda l'avocat.
- Vous le savez très bien, non ?? Ça fait dix minutes que vous me cuisinez ! Je suis Marco Nialpe, et je vous dis que votre cliente a tué sa sœur ! J'étais là !!
L'avocat marqua un temps d'arrêt, regarda le ciel, puis tourna sa tête vers le témoin, ignorant totalement les autres.
- Il me semble vous avoir seulement demander votre nom, non ?
- Objection ! Cet homme se moque de mon témoin !
- Objection rejetée. Me Lacklaye, continuez.
- Merci. Donc, si je cherche là-dessus... Oh ! Ça par exemple, le nom Nialpe ressort pleiiiiins de fois...
Il montra au public le papier en levant une feuille avec une fierté bien dissimulée.
- Ceci est un relevé des mails de la victime, Anabelle, la sœur de l'accusée. Et si je lis ne serait-ce qu'un seul des mails que vous avez envoyés, ça donne ça... Erm, erm.
Nathan sourit en voyant les mimiques théâtrales de l'avocat de la défense.
- « Belle Anabelle, je ne saurais passer une seule seconde sans sentir ton parfum, voir ton visage. Tu es à moi. Je ferais tout pour toi. Je t'aime à en mourir. »
- Je vois pas le problème ! marmonna Marco, les bras croisés.
- Moi je vais vous le dire le problème : ça s'appelle du harcèlement. Il n'y en a pas moins de quarante de mails similaires. Et si je modifiais la dernière phrase, ça pourrait aussi donner : je t'aime à t'en tuer ? Mourir, tuer, c'est la même chose !
- Objection votre Honneur ! Me Lacklaye provoque mon témoin avec des accusations non fondées !
- Objection retenue. Maître, cessez vos enfantillages et allez droit au but.
Me Lacklaye esquissa un petit sourire, et hocha la tête.
- Très bien. Ceci est un bout de combinaison.
Même rengaine, l'homme montra un bout de tissu bleu soigneusement sécurisé par une pochette plastique.
- Et... alors ? demanda le juge.
- Ben alors ? Nous avons examiné les résidus logeant dans les particules de cette matière... assez... bizarre, et nous avons découvert de l'ADN de... Phogleur !
- Que je sache, la victime n'est pas un Phogleur ! s'énerva l'avocat de l'accusation.
- Non je le conçois. Seulement votre témoin qui tente de « dénoncer » ma cliente innocente, est soigneur Pokémonologue dans les bassins du zoo de Nénucrique.
- Oh Arceus... comprit le procureur.
- Et devinez où a été retrouvé cette... chose ? demanda-t-il en secouant la pochette renfermant le tissu.
- Sur la victime ! sourit le juge.
- Exactement. Alors, môsieur le justicier qui a vu la victime mourir entre les mains de sa sœur, qu'avez-vous à répondre à cela ?
L'avocat regarda dans la salle et vit Nathan, et lui adressa un petit sourire en coin. Nathan ricana, puis racla sa gorge en voyant les personnes d'à-côté le regarder avec mépris. La sueur perlait sur le front de Marco, qu'il essuya d'un revers de la main.
- Je... Euh...
- Un instant ! Rappelez-vous Me Lacklaye, que mon témoin a tenté de secourir la victime lorsqu'elle était encore en vie ! s'exclama bruyamment l'avocat d'en face.
- Cela est possible ! approuva le juge facilement influençable.
- Muahaha, je ris, je ris.
Brouhaha dans la salle. Quelle arrogance animait cet homme de loi ? Avec son costume bleu, on aurait cru un Power Ranger. Le juge regarda alors Lacklaye, le bel avocat brun au visage carré, sarcastique sur les bords.
- On sait tous qu'un bout de ce genre de combinaison ne s'arrache pas en faisant des bisous. C'est une matière spéciale pour être protégé de la froideur de l'eau des bassins. Elle s'est débattue et a tenté de vous griffer ou je ne sais quoi, voilà ce qui a provoqué le déchirement du tissu !
La sœur de la victime, dans un box juste au-dessus de son avocat, ne put retenir ses larmes en imaginant sa sœur souffrir.
- Je... Je... bredouilla Marco.
- Allez, dites à la cour, ce qui s'est passé, ça vous fera du bien...
= =
Nathan tapota l'épaule de son meilleur ami.
- Tu gères de mieux en mieux à la cour, Tim !
Timéo ricana. Nathan but une gorgée de son café allongé tout en le regardant. « Toujours les dents aussi blanches aussi... »
- C'est grâce à mon costume bleu. Tout le monde le trouve canon, alors forcément, ça a de l'effet sur le juge.
- Penses-tu. Je devrais essayer de mettre des trucs plus extravagants moi aussi...
- Eh oui, fais donc cela ! Nous avons 23ans, nous sommes dans la force de l'âge, nous sommes beaux et charmants ! chanta-t-il.
Nathan le dévisagea, acquiesçant. Peut-être, sauf que lui n'était pas quelqu'un de si assuré.
- Tu as l'air... en forme, déclara-t-il.
- Oh oui, plus que jamais ! J'ai remballé ce procureur à deux balles qui n'arrêtait pas de se moquer de moi. Alors imagine la satisfaction intérieure qui brûle en moi, ça me donne envie de m'embrasser les pieds.
Nathan grimaça, étonné de la réplique.
- Toi par contre, t'as pas l'air très en forme... Comme d'hab ! gloussa Tim.
Il n'hésita pas à faire un rire forcé, puis de soupirer.
- Moi je n'ai pas fini de travailler, je vais devoir y aller. Mon boss va me tuer juste parce que je suis venu te voir jouer les surhommes !
- Me Lacklaye !
Timéo se retourna et découvrit sa cliente, une jolie petite blonde s'approcher vers eux.
- Alors, vous êtes innocentée, ça va mieux ? sourit-il d'un air charmeur.
- Oui, je ne sais pas comment vous remercier... rougit-elle.
- Moi je sais ! Si vous voulez, on peut se retrouver ce soir au bar en face de la SARL ? Maintenant qu'aucune relation professionnelle ne nous lie... ricana-t-il.
Nathan à côté se tapa le front, dépité.
- Je... C'est d'accord !
- 20h, ça vous va ?
- Parfait... À ce soir !
Timéo reprit sa marche, le sourire bien visible aux lèvres. Il marchait le torse bombé, tout fier. Ils en venaient bientôt à la fin de ce couloir luxueux avec le long tapis rouge qui sans doute devait servir de second supplice aux accusés de par sa couleur rouge sang, rappelant leur crime. Nathan le dévisagea.
- Tu ne changeras jamais, grommela-t-il.
- Jamais de la vie, ça me plait moi ça. Je l'ai innocentée, j'ai le droit de sortir avec elle non ? C'est pas interdit par la loi.
- Non, sans doute, mais ça fait très collectionneur.
Nathan poussa la porte d'entrée, puis ils dévalèrent les marches.
- Toi tu dis ça parce que tu es mon meilleur ami, que tu es très carré...
- Que dalle. J'aime pas ça, c'est tout.
- ...mais pour les autres, voir une ou deux filles par mois, ça fait... normal.
- Soit, souffla Nathan. Bon allez je file au boulot. Je te le répète une dernière fois : tu m'as bluffé au barreau !
- C'était facile... J'admets qu'il ne voulait pas la tuer et que c'était un accident, mais ça se voyait qu'il culpabilisait à fond, bref. Allez Nath, on se voit plus tard !
Ce dernier approuva d'un signe de tête. Il prit sa voiture et sortit du parking.
= =
C'était comme ça très souvent. Nathan aimait bien voir son meilleur ami dénicher le moindre mensonge dans un témoignage, présenter des preuves avec des étincelles pleins les yeux... Oui, pour lui c'était ça sa vie. Se réjouir du fait que ses amis réussissent dans leur carrière, et tant pis si lui était un peu seul au fond, parce qu'ils étaient toujours là pour l'aider.
Au B.I.C, les bureaux étaient calmes, assez déserts. Il y avait une petite queue devant la machine à café, et beaucoup d'agents marchaient des papiers en mains. Les salles se ressemblaient un peu toutes, les bureaux et chaises gris, le sol en moquette grise, et les murs blancs, blancs comme la vérité qu'ils tentaient toujours de trouver. On entendait toujours les bruits incessants de sonneries de téléphone, de personnes parlant au talkie walkie, le ronronnement des imprimantes, et le grésillement d'un ou deux néons défaillants.
- Hé Corwyn, t'es en retard ! Tu commences à me pomper sur les nerfs !!!
Nathan se retourna à l'entente de son nom, et découvrit Dick Nantelieu, son supérieur. Un homme assez grand, les cheveux aussi sombres que Nathan, revêtu de son éternel imper vert kaki, et dessous, une chemise beige et une cravate marron toute fine. Il était mal rasé, et portait un pansement sur la joue gauche. On pourrait dire qu'il était assez... négligé sur lui.
- Oh boss... Vous vous êtes encore coupé ?
- Ne change pas de sujet Corwyn ! Ça fait vingt minutes qu'on t'attend !
- Et... Pourquoi ?
- Pour...
Dick réfléchit, afin de trouver une bonne raison.
- ... Pour te remercier de la part de Mme Frankette qui avait perdu son Chacripan ! M'enfin voyons, tu vas pas la faire attendre !
- Pour vingt minutes, je pense que ça ne vous aura pas tué...
- Allez, file dans ton bureau, tes camarades t'attendent !
- Vous parlez comme si j'étais un enfant... marmonna Nathan, blasé.
- Inspecteur Nantelieu !
Dick tourna la tête vers l'un des agents qui l'appelait de l'étage, devant son bureau.
- Oh oui, j'arrive. Toi ! dit-il en pointant du doigt Nathan, tu as intérêt à rentabiliser tes vingt minutes d'absence !
- Très certainement... acquiesça-t-il.
Nathan avança d'un pas nonchalant vers son bureau, pour une fois pas trop d'humeur à travailler. Il adorait son métier, vraiment, mais ce qu'il aimait surtout, c'était enquêter sur les lieux du crime, pas trier des papiers d'anciennes affaires ou transférer des pièces à conviction. C'est d'ailleurs parce qu'il adorait ça, qu'il était très efficace, et donc qu'il s'était rapidement fait un nom au B.I.C. Nathan s'assit à son bureau, et admira ironiquement tous les papiers mal rangés les uns au dessus des autres. Il soupira, et s'amusa soudain et tourner sur sa chaise à roulettes. Tourner et tourner et tourner et to...
- Et Nath ! Ressaisis-toi !
Il s'arrêta d'un coup, surpris, et ricana en voyant Camille Lonar.
- Hé salut ma « camarade » !
- Haha, Dick t'a encore corrigé. T'as vu mes nouvelles godasses !
Nathan sourit puis baissa la tête vers les baskets de Camille, vertes et blanches. Il reprit rapidement un air sérieux.
- Oh Arceus, magnifiques... Tu t'achètes tes trucs où, histoire que je sache qu'il ne faut pas que j'y aille ?
- C'était méchant !
- C'était ironique !
Camille, 26ans, était l'une des trois équipiers de Nathan. C'était un véritable garçon manqué. Pas très grande, les cheveux plutôt courts, elle portait TOUJOURS une casquette. Si Camille ne portait pas de casquette, alors il y avait soit un GROS problème, soit ce n'était pas la vraie Camille.
- Tu sors pas tes Pokémon un peu ? demanda-t-elle, étonnée.
- Ah hum, oui...
- T'as pas l'air bien aujourd'hui mon petit Nath.
- Ça fait la deuxième fois qu'on me dit ça aujourd'hui, rohlala !
Nathan s'exécuta donc, et sortit Arcanin.
- Bonjour mon bébé ! sourit Camille.
- Arcanin, mange-là, pitié.
Le chien pencha la tête sur le côté, surpris, puis refusa en secouant la tête.
- Ça, c'est mon chien préféré ! s'exclama Camille.
- Où est Logan ? demanda Nathan.
- Il est parti chercher des croissants.
- PAR PITIÉ, DIS-LUI QU'IL ME FAUT DU CAFÉ !!
- J'en ai, j'y ai pensé !
Logan von Karda apparut à l'entrée, les bras chargés de paquets blancs et de gobelets brûlants. Il marchait maladroitement, mais réussit à atteindre le bureau de Nathan sans dégâts.
- Salut Logan !
- Rebonjour Log', balança Camille tout en caressant Arcanin.
- Voilà ton triple café, et pour les croissants, vous vous servez...
Nathan fouina tout en reniflant les croissants puis en saisit un. Il se précipita ensuite sur son café, l'humectant avec envie.
- Ça s'arrange pas ton addiction pour cette horreur... grommela Logan.
Logan, c'était le plus vieux de l'équipe. 31 ans, et pourtant, il ne les faisait pas du tout. Son côté espiègle, timide et maladroit faisait de lui le petit homme à protéger. Ça faisait pas mal d'années qu'il travaillait au Bureau d'Investigations Criminelles, et jamais il n'avait porté autant d'admiration à un petit nouveau que Nathan. C'était comme son frère pour lui, son modèle, même s'il s'abstenait de le lui montrer.
- Le café c'est bon pour la santé, ça m'aide à enquêter bien éveiller, et à être attentif à tous les détails... se justifia tranquillement Nathan.
- Pfff, Logan a raison, c'est faux ce que tu dis ! gronda Camille.
- Croyez ce que vous voulez...
Les deux équipiers s'éloignèrent à leurs bureaux respectifs. Nathan soupira et commença à lire un rapport d'enquête. Ses yeux filaient vite, l'habitude prenait le pas. Avec son café dans une main et une feuille dans l'autre, c'était la scène routinière. Arcanin restait là, calme, couché comme un bon chien policier.
- Hé, Log', le réseaux X-2 a été démantelé hier alors ou pas ? demanda Nath le nez sur sa feuille.
- Non, ils ont encore filé... marmonna le trentenaire à quelques mètres.
Il ricana, pas étonné. Le B.I.C a beau être l'organisation fédérale la plus admirée et saluée par les cinq régions, surtout Hoenn, elle n'était pas si performante que cela. Il y avait quelques agents d'exceptions en revanche.
Au B.I.C, les équipes d'enquêtes sont formées de quatre agents. C'est à eux d'apprendre à gérer leur place, à s'entraider, à se compléter. Plusieurs équipes sont sous le contrôle d'un inspecteur, dans le cas de Nathan, le fameux Dick Nantelieu, celui dont tout le monde se fout.
= = =
Encore de la paperasse. Nathan lisait un peu plus doucement. Agacé, il se leva puis rejoignit Camille et Logan. Il se posa sur le bureau de la fille à casquette, les bras croisés.
- Comment se passe votre journée papiers ?
- Comme une journée papiers, morveux... répondit Camille, fatiguée.
- Je n'aurais pas répondu mieux ! sourit Logan.
Arcanin aboya soudain. Nathan releva la tête et inspecta toute la pièce, l'œil mauvais. Il n'était toujours pas là non plus, lui.
- Nathan, combien de temps allez-vous être en compétition tout les deux... souffla Camille.
- Aussi longtemps qu'il le faudra ! Ce pauvre type me provoque et me défie tout le temps, et en plus il n'est même pas là, donc il est en retard !!
- À vrai dire... Il est juste en train de parler augmentation avec le chef...
- ... Oh. Ben j'espère qu'il ne l'aura pas, tiens.
Nathan engorgea son café, avide. Logan grimaça, agacé par cette scène pire que quotidienne.
- T'as beaucoup de cernes ! remarque la brune à casquette.
- C'est parce qu'il boit ce poison noir, argua une nouvelle voix.
- Ah, enfin te voilà cher Kyle...
Kyle Lanter, le rival de Nathan. Kyle Lanter, un autre agent très bien vu et très professionnel. Kyle, ou l'homme opposé de Nathan. Blond aux yeux bleus, s'habillant dans les tons clairs, aujourd'hui avec une chemise bleu ciel, le sourire permanent aux lèvres, les yeux pétillants, âgé de seulement un an de plus.
- Alors mon petit Loggy, as-tu prévenu Mister Corwyn ?
- De quoi ? demanda Nathan, penaud.
- De...
- Visiblement, il ne l'a pas fait. Dick t'attend dans son bureau pour régler cette affaire avec Phyllali.
- What ?! Mais je l'ai vu il y a dix minutes !
- Il faut croire qu'il voulait ménager le suspens afin que nous, nous te tenions au courant.
- Pff, journée POURRIE !
Il se leva en jetant le gobelet dans la poubelle, et monta les escaliers en pestant, suivi d'Arcanin. Dick Nantelieu pouvait entendre le bruit sourd des pas très marqués de Nathan, qui entra rouge de fureur. Il n'attendit pas que son supérieur l'autorise à s'asseoir qu'il se jeta sur la chaise en plaquant son poing sur la table.
- Vous vous foutez de moi là, c'est ça ??
- Corwyn.
Sa voix calme et posée éraillait encore plus les oreilles de Nathan qui commençaient à siffler. Il tonitrua de s'expliquer, tellement fort que Camille et Logan ne purent s'empêcher de ricaner.
- Ecoute Corwyn, j'veux pas être méchant avec toi, mais si tu me parles comme tu le fais, je vais t'envoyer au trou VITE FAIT BIEN FAIT !
Nathan baissa la tête et commença à sortir une PokéBall.
- Tu connais la procédure, sors Phyllali. Et rentre Arcanin.
Le Pokémon Plante apparut, et secoua sa tête, ce qui dégagea une douce odeur de fleur. Le Pokémon sourit à Arcanin qui rentra dans sa PokéBall, puis baissa à son tour la tête en apercevant Dick.
- Vous voyez, vous la faites flipper, grogna-t-il.
- Phyllali, poursuivit Nantelieu sans tenir compte de Nathan, tu te rappelles du petit incident ?
- Bien sûr qu'elle s'en rappelle, foutez lui la paix quoi !
Phyllali couina un peu avant d'acquiescer doucement. Son pelage beige et ses oreilles feuillues avaient directement séduit Nathan qu'il l'avait capturée à peine l'eut-il rencontrée. C'était son petit bébé intouchable, et il ne supportait pas qu'on lui cherche des crasses.
- Tu sais que ce n'est pas bien de paralyser un humain qui ne fait aucun mal... continuait Dick à genoux devant elle.
- Je lui avais ordonné ! C'est un Pokémon d'un agent policier, elle va m'obéir, logique !
- Je sais, approuva le boss en se relevant. Elle est désormais prévenue, c'est donc à toi que je m'adresse.
Il planta ses yeux froids, qui pourtant étaient d'habitude comme ceux d'un Caninos maltraité. Nathan déglutit et sentit la sentence à plein nez. Il s'enfonça dans son siège, désormais moins entreprenant qu'avant.
- Demander à son Pokémon de paralyser un stagiaire parce qu'il s'est à peine moqué de toi...
- Il a dit que j'étais un pépère que bon à boire du café !
- Et alors ?! Tout le monde sait que t'es un agent efficace, pas besoin de paralyser un nouveau pour qu'il se retrouve aux urgences ! En plus, il n'avait pas si tort.
- Hein ?!
- Alors les 250 Pokédollars que je retire de ton salaire par sanction reviendront à Kyle.
- QUOI ?!
= =
Dans les bureaux, le jeune homme blond se mit à rire de bon cœur. Logan fit une mine étonnée.
- Il vient de lui dire pour le transfert des rémunérations ! répondit Kyle en souriant.
Et effectivement, quelques minutes plus tard Nathan déboula dans la pièce. Il faisait un tel vacarme que tous les agents le regardèrent une fois de plus, s'arrêtant de bouger. Le grand brun descendait les escaliers à une vitesse faramineuse et frappait la rambarde d'énervement. Camille et Logan tentèrent de l'attraper au vol, mais il se dirigea frénétiquement vers son antagoniste blond, et hésita à l'empoigner.
- Bonjour chéri, tu veux un bisou ? sourit Kyle, l'air viril.
- Toi, mais toi, mais toi... Si je pouvais te briser les... Crois-moi je le ferais !
Les agents se rapprochèrent, assoiffés d'action dans ce bâtiment ennuyeux.
- Mais je t'en prie, vas-y, rappelle toi quand même qu'on au Bureau Général d...
Nathan grogna et repartit, poussant quelques gens sur son passage. Il quitta le bâtiment et se jeta dans sa voiture. On lui retirait peut-être seulement 250 Pokédollars, mais pour lui, ses dépenses se jouaient au dollar près, surtout en cette période de crise. Alors que Kyle, le Kyle Lanter avait une famille assez privilégiée, assez pour que le gosse se promène avec une Rolex en or au poignet, et pour porter des chemises Milano. En fait, il était habitué à sentir cette odeur ambiante de richesse autour de lui. Kyle, Timéo... Tim aussi a toujours été gâté, et son travail d'avocat en plus lui permettait tranquillement de faire quelques extras. Mais Nathan n'est pas du genre à demander de l'argent, même à son meilleur ami de toujours. Ça fait trop... « dépendant. » Et Nathan ne doit pas être dépendant.
Il longea la longue route centrale de Mérouville, passa devant la fontaine. Cette fameuse fontaine, éclairée par de magnifiques guirlandes multicolores la nuit durant les périodes froides, où les enfants aiment jouer quand il fait chaud, où les couples aiment se retrouver pour exprimer leur amour, ou au contraire leurs problèmes. La fontaine emblématique de la ville, pour ne pas sortir les grands mots. La route était encadrée de buissons taillés en parfaits carrés, ce qui rendait la ville assez géométrique, à la limite sans saveur. Les immeubles noirs, blancs, gris, se concurrençaient, comme s'ils jouaient à être le plus grand. D'autres restaient modestement plus petits, deux ou trois étages, comme celui de Nathan. Le sien était un petit peu éloigné du centre, c'est à dire la Sarl, le Bar, le B.I.C, mais était quand même bien situé.
Il gara sa petite voiture devant chez lui, ramena sa poubelle devant la porte de l'immeuble, et salua mollement sa voisine du dessus, une grosse dame noire très gentille. Il s'enferma dans son appartement, et s'étala sur son canapé, dépité. Il se saisit d'un coussin, le mordit, et cria dedans.
« À tous les agents de Mérouville, à tous les agents de Mérouville, un Aligatueur est en train de détruire une maison localisée dans le quartier A4-7, je répète, un Ali... »
Nathan se retourna sur le dos, et s'égosilla à pleins poumons.
- QU'ELLE SE FASSE DÉGOMMER LA MAISON, FOUTUE RADIO D'AGENTS DE ...
Il entendit de forts coups venant du plafond, probablement le voisin du dessus qui tapait avec le balai pour que Nathan baisse d'un ton. Le quartier A4-7 était pour le coup pas loin de chez lui, mais la seule chose dont il avait envie, c'était de préparer une cible d'arc et de mettre en son centre la tête de Kyle, et pleins de petites têtes de Nantelieu sur les côtés, puis de les massacrer. Ou alors de dormir. Probablement plus simple. Il sentit une de ses quatre PokéBall s'agiter, et se rappela qu'il fallait nourrir la populace. Il les sortit donc tous. Arcanin et Phyllali foncèrent directement dans la cuisine, mais Kirlia et Heledelle le saluèrent respectueusement.
- Bah, vous voyez ma tête mes cocos, pas besoin de me dire bonjour...
Heledelle s'envola en chantant, ce qui provoqua un frisson de détente sur Nathan. Kirlia usa de ses pouvoirs de télékinésie pour soulever les différents paquets de croquettes, et les déversa dans les quatre gamelles réparties dans le salon-cuisine. Nathan soupira, enfonça sa tête dans ses mains. Comme un mal de crâne s'était réveillé, il prit de l'aspirine. Ses chaussettes à l'encontre du sol provoquaient un bruit qui faisait tout de suite comprendre à quel point Nathan était mal. Il reposa son verre sur la table basse noire et son téléphone sonna à cet instant.
- Ouais...
- « Bonjour, je m'appelle Lou et mon ami me laisse en plan au bar, super. »
- Oh Lou... OH LOU ! J'avais complètement oublié !!
- « Ouais, ben je vois que Timéo m'a oubliée aussi, vous êtes vraiment des amis fantastiques les gars, chapeau. »
- Non, Tim mange avec sa cliente, c'était sans doute à moi de te prévenir en arrivant...
- « Sauf que tu n'es pas arrivé », argua la fille de l'autre côté du téléphone, énervée.
- Excuse moi mademoiselle de travailler, ainsi que Timéo, on a pas le même emploi du temps que toi... dit-il sarcastiquement.
- « Et mon poing dans ta tronche, ÇA TE DIT ??? »
- Euh, écoute j'arrive dans dix minutes, on fait comme ça ? Commande l'apéro en attendant.
Bip. « Elle m'a raccroché au nez... » Il se traîna hors du canapé, en soupirant tout ce qu'il avait, et partit mettre une chemise noire et un jean, histoire d'être un peu plus présentable. La pauvre Lou devait attendre depuis vingt minutes, et laisser une jolie fille seule un soir dans le Bar Yotuba de Mérouville n'était pas une bonne idée. Nathan rappela ses Pokémon, chercha ses clefs pendant dix minutes avant de les trouver sous le coussin gris qui était tombé par terre pendant la conversation téléphonique, et s'empressa de prendre sa voiture.