Seul sur un paradis... [Shaw]
Chapitre 4 : Seul sur un paradis... [Shaw]
J'avais si froid et si chaud en même temps... Mes jambes me lançaient terriblement et j'avais l'impression que ma tête allait exploser. Je ne sens plus du tout mon corps. Comme si... Comme si mon âme en était sortie...Je... Je ne veux pas mourir ! J'ai tant de choses à faire, tant à découvrir ! Pourquoi mon Dieu ne m'en a pas laissé le temps ?
Le ciel est si clair, si bleu... Où suis-je donc tombé ? Ça ne ressemble pas au climat qu'on voit vers l'orphelinat ou à Kanto... Je tente un mouvement de mon bras gauche. Miracle, je peux bouger même si je me sens bizarre. Je me relève difficilement pour regarder le paysage. Une plage de sable, une eau bleue et claire comme du crystal, des palmiers, une forêt aux fleurs de toutes couleurs... Est-ce un rêve ? Si seulement c'en était un car mon corps n'est plus que souffrance et douleur. Mes jambes vacillent, faiblissent sous mon poids et cette fatalité qui se dresse devant moi inexorablement.
Je suis vivant. Vivant mais seul. Seul mais perdu. Perdu sur une île déserte, inconnue aux yeux du monde. Si seulement, si seulement... Ces mots résonnent en moi comme une chanson accablante. Les vagues s'étalent doucement à mes pieds et les coquillages qui s'emmêlent aux algues vertes. Plusieurs récifs entourent l'île, coupants comme une griffe et tranchants comme un couteau. C'est un paradis infernal.
Qui peut survivre comme je le suis ? Mes vêtements sont en lambeaux, mon corps est gelé jusqu'à la moelle et je suis trempé comme si j'étais passé à la douche froide. Mes mains sont coupées, blessées je ne sais comment et tout mon dos me fait souffrir. Mes yeux restent ouverts avec difficulté, je dois me forcer pour rester éveillé et ne pas retomber dans un malaise. Et ce soleil qui brille trop fort, alors que je ne suis plus qu'un être à moitié détruit par une chute en mer.
Je fais un pas, puis un autre et encore un, mais c'est comme si j'escaladais une montagne par une température inférieure à zéro degrés. Insurmontable. C'est le mot pour décrire ce que je pense en clair. Je suis trop épuisé, trop fatigué pour continuer quoi que ce soit.
Je vis mais pourquoi vivre si l'on sait que notre mort nous a déjà attrapés ? La seule chose qui règle cela pour éviter une torture trop longue c'est de mourir tout de suite.
Avec difficulté, je continue cette marche lassante. Du sable à perte de vue et l'océan infini, bleu ou gris à ses humeurs et cruel lorsqu'il condamne un être à une solitude horrible. Ce qu'il me fait subir aujourd'hui.
Et puis j'ai finalement trouvé ce que je cherchais. Une falaise. Une belle falaise. En surplomb de la mer en plus. Je m'approche du bord en inspirant profondément. Je commence par avancer un pied dans le vide. L'hésitation s'insinue dans mon esprit. Et mes proches ? Pas ma famille, mes amis : Kamie et Mathaël. A l'heure qu'il est, ils doivent penser que je suis noyé et que mon corps est perdu au fond de cette immensité d'eau. Et je recommence avec mes « Si seulement... »... Si seulement je pouvais juste les prévenir que je vais bien. Juste une phrase que je pourrais leur dire : « Je suis vivant ».
Le plus choquant mais le plus merveilleux pour moi serait de trouver une cabine téléphonique sur cette île... C'est bon, je rigolais ! Aucun risque que je puisse appeler. J'ai même pas de sous pour payer la communication...
J'inspirai à nouveau, vidant ma tête de toute pensée contradictoire à ce que je m'apprêtais à faire et sautais dans le vide. J'avais l'impression de flotter ou même de voler pendant quelques secondes jusqu'à ce que je percute la surface de l'eau.
L'eau est tellement claire que l'on peut voir les Pokémons marins. Un Tentacool qui passe par là et un... Un... Euh... Truc ? Je crois pouvoir le définir comme un P.N.N.I. Pokémon Nageant Non Identifié. Une tortue bleue pour être plus précis avec une carapace grise-noire. Avec un air méchant. Mais alors pas fait pour rassurer quelqu'un. Et ce Pokémon se dirigeait droit sur moi. Lorsqu'il ouvrit les mâchoires dans l'espoir de me croquer j'évitais d'un coup de jambes son attaque. J'entendis un claquement tout près de moi. Pfiou ! Ce n'était pas passé loin. Je préférais encore mourir de faim que me faire manger par une tortue cannibale !
Je commençais à nager pour remonter à la surface, très déçu par mon idée de me suicider en sautant d'une falaise pour me noyer. Malheureusement pour moi, il n'y a pas que des Pokémons normalement herbivores qui se nourrissent de viande. Il y a aussi des Sharpedos. Et là quand je parle de boucherie, ce n'est pas pour exagérer. Ces requins sont énormes et capables de vous déchiqueter une épaule en deux secondes. L'un d'eux m'avait repéré après mon mouvement d'esquive de la tortue. Je laissais quelques bulles s'échapper de ma bouche en signe d'exaspération. Ce n'est pas bientôt fini, oui ? Je veux mourir tranquillement pas me faire massacrer par des carnivores ! Allez voir ailleurs si j'y suis !
Mais c'était déjà trop tard, le Pokémon carnassier nageait déjà vers moi comme une torpille téléguidée. Je mis mes bras devant ma tête pour me protéger. Pure folie me diriez-vous, mais c'est juste un réflexe de survie. Une ombre blanche passa devant moi. Intrigué, je regardais ce qui se passait. Cela me surpris au plus haut point. Un Lamantine venait d'apparaître de nulle-part pour me protéger. Il donna un coup de queue au requin avant de lancer une puissante attaque Onde Boréale. Le rayon aux milles couleurs frappa le Sharpedo qui disparut sans demander son reste.
Le Pokémon tournoya autour de moi avec grâce. Il me regardait le plus naturellement du monde tandis que moi je me demandais ce qu'il faisait ici. Normalement on ne trouve ce type de Pokémon que dans des mers glacées et froides. Peut-être que celui-ci a décidé de se payer des vacances aux tropiques ce qui est peu probable. Enfin bon, je n'ai pas à m'en faire pour ça. De nombreuses questions émergeaient dans ma tête tandis que le Pokémon eau continuait toujours à nage comme si de rien n'était.
Pourquoi m'avait-il sauvé de l'attaque du Sharpedo ? Je ne le saurais peut-être jamais. Je fus surpris par ce qu'il fit ensuite. Il me poussa par en-dessous, me faisant évacuer tout l'air qui me restait dans mes poumons et commença à remonter vers la surface pour je ne sais quelle raison.
J'aspirais un maximum d'oxygène quand ma tête sortit à l'air libre. Puis je sortis de l'eau pour m'affaler sur la plage de sable où je m'étais réveillé. En haletant, je demandais au Lamantine, même si je sais qu'un Pokémon ça ne parle pas :
-Qu'est-ce que tu me veux au juste ?