De nos joursAdélie Dialine était née dans une famille riche. Sa mère, ancienne présidente de la région, possédait une grande renommée et une grande fortune personnelle. Son père avait disparu il y a des années, mais non sans avoir légué à ses enfants tout le prestige qui faisait d'eux des héritiers de la grande famille des Dialine. Le grand-frère d'Adélie, Nathan, faisait parti du Triumvirat, l'instance dirigeante de la région de Naya.
Bref, Adélie avait tout pour elle. Mais elle ne voulait rien de tout cela. Quand on la voyait, on pourrait douter du fait qu'elle fut l'héritière d'une des plus puissantes familles de Naya. Elle portait une combinaison de travail sale, des lunettes de mécano, et était en train de ressouder une pièce d'une énorme machine. Ses cheveux roses et son visage étaient noircis par la suie et les fluides hydrauliques. Elle n'était pas vraiment habillée en princesse, mais sous son épaisse combinaison unicolore, sous ses lunettes et sous la suie et la sueur, on pouvait quand même distinguer la noblesse de son visage qui trahissait immanquablement ses origines.
Adélie n'était pas comme les autres filles de son âge. Elle se fichait des belles robes, du maquillage et des garçons. Elle se fichait d'être belle ou jolie. Pourtant, elle arrivait à l'être sans faire d'efforts. Et ça la rendait dingue. Elle détestait quand les garçons la reluquaient d'un peu trop près, ou quand les gens murmuraient sur son passage « Regardez, c'est la fille Dialine. En voilà une qui ne manque de rien ». Et pourtant, Adélie n'était plus vraiment dans les bonnes grâces de la famille. Elle avait tout fait pour, d'ailleurs.
Déjà, elle n'aimait pas qu'on l'appelle par son prénom. Elle préférait le diminutif qu'elle s'était elle-même donnée, Ad. Adélie, ça faisait trop... fille, dans le sens péjoratif ou Ad l'entendait. Parfois, Ad regrettait de ne pas être un garçon. Dans le milieu de la noblesse où Ad avait grandi, ils étaient un peu plus libres des conventions que les filles. Ils pouvaient aller jouer dehors et se salir, voir même participer à quelque bagarres. Mais si jamais Ad s'était avisée de faire comme eux, alors là non, ça n'allait plus du tout. En tant que fille de noble, elle devait toujours être parfaite, propre et à cheval sur le protocole. Mais Ad ne l'avait jamais été, contrairement à son aristocrate de frère.
Les Dialine étaient depuis longtemps des gens puissants, prompts à gouverner. En son temps, le père d'Ad faisait parti du Triumvirat, et avait légué la place à son fils. Leur mère, Fastia, avait été présidente de la région. Quant à Adélie, elle était mécanicienne, ou plus précisément, inventrice. Elle adorait la mécanique, la science technologique. Elle avait, avec les machines, une empathie qu'elle n'avait pas avec les gens. Inutile de dire que sa mère n'avait pas sauté de joie quand Ad lui avait annoncé qu'elle voulait être mécano. Mais de toute façon, Ad ne lui avait pas demandé son avis. Elle était partie de la maison familiale l'année dernière, pour s'installer dans cet atelier, dans la petite ville de Vearnia.
Sa mère lui avait dit qu'elle ne lui donnerait jamais plus le moindre sou. Comme si ça importait à Ad... Elle s'était trouvée l'argent toute seule. Ad était très intelligente et dépassait de nombreux ingénieurs trois fois plus vieux qu'elle. Après plusieurs mois de travail et de recherche, elle avait créé une machine, un brassard, qui permettait aux Pokemon évolués de régresser à leur stade précédent à volonté. Ils pouvaient bien sûr ré-évoluer s'ils en avaient l'envie.
Son engin, qu'elle avait baptisé l'involuteur, était une révolution mondiale. Pour autant qu'elle le savait, aucun Pokemon évolué n'avait réussi à faire marche arrière pour retrouver sa forme d'avant, en dehors des Méga-évolution. Ad avait étudié en détail la composition des Pierres Stases, qui empêchaient l'évolution, et en avait adapté une forme voisine, qui elle pouvait ramener le Pokemon à son stade précédent. Bien entendu, Ad ne connaissait rien au commerce. Elle avait du faire équipe avec un couple d'industriel de la grande ville voisine, les Denteks. Ils avaient été très intéressés par l'invention d'Ad, et avaient investi gros dessus.
En cinq mois à peine, l'involuteur s'était vendu en quantité phénoménale à travers toute la région, puis dans le monde entier. C'était étrange comme beaucoup de dresseurs, ou même d'éleveurs, regrettaient la forme précédente de leur Pokemon, avant leur évolution. Et avec l'involuteur, ils pouvaient la retrouver, mais aussi permettre à leur Pokemon de se retransformer s'ils le désiraient. De façon globale, ils gardaient la forme pré-évolutive dans la vie de tous les jours, et reprenaient leur forme évolutive lors des combats.
Aujourd'hui, Ad était, à elle toute seule, et à à peine seize ans, aussi riche que sa mère, ce qui ne manquait pas d'exaspérer Fastia. Mais Ad n'utiliserait pas sa richesse pour une grande maison, des bijoux de luxes ou des majordomes. Elle se plaisait dans son atelier et ne voulait pas changer. Elle se servait de son argent uniquement pour vivre modestement, et pour continuer à travailler avec ses machines. Les Denteks l'avaient encouragée à monter sa propre entreprise, qui, avec le succès de l'involuteur, deviendrait très vite une puissante multinationale. Mais ça n'emballait pas vraiment Ad. Elle préférait travailler toute seule, et elle-même. De toute façon, elle n'avait pas du tout le sens des responsabilités typique de sa famille, et ne saurait pas gérer une entreprise.
Alors elle continuait à vivre ici, dans son atelier, avec pour seule compagnie ses deux Pokemon, Lopchu et Clic. Car Ad était aussi une dresseuse. Enfin, à son temps perdu. Les combats n'étaient pas sa tasse de thé, mais elle savait qu'ils étaient nécessaires pour qu'un Pokemon découvre tout son potentiel. Alors Ad s'y adonnait, de temps en temps, le plus souvent avec son ami Kinan, le fils des Dentek, qui était lui un dresseur de vocation, se baladant à travers toute la région de Naya pour récolter les différents badges, et espérant affronter le Conseil des 4.
Lopchu était le premier Pokemon d'Ad. C'était un petit lapin rose, qui se tenait debout sur ses pattes arrières. Il avait une étoile dessinée sur son ventre, et une petite queue pelucheuse. Ses poings étaient assez solides, la raison en était que Lopchu était de type Normal et Combat à la fois. Il portait aussi, au bras gauche, un involuteur. Car Lopchu avait évolué depuis longtemps, mais ne se transformait que durant les combats. Sa forme évoluée était assez voyante.
Ad le préférait bien plus en Lopchu. Le Pokemon avait d'ailleurs été son premier sujet dans l'expérimentation de l'involuteur. Lopchu était la seule et unique raison qui faisait qu'Ad parlait encore de temps en temps à sa mère, pour prendre de ses nouvelles. Car Lopchu lui avait été offert par Fastia Dialine alors qu'elle devait avoir huit ans. Et le Pokemon était très vite devenu son seul ami dans cette immense maison remplie de domestiques. En dépit de son mépris pour sa famille, Ad aurait toujours un soupçon de reconnaissance pour sa mère pour ce cadeau.
Quant à Clic, un Pokemon Acier qui était composé de deux roues collées et d'une plus grosse superposée, Ad l'avait trouvé quand elle avait aménagé dans cet atelier désaffecté. Il traînait avec les machines. Ad n'avait même pas eu besoin de le capturer. Ils étaient vite devenus amis, et finalement, Ad avait acheté une Pokeball et il était entré dedans de sa seule volonté. À l'heure actuelle, Ad était en train de travailler sur une autre de ses inventions. Ça ressemblait à une grosse caisse de métal ornée d'une porte.
Normalement, elle était prévue pour faire changer les Pokemon de couleurs. Il suffisait qu'il rentre dedans, que le dresseur choisisse la coloration, et voilà. Mais c'était pas encore vraiment au point. La dernière fois que Lopchu y était entré, il était devenu uniformément blanc, alors qu'Ad avait pointé pour une fourrure bleue. Heureusement que la couleur artificielle partait au bout de quelques jours. Lopchu était à ses cotés et la regardait travailler.
- Lop, chuchu ?
- Ouais, je pense avoir trouvé ce qui clochait, dit Ad. Un problème au niveau de la redirection des ondes. Mais si je bouche un peu le conduit C-3, je pourrais...
- Adélie Dialine ?
Ad grimaça, plus par l'entente de son nom complet que de découvrir que quelqu'un était entré dans son atelier sans qu'elle l'entende arriver. Elle pouvait déjà affirmer, sans se retourner, que son futur interlocuteur n'était pas un de ses amis, pour l'appeler ainsi. Elle éteignit son chalumeau et leva ses lunettes. Devant elle se trouvaient un homme et une femme, habillés de façon bien singulière. On aurait dit des rescapés d'un voyage dans le temps vers le passé, avec des combinaisons futuristes, des lunettes holographiques qui leur couvraient toute la partie supérieure de leur visage et des écouteurs qui dépassaient de leurs oreilles.
Ad savait de qui il s'agissait. Et elle révisa son jugement. Ces types ne sortaient pas du futur, mais de l'asile. La Team Malware. Une organisation de demeurés qui voulaient transformer le monde en une boule géante de technologies. Ils désiraient remplacer les Pokemon par des robots, et mettre, à la place des différents gouvernements du monde, un supra ordinateur qui édicterait des lois au niveau mondial. Depuis quelques temps, la Team Malware n'avait cessé de lui envoyer des messages pour tenter de la recruter. Ils devaient avoir entendu parler d'elle ; une fille de riche qui avait renié sa famille pour se consacrer aux machines, et qui méprisait la politique. Une recrue de choix, en somme. Mais dommage pour eux, les Magmar apprendront à lancer des attaques glaces avant qu'Ad ne se joigne à la Team Malware.
- Adélie ? feignit Ad. C'était la précédente locataire. Elle s'est tirée y'a deux mois, sans manquer de me bousiller la moquette avant.
Les deux sbires se regardèrent, momentanément déconcertés. Des petites frappes, songeant Ad. La femme sbire se reprit.
- Nous savons que c'est vous, mademoiselle.
- Alors pourquoi vous le demandez ? Dites-moi donc ce qui vous amène dans mon p'tit coin de chez moi, pour que j'ai le plaisir de dire non.
- Vous n'avez pas répondu à nos messages. On nous a donc envoyés.
- Pour que vous me fassiez vous-même la promo de votre bande de geek ? Désolée, pas intéressée.
- Pouvons-nous en parler quelques minutes ?
Ad s'étonna qu'ils restent si polis après les rebuffades qu'elle leur avait envoyées. La Team Malware n'était pas connue pour sa patience. Ils devaient donc beaucoup tenir à ce qu'elle les rejoigne. Elle les comprenait. Une gamine de seize ans qui avait réussi à se faire une petite fortune en peu de temps grâce à la technologie, et qui était de plus l'héritière d'une des trois familles les plus influentes de Naya, ça leur rapporterait un paquet de sous dans leur caisse. Oui, c'était vrai, Ad n'aimait pas sa famille de bourgeois, ni le Triumvirat, qui dirigeait Naya et dont son frère faisait partie, et oui, elle aimait les machines et la technologie. Pour autant, elle n'était pas cinglée au point de vouloir faire de la planète un ordinateur géant.
- Non, répondit Ad. Je connais déjà les objectifs de votre petite secte.
- Des objectifs on ne peut plus nobles, précisa la sbire. Notre glorieux chef, dans sa grande sagesse, a compris que l'être vivant était faillible et imparfait.
- Vrai ? ironisa Ad. En voilà une nouvelle surprenante.
- Oui. C'est pourquoi, pour notre salut, les êtres vivants se doivent d'être dirigés par une intelligence infaillible et parfaite. Une intelligence artificielle, qui, par de simples calculs mathématiques, saura ce qui est le mieux pour nous.
- J'ai quelques réserves à voir ma vie dirigée par un fichu ordinateur, répondit Ad en reprenant son chalumeau et en continuant à travailler.
- Vous préférez que ce soit ces dirigeants incompétents et égoïstes du Triumvirat ?
- Non. Eux non plus ne dirigeront pas ma vie. C'est moi qui dirigerai ma vie. Pas un superordinateur, ni mon frère et ses amis.
- Mais vous, vous êtes un être vivant, donc vous êtes faillible. Pas l'ordinateur.
Ad soupira et secoua la tête devant tant de bêtise.
- Et qui va le construire, votre ordinateur divin ? Ce sont les humains, non ? Dans mon esprit, les inventions humaines sont aussi faillibles que les humains.
Les sbires Malware furent quelque peu déroutés, ne sachant pas quoi répondre. Ad poussa à son avantage.
- Et votre histoire de remplacer les Pokemon par des robots qui nous serviraient... J'ai rarement entendu pareilles conneries. Vous comptez faire quoi ? Exterminer à vous tous seuls tous les Pokemon ?
Le sbire masculin se rebiffa.
- La technologie, c'est l'avenir !
- Je suis d'accord avec ça, mais seulement quand elle est raisonnablement utilisée. Avec vous, elle sonnerait plutôt le commencement du déclin. Allez, tirez-vous. Allez donc vous chercher un autre pigeon.
L'homme, de rage, renversa la petite table où Ad posait ses outils et prit l'une de ses Pokeball à sa ceinture. Lopchu se raidit, prêt à combattre.
- Sale gamine ! Comment oses-tu te foutre de nous ?!
- Attend ! intervint sa compagne en lui prenant le bras. Le Boss nous a bien dit de ne pas l'attaquer...
- On ne va pas laisser cette merdeuse souiller le nom de la Team Malware, quelque soit son génie ou son argent !
- Le Boss la veut absolument avec nous ! Si tu l'attaques...
Mais l'autre sbire libéra quand même son Pokemon. Un Porygon. Ad sourit. C'était une bonne occasion de s'entraîner un peu.
- Lopchu, appela-t-elle.
Le petit lapin rose sauta de la table. Il y eut un flash de lumière, et quand il retomba, il n'était plus petit du tout. Il faisait maintenant dans les deux mètres, ses oreilles énormes sous forme de mains. Son étoile dorée était devenu une étoile argentée, et de la fourrure lui avait poussé autour du cou. Quant à ses poings, ils respiraient la force et la crainte.
- Que... Qu'est-ce qui s'est passé ? balbutia le sbire.
- Il vient juste d'évoluer ? Mais je n'ai rien vu ! s'exclama la femme.
- Tout juste, acquiesça Ad. Je vous présente Kung-Fufu, l'évolution de Lopchu. L'involuteur qu'il porte a été un peu modifié par mes soins. Il lui permet d'évoluer ou de redevenir un Lopchu à une vitesse quasi-indiscernable. Le pied pour surprendre l'adversaire en combat. Je pense que je vais bientôt commercialiser cette nouvelle version. Bon, mais où on en était ?
Le sbire ne parut plus du tout si sûr de lui, à présent, devant la taille et les poings de Kung-Fufu. Si il faisait combattre son Porygon quand même, qui en tant que Pokemon Normal craignait les attaques combats, il était un véritable idiot.
- Porygon, attaque Triplattaque !
Bon, c'était un idiot. Sans qu'Ad n'ait dû ordonner quoi que ce soit, Kung-Fufu se servit de ses puissantes jambes pour sauter et esquiver l'attaque, qui alla exploser sur l'un des meubles de l'atelier.
- Lance Pied Voltige, ordonna Ad.
Le coup atteignit Porygon de plein fouet, et naturellement, il resta à terre. Le sbire Malware le rappela, fulminant de rage derrière ses lunettes-écrans.
- Sale petite...
- Vous m'avez bousillé un meuble et tous les outils qui se trouvaient dessus, constata Ad en regardant les dommages causés par la Triplattaque. J'enverrai la facture à votre patron... en même temps que ce qu'il restera de vous une fois que Kung-Fufu se sera chargé de votre cas.
Mais le sbire ricana.
- Tu crois cela ?
Il tendit le bras vers Kung-Fufu, et aussitôt, un petit rayon vert, sorti tout droit du brassard du sbire, alla frapper le Pokemon qui s'effondra avec un cri de douleur. Ad se précipita. Son Pokemon n'avait pas le corps troué, mais son pelage avait pris une horrible couleur verte là où le rayon l'avait touché, et il semblait beaucoup souffrir.
- Contemple là la supériorité de la technologie, et les limites de ces misérables Pokemon inférieurs !
Ad se retourna vivement vers le sbire, et le regard qu'elle lui lança dut être particulièrement terrifiant, car il recula instinctivement d'un pas.
- Ça c'est dégueulasse, dit-elle, les dents serrées. Je vous jure que vous allez le regretter.
- Ah ah ! Tiens donc ?
- Ça suffit Hof ! s'écria la sbire en prenant le bras à son collègue. On était pas venu pour ça ! Viens, partons !
Mais le dénommé Hof se dégagea.
- On ne peut plus reculer. Cette fille est notre ennemie maintenant.
- Je me demande bien pourquoi ! s'exclama la femme Malware, bien plus en colère que son compagnon. Le Boss va te saquer, Hof ! Tu as tout fait foirer !
- Il me pardonnera quand je lui ramènerait tous les beaux joujoux que cet atelier contient, dit Hof avec un horrible sourire.
- Touches-y pour voir ! rugit Ad.
Blesser ses Pokemon, c'était une chose. Mais lui voler ses inventions, qui étaient toute sa vie, c'était impardonnable. Elle prit son autre Pokeball et la lança. Clic, son Pokemon acier semblable à trois roues de mécanique, en sortit. Le sbire repointa son laser, mais cette fois, le rayon vert toucha Clic sans lui causer aucun dommage.
- Je ne sais pas ce que c'est, ta merde verte, mais ça ne marche pas sur l'acier, dommage pour toi, jubila Ad. Clic, attaque Lancecrou !
La roue arrière de Clic se détacha du reste de son corps pour frapper au front le sbire Malware. Et comme un boomerang, elle revint sur Clic, sans manquer de frapper une nouvelle fois le sbire au passage. Assommé, il s'écroula. Mais Ad n'en avait pas fini. Elle voulait le faire souffrir bien plus que ça, qu'importait s'il était inconscient ! Devinant ce qu'elle comptait faire, la sbire intervint et lança son propre Pokemon. Un Electrode. Ad doutait d'avoir l'avantage, cette fois. L'acier était faible face à un Pokemon électrique.
- Vous aimez bien les Pokemon artificiels vous hein ? demanda-t-elle. Des êtres de chairs et de sang seraient trop indignes pour ceux qui croient que les êtres vivants sont inférieurs, n'est-ce pas ?
- Restons-en là, proposa la sbire. Notre but n'était pas le combat.
Ad se surprit à réfléchir à la proposition. C'était censé. Elle ne tenait pas trop à ce que toute la Team Malware lui cherche des noises, et de plus, elle était loin d'être sûre de remporter ce combat avec son seul Clic. Mais voilà, Ad n'était pas une fille posée qui prenait le temps de réfléchir au pour et au contre. On l'avait attaqué, elle, son atelier et son Pokemon, et son instinct la poussait à exploser ses enflures. C'était ce qui la séparait de la Team Malware. Eux méprisaient les instincts et les sentiments, qu'ils considéraient comme la base de la faiblesse humaine. Ils ne s'en tenaient à la place qu'à la pure et simple logique mathématique. Pas Ad.
- Clic, lance Grincement !
Le bruit des rouages qui tournaient se transforma en un son horrible qui poussa les deux humaines à se mettre les mains sur les oreilles. Mais Electrode, lui, n'avait pas de main. Bon, il n'avait pas d'oreille non plus, mais il entendait parfaitement. Et ce son lui coûta une baisse significative de sa défense. Maintenant, Ad pouvait espérer lui faire quelques dégâts malgré sa résistance au type acier. Mais la sbire Malware ne se laissa pas faire.
- Electrode, attaque Boule Elek !
Le Pokemon qui ressemblait à une Pokeball à l'envers fit une roulade tandis que son corps se chargeait en électricité. Sa vitesse était bien supérieure à celle de Clic, et il parvint à le frapper de plein fouet. Mais Clic n'abandonna pas.
- Lancecrou maintenant !
Clic relança sa roue de derrière. Mais aussitôt, la sbire Malware ordonna une attaque Reflet, et Ad et son Pokemon eurent devant eux une dizaine d'Electrode en trois secondes. La roue de Clic en toucha deux, qui disparurent, prouvant qu'ils étaient factices.
- Merde... jura Ad.
- C'est toi qui l'a cherché, s'écria la sbire. Electrode, attaque Onde de Choc !
Après la Boule Elek, il y avait peu de chance que Clic résiste à ça. Ad avait joué, et elle avait perdu. Mais peut-être pas. Car alors que l'Onde de Choc s'apprêtait à s'abattre sur Clic, un mur transparent de couleur rose se plaça entre le Pokemon et l'attaque, absorbant la foudre et la renvoyant sur Electrode.
- Quoi ?! s'exclama la sbire Malware.
Ad était aussi étonnée qu'elle. Cette attaque... on aurait dit Voile Miroir. Mais Clic ne la connaissait pas. Mais elle ne venait pas de Clic. Un étrange Pokemon blanc et bleu, ressemblant à un cornet de glace à trois boules, flottait dans les airs près de Clic. Ad le reconnut. C'était un Sorbouboul. Et le seul dresseur à sa connaissance qui possédait un Sorbouboul était...
- Kinan ?
Un jeune homme de son âge était adossé à la porte d'entrée grande ouverte. Il avait les cheveux châtains sous un bonnet similaire à celui que portait Ad quand elle sortait, avec les mêmes lunettes de mécanos qu'elle. Kinan prenait un malin plaisir à imiter son style. Ad n'en avait pas encore découvert la raison, bien qu'elle le soupçonnait. Kinan était quasiment son seul ami. C'était un dresseur, mais aussi le fils unique de monsieur et madame Denteks, qui avaient aidé Ad à commercialiser son involuteur. Ad l'avait rencontré en même temps que ses parents. Kinan était quelqu'un de réglo, mais un peu trop collant au goût d'Ad. Mais pour une fois, elle était contente de le voir, même si, par principe, elle devait faire comme si elle gérait parfaitement la situation.
- Yo Ad, fit le dresseur en levant la main. T'as des petits soucis on dirait ?
- Des soucis ? Je n'en vois aucun, mais merci de t'inquiéter.
Le visage souriant et confiant de Kinan se décomposa. Sans doute avait-il déjà imaginé son scénario comme quoi il sauvait Ad et que cette dernière se précipitait dans ses bras, remplie de reconnaissance. Pour reprendre contenance, il s'adressa à la sbire.
- Prenez votre pote et filez, ordonna-t-il. On veut pas de vos idioties ici. Laissez mon amie tranquille, elle est bien trop intelligente pour rejoindre votre clan de zigotos !
Ad secoua la tête d'agacement, comme à chaque fois que Kinan trouvait une occasion de la complimenter. La sbire Malware dut voir que la situation n'était plus à son avantage. Mais elle les gratifia d'un regard meurtrier quand elle souleva son compagnon par les épaules et sorti.
- Vous paierez ce que vous avez fait, leur dit-elle. On ne s'attaque pas impunément à la Team Malware comme ça !
- C'est ça, c'est ça, fit Kinan. Allez, bon vent.
Il ferma la porte derrière elle, et se retourna vers Ad, prêt à recevoir un sourire de remerciement. Il ne reçut qu'un regard féroce.
- Je n'avais pas l'intention de laisser partir ces demeurés, protesta Ad. Ils m'ont attaquée !
- Sans doute, mais telle que je te connais, tu ne les aurais pas forcément découragé à le faire, non ? Faut pas trop se les mettre à dos. Vu comme ça, ils ont l'air d'illuminés inoffensifs, et individuellement, ils sont assez faibles, mais j'ai entendu dire que leur nombre n'est pas aussi réduit qu'on pourrait le croire.
- Je ne travaillerai jamais pour ces gus.
- Oui, je me doutais que c'était pour ça qu'ils étaient venus. Faut voir leur proposition de t'embaucher comme un compliment. Ils sont peut-être fous, mais la grande majorité d'entre eux sont des génies de l'informatique.
- Tant mieux pour eux. Dis, tu n'aurais pas quelque chose pour mon Kung-Fufu ? Il s'est fait canarder par un laser des Malware.
Kinan examina la blessure, puis prit dans son sac un flacon de Super Potion. Quand Kung-Fufu alla mieux, deux minutes plus tard, il se retransforma en Lopchu et Ad le fit rentrer dans sa Pokeball.
- Au fait, pourquoi t'es là, toi ? demanda enfin Ad à Kinan
- Viens, sortons, dit le dresseur d'un air enthousiaste. Une rumeur de malade commence à se propager. Il faut absolument qu'on enquête !
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Image de Lopchu et Kung-Fufu