Tic Tac
Chapitre 12 : Tic Tac
Je me réveillai dans mon lit, sous une couverture. Personne autour de moi. Ma tête me lançait et il me semblait qu'un tambour s'y trouvait. Je fermis mes yeux de nouveau avant de me lever en douceur. Je fis ma toilette longuement, me séchai les cheveux à une vitesse semblable à celle d'un escargot, puis m'installai à mon bureau. Là, un ordinateur s'y trouvait. Je l'allumai. Mais n'y trouvait aucun intérêt. Je l'éteignis. J'ouvris alors la fenêtre, et respirai un bol d'air frais. Cette fraîcheur me donnait de l'énergie. Je me sentais mieux. Je pensai un instant à toute cette histoire puis me rappelai. Mes parents. Mes amis. Mon collège. Ma vie.
Où étais-je en réalité ? Pourquoi m'avait-on enlevée à mon domicile ? Pourquoi moi ? Que se tramait-il dans les coulisses de cette ridicule comédie ?
Je secouai la tête. Cela faisait une semaine que je n'étais sortie de ma chambre, et cela faisait déjà deux mois qui s'étaient déjà écoulé. Du moins, deux mois que je crois être à cette académie. Ces locaux me donnaient presque toujours autant la même impression qu'à mon arrivée, une sorte de... Frayeur, combinée à une incompréhension totale. Toutes ces gens, qui y étaient, avaient-elles choisi d'être ici ? Ou leur avait-on imposé cette décision ? Avaient-elles un lien avec moi ? Mais déjà, elles m'ennuyaient. Toutes autant qu'elles soient. On pourrait dire de moi que je suis quelqu'un d'intensément étrange, mais c'est ainsi que la vie est faite. Les gens m'ennuient aussi tôt que j'apprend à les connaître. Et alors, je me referme sur moi-même. Pour une durée indéterminée. Jusqu'à la prochaine rencontre.
Quelqu'un toqua à ma porte. Je fis ma désintéressée, et ne daignai pas me lever afin d'ouvrir. J'attendis, en silence, que le temps passa. Plusieurs heures passèrent. Je ne bougeai pas. J'étais fidèle à mon siège près de la fenêtre. Je regardai simplement le ciel anormalement dégagé pour un mois de décembre. J'en avais déjà vu un de la sorte. A mon arrivée. Je soupirai, puis songeai au fait que j'avais pas rêvé depuis un long moment. Depuis que je suis arrivée en réalité. Comme si je n'en avais pas le droit. Je fermai les yeux un instant.
Une citrouille. Orange. Qui sautait d'un endroit à un autre. Le ciel était légèrement couvert de nuages, par ci, par là. Un oiseau y volait docilement, effectuant quelques acrobaties, tournoyant dans le ciel et créant une légère traînée derrière lui. Le ciel était désormais couvert de nombreux nuages, d'un gris pâle, et l'on pouvait voir la lune qui s'effaçait petit à petit. Au loin, un soleil rougeâtre se levait. De nombreux arbres nus se tenaient sur des monticules de terre qui jonchaient le sol poussiéreux. De nombreux fils pendaient des branches dénudées, sur lesquelles se trouvaient des araignées. Elles remuaient lentement leurs pattes, avançant tant bien que mal telles des acrobates retraités.
Un mot apparut. "Solitude". Il se tenait là, sans bouger, mais quelque peu excité. Ses lettres étaient toutes écrites de la même police, et de la même couleur, d'un rouge pourpre.
Quelque chose bougeait, en revanche. Ou coulait, plus précisément. Le mot se retourna, et montra des blessures et de nombreuses griffures. Ce mot avait été attaqué jusqu'à saigner. De lourdes gouttes tachaient la terre, qui l'absorbait, comme si elle n'avait été arrosée depuis longtemps. Elle s'en nourrissait, et gonflait.
Le sol changea de couleur. Il devint jaunâtre, comme du sable. Quelques oasis se tenaient dessus. Mais n'étaient que mirages. Le ciel était redevenu bleu, toujours parsemé de nuages aussi blancs que neige. Un bruit se fit entendre, le bruit d'une horloge donc l'aiguille ne cessait de tourner. Un son qui semblait si agaçant que tout se mit à trembler. La poussière emplit progressivement l'endroit, quand de la neige se mit à tomber lentement. Ses flocons se déposaient sur le sable, et s'y mélangeaient harmonieusement, mais ils absorbaient également les particules de poussière présentes dans l'atmosphère jusqu'à ce que tout redevint visible.
A présent, des tas de feuilles mortes étaient posés sur le sol couvert de mousse. L'endroit était entouré d'arbres, tous alignés, de même hauteur et de couleurs différentes, formant ainsi un dégradé du gris au blanc. Le ciel suivait ce même dégradé, et était à présent complètement dégagé. L'atmosphère semblait lourde, et emplie de tensions de toutes sortes. La silhouette d'un phare se dessinait au loin, et son ombre envahit peu à peu l'endroit. Pas un son n'était perceptible. Tout devint noir. Puis quelques lumières apparurent, telles des bougies que l'on venait d'allumer. Elles remuaient d'un coup comme si quelqu'un soufflait dessus afin de les éteindre. Elles s'éteignirent. Noir. Le néant.
Je suais. Mon visage était complètement trempé, je me levai. Ce songe m'avait complètement déboussolée. Je tremblais de tous mes membres, et claquais des dents. Je n'avais pas fait de songe de la sorte depuis très longtemps, mais la dernière fois que cela se produisit, plusieurs de mes proches décédèrent. Je n'avais pas un bon pressentiment, mais me forçai à me calmer, bien que la seule chose dont j'avais envie était de crier. Et m'enfuir.
J'étais si désemparée que je n'avais pas fait attention au son qui se faisait entendre. Un son, comme une alarme. J'entendis de nombreux pas de course dans le couloir, et de nombreux murmures. Quelqu'un semblait s'être fait plaquer contre ma porte, puis je vis un liquide rouge passer sous ma porte. Je frissonnais. Mon premier réflexe fut de regarder par la fenêtre.
Un torrent de gouttes se versait, et brouillait ma vue. La vitre était emplie de buée. Je la frottai alors à l'aide de ma manche.
Des torrents de flamme et d'eau jaillissaient à folle vitesse. Des éclairs apparurent, Des lianes surgissaient d'endroits insoupçonnables. Tous les éléments étaient déchaînés. J'étouffai, j'ouvris la fenêtre. Quelqu'un m'aperçut. C'était Lisa, la blonde avec qui j'avais eu une altercation à mon arrivée.
"Alice ? Qu'est-ce que tu fais là-haut ? Descend et viens nous aider au lieu de rester dans ta chambre ! N'as-tu donc pas entendu l'alarme ?"
Je n'avais pas envie de descendre, et encore moins d'être happée par la foule d'élèves. Je remuai la tête.
"Tu n'es plus une enfant Alice, dois-je donc venir te chercher pour que tu descendes ?"
Je fermis la fenêtre et reculai. Cette situation m'effrayait. Je n'aimais pas le fait d'être obligée à faire quoi que ce soit. Je ne voulais pas descendre, je ne descendrai donc pas.
La porte de ma chambre s'ouvrit en un grand fracas. Lisa apparut, haletante, et présentait de nombreuses blessures. Elle était bien amochée, si bien que je me demandai comment elle pouvait tenir debout. Ses habits étaient déchirés de manière spectaculaire, et seule sa montre qu'elle portait au poignet était intacte.
"Que fais-tu Alice ? Tu ne comprends pas que nous sommes dans une situation d'urgence ? Descend, ou je me devrais de te faire descendre par la force s'il le faut. Tu n'es plus une enfant, Alice."
Il faut savoir que je détestais entendre cette phrase. Elle avait le don de me mettre en colère en un rien de temps, et je n'appréciai pas du tout le fait d'être mise en colère. Je fronçai les sourcils.
Lisa fonça sur moi, et m'attrapa le bras, me griffant au passage. J'étais surprise, et glissai en m'emmêlant les pieds. Je lui attrapai les deux pieds avant de les lui renverser. Elle tomba en arrière, et se cogna la tête au mur. J'entrepris de me lever mais elle m'agrippa férocement et je fus prise d'une violente douleur au dos. Je ne savais pas ce qu'il s'était passé, mais je sentais des gouttes ruisseler de mon dos. Du sang ? Sûrement, je ne voyais pas d'autre alternative. Je sentis la colère monter de plus en plus, je n'étais plus maître de mes gestes.
Lisa se retrouva au sol, salement amochée, inerte.
J'étais tellement furieuse que je n'avais pas suivi ce qui s'était passé. Je ne savais pas comment elle s'était retrouvée au sol, et j'ai eu peur. Peur de l'avoir blessée. Elle était alors recouverte d'une multitude de fins cristaux de glace, et je ne comprenais pas d'où ils venaient.
Je m'assurais seulement, et lâchement je dois l'admettre, qu'elle respirait encore avant de partir en courant.
Sa montre, quant à elle, continuait toujours à fonctionner, et ses aiguilles à tourner, en produisant leur agaçant bruit habituel.